Cacophonie
La plaine gronde à faire éclater les tympans.
Hennissement des chevaux qui renâclent, tapent du sabot, rongent les mors ; tintement des charnières de chanfreins décorés, froissement des cataphractes en cuir et en acier, tapage des étriers contre les boucles de sangles. Friction des armures, des heaumes dont on abaisse les visières ; vacarme des épées contre les boucliers, fracas des lances qui s’entrechoquent, du bois des manches dans les poings gantés ; épaulettes qui grincent, plaques et rivets mal entretenus, peau qui gratte sous le colletin et le pli des coudes. Chaque division aboie son chant de guerre, défend son hymne, alors que les bannières claquent au vent. On s’encourage, on s’époumone, on s’invective, on pisse et on crache dans la poussière.
Et puis soudain, le silence.
Tel un lever de Soleil, prodigieux et rayonnant, le roi surgit de derrière la colline. Casque cornu, broigne vermeille, destrier blanc dans son caparaçon de velours ourlé de galons d’or. Il lève ses bras immenses, embrasse le ciel azur. Même le vent retient son souffle.
— Ce matin résonne le tumulte de la guerre, le boucan des braves, l’appel du sang ! Aujourd’hui, sonne le glas hideux de ceux qui ont brûlé nos terres ! Mais ce soir chantera les louanges de cette bataille, célébrera votre courage d’une glorieuse mélodie ! Avec moi mes frères, mes amis, mes alliés : la victoire ou la mort !
— La victoire ou la mort !
La clameur fait trembler la plaine hérissée de métal, et tandis que se met en branle la cohorte, dans sa tanière se retourne un chien de prairie.
— C’est ça, cassez-vous ! Y’en a qui voudraient bien dormir !
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