La vie d’artiste
J’ai brûlé mes ponts sur des routes sans boussole,
laissé des écailles de rêve dans les filets d'un vent mauvais.
Derrière moi, des années raturées,
des labyrinthes aux murs effrités,
et le goût acide
d’une vie sans ancrage.
J’ai choisi l’art,
le travail des mains et de l’argile,
comme si la matière
pouvait me recréer,
comme si le toucher
pouvait effacer
les cicatrices invisibles.
Tout se dérobe
entre mes doigts.
La matière est du sable évanoui.
Exilée
dans cette école à prestige facturé,
une chambre trop blanche, trop vide,
où même l’écho hésite à me suivre.
Elle me tient, cette petite chambre glacée,
dans son ventre de bête qui m’a dévorée.
Revenue aux anciennes frontières,
là où les visages me reconnaissent,
où les murs respirent mon nom,
le vide me poursuit,
me harcèle, rampant
dans les ombres lentes.
Je le porte en moi,
ce gouffre qui grandit,
il étend ses bras d’arbre d’automne
qui ne sait que perdre ses feuilles
et ces plaisirs,
ces oasis sucrées
qui fondent entre les dents,
les lumières artificielles
qui éclatent en silence,
ne sont que des miroirs sans teint.
Je les avale, je comble l’espace
laissé par l’absence
qui se répand en moi.
Je voudrais être douce,
lumière,
mais le sel s’est infiltré dans mon sang
et le goût amer persiste.
Je ne sais même pas
pourquoi je me bats,
dans ce théâtre
où le rideau tarde à se lever,
où la scène reste vide,
un désert peuplé de chimères fatiguées.
La poitrine percée de fragments d’incertitude,
je marche encore
sur ce chemin de papier
inondé par la pluie.
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