19/06

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Où sont les lendemains promis, ceux qui chantent, ceux qui enchantent, où sont les lumières qui hantent les yeux des enfants, les fantômes des joies à venir, les ombres du futur désir, le germe infécondé, écrasé sous les chausses et les dents qui se déchaussent, qui crissent sur le gravier des promesses non tenues, les mots et les discours enjôleurs, lavés à l’encaustique du retour à la réalité. Tout crève, et tire la manche des jours qui passent, des jours bourgeois qui n’ont pas un regard, pas le temps, pas la monnaie, rien, il n’arrêteront pas leur course pour offrir un peu de ce temps qui les entraîne vers l’avant, ou à rebours, ils disparaissent dans la nuit des âges, ils filent, étrange spectacle des calendes qui s’effeuillent, pèlent comme des léprosités sans âge. Tout retourne au néant, à la non existence d’un concept éculé, figé, frisé, dans une chronologie, une chronophagie inassouvible. Autrefois, autres temps, autres fois, autres moeurs, ô trains des ans qui déraillent dans l’infini vertige. Où sont les gares, les garderies, les gardénias, il a fallu sauter en marche, la marche impériale, c’est déjà le repos éternel, le néant abscons et incompréhensible, pauvres cerveaux de vivant. Les sombres pensées rôdent comme des torpilles ventrues, elles reniflent les peurs inhérentes, inhalent ces phéromones acides, rongent, corrodent. L’enfer c’est attendre, l’attente est sale, nous porte atteinte, porte de prison, teinte les jours d’un brouillard que nul feu ne vient percer, c’est une bouillie froide, qui encombre, qui engloutit. Les décombres sont jetées, c’est comme le rubicond, un rubik's cube pipé pour qui ne pipe rien, pour qui casse sa pipe, sur le pavé des bonnes intentions, quelle importance, au fond, au fin fond des choses. C’est la fonte des miroirs, les reflets comme des montres de Dali, qui marquent le temps qui passe dans leur déliquescence, leur sénilité molle de motte de beurre rance. Délavé, dépouillé, votre reflet vous va si bien au teint, sans fond de tein, vous plongez dans ses yeux, comme dans une faille ouverte, une blessure temporelle. Le sang s’en écoule, en torrent, insipide et gonflé, c’est comme un abcès percé, un pus sépia, jauni par les ans, vous inonde, vous dégueule, vous n’êtes que le grain de blé d’une immense gerbe, moissonné, battu, ensilé, roulé dans la farine. Vous êtes le saumon pas né qui retourne sur les lieux de cette innaissance, l’instinct vous pousse, poussez, poussez, les flots pellucides vous dépassent, c’est la perte des eaux, sur la course des fontaines de jouvence. C’est une bombe à eau qui s’éclate, au ralenti, une enveloppe qui perce, le liquide enfermé qui crie sa liberté, toujours il chérira la mer, toujours il chérira... La mer demeure, ultime demeure, havre des épaves et des ruines, elle accueille dans ses engloutissures, dans ses tréfonds trépassés, ses abysses insondées. Elle a ce repos, en son sein, ce repos promis et dors et déjà offert, comme une quintessence de mausolé sans rivage, dans les virages et les méandres des courants céaniques, des afflux menstrueux qui en font les coraux sans barrières, dans la nuit des profondeurs, où neige le plancton, tous les pois sont gris. Il n’y a plus de couleurs ou de formes, il n’y a qu’une pression immense, faite de silence et de fausse pesanteur, c’est tout le poids de la mer qui appuie sur l’épaule dérisoire qui s’effiloche, qui ploie et plie, qui se fond dans le sol, embrasse les coulées immémorielles.

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