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L’acier avait ce goût de sang, ce goût d’oeil mangé par le sommeil, bêtes de somme, sauvages, sylvatiques, et l’acier nourrissait la chair comme la louve allaitant l’enfant. Sur le pont, l’acier nouait les coeurs cadenassés, coeurs foliés de glaïeuls affutés, déchirants, ensanglotés, coeurs d’artistes réchauffés, de fer forgés au creuset de lointains volcans, brisés par le temps, ressoudés de travers comme des nez de boxeurs clandestins. Le destin de ceux qui sèment et qui récoltent le blé des hivers au bec des corbeaux d’un système intraitable, oiseaux noirs frayants avec les ombres, crevants de leurs ergots le seigle et l’aveugle esseulé qui bronze à la lune, le fou traque sa proie à travers l'échiquier où s’allongent les reines noires mises en chaînes. L’acier chevillé au corps comme la charpente d’un galion, croupie dans la sentine et l'opprobre, l’orgueil dans les voiles, dignité muette de mouette qui connaît les assauts du vent. L’oiseau à travers les anneaux d’une cage à lettres, missives scellées de plumes et de fientes acides, gobergées comme des oies savantes, blanches et prudes et creuses, remplies de farces et de force, défigurées, désanimées. Et l’acier sépare, l’aile ou la cuisse, et la carcasse vitrifiée, puante de ne rien sentir, et l’œil encore, criant de toute son indifférence : Déchirez-moi ! Les dents d’acier du temps creusaient les sillons putrescents comme des pyrogravures, et le corps s’ouvrait au ciel de toutes ses carrières désaffectées. Les souvenirs collaient, comme des aimants sur l’acier d’un frigo oublié dans une déchetterie de province, vaincus mais tenaces, parasites, tiques difformes, gonflés de sang impur et vicié, qu’on tripote maladivement, caressant la chair molle et grise et douceâtre d’un doigt fébrile, sans oser l’arracher. Et l’on passe son esprit à la perforatrice, pour faire comme des confettis, un air de fête et de dimanche, un air de mariage heureux ou de pot de départ, quand l’alcool n’a pas ce goût trop cuit de lendemain poreux, quand la tête est au sourire, quand le chat n’est pas là, que l’on danse sous la table et qu’on roule sur les rond-points, la paupière ferlée et l’oeil mat, sans plus de brillance qu’un poisson crevé. Paupière en paupiette, à vau l'eau, écorné de cils, la valise faite, portée à bout de nez, et derrière, néant vitreux d’une mise en demeure et trois font quatre sur la pelouse des trèfles superstitieux. Pique nique rage, rage dedans, orage dehors, et l’acier des paratonnerres qui s’agitent comme des antennes de criquets coup de foudre, goût de poudre prête à faire feu de tout bois sur les loups faméliques qui rêvent de moutons électriques, robots modernes des forêts d’aciers et de verres, apprivoisés à prix coûtant, dressés et dresscodés de fumants oripeaux, l’acier trébuchant plein leurs poches de bipèdes qui les fait trébucher sur le pavé des bonnes intentions.

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