Contexte :

Valérian et Dorian, deux magiciens noirs, sèment la terreur dans tout Sorgat. Cependant, le fils ne souhaite plus cautionner les agissements de son père mais comment trouver la rédemption alors que la simple évocation de son nom provoque l’effroi ?

Dorian vient d’échapper à son exécution grâce à l’intervention d’un militaire elfique : Calion. Ce dernier a une mission : conduire le magicien à sa reine.

***

Lorsque Dorian reprit ses esprits, il était ballotté par le rythme cahotant d’un cheval. Il continua de feindre l’évanouissement afin de pouvoir analyser la situation. Il avait, une nouvelle fois, échappé à la mort. Son corps, perclus de douleurs, portait les séquelles de son exécution avortée. Il banda son esprit dans le but de trouver une source d’éther à laquelle s’abreuver pour régénérer ses forces. Le silence le surprit. Il n’avait jamais ressenti un si grand vide autour de lui. Il comprit bien vite que ses facultés, à l’instar de ses mains, étaient entravées.

Quand il sentit sa monture ralentir, il ouvrit à demi les yeux pour observer le monde qui l’entourait. Une poigne violente l’agrippa et le fit tomber au sol. Une puissante douleur irradia tout son côté droit lorsqu’une botte entra en contact avec son flanc.

• Debout, Chien ! hurla une voix qui n’avait rien d’amical.

Dorian comprit qu’il devait se redresser rapidement. Il tituba en essayant de se lever. Son tortionnaire lui envoya un nouveau coup de pied qui lui coupa le souffle.

• Je croyais que j’étais invité, balbutia le magicien.

Une poigne vigoureuse l’arracha du sol et un visage apparut. Si ses traits n’avaient pas été déformés par la rage, l’elfe aurait transpiré d’une beauté stupéfiante. Ses yeux brillaient comme deux émeraudes dans un écrin d’ébène.

• La Reine veut te voir en vie, siffla-t-il, mais elle n’a jamais dit dans quel état. Fais un seul pas de travers et tu goûteras de mon épée, c’est clair ?

Comprenant qu’il devait faire profil bas, Dorian s’empressa d’acquiescer. Son tortionnaire le lâcha soudain, les jambes du mage ne purent supporter le poids de son corps et il s’effondra de nouveau au sol comme une poupée de chiffon. Calion se désintéressa de son prisonnier pour vociférer contre un soldat qui passait par là.

Dorian décrivit alors ce qui l’entourait. Les hommes de Calion avaient rejoint un régiment qui bivouaquait au bord d’un lac, au milieu d’une forêt. La magnificence de ce lieu était troublée par l’agitation qui régnait dans le camp. Ses maigres connaissances de la langue elfique lui permirent tout de même de comprendre que leur général avait disparu. Il s’était éloigné du groupe pour se baigner et s’était évanoui, ne laissant derrière lui que son armure.

Lorsqu’un elfe, qui paraissait plus gradé que les autres, passa à sa portée, Dorian le héla :

• Je suis mage, je peux, peut-être, vous aider !

Le soldat était assez paniqué pour envisager la proposition.

• Il y a eu une grande lumière et lorsqu’on est allé voir, le Général avait disparu. Vous pensez que c’est magique ?
• Fort probablement, répondit Dorian. Sans doute un coup de Valérian.

Il ne put s’empêcher d’esquisser un sourire lorsque son interlocuteur tressaillit. Cet elfe, naïf, fut bien facilement influencé. Il eut juste besoin de craindre pour la vie du général pour que le soldat consente à lui retirer ses chaines. Quand Calion s’en rendit compte, il hurla et se rua vers lui, mais il était déjà trop tard. Dorian avait disparu.

***

Dorian arriva dans son monde polaire, riant de sa facétie. Syphilis, son familier apparu immédiatement, s’inquiétant de son état. Après l’avoir rassurée, il balaya, d’un geste nonchalant, un des murs de sa caverne. La glace prit l’allure d’un miroir, reflétant ce qu’il se passait dans la clairière.

Calion, furieux, vilipendait le pauvre soldat qui l’avait libéré. La scène l’amusa un instant jusqu’à ce que l’attention du mage soit captée par l’armure du général. Il comprit alors pourquoi, ce dernier s’était éloigné du camp pour ses ablutions : c’était une femme. Une demoiselle en détresse !!! Une proie de plus à accrocher à son tableau de chasse. Il esquissa un sourire mutin et disparut dans un souffle glacé.