Le soldat dansant 1/2

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Les gars ont un match avec un autre lycée. Pour la première fois depuis janvier, nous recevons l'équipe adverse pour trois jours. Les militaires ont fait en sorte que les garçons se déplacent à chaque fois ces quatre derniers mois, cependant, à force, ils sont contraints d'accepter la venue de nouveaux citadins temporaires. Comme il est prévu dans de telles occasions, une visite touristique de la ville doit s'organiser pour le groupe d'adolescents. Cela engendre de gros soucis tant pour le lycée que pour les troupes en stationnement.

Il y a environ un mois, la présence de terroristes ou de gangs criminels commençait à être mise en doute par les habitants qui se plaignaient à leurs proches. Les proches ont parlé. Plusieurs journalistes de petites chaînes locales ont tenté de faire des enquêtes. Les gros médias ont reçu des directives gouvernementales et ne mettront pas les pieds ici. Pour leur donner quelque chose à filmer, et pour calmer les curieux, une fausse fusillade a été organisée "en direct" lors d'un reportage filmé. Heureusement que personne n'a regardé de près les images. Mélia et moi avons éclaté de rire en voyant les amis de Mitchell grimés en caïd avec tatouages. Ils ont tiré à blanc en direction de la jeune journaliste terrifiée. Cela, en plus de quelques coups de fils aux directeurs des journaux locaux, a suffi pour éloigner les curieux et étouffer les enquêtes temporairement.

L'arrivée des jeunes, et les militaires au sein du lycée, endroit peu crédible comme cachette de grands criminels, risque de relancer les interrogations. Les soldats sont bien embêtés pour justifier leur présence sans fournir d'informations compromettantes. Il est déjà difficile de s'expliquer auprès de la population locale. Lorsque je traîne près des baraquements, les hommes discutent librement devant moi des tracas que cette visite leur procure. Ils n'ont pas envie de devoir recommencer leur simulacre devant les visiteurs et je les comprends. Les jeunes profitent souvent de ces visites pour faire des âneries la nuit. Les soldats cherchent une solution pour les tenir à l'abri.

Mélia, qui est venue récupérer des chutes de tissu militaire, suggère alors aux hommes d'accéder au besoin primaire de bêtises des adolescents. Il suffit de leur permettre une sortie, mais sous contrôle. Elle leur demande de remettre en place la fête foraine ou tout autre événement intéressant, de manière que les gamins aient envie de faire le mur, tout en permettant aux militaires de savoir où ils vont et d'en protéger les accès. L'idée enthousiasme les hommes qui vont la transmettre à la hiérarchie.

Ma frangine leur propose de parler à Maltez et à Blaise. Si les stars de l'équipe sont dans le coup, ce sera plus facile de tendre un piège aux visiteurs. À force d'entendre nos louanges sur Blaise et aussi de coopération entre le grand dadet, Thibaut, Alex et les militaires pour m'empêcher de faire des bêtises, les soldats ont sympathisé avec les quatre basketteurs. Le lieutenant Mitchell entretient aussi une bonne amitié avec les kawai, Naya et son père. J'écoute distraitement le plan s'élaborer pendant que j'aide les hommes à nettoyer leurs armes et le reste de leurs équipements. Le stratagème de ma petite chérie plaît énormément et très vite, ils parviennent à créer un truc pas trop mal.

Les corvées de Papinou me manquent. L'ambiance stricte aussi. Mon humeur s'en ressent de plus en plus. Les hommes me laissent squatter dans leurs baraquements. Ainsi, je les aide, ils peuvent me surveiller et surtout, je me tiens tranquille. Cela nous permet aussi, puisque ma sœur adorée vient également régulièrement, de voir Richard de manière discrète. Le directeur du lycée ferme les yeux sur nos fugues. C'est cela ou un génocide de lycéens de ma part. Les hauts gradés qui ne sont pas amis, ignorent tout de notre présence. Nous sommes chouchoutés d'une manière étrange qui nous rappelle notre enfance. Aucun n'a de gestes déplacés. Ils agissent comme des oncles ou des cousins casse-pieds, mais protecteurs. Ils nous parlent de leurs familles, nous donnent des nouvelles de la nôtre ou du monde, assurent la continuité de nos apprentissages en combat et savoir-faire pratique. Le pire casse-pieds est Mitchell qui s'est donné pour mission de me remettre correctement au sport et m'invente de nouvelles tortures chaque jour pour me fatiguer et me faire perdre le gras du bide qui commence à apparaître suite à mon inactivité depuis Septembre.

C'est ainsi qu'un troupeau de basketteurs, de pom-pom-girls et leurs professeurs débarquent un beau matin tranquille pour perturber ma quiétude. Tout est planifié, organisé. Les militaires sont présents en raison de répétition pour une parade annuelle et ils profitent des locaux disponibles du lycée pour stocker matériel et troupes. La majorité d'entre eux optera pour des tenues civiles pour patrouiller en ville sans attirer les soupçons. Leur nombre apparent diminuera d'autant. Ce n'est finalement pas une fête foraine, mais un concert d'une pop star à la mode qui aura lieu. Idéal pour faire un bruit pas possible et utiliser des lumières aveuglantes et tournoyantes. Personne ne traînera puisque le service des bus est assuré de manière régulière par les soldats déguisés. Tout est sous contrôle, y compris la future fugue des adolescents à l'initiative de Maltez et Naya qui les guideront droit vers le chemin sécurisé au préalable, avec l'accord bienveillant du directeur. Un beau traquenard.

La première journée se passe plutôt bien d'après mes camarades. Les visites du zoo et du parc botanique adjacent ont enchanté les adolescents qui ont cependant préféré le musée de la Bande dessinée. Nos amis ont laissé traîner leurs oreilles afin de détecter les éventuels rebelles qui voudraient sortir dès le premier soir. C'est rare. En général, les adolescents gardent leurs forces pour le match et le spectacle des pom-pom-girls toutefois, il y a toujours des plaisantins. D'après les basketteurs, la nuit devrait être calme. Les filles me parlent de deux bêcheuses, mais rien de plus. Ne pouvant pas dormir, je surveille les mouvements dans le dortoir des filles pendant que le lieutenant Mitchell veille sur les troupes masculines. Blaise a raison. Nous avons affaire à des visiteurs bien trop sages et je suis la seule lycéenne à veiller tard.

Le lendemain est jour de match. Afin de permettre aux athlètes de se reposer pleinement, les cours ont été annulés ce jour pour les sportifs. Les autres élèves ont droit à du soutien ou de l'approfondissement lorsque cela est possible. Sinon, le cours normal est assuré. Les professeurs fourniront un rattrapage aux absents si besoin, comme ils le font à chaque déplacement. Le match est prévu en fin d'après-midi, une fois les cours terminés. Les athlètes vont avoir droit à une petite visite d'une chocolaterie et surtout à des échauffements et des répétitions pour les filles.

C'est enfin l'heure du match. Tout le monde s'installe sur les gradins du grand gymnase. Je ne suis pas une grande fan, cependant, je fais acte de présence pour soutenir Blaise, Thibaut ainsi que Sarah et Lilou. Mélia et Fleur hurlent et commentent. Je reste tranquille sur mon banc, tentant de comprendre ce qui se passe tout en essayant de ne pas me faire voler mes pop-corn par l'estomac affamé bariolé qui m'agresse sans prévenir. On ne dirait pas à première vue, mais elle est bien plus dangereuse qu'il n'y parait. J'ai déjà subi la perte de cinq grosses poignées à la mi-temps. Mon maxi pot est presque vide. J'ai quinze minutes pour aller me ravitailler.

Nos gars sont en tête avec 19 points, toutefois, les adversaires sont proches avec quatorze points. Ils sont en sueur et encore très concentrés. Maltez semble donner des indications sur la suite de la tactique tout en buvant abondamment et en reprenant son souffle. Je rigole doucement en le voyant miner une tactique d'esquive que je lui ai sorti lors de nos affrontements d'entraînements. Je pense qu'il rappelle aux gars comment s'échapper lorsqu'ils sont encerclés. Blaise me lance un bisou de loin et me fait des signes pour me demander de prendre un paquet de pop-corn pour lui ce soir.

Lui et moi, on a les mêmes goûts alimentaires et un estomac insatiable. L'une des cantinières veut même nous vermifuger. D'après elle, et en raison de la quantité de nourriture ingurgitée chaque jour, elle pense que nous avons des vers tous les deux ainsi que Maltez. Pour moi, elle ose accuser mon adorable canasson crasseux de m'avoir refilé une saleté. Pour les deux garçons, elle n'a pas de théorie affirmée, toutefois, Sarah la soupçonne de s'inventer des triangles amoureux dans sa tête. Peu nous importe, tant qu'elle nous donne à manger. Par acquis de conscience, mais aussi pour se marrer un peu, on a demandé au médecin militaire de nous faire une échographie abdominale. Rien de suspect. Juste des kilomètres d'intestins vides chez chacun de nous trois. Je réponds à Blaise en lui montrant trois pots maxi format dans mes mains. Le plus difficile maintenant est de réussir à en planquer un des sales pattes de mon double.

Le spectacle des filles commence. À force de traîner avec les filles lors de répétitions, je connais la choré par cœur. Je les regarde donc voltiger avec leurs jupettes pour leur faire un retour sur les points à améliorer ou corriger dans quelques jours. Les filles me l'ont demandé. Les deux groupes de pom-pom-girls se font face et effectuent des démonstrations comme une sorte de défi en simultané. Ce début est très joli à voir des deux côtés. Soudain, quelque chose cloche. Deux nanas de la troupe adverse ne se positionnent pas normalement. Elles ne sont pas symétriques par rapport à leur groupe, trop en avant, trop près de mes amies. Je les vois faire un croche-patte à Lilou et Hélène qui réalisent un porté de Sarah. La petite souris chute et est rattrapée de justesse par une autre fille du groupe adverse. Lilou et Hélène tombent à terre. Le trio se fait très mal et les cris fusent de tous les côtés. Le spectacle est interrompu quelques secondes.

Blaise, Thibaut et Maltez se précipitent aussitôt et portent les filles jusqu'au banc de repos. Hélène a une sévère entorse à la cheville. Lilou saigne du nez, car elle a pris le pied de Sarah dans le visage. La petite souris est blessée au ventre bien qu'on ait amorti sa chute. Pendant que l'infirmier les soigne, je peste. J'ai vu clairement le sabotage et j'en fais part à Naya et aux autres filles. Mélia confirme ma version. Elle a distingué le geste mesquin et est furieuse. Elle veut aller casser la figure aux deux tricheuses. Des remous dans l'équipe adversaire montrent que les pom-pom-girls adverses ne sont pas d'accord avec ce qui vient de se passer et dispute les deux mesquines. Celle qui a rattrapé Sarah semble particulièrement en colère elle aussi. Elle agrippe le col de ses deux collègues et paraît leur passer un savon sévère.

— Vous êtes gentilles les deux folles, mais comment on fait ? Si on les agresse hors terrain, on prend un blâme. Et avec trois filles en moins, notre choré est foutue, râle Naya.

— Je peux remplacer l'une d'elles. Je connais la choré, annonce Clarissa qui s'est approchée.

— Nous aussi, on connaît la choré et en plus, on maîtrise la capoeira pour leur péter la tronche, déclarons d'une même voix Mélia et moi.

Naya sourit de notre réponse sortie droit du cœur. Elle accepte notre proposition. Il est clair qu’avec de tels renforts, il est possible de refaire l'enchaînement sans danger. Ma frangine et moi surveillerons les deux nanas et répondrons si besoin. Sur ce point, Naya a toute confiance dans le duo de folles Farmer. Clarissa et Mélia enfilent les tenues d'Hélène et de Lilou, dissimulant leur nudité temporaire par les blaser tendus des gars. Dès qu'elles sont habillées, Fleur les maquille aux couleurs de l'équipe de basket. Il reste un dernier point à régler.

— Blaisounet ? Tu peux me prêter ton maillot ? Mes fesses généreuses, nourries au chocolat, ne rentreront jamais dans la micro-jupette de la petite souris et tu es le plus grand après l'autre andouille. Je veux bien défendre et venger Sarah, mais je refuse catégoriquement de porter un seul vêtement avec l'odeur nauséabonde de ton capitaine. En plus, un beau gosse comme toi torse-nu, ça peut détourner l'attention de nos adversaires.

Un éclat de rire général me répond. Mon antipathie non dissimulée envers Maltez et ma drague digne d'un gros lourdaud envers Blaise détend l'atmosphère. Mon ami retire son maillot plein de transpiration avec un grand sourire et me le tends en secouant la tête pour rire de mes âneries. Je ne suis pas épilée comme les autres filles, mais je m'en fous d'avoir du poil aux pattes. Ça ne se verra pas de loin. Fleur a maquillé rapidement Mélia et Clarissa. Elle s'affaire sur moi en un temps record. Aucun doute, cette fille a de l'or dans les mains. Nous ressemblons à trois magnifiques tigresses humaines.

Nous reprenons la choré au départ. Clarissa devient voltigeuse à la place de Sarah. C'est la plus légère et surtout la moins apte à se battre si besoin. Mélia et moi sommes les porteuses. L'autre équipe a procédé aussi à un changement de place. La fille qui a rattrapé Sarah est à côté des deux autres et leur lance des regards noirs. Il y a de l'eau dans le gaz niveau cohésion équipe. Le début de la chorégraphie se déroule sans accroc. Comme prévu, au moment du porté, les deux pétasses essayent de nous faire tomber. La troisième tente de les empêcher. La triche est confirmée. Plus aucun doute sur les motivations des deux filles. La première fois, cela peut être une erreur. Une seconde fois, c'est volontaire. Mélia et moi décidons d'un commun accord de leur montrer ce qui arrive quand on met deux tigresses en colère. Nos appuis sont bien plus stables et surtout, nous sommes plus rapides et évitons la première tentative sans aucune difficulté.

Clarissa se réceptionne au sol, sans dommage. Au mouvement suivant, nous attaquons en rythme et en douceur. On va faire monter la pression peu à peu. Leur chorégraphie est basée sur le lancer de pompons et le rattrapage comme s'il s'agissait de ballons de basket. Rien de plus facile que de faire dévier les trajectoires innocemment pour leur faire rater leur cible. Nous les faisons tourner en bourrique pendant une bonne minute. Elles ratent toutes leurs réceptions et n'ont plus qu'à mettre les poings sur les hanches pour faire bonne figure.

Deuxième round. Cette fois, je porte seule ma frangine et nous prenons une pose digne des arts martiaux. Elle a une jambe sur ma hanche, nous nous tenons par les bras et de nos pieds libres, on fouette l'air en direction des deux pouffes. Ça ne me pose aucun problème. Ma sœur est légère et très stable. Ce n'est pas la première fois que nous faisons ce mouvement. On rigole en les voyant reculer craintivement. Nous venons de leur montrer un échantillon de notre capacité à leur péter la tronche.

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