Epilogue - 2
En bas du sentier qui menait au château, Vénior abaissait son arc, les yeux fixés sur la chaumière d'Edmyre. Le feu avait déjà bien pris, le toit et la charpente étaient déjà entièrement embrasés.
Il imaginait sa marraine, en proie à la panique, essayant tant bien que mal de protéger le peu de bien qu'il lui restait avant que sa minuscule chaumière ne soit détruite pour de bon. Elle se contenterait très probablement de fuir sans rien emporter. Dans ce cas, elle mourrait de faim dans la forêt, où bien serait dévorée par la bête une fois cette dernière relâchée.
L'héritier des Landebrune rangea son arme. Il n'avait pas le temps de s'attarder sur le sort d'une vieille folle. Elle n'avait eu que ce qu'elle méritait.
Seule comptait Aurore. Il lui fallait la ramener au château coute que coute. Sa fuite avait provoqué en lui colère et désespoir. A aucun moment il n'avait douté de l'amour qu'elle lui portait, pas plus qu'il n'avait douté de son amour pour elle. Et pourtant, elle s'était enfuie. Ces longs jours passés à traquer la fille des Damester l'avait rendu aveugle au malheur de sa bien aimée. Malgré les larmes qu'elle avait versé en sa compagnie, jamais Vénior n'avait pu imaginer qu'elle finirait par le fuir, lui, celui qui l'avait sauvé des griffes du monstre.
Certes, le monstre n'était pas une menace pour lui. Il ne l'avait jamais été puisqu'il appartenait à son père. Vénior avait appris à maitriser sa fureur et, au fil des ans, à lui imposer sa volonté. Même si Aurore n'avait couru aucun risque tant qu'il était présent pour contrôler la bête, l'héritier des Landebrune se sentait coupable de l'avoir lâché sur elle. Il n'avait pas trouvé de moyen plus efficace de gagner son cœur. Il avait voulu la rendre reconnaissante, soigner ses plaies et clamer sa peur pour qu'elle lui soit à jamais redevable. Il avait même fait en sorte qu'elle puisse voir le vrai visage d'Annabelle Damester. La truie.
Peut-être qu'Aurore avait regretté son geste au point de vouloir fuir une vie qu'elle ne pensait pas mériter. Vénior admettait avoir pris un risque en la laissant retrouver sa mère: il savait parfaitement bien que, tôt ou tard, Annabelle Damester essayerait de réparer sa faute. Il était resté pour observer la scène, prêt à intervenir si la truie avait pris le dessus, mais cela n'aurait peut être pas suffi. Aurore avait du sa survie à la chance.
Vénior se rendait compte de la gravité de son erreur. Il aurait du enfermer la jeune fille au château, puis partir tuer Annabelle Damester et sa fille de ses propres mains, comme il l'avait si souvent rêvé. Il l'aurait attachée, torturée, aurait tranché la tète de Jeanne sous ses yeux, puis l'aurait égorgée comme la truie qu'elle était. Il lui aurait peu importé que ses cris aient alerté les villageois. Il les auraient massacrés à leur tour.
A cet instant, Vénior s'apprêter à réaliser ce qu'il avait voulu faire sans avoir osé se l'avouer. Un village ne pouvait pas exister sans un seigneur, à moins que ses habitants ne soient plus de ce monde. Au yeux de la loi, il était responsable de leur survie. Ce qui constituait un obstacle à sa liberté. Mais quel meilleur moyen de se débarrasser d'un obstacle que de le réduire en cendres?
L'héritier des Landebrune retourna au château. Il aurait besoin d'aide pour accomplir cette mission.
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