chapitre 2-2
Elle surjouait la colère, je le voyais bien. Mais je fis mine d’y croire et exprima du mieux que je le pus ma honte et ma peur du châtiment. Cela apaisa un peu la tension, mais certainement dégrada encore mon image à ses yeux. Cela ne me paraissait plus aussi grave qu'au début de notre séparation, je ne savais plus vraiment ce qui restait encore de cet amour en moi.
— J’ai appris que, depuis cette nuit, les ombres d’acier ont une nouvelle mission. Nous devons coordonner le service de renseignements de l’Ordre pour que l’Ange Sombre soit informé sans délai de son déroulement et qu’il puisse en retour vous faire parvenir les ajustements nécessaires aux aléas possibles. Et avec des soldats comme toi, il risque d’y en avoir pas mal, des aléas ! ajouta-t-elle en contenant un sourire entre l’humour et le mépris.
Je lui tendis le papier sur lequel j’avais griffonné le chronogramme de la mission. Elle le saisit et me l’arracha des mains d’un geste rapide, le lut, le froissa, et le jeta à l’eau.
— Tout ce ramdam pour quelques assassinats ? La mise en œuvre des ondes protectrices, que je ne supporte plus, le recrutement des ombres d’acier les plus puissants, la mise en branle du service de renseignements de l’Ordre, tout ça pour quelques assassinats ? Qui sont les cibles ?
— Effectivement, il ne s’agit pas de n’importe qui. Cibles prioritaires, personnalités de premier niveau. C’est du lourd cette fois…
— Que se passe-t-il, on rentre en guerre ? Tuer des chefs d’État, ou de grands dignitaires religieux pourrait avoir des conséquences néfastes sur notre invisibilité. Comment en est-on arrivé là ? Pour mener à bien ce genre de mission, une opération d’une telle envergure, il faut d’abord mettre en place la logistique d’un ou plusieurs plans de repli. Or l’ordre n’a été donné que d’informer et n’a sollicité que l’implication du service de renseignements et communication ! Combien y a-t-il de cibles ?
— S’il y a des questions stratégiques à aborder, ce n’est surement pas avec un homme de mon rang qu’il faut en discuter. As-tu un message à me donner pour l’Ange Sombre ?
Elle parut réfléchir quelques instants. À l’évidence la situation lui paraissait plus complexe que d’habitude.
— Non, je suppose qu’ils doivent savoir ce qu’ils font. Ils croient peut-être que la mélodie du sonateur suffira à leur donner la victoire. S’ils tombent, nous ne tomberons pas avec eux. L’Ordre prendra ses propres précautions pour se protéger. S’ils ne nous demandent rien, ils devront se débrouiller tout seuls en cas de problème, déclara-t-elle sèchement.
Elle se retourna complètement vers moi, me salua du salut de l’ordre en guise d’au revoir. Je la saluai du salut d’usage des ombres d’acier. Nous fîmes chacun demi-tour sans un mot de plus pour nous éloigner en directions opposées.
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