chapitre 3-3
Nous remontâmes à la bergerie pour terminer notre travail d’investigation et de documentation photographique. De par nos lectures de l’histoire des anciennes guerres contre les vint-trois rois du haut mal, nous connaissions parfaitement leur méthode dans ce genre d’assassinat. Globalement tout paraissait correspondre, mais chacun d’entre nous trouvâmes des détails qui ne collaient pas. Tout d’abord les différents signes du haut-mal n’étaient pas tous bien dessinés. Or c’est leur structure parfaite qui leur donnait tout leur pouvoir. Jamais nous n’avions entendu parler de ce genre de défauts. De même l’organisation des corps, la disposition des têtes sur le sol en particulier, n’était pas habituelle. Cette disposition, qui avait comme base la forme de l’étoile d’Ishtar, n’était pas correctement respectée. Or c’est par cette organisation précise que les seigneurs du haut-mal désignaient les cibles principales destinées à la transmutation, et les distinguait des cibles secondaires dont ils tiraient simplement l’énergie qui leur donnerait davantage de force, et enfin des cibles tertiaires représentant simplement des dégâts collatéraux involontaires ou imprévus.
Ici, la scène était confuse, on pouvait plus ou moins identifier les cibles primaires, mais la disposition ne permettait pas une désignation claire à une possible transmutation.
Ainsi ces détails importants, accompagnés de beaucoup d’autres plus secondaires, nous interrogèrent sur le véritable auteur de ce carnage. Ce n’étaient pas les seigneurs du hauts mal, ou alors pas les mêmes que depuis toujours.
Après avoir documenté par toutes les photos possibles et notés tous nos commentaires, un ensemble de fichiers que nous avions de suite sauvegardé dans le Cloud, nous décidâmes de détruire la grange pour éviter de donner trop d’indices à la police ou la gendarmerie. Deux d’entre nous durent descendre chercher des bombes incendiaires de forte puissance que se trouvaient dans les coffres des voitures, puis les remonter à la bergerie. L’aube pointait ses premières lueurs lorsque tout s’embrasa dans la libération d’une chaleur portant la température à plus de 1500°C. En quelques minutes, tout serait calciné et peu reconnaissable. Nous nous éloignâmes rapidement, en courant, car la fumée risquait d’attirer du monde qui pourrait nous voir ou prévenir rapidement la gendarmerie.
En bas, chacun prit sa voiture sans révéler aux autres ni où il se rendait, ni ce qu’il comptait faire. Nous nous transmettrions ces informations plus tard par téléphone sécurisé.
Je roulais seul et à toute allure sur cette route sinueuse, aussi vite que s’entrechoquaient mes multiples pensées, hypothèses et théories. Dans cette lumière blafarde, entre chien et loup, l’esprit absorbé par mes réflexions, c’est à peine si je l’aperçus quelques secondes au bord de la route, au détour d’un virage. Le cavalier blanc, comme à la fois lumineux et transparent, m’attendait là sans bouger. Le même que celui qui avait attaqué Nicolas. J’eus la mauvaise réaction. Je freinais d’un coup sec, ma voiture dérapa et passa sur la voie de gauche pour s’arrêter comme par miracle juste au bord du précipice. Immédiatement, je me retournai pour voir le cavalier. Il arrivait à fond, et sa monture se précipita les pattes en avant sur le coffre arrière de la voiture. Le choc la fit avancer d’à peine un mètre, mais suffisamment pour la faire basculer dans le vide.
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