Chapitre 2

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Chapitre 2 : L'Ombre du Passé

Le lendemain matin, un calme étrange régnait dans la maison de Timmy. La fête s'était achevée tard dans la nuit, et les restes de la soirée portaient encore les traces de leur petit chaos : des verres éparpillés sur la table basse, des assiettes couvertes de miettes, et des ballons à moitié dégonflés flottant mollement près du plafond. La lumière du matin, douce et dorée, s'infiltrait par les rideaux tirés à moitié, révélant chaque détail avec une clarté tranquille.

Timmy descendit les escaliers en bâillant, ses cheveux ébouriffés lui donnant l’air d’un gamin qui n’avait pas encore quitté l’enfance. Ses chaussettes glissaient légèrement sur les marches en bois, usées par les années et le passage de nombreux pieds. En entrant dans la cuisine, il trouva Clement, assis à la table, une tasse de café fumant entre ses mains.

Clement portait un pull gris légèrement trop grand, et ses cheveux châtains retombaient en mèches désordonnées sur son front. Ses yeux, concentrés, étaient fixés sur une bande dessinée posée devant lui. L’ouvrage semblait vieux mais bien entretenu, la couverture arborant des couleurs sombres et des détails frappants.

« T'es déjà levé ? » demanda Timmy, la voix encore rauque de sommeil.

Clement releva la tête, un sourire timide étirant ses lèvres. « Pas vraiment dormi. J’ai ramené ça hier soir. Je voulais te le montrer, mais on n’a pas eu le temps. »

Intrigué, Timmy s’approcha. Sur la couverture, un champ de maïs semblait s’étendre à l’infini sous un ciel noir et orageux. En son centre, une silhouette sombre dominait la scène : l’épouvantail. Son visage cousu affichait un rictus effrayant, et ses bras tendus, terminés par des doigts décharnés, semblaient inviter le spectateur à entrer dans son cauchemar. Le titre, écrit en lettres rouge sang, proclamait : L’Épouvantail : Les Ombres de la Moisson.

« Une édition spéciale, » expliqua Clement, visiblement fier de son acquisition. « Ils ont sorti cette bande dessinée pour accompagner la série. Elle reprend certains épisodes, mais il y a aussi des scènes inédites. C’est collector. »

Timmy s’assit en face de lui, ses doigts traçant les contours de la couverture avec curiosité. Il n’avait jamais été un grand lecteur, mais quelque chose dans cette bande dessinée l’attirait. Peut-être était-ce la nostalgie des soirées passées à braver les interdits pour regarder la série, ou peut-être était-ce la fascination morbide qu’il éprouvait pour l’épouvantail lui-même.

Clement tourna les premières pages avec précaution. Les illustrations étaient saisissantes : chaque détail des champs de maïs, des fermes délabrées et des nuits étoilées semblait réaliste et vibrant. Mais ce qui capturait vraiment l’attention de Timmy, c’était l’épouvantail. À chaque case, il était représenté avec une précision glaçante : ses yeux noirs cousus, son sourire grotesque, ses vêtements en lambeaux, et cette posture qui oscillait entre l’humain et l’inanimé.

« Regarde cette scène, » dit Clement, pointant une case particulièrement marquante. L’épouvantail, éclairé par la lumière froide d’une pleine lune, se tenait au centre d’un champ. Son ombre, allongée et déformée, s’étendait vers une ferme en ruine, où une silhouette humaine semblait reculer de terreur.

Timmy sentit un frisson lui parcourir l’échine. « Ils n’y vont pas de main morte. C’est encore plus intense que dans la série. »

Clement hocha la tête avec un sourire fier. « C’est ça qui est génial. Les dessins te plongent vraiment dans l’ambiance. Ils ont même ajouté des détails sur le passé de l’épouvantail. Regarde cette page. »

Il tourna une autre page, dévoilant une scène où un groupe de fermiers pendait un homme à un poteau, au milieu d’un champ. Les couleurs étaient sombres, presque monochromes, sauf pour les éclaboussures de rouge qui marquaient la violence de l’acte.

« Ils expliquent qu’il a été maudit après avoir été sacrifié. C’est pour ça qu’il revient. Pour se venger de ceux qui ont profané ses terres, » expliqua Clement, l’enthousiasme brillant dans ses yeux.

Timmy observa les images en silence, mais une pensée troublante s’insinua dans son esprit. Les fermes, les champs, les chemins dessinés dans la bande dessinée… ils ressemblaient étrangement à son propre village.

« Tu trouves pas que… » Il hésita, cherchant ses mots. « Que ça ressemble un peu trop à chez nous ? »

Clement haussa les épaules. « C’est peut-être voulu. Beaucoup de villages se ressemblent, surtout ceux paumés au milieu des champs comme le nôtre. »

Avant qu’ils ne puissent poursuivre la conversation, des bruits de pas dans l’escalier interrompirent le moment. Emy fit son apparition, ses cheveux blonds emmêlés et vêtue d’un pull trop grand, probablement emprunté à Timmy.

« Vous êtes debout si tôt ? » demanda-t-elle, en se servant un verre d’eau.

« Clement m’a montré cette bande dessinée, » répondit Timmy.

Emy haussa un sourcil. « L’Épouvantail, encore ? Sérieux, vous êtes obsédés par ce truc. »

« Peut-être, » répliqua Timmy, refermant le livre, « mais les meilleures histoires ont toujours un fond de vérité, non ? »

Un sourire amusé flottait sur les lèvres d’Emy. « T’es vraiment prêt à croire à cette vieille légende ? Si tu continues comme ça, on va te retrouver planqué sous ta couverture à chaque coup de vent. »

Henry entra à son tour, ses joues rougissant légèrement en croisant le regard d’Emy. Il s’approcha de la table, attiré par la discussion.

« De quoi vous parlez ? » demanda-t-il timidement.

« De la bande dessinée, » répondit Clement.

« Timmy croit que l’épouvantail pourrait être réel, » ajouta Emy avec une lueur taquine dans les yeux.

« Je n’ai jamais dit ça ! » protesta Timmy.

Le reste de la matinée se déroula tranquillement. Pourtant, même en riant avec ses amis, Timmy ne pouvait chasser l’image de l’épouvantail de son esprit. Chaque fois qu’il regardait par la fenêtre et voyait les champs de maïs se balancer doucement sous le vent, il avait l’impression que quelque chose l’observait, tapi entre les rangées.

Et lorsque l’horloge sonna midi, il se surprit à scruter l’horizon, guettant une silhouette qui, il le savait, n’était pas censée être là.

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