Vyrian sourit à la demande de l'Ombre, il n'avait aucune confiance en lui. Pourtant, au vu de la situation, il ne semblait pas avoir le choix. Néanmoins, il ne pouvait se résoudre à s'y fier aveuglément.

— Que comptez-vous me faire ?

Ollesty lui répondit une pointe d'agacement dans la voix.

— Te sauver, je te l'ai déjà dit.

Cette réponse vague déplut au scientifique qui s'acharna, luttant contre l'évanouissement qui le guettait.

— Comment ?

— Ce n'est pas le moment de parler de ça.

— J'ai le droit de savoir !

— Très bien, mais je t'accompagne au bassin avant que tu ne perdes connaissance. J'ai pas envie de me trimbaler ton corps inanimé.

Vyrian hocha la tête et entreprit de se relever, mais sa faiblesse le rattrapa et à peine debout, il se mit à chanceler sur ses jambes. Dans sa chute, il eut juste le temps d'apercevoir Ollesty pester et tenter de le rattraper. Mais l'homme peinait déjà à se déplacer, la canne qu'il tentait de cacher en était la preuve. Lorsqu'il avança les bras pour l'aider, l'Ombre dû s'en débarrasser, déstabilisé, il ne parvint pas à rattraper Vyrian et ils tombèrent tous les deux.

Lorsqu’ils percutèrent le sol, les ornements émirent une vive lueur blanche avant de reprendre leur teinte normale. Durant ce court laps de temps, Vyrian sentit son corps s'arquer de douleur. Il ignorait ce que s'apprêtait à lui faire Ollesty, mais la décharge qu'il venait de recevoir finit de le convaincre de refuser l'offre de l'Ombre. Mais lorsqu'il regarda dans sa direction, il le vit souffrir tout comme lui et il comprit que rien de tout cela n’était prévu.

Alors qu'il s'apprêtait à l'interroger, Ollesty lui désigna le bassin et Vyrian s'y dirigea. Plus il s'en approchait et moins son corps se faisait douloureux, les saignements finirent même par s'arrêter et il reprit peu à peu ses esprits. Arrivé au centre de l'arabesque, il put distinguer le liquide qui y circulait. Des conduits avaient été aménagés permettant au fluide de se déplacer. Vyrian observa quelques instants le phénomène. Il put voir de petites ondulations à la sortie des canaux provoquées par le flux entrant, les vaguelettes ne restaient pas bien longtemps et la surface retrouvait rapidement sa surface lisse avant de s’écouler en douceur dans une canalisation de sortie.

Lorsque Vyrian trempa sa main dans ce curieux liquide, elle disparut sous la surface d'un blanc éclatant. La sensation était étrange, il avait à la fois l’impression que rien d’autre que l’air ne s’opposait à son contact, mais il ressentait également la douce texture du fluide. Cela lui rappelait vaguement le toucher du velours.

Peu à peu, il y plongea l'avant-bras profitant de la douce sensation de calme que cela lui procurait, jusqu'à ce qu'il visualise d'étranges ruisseaux scintillants. Surpris, il retira vivement sa main et une nouvelle décharge lui parcouru le corps. Il entendit Ollesty se redresser et vit du coin de l’œil sa canne produire des flashs lumineux lorsqu'elle entrait en contact avec un symbole. Le scientifique attendit que l'homme le rejoigne et l’interrogea.

— Qu'est-ce que c'est ?

Toute trace d'agressivité et de méfiance avait quitté sa voix devant le spectacle qui se tenait sous ses yeux. L'Ombre lui répondit, le mécontentement perçait dans sa voix.

— La magie du Monde Mythique.

— Il me semblait qu'elle avait été corrompue.

— Elle l'est, le symbole que tu vois est là pour la purifier et la protéger d'une contamination.

— Et quel est le rapport avec ce que vous souhaitez me faire ?

— Si tu viens bien du Monde Fondateur comme je le suspecte et que nos mondes sont bien reliés comme l'indique la légende, alors te plonger dans la magie du Monde Mythique te permettra d'entrer plus facilement en contact avec les tiens.

— Est-ce sans danger ?

— Oui. Il existe des thermes dans lesquels tu peux te baigner dans le but d'améliorer ta perception et ton affinité à la magie, mais tu ne peux pas y rester trop longtemps. Les mages les plus puissants le tolèrent très bien et peuvent y rester sans limite de temps.

— Et pour moi qui n'ait aucune affinité à la magie ?

— Comme je te l'ai dit ton origine devrait te protéger.

— Quelle est cette décharge alors ?

— C'est de l'énergie pure, il faut être délicat, sinon elle devient instable et on se prend des décharges.

— D'où le fait que vous m'aviez demandé de rejoindre le bassin avant de me fournir des explications.

Ollesty hocha la tête et fournit les explications manquantes au scientifique.

— Une fois que tu seras immergé, je t'informerai du temps qu'il te restera pour prendre contact avec les tiens, j'ignore comment va se comporter l'énergie du Monde Mythique, au moindre signe suspect je te demanderai de rompre la connexion et de sortir du bassin.

— L'énergie de ce monde peut-elle se rendre compte que je ne viens pas d'ici.

— Bien sûr, elle l'a déjà fait, c'est la première fois que je la vois si calme. Que t'a-t-elle montré ?

— Je ne sais pas trop, on aurait dit des ruisseaux. Est-ce que ça a un sens particulier ?

— Ça toi seul peut le savoir. Elle prend contact avec chacun d'une manière différente. Tu ne devrais pas tarder, je ne pensais pas que cette proximité stabiliserait ton état.

Vyrian hocha la tête et s'immergea dans le liquide. Une fois à l'intérieur, il ne se sentit pas mouillé, pas plus que ses vêtements lui collaient à la peau. Au contraire, il avait l'impression de flotter, il n'avait pas besoin de fournir d'effort pour maintenir la tête au-dessus de la surface. C'était à la fois reposant et agréable. Seul le dispositif que lui avait installé Ollesty lui tiraillait la peau, il en fit part à l'Ombre.

— Retirez-le moi.

— Non sans cela, je ne pourrai pas suivre tes avancées et t'aider à revenir parmi nous.

Vyrian n'appréciait pas de le savoir capable de suivre ses pensées, mais au point où il en était, l'idée lui était moins insupportable, de plus si Ollesty apprenait l'identité des véritables instigateurs derrière le transfert des Exilés, peut-être arrêterait-il d'accuser Mère à tort.

Vyrian s'étonna de son propre raisonnement et se promit d'interroger l'Ombre au sujet de l'effet de la magie du Monde Mythique sur la psychologie, mais pour le moment, il se laissa flotter sur le dos et ferma les yeux.