La Madonne du peuple
Au fond de l'Argentine,
Une danseuse de Tango
Dansait dans les cantines,
Des rêves plein la peau.
D'homme en homme elle parvint
Jusqu'à la capitale,
Devint, certes, catin
Mais sur un piédestal.
Il lui suffit d'un soir
Pour rencontrer Péron
Qui rêvait de pouvoir,
Et la voilà Madone.
Los descamisados,
Portés par ses discours,
Sont les nouveaux héros
De l'espoir au long court.
Elle porte tout un peuple
Et le peuple la porte,
Et Péron l'emporte
Vers les plus hauts sommets.
Sous les acclamations,
La voilà au balcon.
A Casa Rosada
Y viva Évita.
L'icône devient déesse
Pourvu qu'elle apparaisse,
Sous sa chevelure d'or,
Vêtue de Christian Dior.
Et tout devient plus beau,
Plus moderne et plus haut,
Sous l'égide qui fait loi
De la divine Eva.
Partout on baise ses pas,
On l'abreuve de vivats.
Son sourire resplendit,
Sa présence éblouit.
Mais un soir de juillet
Eva s'en est allé,
Son astre tant adulé
A cessé de briller.
Dans un cerceuil de larmes,
Evita, sanctifiée,
Reçoit l'adieu aux armes
D'une nation crucifiée.
L'Argentine est en deuil
Et pleurant sa madone,
Se sent abandonnée.
L'espoir s'est envolé.
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