Ce soir, je ne peux fermer l’œil.
C’est à cause d’Halloween.
Ne vous méprenez pas, je n’ai pas peur.
Je n’aimerais pas que l’on me pense froussard - il y a bien longtemps que je ne crois plus aux monstres.
Mais ce cortège de bruits, de cris et de pétards !
C’est agaçant, horripilant, cela me porte sur les nerfs.
Et, bien que j’aie mis des bouchons dans mes oreilles, le tapage, dans mon cerveau, va croissant - c’est angoissant.
Car en plus des gamins qui hurlent dans la rue, les voisins dans leurs foyers festoient à tue-tête.
Dead can dance, à gauche, chez les Dansaert ; Killing in the name of, à droite, chez les Namaert.
Entre les deux c’est l’insomnie.
La mienne.
Ce ne sont plus des maisons mais des boîtes à sons.
Je me crispe dans mon lit, l’oreiller sur la tête et l’ensemble sous les draps.
Rien n’y fait.
Entre mes tempes résonne un brouhaha cacophonique.
Une heure, deux heures, trois heures de ce tohu bohu rythmique et mon esprit n’est plus qu’une bouillie sonore, un spectre binaire en ram et en dam.
C'est bon, ils ont réussi.
Ils m’ont emporté jusqu’au bout de ma nuit.
De ce tintamarre, j’en ai marre !
Alors, je me lève, colère, et sors, vociférant.
A mon tour le barnum !
Du squelette la tête vola ; les petits fantômes dans l’au-delà furent renvoyés ; les zombies outre leur tombe ; le loup-garou, je le pris par la queue et en fis du boudin ; les vampires avalèrent leurs canines ; les sorcières leur bâton ; les bandelettes des momies virèrent au rouge ; et ce que je n’identifiai pas devint de la pulpe de potiron.
Oh mon dieu quel sabbat !
Quel régal !
L’espace vidé, mon barouf continue : cap chez les Dansaert !
Je fends l’huis et m’invite sur la piste.
Dans un metal endiablé – Nothing else matters - , je tranche bras, pieds, troncs, bassins et que sais-je encore ? Je ne suis pas boucher, moi. Je ne fais pas dans la dentelle !
Le dernier coup est pour l’infernale machine qui enfin, dans un ultime crachotement, se tait.
Je prends un moment et savoure ; il faut bien que je l’avoue : je m’amuse follement !
Plus qu’une étape !
Ces chers Namaert !
Hache dans le dos, sourire grimaçant de circonstance, je frappe à leur porte.
Des bonbons ou la vie ?
La vie, bien sûr !
Le sang gicle et les corps tombent.
Tandis que j’abats mon outil sur la fille de la famille, je reconnais Sympathy for the devil.
Je l’aime bien celui-là - mais il est beaucoup trop tard pour être sympathique.
Je poursuis donc mon carnage jusqu'à ce qu'ils soient tous en morceaux.
Voilà, c'est fini.
Il ne reste des Namaert que des petits bouts épars.
Quelque peu ému, je contemple mon oeuvre sur les mesures de Sweet Dreams ; puis, cérémonieusement, j'éteins le lecteur et regagne mes pénates, emportant leur panier de chocolats.
Je me recouche encore quelque peu fébrile, excité, la tête pleine de morts.
Heureusement, au bout de quelques minutes, mes muscles se délassent et le sommeil me borde.
Haaaaaaaaaa quel délicieux silence…