5 - Caliente
Je me réveillais le lendemain matin, ou midi ? Mon cerveau refusait d'accepter l'affichage sur le cadran du micro-onde. Il était quinze heures et des brouettes. What ? Nom d'une papaye, je n'ai pas dormi autant depuis le lycée !
Je me rappelais alors la raison pour laquelle je me réveillais sur le canapé de mon amie. La douleur reflua vers mon cœur en un instant, mais je refusais de lui laisser trop de place. J'avais besoin d'avoir les idées claires, d'une douche, de vêtements propres, de trois ou quatre cafés et d'une bonne partie de jambe en l'air. Pas forcément dans cet ordre-là.
Je me traînais jusqu'à la salle de bain. Elle m'avait préparé un petit tas de fringues, une serviette et un nécessaire de toilette posés sur un banc à côté du bain. Je me fais peur avec mon propre reflet. Tiens ! Il faudrait que je postule pour le casting de Walking Dead... Je grognais en constatant que mon amie avais décoré la vitre de sa plume. Ou plutôt de son rouge à lèvres.
"Appelle-moi quand tu es redevenue humaine".
La baignoire me fait de l'oeil, je fut tentée par son appel tel un marin face à une sirène. Je m'ébouillantais en m'immergeant, faisant rougir ma peau comme une écrevisse. Je sentis un frisson agréable de parcourir et fermais les yeux un instant.
Je parvins à ne pas me rendormir, à sortir du bain sans vider tout le ballon d'eau chaude et me préparer. Mes idées étaient trop confuses et je ne cessais de vouloir chasser mes tristes pensées.
Charlotte travaillait à deux pas de chez elle. Elle était une tatoueuse talentueuse. Et en plus ça rime !
Je m'apprêtais à rentrer dans sa boutique lorsque je la vis dans la rue en train de parler à un homme. Je la rejoignis et elle me présenta Lucas. Il est tatoueur et la remplacerait le temps de ses congés. Elle lui confia les clés et ses dernières recommandations puis me prit par le bras.
– Bon, on ne perd pas de temps ! On a des valises à préparer et un avion à prendre.
– Hein ? Mais de quoi tu parles ?
– On passe chez moi, on se prépare. Mon père passe nous prendre dans une heure, l'avion part à dix-neuf heures.
– Mais un avion pour où ?
– Bah l'Irlande !
Je tentais d'y voir clair et cherchais dans les tréfonds de ma mémoire un élément capital.
– Ivy ! T'es pas sérieuse ? Tu as oublié la discussion qu'on a eue hier soir déjà ?
– Non, mais attends ? Tu parles de ce que je t'ai dit hier. Mais ce n'était pas sérieux ! J'ai dit ça sur le coup de la colère... Et de l'alcool, beaucoup d'alcool.
– Oui je savais très bien que tu trouverais des excuses, donc j'ai pris les devants. Au fait, c'est sans discussion compris ?
Je réfléchis quelques instants et lui posait des questions pour l'organisation. Je culpabilisais qu'elle plante tout moi.
Comme d'habitude elle avait pensé à tout et m'avait enlevé une grosse épine du pied. Son père et sa mère avaient mis les affaires de Seb dans des cartons sur le pas de ma porte. Ils avaient changé le verrou de mon appartement et envoyé un message à mon ex pour le presser de les récupérer. Ou plutôt ils l'ont menacé de donner ses affaires à un foyer de sans-abri s'il ne venait pas les chercher dans les trente minutes. Apparemment c'était convaincant. Au passage, la super maman de Charlotte avait récupéré mes affaires et mes papiers pour le voyage.
C'était la course et j'avais l'impression de flotter alors que je regardais par le hublot de l'avion, attendant que celui-ci décolle.
Sur le moment, je n'ai pas trop eu le temps de réfléchir à ce voyage. Et je sais que c'était volontaire de la part de mon amie de ne pas me laisser le temps de cogiter. Mais finalement, elle a su qu'il me fallait prendre du recul pour repartir à zéro.
Un beau Stewart nous installa un plateau-repas et nous en profitions pour nous remémorer tous les voyages que l'on avait faits ensemble.
Je savais à cet instant que malgré le bordel qu'était ma vie à cet instant, je ne n'étais pas seule et que de belles choses peuvent encore arriver.
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