Chapitre 2

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Six mois plus tard, le jour de mon anniversaire, je partis vers 10h dans la forêt. J’accrochai un petit mot sur l’arbre, avant de retourner précipitamment dans la maison. Sur ce petit mot, il y avait écrit :

  • Je ne pourrai pas venir aujourd’hui, puisqu’il y a trop de monde, vu que c’est mon anniversaire. Mais je pourrai venir demain, vers 11h je pense.

Vers 15h, je m’éclipsai un bref moment pour retourner dans la forêt. Mon mot avait été remplacé par un autre :

  • Je t’attendrai demain à 11h, c’est d’accord. Claude.

Je passai une heureuse journée, où je reçus un lot de cadeaux assez important, comme des livres, dont de nombreux Arsène Lupin, série que j’adorais malgré mon trouble de la concentration qui ne m'aidait pas (je n'arrivais pas à me concentrer suffisamment longtemps pour lire), ou des jouets pour m’occuper.

Mon hyper-activité allait beaucoup mieux depuis l’événement de l’arbre. J’en avais presque conclu qu’il suffisait d’un moment marquant pour la faire disparaître.

Le lendemain, vers 11h, je réussis à pouvoir sortir en prétextant une quelconque raison, et me plantai devant l’arbre. Le papier était toujours là. Hésitant, je touchai de la main l’arbre, et rien ne se passa.

  • Il faut y aller en entier, pour pouvoir y entrer, mais surtout il faut avoir une solide volonté, dit un homme dans mon dos.

Je me retournai en entendant la voix de Claude, et le découvris pour la première fois. Il avait une cinquantaine d’années, une petite barbe, qui contenait quelques poils blancs.

Derrière lui, son associé, dont je ne connaissais pas le nom, surveillait les alentours. Lui avait plutôt la vingtaine, et paraissait sûr de lui. Claude dit :

  • Je te présente Lionel, mon adjoint.

Celui-ci m’adressa un petit signe de la main, tout en regardant attentivement le chemin qui passait au milieu de la forêt. Claude me demanda :

  • Tu veux qu’on aille dans l’entre-monde, ou tu préfères rester ici ?

Quelque peu intimidé, je hochai la tête.

  • Ce n’est pas une réponse, ça ! plaisanta Claude. Bon, je prends ça pour un acquiescement de la deuxième proposition.

Je hochai de nouveau la tête en signe de confirmation.

  • Ne sois pas si timide !
  • Est-ce que... vous allez tout m’expliquer ?
  • Non. De une, parce que je n’ai pas tout compris moi-même - Il lâcha un petit rire, satisfait de son trait d’humour - et de deux, parce que je pense que tu es trop jeune pour tout comprendre, et pour tout retenir.
  • Et surtout parce que tu ne sais pas encore très bien tenir les secrets, dit Lionel. Tu ne devras jamais dire que l’on s’est vu ici ! Sinon...
  • Puisque vous êtes si malins, alors à votre avis, pourquoi est-ce que je suis ici ? Parce que je n’ai jamais dit à ma mère que je devais vous rencontrer ici le jour de mon anniversaire !

Un court silence s’ensuivit. J’eus peur de m’être montré trop impoli, mais je fus rassuré quand Lionel éclata de rire :

  • Ah ! Tu m’as posé une colle ! Je t’aime bien, gamin, je t’aime bien.
  • Bon, je vais d’abord devoir te poser quelques questions, dit Claude. Pour que je puisse mieux t’expliquer plus tard.
  • Un instant, l’interrompis-je. Quand allez-vous tout m’expliquer ?

Lionel et Claude échangèrent un regard, puis Claude déclara :

  • À toi de me dire quand tu te sentiras plus mature, assez mature pour te révéler un des secrets les plus importants qu’il soit.
  • Donc pas maintenant, dis-je.
  • Exactement ! Tu n’es pas encore digne d’entrer dans la communauté.
  • Ça fait un peu secte là, observa Lionel. Et puis, pour entrer dans la communauté, comme tu l’appelles, il faut faire un test, tout un truc. Je me souviens avoir passé deux ans avant d’être un simple membre. Deux années au cours desquelles j’ai longtemps attendu ce moment. Et lui, il entre comme ça, sans aucun test, simplement parce qu’il a un don.
  • Tu sais aussi bien que moi que ce don, il n’apparaît pas à 9 ans, mais plutôt à 18. Qu’il l’ait développé maintenant est exceptionnel.
  • Excusez-moi, mais j’ai 10 ans, maintenant.
  • C’est vrai que ton âge compte deux chiffres, ironisa Claude. Bon, fini les tergiversations, passons aux questions. Est-ce que tu sais quelque chose au sujet de ta naissance ?
  • Bah... je suis né le 27 février 1971, dis-je, hésitant.
  • En même temps, pourquoi tu lui poses des questions pareilles ? soupira Lionel, tandis que Claude s’enfonçait deux doigts dans les yeux. Il n’a que 10 ans, je te rappelle.
  • Bon, est-ce que tu es né dans un hôpital, ou autre part ?
  • Je ne sais pas, dis-je. Je demanderai à ma mère.
  • Ça ne nous aide pas, murmura Claude.
  • D’autres questions ?
  • As-tu des relations spéciales avec la nature ? demanda Lionel.

Devant mon air intrigué, ce fut au tour de Claude de soupirer :

  • C’est au tour de qui de poser des questions compliquées ? Bon Edward - c’est ça ? - est-ce que tu sors souvent dans la forêt ? Est-ce que tu fais souvent des promenades ?
  • Quand j’étais petit, je ne sais pas, mais depuis quelques années, c’est sûr. Plusieurs raisons pour ça : j’habite au beau milieu d’une forêt, ça serait dommage de ne pas en profiter.
  • Logique, dit Claude.
  • Sinon, je suis hyperactif.
  • Ah bon ? Un point pour lui, murmura Claude à Lionel.

Celui-ci haussa les épaules, tandis que je continuais :

  • Du coup, j’allais plusieurs fois dans la forêt pour apprendre à contrôler mon hyper-activité, je jouais à cache-cache, et c’est pour ça que...
  • Que tu es tombé dans l’Arbre, on sait, acheva Claude.
  • Pourquoi dis-tu : j’allais ? demanda Lionel.
  • Parce que maintenant, comme j’ai fait trop peur à ma mère, je n’ai plus le droit de le faire.
  • Comment as-tu réussi à arriver ici ?
  • J’ai dit que j’avais besoin de prendre l’air parce que j’avais mal dormi, ce qui est faux.
  • Bien, bien, dit Claude, en entendant les cris de ma mère. Je crois que notre entrevue se termine là. Nous nous reverrons donc l’année prochaine.
  • D’ici là, essaie de trouver des réponses à nos questions, sans trop te faire remarquer.
  • Au revoir, alors, dis-je en tendant ma main.

Les deux hommes se regardèrent d’un air surpris, puis me serrèrent la main à tour de rôle. Je les regardai ensuite d’un air ébahi entrer dans l’Arbre, avant de rebrousser chemin et de retourner tranquillement à la maison. Ma mère me gronda :

  • Qu’est que tu faisais ? Tu t’es absenté une demi-heure !
  • Bah... Je t’avais dit que je partais faire un tour.
  • Je ne pensais pas que ce tour allait durer aussi longtemps ! Je pensais que tu allais jouer un peu dans le jardin...
  • Nous n’avons pas de jardin, fis-je remarquer.
  • Tu aurais dû faire le tour de la maison !

Ma mère s’arrêta, soupçonneuse, puis demanda :

  • Tu n’es pas retourné près de l’arbre, j’espère ?
  • Tu m’avais fait promettre de ne plus jamais en parler, observai-je. Donc je ne peux pas répondre à ta question. Et de toute façon, je n’y suis pas allé, continuai-je, lui mentant ouvertement. Je suis allé faire le tour normal de l’après-midi.

Je commençai vraiment à prendre goût aux mensonges.

  • C’est bizarre, mais je ne te fais pas vraiment confiance.
  • Crois ce que tu veux, moi, je te dis la vérité.
  • Allez, rentre. Tu as des devoirs, je te rappelle.

Je m’exécutai, mais, juste avant d’entrer, je demandai :

  • Où est-ce que je suis né ?
  • Pourquoi cette question ? Qu’est-ce qui te prend, d’un coup ?
  • En fait, c’était sur une évaluation, on devait noter notre lieu de naissance, et comme je ne le savais pas, j’étais bien embêté.
  • C’est compliqué.., fit ma mère, gênée. En fait, tu es né en pleine forêt. Nous faisions une promenade avec ton père, quand tu as voulu sortir de mon ventre. Heureusement, nous n’étions pas très loin d’une maison, et les habitants ont appelé immédiatement l’hôpital. Le temps qu’ils arrivent, ils n’ont pas pu me transporter dans un endroit sûr. J’ai donc dû accoucher en forêt.
  • Mais donc, je suis bien né à un endroit précis ?
  • Le plus proche lieu était un village. Tu es donc né à Edale. Tu sais comment l’écrire ?
  • Je pense, oui. Ça s’écrit E, D, A, L, E ?
  • Exactement. Tu sauras pour plus tard.
  • D’accord. Merci Maman !

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