Premières feuilles
Poussée par ma racine qui prenait de plus en plus d’ampleur, ma coque protectrice commençait à affleurer à la surface. La chaleur du soleil parvenait à l’intérieur. Il ne m’en fallait pas plus pour rassembler mes forces une seconde fois. Crac ! Ma première pousse brisa l’autre côté de ma coque, à l’opposé de ma racine. Encore un effort et ma première feuille se déplia au grand jour.
Ce fut comme si j’ouvrais les yeux après un long sommeil. Quand ma feuille se déploya, je fus assailli par une telle quantité de lumière et de chaleur que j’en fus un instant tout étourdi. Mes cellules photosensibles s’activèrent et je pris ma première inspiration.
Je compris alors que lorsque j’étais graine, je n’avais fait qu’exister. J’étais là, fragile et perdu, séparé du monde par ma coque protectrice. Avec ma racine et ma feuille, je commençais à vivre. Je respirais l’oxygène contenu dans l’air autour de moi. Je me nourrissais des nutriments du sol. J’étais fait pour ça. J’étais prêt à conquérir le monde.
Respirer multiplia mon énergie par dix. Je recevais enfin oxygène et ultraviolets. Ma feuille mit un peu de temps à s’adapter à la lumière, comme si mes yeux étaient encore tout collés par le sommeil. Puis, petit à petit, je parvins à discerner les formes autour de moi. L’animal qui m’avait déplacé en tant que graine m’avait oublié pendant l’hiver dans mon trou. Cela avait été ma chance. Je venais de surgir au milieu d’un sous-bois humide, au centre d’un un trou de lumière formé par les feuilles des arbres au dessus de moi.
Les arbres. Ils étaient gigantesques pour la petite pousse que je représentais alors. Leurs troncs puissants aux racines noueuses s’étendaient vers le ciel, leurs feuillages se déployaient sur des mètres et des mètres de circonférence. J’eus du mal à imaginer qu’un jour je me tiendrais parmi eux, moi aussi, grand et fier. Ma petite feuille me parut soudain bien médiocre face à ces géants. Mon objectif suivant fut d’en produire rapidement de nouvelles.
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