Végétarienne à en devenir
Cher Journal,
Aujourd'hui est placé sous le signe de l'échec. Après avoir renoncé fermement, combattu avec force, résisté sans pareil, j'ai craqué. Après avoir tenu deux semaines sans manger un gramme de viande, je viens de m'enfiler un kebab.
J'ai perdu le contrôle, alors que je maitrisais parfaitement la situation. Hier je suis sortie faire deux-trois courses, pour entre autre refaire ma réserve de fromage, juste histoire de vivre ma période de transition sereinement. Donc mes sacs pleins et délestée de l'équivalent d'un rein, deux poumons et trois pancréas, je prends la direction de mon studio. Tout était absolument maitrisé ! Il a fallu d'un détail, un micro-détail. En passant devant le tabac, je tombe sur le kebabier qui me salue dans un grand sourire.
Rencontre insignifiante, hein ? Si seulement...
Le reste de la journée se passa sans encombre, le soir j'ai avalé un bol de gouda accompagné d'un peu de soupe. Une soirée tout ce qu'il y a de plus normale. Rien ne pouvait présager une telle défaite.
Je ne me suis pas méfiée, mais j'aurais dû. Ces choses-là t'attaquent au moment où tu t'y attends le moins...
Alors que je dormais tranquillement, Monsieur le kebabier est venu visiter mes rêves ! Sa barbe de trois jours, son ventre bedonnant, son tablier arrosé de graisse, la goutte de sueur du travailleur sur le front. J'étais dans son échoppe, devant son étal de crudités, les yeux rivés sur sa broche fraichement mise devant le grill. Il a attrapé son petit carnet et m'a demandé : « Salade, tomate, oignons ? ».
Je n’ai jamais bien saisi ce qu'était le foodporn, mais je pense que quand on a l'impression d'être demandé en mariage alors qu'on commande un Kebab, on s'en rapproche.
Du coup est arrivé ce qu'il devait arriver : j'y ai pensé toute la matinée et à midi je suis allée chercher ce maudit sandwich...
Je crois que le pire de tout dans l'histoire, c'est que j'ai du mal à le digérer, je vais être barbouillée toute l'après-midi.
Damn it !
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