VI.

3 minutes de lecture


    Trois jours d’angoisse passèrent. Je n’étais que peu sorti, seulement pour satisfaire mes obligations vis-à-vis de l’Ordre. J’étais allongé sur ma petite couche inconfortable, accaparé par des idées noires. Cette fois là, les picotements se firent sentir sans que je m’y attende. Je me retrouvai dans l’immense salle que je commençais à bien connaître, malgré son absence d’existence réelle. Pourtant, il y avait quelque chose de différent.

    Tous les autres membres du Conseil étaient déjà présents. Ils étaient alignés devant moi, en une ligne parfaitement figée, les visages graves et fermés. Adam était parmi eux.

    La scène à laquelle j’avais assisté à Sorman Union avait créé une vague de panique en Terre Noire. Nous ne comptions plus le nombre de désertions. Les membres de l’Ordre préféraient, dorénavant, affronter les dangers de l’extérieur plutôt que de rester à Terre Noire.

    Il se disait qu’on viendrait nous chercher jusqu’au fond des catacombes pour nous punir de nos mensonges. Nous étions les ennemis des peuples élus. Nous étions ceux qui avaient manipulé l’Ancien Monde pour organiser et provoquer La Levée du Voile, responsables des millions de morts et d’un bouleversement allant à l’encontre des plans de la Nature elle-même. Mais nous étions également ceux qui avaient manœuvré dans le Nouveau Monde.

    Je ne me faisais pas d’illusion. J’avais été appelé ici dans le seul but de connaître le châtiment qui nous serait réservé.

    Un murmure avait accompagné mon apparition. Louise leva la main pour faire taire les conseillers. Elle présidait cette séance.

    La Rêveuse se leva, et fit un pas en avant. C’était une femme particulièrement grande, déjà âgée, dont les yeux gris semblaient toujours se perdre dans le vague. Ses longs cheveux argentés et son calme permanent lui conféraient une aura de sage. Même au sein du Conseil, elle avait cette réputation. Elle me regarda de ses yeux étranges. Pour la première fois, elle semblait être complètement avec nous, focalisée sur l’instant présent.

    « — Gi, tu as été appelé pour être destitué de ton siège au Conseil des Douze Peuples suite à l’usurpation dont toi et les Descendants d’Eren vous êtes rendus coupables. L’apparition des Druides et les aveux de certains membres de ton Ordre ne font aucun doute sur le mensonge dont nous avons tous été victimes. La marque de l’Ouroboros qui enserre votre poignet n’a jamais été la marque des élus.

    Je baissai les yeux sur mon bras. Le tatouage avait perdu son éclat et n’était plus qu’un dessin noirci par une encre déjà vieille. Depuis ma mission, plus personne n’avait jugé utile de continuer les injections d’énergie. L’espoir de réussir à poursuivre nos plans n’avait, tout simplement, pas effleuré nos esprits. La vérité avait éclaté sans qu’on ne puisse lutter.

    « Les conséquences seront dramatiques. Vous avez été jugés et condamnés.

    J’ouvris la bouche pour répondre, mais Louise me fit signe de me taire.

    « Tu n’es pas autorisé à parler en ces lieux. Tu as proféré assez de mensonges ici, violant ce sanctuaire et ses louables desseins.

    J’observai les autres conseillers, les uns après les autres. Lounès semblait inquiet, Tania et Adam également. Les yeux de Nanaki, eux, seules choses un tant soit peu déchiffrable sur ce visage animal, paraissaient exprimer une profonde pitié. Les autres dégageaient une haine profonde. Je repensai un instant aux désirs de Sergeï et de Peter quant aux milices humaines et aux projets qu’ils cachaient à tous. Le Vampire me fixait, son œil valide plein de colère. Louise continua.

    « Tu as également été appelé car, bien que n’étant plus membre du Conseil, tu es à ses yeux le représentant des Descendants d’Eren. Il t’appartient donc d’entendre la sentence et de la rapporter aux tiens.

    Je fis signe que je comprenais. L’angoisse me prenait aux tripes.     Les Oracles n’avaient rien vu de ce Conseil. Ils n’avaient rien vu de la sentence.

    « Vous êtes officiellement indésirables dans ce monde. La loi des Hommes ne s’appliquera pas à ceux qui pourraient vous nuire. Le vote est sans appel. Si une personne, ou un groupe, s’attaque à vous, personne ne pourra vous venir en aide. Il en va de même pour vos milices humaines. Les non-marqués sont déchus de leur humanité.

    Louise avait parlé d’une voix mécanique, froide et dure. Elle souffla un instant. Elle semblait aussi horrifiée que moi. Elle reprit d’une voix plus douce, penchant légèrement la tête sur le côté.

    « Quels que soient les projets qui vous animent, je ne saurais que vous conseiller de les oublier. Faites-vous discrets. Dissolvez votre Ordre et séparez-vous. Quittez Terre Noire et ne faites plus jamais parler de vous. Certains viendront et, s’ils vous trouvent, se vengeront.

    Sergeï m’adressa un sourire cruel. Oui, ils viendraient. Ils étaient sûrement déjà en chemin.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Samuel Morgzac ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0