Numéros 3
Marie reprit conscience lentement. Elle était allongée sur le dos, les bras tendus le long du corps. Ses idées étaient embrouillées et elle ressentait comme un goût amer dans la bouche.
Elle leva le bras droit et se frotta vigoureusement les yeux. En ouvrant ses paupières, elle fut éblouie par la lumière vive qui émanait du plafond et mit plusieurs secondes à s’y habituer.
Elle se redressa avec peine et resta quelques secondes à quatre pattes.
Petit à petit, elle prenait conscience de son environnement immédiat et la peur la submergea.
« Où était-elle ? » « Comment était-elle arrivée là ? »
Elle portait une combinaison blanche moulante parfaitement adaptée à sa morphologie. Le numéro « 3 » était inscrit au niveau de sa poitrine. Sa tenue couvrait tout son corps, du cou aux chevilles et aux poignets. Elle n’avait ni poche, ni couture et semblait avoir été moulée directement sur son corps.
Tremblante, elle finit de se relever et examina soigneusement la pièce où elle se trouvait : elle était vide et mesurait environ quatre mètres sur quatre. Le plafond se trouvait très haut, il était tapissé de dalles d’où émanait cette lumière blafarde. Le sol et les murs étaient d’un blanc immaculé. Elle s’accroupit et tapota avec ses phalanges un peu au hasard sur la surface ; dur et froid.
Face à elle, dans le mur, il y avait une porte sans poignée. En son centre, elle distingua une sorte de gros bouton rouge. À bonne distance, elle examina cet accès par lequel on avait dû la déposer.
Elle se redressa et avança lentement jusqu’à cette porte et l’examina. Sa surface semblait en acier, elle s’encastrait parfaitement bien dans le reste du mur. Seuls les gonds permettaient d’affirmer que cette partie de la cloison était bien mobile.
Sur ses gardes, Marie posa sa main sur le bouton rouge qui aussitôt s’enfonça et déverrouilla la porte.
La jeune femme fit un bond en arrière, attendant inquiète la suite des évènements, mais rien ne se passa. La porte s’ouvrit sur un couloir sombre puis, après quelques secondes, se referma d’elle-même.
Marie, toujours sur ses gardes, s’approcha à nouveau de la porte. Elle reposa sa main sur le bouton et l’accès se rouvrit.
Elle observa avec crainte le couloir qui se perdait dans l’obscurité, elle en eut la chair de poule. Cette porte ne semblait pas s’ouvrir sur sa liberté.
« Où menait ce couloir ? » « Était-elle censée le suivre ? »
Alors qu’elle se demandait comment elle avait bien pu atterrir ici, les larmes lui montèrent aux yeux et elle pleura en silence.
Elle finit par se ressaisir et d’une voix chevrettant, elle leva la tête et demanda de l’aide à qui pourrait bien l’entendre :
- Y’a quelqu’un ? Aidez-moi !
Personne ne répondit à son appel. Sa peur laissa peu à peu place à de la colère et elle hurla :
- Au secours ! Je suis prisonnière !
Elle fit le tour de la pièce et revint vers la porte. Elle la rouvrit et l’empêcha de se refermer, puis elle se pencha dans le couloir qui lui faisait face et elle cria à plein poumon.
- Je suis avocate ! Tout cela risque de vous coûter très cher ! Ne soyez pas bête, pour l’instant… Cette mauvaise blague sera vite oubliée si je peux sortir de cette pièce tout de suite !
Mais là non plus, elle ne reçut aucune réponse. Elle finit par franchir le seuil du couloir et tenant toujours la porte afin qu’elle reste ouverte, elle renouvela sa mise en garde. Puis, elle laissa s’exprimer sa colère et sa frustration en termes très grossiers.
L’écho de ses cris se perdit dans l’obscurité du couloir et resta sans réponse.
Elle finit par revenir dans la pièce. Alors que la porte se refermait, elle finit par fondre en larme et se laissa glisser contre la paroi du mur jusqu’à atteindre sur le sol. Elle pleura longuement en tentant de regrouper le peu de souvenirs qui lui restaient d’avant son réveil.
Elle se souvenait de son nom : marie Bilan. Elle était Française et vivait à Paris. Elle venait de fêter ses 25 ans et travaillait dans le centre d’affaire de la Défense. Elle occupait un poste d’avocate dans une grande multinationale et était appréciée de son directeur et de ses collaborateurs.
Elle était blonde, célibataire et sans enfants. Ses parents, retraités, vivaient en Bretagne. Elle avait peu d’ami et vivait seule dans un vaste appartement avec ses deux chattes.
Elle ne buvait pas, ne fumait pas, ne se droguait pas et avait plusieurs cartes de salle de sport. Elle jouait aux échecs et lisait beaucoup. Elle entretenait aussi bien son corps que sa tête.
Elle se considérait comme plutôt jolie et attirait facilement les regards. Hétérosexuelle, elle appréciait les hommes d’un certain standing et les voyages. Elle estimait avoir encore le temps avant de rechercher un amour stable et d’avoir des enfants.
Pendant plusieurs minutes, elle fit le tour de sa vie en tentant de regrouper le plus d’information possible. Peut-être, finirait-elle par se rappeler un détail qui expliquerait sa situation actuelle…
Mais malgré sa bonne volonté, elle ne pouvait justifier cet emprisonnement. Car pour elle, cela ne faisait aucun doute : elle avait été enlevée !
Alors qu’elle essuyait à nouveau ses larmes, elle fut parcourue par un frisson. Ses pieds étaient gelés. Elle les frotta vigoureusement et fit quelques pompes afin de bien faire circuler le sang.
Elle étira ses bras et après quelques mouvements d’assouplissement, elle revint vers la porte et l’ouvrit. Elle renouvela ses appels et frappa du plat de sa main la paroi lisse du couloir.
« Jamais, je n’enterai là-dedans… Plutôt crever ! »
Entrer dans ce couloir signifierait qu’elle acceptait la situation et obéissait à ce qu’on attendait d’elle.
Que pouvait bien signifier ce numéro ‘3’ sur sa combinaison ? Elle était la troisième prisonnière d’un maniaque ou d’une organisation secrète ? Où étaient passées les deux autres avant elle ?
Dépitée, elle retourna s’assoir contre son mur et, la tête bien blottie dans ses genoux, attendit résignée la suite des évènements en fixant la porte qui se refermait.
Le temps passa, long et monotone… ‘La suite’ qu’elle quelle fut, ne semblait pas pressée de se manifester.
Marie, retourna vers la porte et renouvela ses appels à l’aide, seul l’écho de ses cris lui répondit.
Elle se sentait perdue, oubliée dans cette pièce sans issue, ou du moins, à l’issu incertaine, pas vraiment rassurante. Afin de se changer les idées, elle fit quelques pompes, quelques étirements et plusieurs minutes de mouvement d’assouplissement.
Alors qu’elle retournait s’assoir contre son mur, elle réalisa qu’elle commençait à avoir faim et surtout… soif ! La situation allait rapidement se compliquer.
En fixant la porte, elle comprit qu’elle n’avait, en vérité, pas d’autres options pour quitter cette pièce et petit à petit, cette certitude s’imposa à elle.
Prenant son courage à deux mains, elle ouvrit de nouveau la porte et s’engagea dans le couloir. En franchissant le seuil, elle adressa une prière muette à Dieu. Le passage était si étroit qu’elle ne pouvait qu’avancer en biais.
La lumière de sa prison éclairait encore faiblement le couloir, mais elle s’estompait peu à peu, elle se pressa. Elle n’avait qu’une peur, que la porte se referme et qu’elle se retrouve piégée dans l’obscurité.
Et comme elle s’en doutait, la porte se referma, plongeant Marie dans le noir complet.
La jeune femme réussit à garder son calme et continua à avancer. Puis, devant elle, au loin, elle distingua une lumière rouge. Elle accéléra.
En parvenant devant la lumière, elle appuya sur le bouton qui déverrouilla la porte
D’un geste sec, elle poussa la porte afin qu’elle s’ouvre plus rapidement et pénétra dans une nouvelle salle.
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