CHAPITRE 1.2 * JAMES

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J.L.C

♪♫ ASCEND (MY MIND EDIT) — DEZKO ♪♫


Vêtue d’une robe bleue, presque noire, foutrement moulante, qui dévoile tout de ses courbes généreuses, ses cuisses élancées, son ventre souple et ferme à la fois, ses seins parfaitement arrondis, ses épaules dégagées, ses clavicules délicates. Putain, je rêve ! Ses cheveux détachés ondulent au rythme de ses mouvements, descendant jusqu’au milieu de son dos. La robe, échancrée, laisse entrevoir un bijou délicat niché au creux de sa colonne vertébrale, juste au-dessus d’un tatouage représentant une nuée d’oiseaux.


Elle danse avec un verre dans la main droite, la main gauche posée sur l’épaule d’un homme que je ne vois que de dos. Elle sourit. Non, elle rit. Elle rejette ses cheveux en arrière d’un mouvement fluide, comme elle le fait souvent. Elle penche la tête, gorge déployée et rit encore. Le mec se colle plus à elle, sa cuisse entre ses jambes, sa tête dans le creux de son cou. Je ne sais pas s’il l’embrasse, la lèche ou la dévore, mais ça me rend fou. Elle est là, dans les bras d’un autre, et... elle a l’air heureuse. Et merde... Victoria.


C’est vraiment elle. Je me doutais bien que j’allais finir par la croiser. J’ai même minutieusement évité tous les lieux qu’elle pourrait fréquenter depuis mon arrivée à Toulouse. Je prends une profonde inspiration pour calmer mon agitation. Ça fait très exactement 61 jours que je l’ai laissée, ce matin-là, sur le palier de sa porte, encore à moitié endormie, emmitouflée dans son petit peignoir blanc. Son corps voluptueux blotti contre le mien, ses lèvres douces posées au creux de mon cou, son souffle chaud caressant mon visage. Ce matin-là, elle m’avait embrassé tendrement en glissant ses mains dans mes cheveux, chatouillant de sa langue ma bouche déjà crispée de regrets. Parce que je ne voulais pas partir, je ne voulais pas la quitter. On avait fait l’amour toute la nuit, avec passion, en y mettant toutes nos émotions. Une putain de nuit de baise torride et sauvage. Une putain de nuit d’amour tendre et nostalgique que je suis loin d’avoir oublié, que je n’oublierai jamais, même. Et maintenant, des semaines plus tard, elle est à nouveau là, devant moi.


Le gars, un grand métis au sourire flamboyant, s'écarte d'elle. Il la retourne et la plaque sur la rambarde. Il se place derrière, une main enroulée autour de sa taille. Elle pose sa tête contre son torse et ses hanches bougent en rythme avec les siennes. J’ai l’impression de tomber en arrière, bien que je sois fermement assis dans mon fauteuil. Mes mains se crispent sur les accoudoirs alors qu'une rage soudaine m'envahit. Merde, on dirait qu’ils baisent, putain ! Les lèvres de Victoria sont entrouvertes comme quand elle jouit ! Ses paupières sont à demi-closes, elle lève son bras libre et pose sa main sur la joue du mec. C'est trop ! Je peux pas voir ça ! 


Je jette des coups d’œil alentour. Mais c’est trop tard. Impossible de rester concentré sur quoique ce soit sinon Victoria. Je la fixe à nouveau, totalement hypnotisé par sa silhouette de rêve, son déhanché sulfureux, ses traits rayonnants. Je secoue la tête et passe une main sur mon visage, essayant de me détacher de cette image, mais elle persiste. Elle semble si libre, si joyeuse, c’est une foutue reine, merde ! Sa vision me donne la gaule. Je porte distraitement la main à ma queue, la réajuste dans mon pantalon soudain trop serré et je me redresse pour tenter de reprendre contenance.


Je réalise subitement que ma sœur et Antoine sont à nouveau près de moi. Isla me dévisage dubitative et, instinctivement, je détourne mon regard de Victoria. Mais pas assez vite. Elle tourne sa tête dans la même direction que la mienne et se fige. Puis, elle me fait face à nouveau et sourit en haussant les épaules.


Bordel de merde ! Elle savait. Je lui décoche un regard noir et insistant.


On n’était jamais venus ici auparavant. On a l’habitude d’aller au Paladium, pas loin du Capitole. “Il paraît que c’est super. Des amis m’en ont parlé. Le proprio est le fils d’un gars qui a fait fortune dans les énergies renouvelables, je crois. On m’en a dit que du bien.”, avait-elle expliqué pour justifier notre venue ce soir. Je me demande comment elle était au courant que Victoria serait là elle-aussi, mais, connaissant ma sœur jumelle, il n’y a aucun doute là-dessus : elle a tout planifié.


Bon sang... c'est un putain de coup monté ! Je me suis fait prendre comme un con. Mon regard devient sombre, mon cœur martèle dans ma poitrine. Je lui balance les mots chargés de tensio


— “Tu savais ?


— “Savait quoi ?” me répond-elle.


Putain ! Elle feint l’ignorance ! Je la fusille du regard. J’ai la voix tendue, mais je me maîtrise :


— “Victoria”.


Je fulmine. Elle n’a aucune idée à quel point ça fait mal de prononcer son prénom.


— “C’est son anniversaire apparament”, me lance-t-elle, d’un ton presque désinvolte.


Elle ne me dit pas “Tu le saurais, si t’avais pas merdé, grand frère !”. Fait chier !


Puis, elle pivote Antoine et ils reprennent leur conversation comme si de rien n’était. Mais avant, je remarque furtivement un regard désolé de la part de mon futur beau-frère, comme s'il voulait dire : "Je n’y suis pour rien, mec."


Je focalise mon attention sur les gens autour de moi. On est venu avec un autre couple. Cléa, une copine de boulot de ma sœur, avec qui j'ai baisé, une fois, ou peut-être plusieurs. Mais c’était avant qu'elle soit avec son nouveau mec, Maxence, qui travaille dans l'aéronautique. Ils sont en train de se rouler des pelles avec une gourmandise presque grotesque pendant qu’Isla sert un whisky à Antoine qui lui caresse tendrement les cheveux. Putain, fait chier ! Me voilà à jouer la troisième roue, tandis que la fille la plus irrésistible que j’ai jamais rencontrée, celle qui me rend dingue depuis des mois, est en train de s’envoyer en l’air dans un foutu club, au beau milieu de tous ces foutus gens ! Façon de parler.


Je n’ose même plus regarder à nouveau vers la loge VIP. Je m’affaisse dans mon fauteuil, en attrapant furieusement mon verre, envahi par une vague d’amertume. Même le whisky qui coule à présent dans ma gorge ne suffit pas à chasser le nœud qui s’y est formé. C’est mon quatrième, non, mon cinquième verre ? Je sens que je vais devoir m’en servir quelques autres, voire, m’envoyer une bouteille à moi tout seul, pour digérer ce que je viens de voir.


Néanmoins, mû par une curiosité mordante contre laquelle je ne peux lutter, je scrute les parages, hésitant à lever le regard complètement. Je dois la revoir. Sa silhouette est gravée dans mon esprit, sa manière de bouger, ce sourire éclatant, cette connexion palpable avec le gars qui est avec elle. Tout cela me torture, m'attire et me brise en même temps. Ma main tremble légèrement en portant le verre à mes lèvres, l’alcool brûle, comme toujours et je grimace. Je sais d’avance que ça n'apaisera pas le tourbillon de sentiments qui m’inonde en ce moment.


Il faut que je sorte d’ici, que j’aille prendre l’air. Putain, j’ai rien pour me défoncer, rien pour l’oublier. Jamais je pourrais l’oublier. Mais Victoria n’est pas pour moi. Je lui ai brisé le cœur, j’en mets ma main à couper. Elle ne voudra plus jamais me revoir. Merde, c’est moi qui suis baisé là, littéralement ! Je me dis que c’est le moment idéal pour aller fumer une clope, mais quelque chose attire encore mon attention dans la loge. Un type, grand brun, cheveux rasés de près, avec un piercing à l’arcade, arrive derrière le gars qui est collé à Victoria. L’autre lui empoigne les cheveux, tire sa tête en arrière et mord violemment son cou. En tout cas, c’est ce qu’il me semble. Putain, c’est quoi ce bordel ?


Le gars lève soudainement la main qui encercle la taille de Vi, repousse l’autre et se jette sur lui. Je me prépare à assister à une baston en direct, les poings serrés et le cœur battant la chamade. Merde, Victoria pourrait être en danger ! Malgré moi, je sens mon corps qui se tend, prêt à fendre la foule qui nous sépare, gravir ces putains d’escaliers en courant et faire de mon corps un rempart contre ce qui risque d’arriver. Mais je suis pris de court par la suite des événements. Victoria chancelle un peu lorsqu’elle perd appui, mais se rattrape à la rambarde. Elle se retourne, l’air étonné, mais finit par éclater de rire en levant son verre à moitié plein, qui se renverse sur elle. Elle est carrément bourrée. Ce qui me surprend, c’est la scène inattendue qui se déroule derrière elle.


Loin de la bagarre que j’avais envisagée initialement, les deux gars ne sont absolument pas en train de se foutre des droites en pleine poire. Non, ils s’embrassent à s’en décrocher la mâchoire ! Le brun au piercing se tourne alors vers Victoria et vient la prendre dans ses bras. Elle saute de joie, comme une gamine excitée, et envoie un baiser de la main au gars qui, quelques secondes auparavant, était en train de frotter sa queue sur ses fesses, du moins c’est ce que je croyais.


Mais quel cerveau de merde ! Toujours à interpréter sans discerner. Il faut que j’arrête de penser avec ma bite, nom de nom ! Je me rends compte à quel point je suis stupide de croire que tout est une histoire de sexe et de passion brute. Peut-être que c’est juste un moment entre amis, peut-être qu’il y a une raison à tout ça. Mais la vue de Victoria, si détendue et joyeuse, dans ce décor de fête où je me sens ce soir complètement décalé, m’ébranle plus que je ne veux l’admettre.


J’ai besoin d’elle. Je le sais depuis que je l’ai rencontrée des mois en arrière. Comment peut-on tomber raide dingue amoureux de quelqu’un en une putain de semaine ? C’est hallucinant.


Voilà en quoi se résume notre histoire aujourd’hui : deux rendez-vous manqués, une semaine de folie pure, un goût d’inachevé, 61 foutus jours de manque insupportable, et 28 jours de torture mentale parce que j’ai déconné, sans lui donner d’explications, parce qu’aucunes ne pourraient réparer ce que j’ai fait. Putain de merde d’enfoiré de mes deux !


Je me passe une main dans les cheveux, je me racle la gorge brusquement sèche et je ravale ma salive avec peine. Je prends une grande inspiration et bombe le torse. Il faut que je me ressaisisse. Mais déjà en moi, des souvenirs que je connais par cœur refont surface. Des vestiges du passé, des fragments d’elle, de nous qui me hantent encore et encore.


Soudain, ma sœur se penche vers moi :


— “James, va lui parler”, me glisse-t-elle.


Mais putain de quoi elle se mêle ! Et c'est quoi ce regard ? De l'encouragement ? Elle compatit  Hors de question que j'aille voir Victoria ! Je ne pourrais plus jamais la regarder en face ! 


Allez, c'est bon, je vais aller me la griller cette foutue clope. Je me lève en direction de la sortie fumeur, mais je ne peux m’empêcher de jeter un dernier coup d'œil fortuit vers l’étage. La fille en robe vert pomme, celle que j’ai vue danser près du DJ tout à l’heure, est maintenant à côté de Victoria, accompagnée d’une autre fille en robe rose. Elles l’entraînent doucement vers les escaliers. Je m’arrête au beau milieu de la piste. Victoria semble réticente, elle les repousse gentiment en secouant la tête de gauche à droite. Elle se laisse finalement emporter par leur enthousiasme, riant à gorge déployée. Les trois femmes descendent ensemble les marches, disparaissent momentanément dans la foule, puis ressurgissent près de l’estrade où des types les aident à monter près du DJ. La musique s’élève soudain, les premières notes d’un remix de I Will Survive résonnent dans la salle.


La chanson emblématique remplit l’espace avec ses vibrations puissantes et entraînantes. Victoria et ses amies prennent le devant de la scène, leurs mouvements synchronisés avec les rythmes effervescents de la chanson. Leurs rires et leur énergie communicative transforment l’instant en une célébration vibrante. Victoria chante à tue-tête, elle connait les paroles par cœur. C’est une satanée chanson qui proclame la survie après une rupture. Les mots me déchirent l’esprit. Le texte parle de se relever après la douleur, de retrouver sa force intérieure malgré les épreuves, de recoller un cœur brisé. Je suis le témoin direct de la résilience de Victoria et je réalise qu’elle est en train, ou a déjà, tourner la page. Cette prise de conscience me laisse un goût amer dans la bouche.


Autour de l’estrade, et partout ailleurs aussi, les gens sont fascinés par ces trois femmes en train de danser corps et âme et de s’amuser avec une énergie contagieuse. Il y a la brune avec sa robe verte et sa longue queue de cheval. Elle incarne à la fois la madone distante et la diablesse provocante, dégage une aura de confiance inébranlable, inaccessible et légèrement hautaine. Il y a aussi une fille au teint doré et au corps athlétique, cheveux clairs, vêtue d'une robe fluide rose remontée sur ses cuisses, et qui lance des œillades discrètes, mais fréquentes vers le bar. Et puis, il y a Victoria, et je vois les regards des mecs rivés sur elle, leurs yeux traînant sur son corps avec une convoitise à peine dissimulée. Ça me rend fou. La jalousie gronde en moi comme un putain d’ouragan. Je ne supporte pas de voir ces bâtards affamés qui bavent sur elle. Je veux les éloigner, les faire fuir. Je veux les éclater ! Non... ce que je veux vraiment, c'est la revendiquer, la faire mienne à nouveau, monter sur cette saleté d’estrade et l’embrasser férocement, passionnément !


Je me force à respirer profondément, à garder mon calme. L'impulsion de traverser la foule pour leur faire regretter de poser les yeux sur elle est presque irrésistible. L’impulsion de traverser la foule et de balancer Victoria sur mon épaule me démange carrément. Au lieu de ça, je me concentre sur la scène, la manière dont Victoria se laisse porter par la musique. Elle est radieuse, et cette vision est à la fois douloureuse et magnifique. Je déglutis. Je suis affamé d’elle, assoiffé, les deux à la fois. Mais je ne suis qu’un enfoiré égoïste. J’ai laissé filer quelque chose de précieux, de rare, sans même comprendre ce que j’avais entre les mains. Chaque jour, je me reproche mes faiblesses et ce putain de texto de couille-molle que je lui ai envoyé à la figure, gratuitement. Et je me rappelle cruellement à quel point j’ai été lâche de recoucher avec Elaine, et avec toutes les autres qui ont suivi, dans un engrenage sans fin de débauche, de sexe, d’alcool et surtout de drogue. Alors que je n'en avais strictement rien à foutre de ces filles ! Elaine, les autres, des filles que je ne voulais même pas, des instants vides qui n’ont fait qu’amplifier mon désespoir. Ça fait deux ans que je laisse ma putain de bite régir ma chienne de vie, comme un trou du cul.


Victoria m’a donné en une semaine ce que j’ai attendu toute ma vie.


J’approche de la trentaine, j’ai des tas de merdes derrière moi, des fiançailles brisées par une garce qui m’a presque laissé devant l’autel avec le goût de la bite d’un autre sur la bouche ! Merde, au fond de moi, je le savais putain. Mais j’avais tracé un chemin et j’avais mis des œillères parce que, oui, je ne suis qu’un lâche trop fier pour faire face à la vérité, aussi évidente soit-elle.


La vérité, là tout de suite, aujourd’hui, c’est que je suis tombé amoureux de Victoria il y a des mois. En à peine quelques jours, elle a chamboulé ma vie, mes croyances, mes désirs, tout ! C’est brutal, c’est clair et sans retour en arrière. Maintenant, le regret me ronge, me rappelle sans cesse à quel point j’ai échoué. Je me déteste pour avoir laissé passer ma chance. Voilà ma putain de vérité, ma putain de connerie !


Et elle s’appelle Victoria Ruby Silva de Saint Clair.

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