CHAPITRE 13.1 * VICTORIA

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MONTAGNES RUSSES

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V.R.S.de.SC

♪♫ DISFRUTO —​​​​​​​ CARLA MORRISON ♪♫

A mon réveil, une douce sensation de flottement m’étreint. Je suis encore à moitié perdue dans les brumes du sommeil, enveloppée par la chaleur réconfortante de ma couette. Je cherche du bout des doigts mon téléphone dont l’alarme sonne durement à mes oreilles, interrompant ce cocon de langueur. La mélodie douce m’accompagne alors que j’émerge lentement de mes rêves. C’est la sonnerie du week-end et des vacances, ce qui veut dire qu’il est très exactement 9h30, ou peut être un peu plus : j’ai la mauvaise habitude de laisser mon téléphone sonnait une bonne demi-heure avant de m’obliger à me réveiller totalement.

On dit que snoozer nuit à notre santé, que ça perturbe complètement notre rythme biologique et laisse notre corps et notre cerveau dans la tourmente. Je m’en fiche. C’est une indulgence que je m’accorde volontiers, que j’affectionne même. D’autant plus aujourd’hui...

Je souris d’aise en réalisant que je peux m’accorder encore un peu de temps, savourer ce moment de paresse. Rien ne presse, je m'étire mollement en repoussant la couette sur mes pieds gelés et je respire une bonne goulée d’air frais. Je bâille et me recroqueville aussitôt, me nichant à nouveau sous la couette. Je sais que je vais devoir subir mes égarements de la veille, l’alcool ne s’évapore pas des veines après juste quelques heures de sommeil. Et j’ai trop peu dormi cette nuit. Bien trop peu...

Pendant que mes pensées s’entremêlent et se confondent dans cette douce torpeur matinale, la lumière qui filtre à travers les rideau m’informe que la journée ne sera pas pluvieuse. Tant mieux, j’ai beaucoup à faire aujourd’hui et un peu de soleil sera le bienvenu. Ses rayons taquinent allègrement mes paupières et cette fois-ci, je souris intérieurement. Mon corps est en train de se gorger de dopamine. C’est comme un doux rappel que le monde a bien continué à tourner pendant mon sommeil. D’ailleurs, je ne ferme jamais mes stores la nuit, cherchant ainsi à capter ce moment, cette connexion subtile avec la nature. Il y a quelque chose de réconfortant à être réveillée par la lumière naturelle, surtout celle du soleil, m’invitant à commencer la journée en douceur.

Je me tourne alors sur le côté, m’attendant à sentir la présence rassurante de James. C’est un besoin presque instinctif, comme si sa chaleur pouvait chasser les doutes et les peurs qui commencent, elles aussi, à faire jour dans mon esprit. Je me suis endormie dans ses bras, convaincue que son étreinte tiendrait ces ombres à distance... Mais mes doigts ne rencontrent que le vide. Quelque chose au fond de moi se crispe, une intuition troublante que tout n’est pas comme il devrait être. Mon sourire s’efface légèrement alors que j’ouvre les yeux. Mais rien. Le drap est froid sous ma main.

Une petite ride de confusion se forme sur mon front. Peut-être est-il déjà debout ? Je tends l’oreille, cherchant des bruits de pas, le son d’un robinet qui coule, une tasse qui se pose, un froissement, un crépitement, mais tout est étrangement silencieux. Mon cœur bat un peu plus vite et je me redresse, jetant un coup d’œil autour de la chambre. Ses affaires, que j’avais posées sur la chaise, ont disparu. Une vague de panique me traverse, rapide, mais profonde. Je me lève précipitamment, trop vite, car mes jambes flageolent lorsque je me mets debout. Peut-être est-il simplement assis silencieusement dans le salon, ou dans la cuisine, ou aux toilettes, ou qu’il profite de la fraicheur du matin sur le balcon, que sais-je ! Mais une étrange sensation de vide, insidieuse et sournoise, commence déjà à s’immiscer dans ma chair et mes os.

Rien. Tout est en ordre, comme d’habitude. Comme s’il n’avait jamais été là avec moi quelques heures plus tôt. Ma tête se perd dans la confusion. Est-ce que j’ai rêvé ? Non, c’est impossible. Tout était bien réel… C’est vrai que j’ai bu plus que de mesure, mais pas au point d’avoir imaginé tout ce qui s’est passé quand même ! La pièce autour de moi semble figée dans le temps, immobile, et cette absence est comme une gifle.

Je me fige, le cœur battant la chamade, essayant de comprendre. Il n’y a pas de doute possible. Il est parti. Une douleur sourde m’envahit, une froideur piquante qui remonte le long de mes veines, serrant mon cœur dans un étau glacé. Mon estomac se noue, se tord dans une contraction douloureuse. J’essaie de me raccrocher à l’idée qu’il a peut-être dû partir précipitamment, mais une petite voix dans ma tête murmure que ce n’est pas ça. Ce n’est jamais ça. Je ricane intérieurement, amère. Quand quelqu’un part le matin venu, sans un mot, c’est pour échapper au malaise qui suit une nuit passionnelle — ​​​​​​​ou pas —, fuir les questions ou les remords. Que lui ai-je dis déjà ? “Si on fait ça, ne fuis pas”. Et merde !

Une étrange sensation d’abandon commence à m’envahir, une douleur sourde, celle d’avoir été trahie encore une fois. Il est parti. Comme ça. Sans un mot, sans une explication. La tristesse et la déception s’entremêlent dans ma poitrine, mais elles ne restent pas longtemps seules. La colère les rejoint, brûlante et immédiate. Comment a-t-il pu faire ça ! Non. Ce n’est pas possible. Il va revenir, il a dû s’absenter pour une raison quelconque. Peut-être qu’il a laissé un message quelque part, sur mon téléphone. Je me précipite sur mon appareil, le cœur serré d’espoir, mais il n’y a rien de sa part. Pas d’appel manqué, pas de message, rien. Le vide. Le silence. Peut-être que c’était inévitable. Peut-être que c’était voué à l’échec dès le début. Peut-être que j’ai mis trop de sens derrière ce qui s’est passé, que je me suis bercée d’illusions. Cette pensée résonne dans mon esprit comme un gong douloureux, une vérité indéniable. C’est devant mes yeux, gravé dans mon cœur, ancré au fond de mes entrailles.

Je m’effondre sur le canapé, me sentant prise d’assaut par mes émotions débordantes. J’ai un arrière-goût de cendres dans la bouche et dans la solitude de mon appartement, je me demande combien de fois je devrais encore affronter cette douleur. Combien de fois, je devrais me reconstruire après des déceptions amoureuses. La réalité est là, cruelle et dénuée de sens, laissant derrière elle des questions sans réponse. Je reste prostrée là, à fixer un point invisible sur le mur en face de moi. Le temps semble s'étirer, mes pensées se diffusent, infusent, m’assaillent. L'absence de James devient une présence oppressante, remplissant chaque recoin de la pièce. Je tente de me relever, de faire quelque chose, mais mes jambes refusent de bouger.

Mon téléphone vibre soudain sur la table basse, me tirant de ma torpeur. Mon cœur s'emballe, l'espoir renaît, fragile. Je me précipite pour le saisir, les mains tremblantes, pleine d’appréhension, priant intérieurement pour que ce soit lui, pour que tout ça ne soit qu'un malentendu, une mauvaise interprétation de ma part. Mais quand je regarde l'écran, je vois qu'il s'agit d'un message de Leslie, que je ne prends même pas la peine de lire. Je laisse retomber le téléphone sur le canapé, sentant les larmes monter de nouveau. Il n'y a rien. Pas de réponse, pas de retour en arrière possible. Je suis seule, et cette solitude me pèse comme une condamnation.

Je ferme les yeux un instant, prenant une profonde inspiration. Il me faut du temps, du recul. Peut-être que ce n’était pas la fin que j’avais imaginé, peut-être que ce n’est même pas encore la fin. Mais pour l’instant, je dois faire face à cette réalité, aussi douloureuse soit-elle. Encore une fois, je vais devoir combler ce vide et essayer de comprendre ce qui s'est passé, même si cela signifie devoir affronter mes propres erreurs, mes propres illusions. Car au fond, je sais que c’est la seule façon de retrouver un semblant de paix, de me reconstruire, morceau par morceau, après cette nouvelle tempêt

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