CHAPITRE 19.3 * JAMES
J.L.C
♪♫ ... ♪♫
Lorsque je pénètre dans la cuisine, Isla est attablée à l’ilot central, absorbée dans son téléphone. Elle relève la tête dès qu’elle capte ma présence.
— Pas mal ! lance-t-elle, tout en me détaillant du regard. Alors, c’est le déjeuner où tout va se jouer ? J’espère que tu as un plan d’attaque.
Je m’appuie contre le comptoir, un sourire en coin.
— Tu ne crois pas si bien dire… J’ai besoin que toutes les chances soient de mon côté.
— Et tu comptes la reconquérir avec ta brillante personnalité ou l'assommer avec ton humour légendaire ? Parce que c’est pas gagné, sinon, la pauvre…
Je secoue la tête, amusé, tandis que je me rapproche de la machine à café pour me préparer un expresso.
— C’est l’ensemble, Izy, dis-je en haussant les épaules, amusé. Faut juste bien doser.
Le grincement familier du broyeur emplit la pièce alors que les grains sont réduits en une poudre parfumée.
— En tout cas, laisse-la parler cette fois, poursuit-elle avec malice. Évite de la dévorer des yeux comme hier soir…
— C’est bon, je sais me contrôler, rétorquè-je, moqueur.
— Ouais, bof… Hier, on aurat surtout dit un étalon en rut, pouffe-t-elle.
— Je te cause de l'épaisseur des murs de ta maison moi ! Tu veux qu’on reparle des nuits où t’écoutais One Direction à fond, façon karaoké privé ?
Son rire cristallin résonne dans la pièce, désamorçant la joute. Je tamise le café, place le porte-filtre et ajuste la machine avant de sortir un récipient du placard.
— T’en veux un ? demandé-je par-dessus mon épaule.
— Non merci, mais attrape-moi le jus de canneberge, s’il te plaît.
Je tourne la molette pour faire couler le liquide noir. L'arôme riche emplit la pièce. La cafetière coupée, la bouteille fraîche sortie du frigo passe de ma main à celle de ma sœur. Je m’installe ensuite à ses côtés, la tasse chaude nichée entre mes mains, prêt à apprécier cette parenthèse de tranquillité.
— T’es vraiment prêt à tout pour épater Victoria, hein ? Combien de temps as-tu mis pour choisir cette tenue ? me taquine-t-elle.
— Contrairement à certaines personnes, je ne passe pas trois heures devant mon miroir, riposté-je pour chahuter ma jumelle gentiment.
— Touché.
Isla secoue la tête, amusée, avant de me tendre son téléphone.
— Regarde ça plutôt !
Sur l’écran, une story Instagram annonce une soirée Halloween au Diamant Rose.
— Elle est justement là-bas en ce moment, annoncè-je en trempant mes lèvres dans la boisson.
L’arôme intense du Sumatra torréfiée, mon préféré, emplit mes sens.
— Dans un club ? À midi ? s’étonne-t-elle, un sourcil relevé.
— Elle y travaille, expliquè-je en poursuivant ma dégustation.
— Vraiment ? Je croyais qu’elle était étudiante, reprend-elle, piquée par la curiosité.
Est-ce que je devrais en dire plus ou la laisser miroiter ?
— Elle fait les deux, confirmè-je, en humant les arômes riches qui se dégagent, la chaleur de la tasse réchauffant mes doigts.
Le regard scrutateur de ma sœur me met presque mal à l’aise. Isla me fixe, les yeux plissés, manifestement insatisfaite par ma réponse.
— Tu pourrais être un peu plus loquace, non ? s’exaspère-t-elle, un soupçon d’impatience dans la voix.
J’ajuste subtilement ma posture en déposant ma tasse, puis je lâche enfin :
— Elle bosse dans l’événementiel en parallèle.
Une petite partie de moi est déconcertée face à la perplexité qui s’efface du visage de ma petite sœur, remplacée par une expression de compréhension. Isla hoche la tête, l’air soudain éclairé par cette nouvelle information.
— Ah ! Je comprends mieux !
— Quoi donc ?
— Non, rien, rétorque-t-elle d’un air ingénu, en me reluquant par-dessus le verre qu'elle porte à ses lèvres.
Pourtant, j’ai le sentiment que ce silence cache quelque chose. Son habileté à semer des indices énigmatiques est légendaire. Je lui adresse un regard perplexe, tentant de deviner ce qu’elle mijote.
— C’est toi qui deviens laconique, mo pìuthar.
La malice se dessine sur ses traits avant qu’elle ne me tire la langue d’un geste enfantin. Je connais ce petit jeu.
— Tu en sais plus que ce que tu veux bien admettre, hein ? je la cuisine, curieux de découvrir ce qu’elle pourrait me révéler si je pousse un peu plus.
— Tiens, mon frère préféré, dit-elle avec une moue innocente.
Je prends le chocolat, mordillant le morceau en savourant sa douceur amère. Elle sait pertinemment que c’est mon péché mignon. Essaie-t-elle de détourner mon attention ? Absolument ! Ça ne prendra pas...
— Où allez-vous déjeuner ? me demande-t-elle, changeant opportunément de sujet.
— Bonne question !
Victoria et moi n’avons encore rien décider.
J’attrape mon téléphone pour lui envoyer un message. En ouvrant notre conversation, mes yeux tombent sur les derniers textos échangés, et ma poitrine se serre soudainement. Une vague de douleur sourde me traverse, balayant la légèreté du moment.
Isla, toujours attentive, ne manque pas de remarquer le changement d’expression sur mon visage.
— Qu’est-ce qu’il y a ? s’inquiète-t-elle, sa voix pleine de sollicitude.
Je prends une profonde inspiration avant de répondre, tentant de dissimuler mes émotions.
— Rien, juste…
Ma voix s’éteint. Mes yeux restent fixés sur les mots à l’écran, comme si je cherchais à y déceler un autre sens que celui que j’essayais vainement de donner :
Oublie-moi… Bonne continuation.
Comment ai-je pu être aussi con ?
Un nœud se forme dans mon estomac. Elle ne m’a pas oublié, et moi, encore moins. Chaque jour qui s’écoule, chaque seconde qui passe, je m'aperçois à quel point cette phrase était vide de sens, une tentative pathétique de me persuader d’un détachement que je n’ai jamais ressenti.
Peut-être que mes mots trouveront enfin un écho aujourd’hui et qu’elle acceptera de me donner une chance d’effacer ce fossé que j'ai creusé entre nous, de réparer mes erreurs, de me racheter. Mes doigts tremblants tapotent l’écran de mon téléphone.
Isla, muette jusqu’ici, continue de m’observer. Finalement, sa voix douce vient briser le silence :
— Tu as pu discuter un peu avec elle de ce que tu... vis ?
Je pose mon smarthphone sur le comptoir et m’efforce de répondre, d'un ton légèrement rauque :
— Oui.
Je prends une respiration profonde, me préparant à aborder ce sujet délicat.
— Je lui ai parlé de... la drogue.
Isla ne réagit pas tout de suite. Ses yeux, remplis de bonté, me scrutent intensément, ébranlant mon cœur.
— C’était la bonne chose à faire, finit-elle par murmurer. Elle doit savoir pour comprendre ta situation.
J'acquiesce, mai une ombre de suspicion s'infiltre en moi, rampant comme un serpent vorace prêt à tuer mes espérances dans l'oeuf.
— Je ne sais pas... Peut-être que ça complique trop les choses. J’aurais pu attendre, lui parler plus tard, quand tout se serait éclairci.
Je me détourne, scrutant le carrelage comme si la solution s’y trouvait.
— Mais elle, elle voulait des réponses. Et moi... j’espérais juste qu’elle se calme…
La main de ma jumelle se pose sur mon bras, une ancre dans cette tempête intérieure.
— Ça n’a pas dû être facile, souffle-t-elle.
Elle cherche mon regard, tente de percer cette muraille que je m’efforce de maintenir en place.
— Non, admets-je simplement, mon intonation presque éteinte.
Je m’accoude au comptoir, comme si le poids de mes pensées m’écrasait.
— Comment elle l’a pris ?
Je ferme les paupières, une image déchirante éclate dans mon esprit. Victoria. Son visage se brouille sous l’assaut de ses émotions. Cette tristesse dans ses yeux ambrés. La douleur… La déception...
— Elle...
Je cherche mes mots, luttant contre la boule dans ma gorge.
— Elle m’en veut de ne pas l’avoir abordée plus tôt. Mais elle est prête à m’aider, si jamais...
Je me détourne, sentant ma diction se briser.
— Je ne souhaite pas qu’elle me voie dans cet état. Parce que ça voudrait dire que j’ai échoué.
Un silence s’étire, chargé de tout ce que je n’ose dire.
— Tu n’en sais rien, James, répond Izy, sa voix combinant douceur et fermeté, trouvant le juste équilibre entre réconfort et réalité.
Elle pousse un léger soupir, posant ses mains à plat sur le plateau de marbre, comme si elle pesait soigneusement ses mots.
— Écoute, laisse-lui du temps pour tout digérer. Néanmoins, n’écarte pas la possibilité qu’elle puisse avoir envie de t’apporter du soutien. Si tu tiens vraiment à elle, tu devras ouvrir ton cœur, mo brathàir.
Mes paumes se pressent l’une contre l’autre, un geste instinctif pour évacuer cette anxiété qui refuse de me lâcher.
— Et si elle ne veut pas de moi ? murmuré-je, à peine audible. L’idée de la perdre m’est insupportable.
Isla incline la tête, ses cheveux blond-roux formant une cascade de boucles autour de son visage. Ses traits s’adoucirent, empreints d’une bienveillance qui me désarçonne.
— Parfois, il faut accepter de lâcher prise, Jamie. Si tu te laisses emprisonner par tes peurs, tu n’avanceras jamais. N’oublie pas qu’en amour, tout est question de confiance. Tu ne peux pas prévoir sa réaction ni ce que l’avenir vous réserve. Tu dois vous donner une chance.
Le mot "confiance" résonne en moi comme une cloche fêlée, ravivant des souvenirs douloureux. Un rire acide remonte en moi, une amertume impossible à contenir.
— La confiance ? Comme avec Amy ? craché-je, un éclat sombre dans la voix.
Je repense à ma relation avec mon ex-fiancée, à cette confiance aveugle que j’avais placée en elle et à la manière dont tout s’est écroulé comme un château de cartes.
Ma jumelle claque son verre sur le comptoir, un bruit sec qui brise le silence comme un coup de tonnerre. Ses yeux s’enflamment d’une colère telle qu’elle pourrait transpercer n’importe quelle défense.
— Arrête ! Arrête de tout ramener à elle ! Toutes les femmes ne sont pas Amy, et tu le sais très bien. Cesse de comparer chaque relation à ce désastre, sinon tu passeras à côté de tout ce qui compte vraiment ! Peut-être que Victoria est ton âme sœur, ou peut-être que ce sera quelqu’un d’autre. Mais, mon dieu, ne laisse pas cette peur te détruire. Ne tombe pas à nouveau là-dedans !
Sa voix se brise à la fin de sa tirade, attestant d’une inquiétude extrême et d’un désir sincère de me voir avancer. La tension est évidente sur son visage. Ma sœur ne peut plus garder toute sa frustration en elle.
Ses paroles s'abattent sur moi comme un coup de fouet, chaque syllabe portant le poids d’une vérité que je n’ai cessé de fuir. Les cicatrices laissées par la trahison d’Amy ne sont même pas les plus profondes… Perdre quelqu'un que j'aime, je ne pourrais plus le supporter. Si j’ouvre mon cœur à Victoria et qu'elle m'abandonne, je n'aurais pas le courage de continuer à vivre avec cette douleur constante…
Je reste figé, incapable de répondre, pris au piège entre la réalité qu’elle m’assène et les souvenirs d’un passé qui refuse de me libérer.
Amy et moi avions bâti notre relation sur des promesses et des rêves communs. J'avais foi en notre avenir, en notre amour, jusqu’au jour où j’ai découvert ses infidélités. La révélation, juste avant notre mariage, m’a frappé comme un coup de tonnerre dans un ciel paisible de nuit d’été. Une décharge émotionnelle qui a laissé une brûlure dans l’âme, quelque chose qui te fait vaciller, te prend au dépourvu. Découvrir que non seulement, la femme avec qui j’allais partager ma vie me trompait, mais qu’elle entretenait une liaison depuis des années — non, bordel, pas une, mais plusieurs — avait été un électrochoc brutal. Comment ai-je pu être si aveugle jusqu'à ignorer les signes qui étaient pourtant là, sous mon nez ? Je lui en veux autant qu’à moi-même, putain !
Après ça, je me suis laissé couler. La dépression m’a englouti. J’ai rompu les fiançailles et j’ai filé en Afrique du Sud, là où on devait partir en lune de miel si... si cette foutue mascarade de mariage avait eu lieu. Là-bas, je me suis réfugié dans le surf. C’était la seule chose qui me donnait l’impression d’être en vie. Comme si, en chevauchant les vagues, je pouvais m’évader, oublier, ne serait-ce qu’un instant. Mais au fond, tout n’était qu’une illusion. Une fuite de plus.
Revenir chez nous a vraiment été le coup de grâce. Devoir rassembler mes affaires, vendre la maison... C’était impensable de continuer à y vivre, encore moins de la lui léguer... J’ai dû faire une croix sur l’avenir que j'avais commencé à nous construire. C’était comme si chaque plan, chaque espoir que j’avais nourri, s’effondrait autour de moi, me laissant esseulé au milieu des décombres.
Peu de temps après, la débauche et la drogue m’ont rattrapé, comme une compagne toxique dans laquelle je me suis perdu plus profondément. À ce stade, ça semblait être la seule chose qui pouvait m’aider à ne plus rien éprouver. Mais chaque liaison, chaque verre de trop, chaque dose ne faisaient qu’approfondir l’abîme de mon désarroi.
— Les épreuves que tu as endurées, avec Amy et Connor, ont profondément influencé ta façon d’être, et je le comprends. Mais tu ne peux pas laisser ces expériences douloureuses gouverner le reste de ta vie.
Je baisse la tête, évitant son regard, mais sa voix continue de me poursuivre.
Peut-être qu’il est temps que je fasse la paix avec ce passé qui me hante encore, et que je commence à édifier un futur différent, un horizon où je ne suis plus prisonnier de ce qui a été.
Mes poings se serrent malgré moi. Isla a raison, je le sais. Mais cette angoisse, ce besoin maladif de me protéger, m'incite à me renfermer, à ériger des barrières. Pourtant, au fond de moi, je ne demande qu’à y croire, qu’à espérer. Mais à chaque élan d’optimisme, une autre pensée surgit, sombre et implacable : et si elle partait ? Et si elle me brisait à son tour ?
Les scénarios défilent dans ma tête, chacun plus cruel que le précédent. Peut-être m’accueillera-t-elle d’un sourire réconfortant, puis finira par comprendre qu’elle mérite mieux que moi ? Peut-être restera-t-elle un temps, pour mieux m'achever plus tard, jusqu’à ce que je ne sois plus qu’un souvenir qu’elle effacera sans peine ? Ou pire encore… Peut-être jouera-t-elle avec mon âme comme Amy l’a fait, sous une façade d’amour, jusqu’au moment où la vérité me frappera comme une lame en plein cœur ?
Et si je m’ouvre à elle, juste pour être rejeté ? Si je lui offre tout, seulement pour qu’elle décide que ce n’est pas assez ?
Ces pensées m’écrasent, chaque hypothèse creusant un peu plus ce gouffre de méfiance dans lequel je suis déjà bien trop ancré. Mais autre chose se présente, une lumière chancelante dans cette obscurité : et si… elle restait ? Et si elle apercevait en moi ce que je n’arrive plus à voir moi-même ?
L’idée me coupe le souffle. La possibilité d’un avenir où elle choisit de se tenir à mes côtés, malgré mes failles, malgré mes démons. Mais cette vision, aussi belle soit-elle, semble fragile, prête à disparaître au moindre faux pas.
Isla m’observe toujours, patiente, mais insistante. Et moi, je suis là, pris entre le vertige de l’espoir et l’abîme de mes peurs.
— Jamie… tu es encore avec moi ?
Je hoche lentement la tête, sans oser prononcer un mot.
— Oui, je te parle de confiance. Tu as souffert, tes craintes sont légitimes. Mais, ce n’est pas parce qu’une personne t’a trahi que toutes le feront. Victoria est une femme bien, je le sais. Contrairement à Amy — que je n'appréciais pas des masses, soit dit en passant… Peut-être que ce qu’elle veut, c’est aussi se battre pour vous.
— Je... je sais que tu as raison, Izy. Victoria est différente, unique, je le sens au plus profond de moi.
Ma voix hésite, tremble presque, comme si admettre mes sentiments les rendait plus réels, plus effrayants. Je passe une main sur mon visage, éprouvant la rugosité de ma barbe de quelques jours. J'essaie de rassembler mes pensées, mais la crainte de répéter les mêmes erreurs me paralyse. Et pourtant, je sais que rester mûré dans le passé, c’est risquer de manquer l'opportunité de construire quelque chose de vrai, de précieux, avec Victoria, parce que ça peut marcher entre nous, une part de moi en est même convaincue.
— C’est la raison pour laquelle je me suis sevré il y a 14 jours, avoué-je finalement, une confession qui pèse lourd, mais qui est aussi augure d’espoir.
— Je sais, James...
Isla pose une main réconfortante sur mon épaule, un geste simple, mais qui porte toute la chaleur de sa présence. Ma sœur voit clair dans mon cœur, comme toujours...
— Tu dois te permettre de croire en une nouvelle chance. C’est difficile, mais si tu ne fais pas le pas, tu te priveras d’un avenir meilleur. L’amour demande du courage, et tu en as. Fais-lui confiance autant qu’elle devra te faire confiance.
Je prends une profonde inspiration, et pour la première fois depuis longtemps, je ressens le poids de ma décision comme une force. Fuir, m’abriter derrière des excuses, me noyer dans la drogue et le sexe n’a jamais été une vraie solution. Trop de temps perdu… Trop d’occasions manquées. J’ai toujours su que ce moment viendrait. Je dois agir, faire face, et ne plus me cacher.
Je me dirige vers la porte, me préparant à affronter ce qui m'attend. Mais avant de partir, je me tourne vers Isla, un sourire reconnaissant sur les lèvres.
— Merci, mo pìuthar. Je peux prendre ta voiture ?
Elle sourit à son tour, avec cette douceur qui n'appartient qu'à elle.
— Bien sûr, Jamie.
Je sors de la maison avec une résolution nouvelle et m’installe au volant de la Audi A3 Sportback grise garée dans l’allée. Le moteur ronronne sous mes doigts, prêt à m’emmener vers un horizon différent, vers Victoria. Le vent balaie mes pensées et je me sens presque en paix. Mais, après seulement quelques kilomètres, mon téléphone vibre. Un regard rapide sur l’écran et mon cœur s’alourdit. Victoria annule. Elle a besoin de temps. Elle n’est pas prête. Eh merde...
La déception m’écrase, glaçant tout espoir. Je serre le volant, ma mâchoire crispée. Ce que j’avais cru être une nouvelle chance s’évanouit aussi vite qu’elle était venue. La lumière fragile au bout du tunnel vacille. Pourtant, je ne peux pas lui en vouloir. Elle doit affronter ses peurs, ses doutes. Peut-être que ce temps dont elle a besoin est aussi celui qu’il nous faut pour mieux nous retrouver. Je ne sais pas... Je soupire, expulse la frustration.
— Un jour à la fois, je murmure, me convainquant autant que je le peux.
Je continue de rouler, sans destination précise. Le chemin qui s'étend devant moi s’avère incertain, mais peut-être qu'un peu d’incertitude pourrait être bénéfique pour réapprendre à avoir confiance en l’avenir, et en l’amour.
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