CHAPITRE 21.4 * JAMES

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J.L.C

♪♫ ... ♪♫

Je scrute l’entrée du club, les lumières tamisées qui se faufilent à travers la porte, attirant mon regard comme un phare dans l’obscurité. Peut-être que la véritable échappatoire est à l'intérieur, là où l'ambiance et le brouhaha pourraient m’aider à oublier, même si ce n’est que pour quelques heures. L’idée de retourner dans cet univers animé me semble plus attrayante que la solitude de cette rue agitée. Je prends une dernière bouffée de ma cigarette, écrase le reste dans un cendrier près de l’entrée, et me dirige vers la porte. L’air frais de la nuit se retire lentement, remplacé par la chaleur et l’agitation du lieu. La musique vibre dans mes veines... Je fais mon chemin jusqu’au bar, l’effervescence de la soirée me capturant peu à peu.

— "Une bouteille de Lochranach, une premium, s’il te plaît", je demande au barman, pas Mathieu, mais le jeune avec un piercing à l'arcade.

Je prends un moment pour analyser la salle, cherchant un coin isolé où je pourrai me réfugier. Quand il me tend mon scotch, je lui glisse ma carte, en lui disant de mettre ça sur mon compte. Puis, je m’éloigne, la bouteille à la main.

Allez, c’est parti. Moi, mes fesses sur un canapé confortable et les notes boisées et fumées de mon scotch “Audace & Alliance” qui m’attendent. Je me cale le plus loin possible du groupe que j'ai repéré. J’y toucherai pas.

Je débouche la bouteille, le son du bouchon résonne comme une promesse. À peine le goulot ouvert, un parfum envoûtant me frappe de plein fouet. Je hume profondément les arômes qui se mêlent : une douceur crémeuse de caramel et de vanille, des effluves de fruits secs, rappelant les cerises noires et les figues. C'est comme retrouver un vieil ami. Je me laisse envelopper par cette familiarité, cette profondeur que j'ai mise des mois à perfectionner. Je prends le temps de savourer cette première inspiration, conscient que chaque goutte que je vais déguster est le fruit de mon travail acharné.

Le premier verre, c'est pour l'angoisse, pour ces pensées qui tourbillonnent dans ma tête. Je prends une gorgée de ce nectar et me laisse tomber sur le canapé, observant les visages flous autour de moi. Les rires, les éclats de voix, tout ça s’entremêle. Je dois rester en dehors. Juste moi, la boisson, et ce moment de solitude. Le bonheur se monnaye. J’ai de l'argent plein les poches.

Mes yeux errent sur la piste, captivés par les mouvements des danseurs. Une fille attire mon attention. De dos, on dirait presque Victoria. Blonde, quoique ses cheveux sont plus courts, elle se déhanche au rythme de la musique. Joli cul, taille fine, mais ses hanches sont plus étroites que celles de Victoria. Sa robe, trop vulgaire à mon goût, en dévoile trop. Il manque la subtilité qui me plait tant chez Victoria. Je détourne le regard, un frisson d’inconfort me traversant. C’est comme si chaque geste de cette fille me rappelait ce que je ne peux pas avoir.

Non, si Vi était là, elle éclipserait toutes ses nanas sans saveur. Elle, avec sa présence, sa façon d’occuper l’espace. Chaque sourire qu’elle offre est un rayon de soleil dans ce monde de néons.

Vi, elle porterait une robe rouge, non blanche, sa peau dorée, ses yeux couleur whisky, un regal pour les yeux, un delice pour les sens, un eldorado pour mon âme en peine. Allez ! Encore une gorgée.

Ses mèches blondes collées à sa peau transpirante. Sa peau douce et glissante, sous l’eau… Non, il n’y a pas d’eau. Elle aime l'eau. Je veux lui faire l'amour dans la mer, ou une piscine, un jacuzzi, une baignoire, on s’en fout. Dans l'eau.

Vi, elle passerait ses mains dans ses cheveux blonds, ça lui va bien le blond. Elle serait jolie en rousse aussi. Ses lèvres entrouvertes, elle me veut. Putain, sa bouche sur ma queue… Mais qu’est ce que je fais là ! Pourquoi je pense à elle maintenant ? Il est où mon verre bordel ? Tant pis, direct à la source. J’attrape la bouteille.

C’est con, non ? Pourquoi je me fous de ces autres filles quand il n'y a qu'elle ? Elle m’envahit, elle est partout. Je la déteste en plus. Lorsque je suis rentré chez ma sœur après le message de cet après-midi, il disait quoi déjà ? Oui, en gros, elle veut pas me voir, elle veut pas de moi. Pourquoi ? Merde, moi je voulais. Je ne veux que ça. La voir, être avec elle, en elle. Putain, même juste lui tenir la main comme un ado pré-pubère me suffirait là… Je ricane. Qui tu crois berner James ? Lui tenir la main ! C’est ça oui ! Comme si je pouvais me contenter d’un geste aussi con. Non, moi là, j'ai envie d’elle. J’irais même si on me l'interdit… Putain ! Qui a remis le bouchon sur la bouteille !

Je suis monté directement dans ma chambre en rentrant. Je voulais pas croiser le regard de ma sœur. Elle me juge parce que je suis un connard. Et probablement parce que j'ai pété sa voiture il a huit ans. Ou c'est à cause de ma manie de lui tirer les cheveux. Je voulais pas répondre à ses questions. Je veux - voulais - couper le contact avec le monde.

J’ai envie d’elle quand j'ai mal. Alors, j'ai fait la sieste. Balayer la frustration et la tristesse qui pesaient sur moi. Mais même dans mes rêves, Victoria était là, son image refusant de me laisser en paix. Elle me griffe, me mord, elle est violente. Putain, j'aime ça. Ça doit être un truc de maso, non ? Je suis prêt à me soumettre. J'ai envie qu'elle soit lente. Oh non... Elle pleure, je ne veux pas. C’est comme une île qui se noie.


À mon réveil, j’avais saisi mon téléphone machinalement. Victoria m’avait écrit. La panique. J’avais même pas répondu à son message précédent. Ah, voilà, dans la poche. Il y a un appel, deux, trois. Manqués. Super, je suis un as de la communication. Quel con ! Attend, c’est maintenant ou tout à l’heure ? Je remet le téléphone dans ma poche.


Victoria m’a invité à une soirée d’Halloween au… Mais comment il s'appelle le club déjà ? L’Hexa ! Le thème, c’est “Anges et Démons”. Je veux bien tenter l'effort. Je souris comme un benêt. Victoria en ange blond, avec des ailes de plumes blanches. Nue. Elle est canon ! Non, Victoria, elle incarne le mal. Le bon mal, pas comme mon mal à moi. Je suis le démon. Est-ce qu’elle aime les démons ? Ça doit être un truc à explorer. Je veux qu'elle soit comme moi. Non, je veux qu'elle m'aime pour ce que je suis, même si je suis un démon. Je veux pas l’être.

Demain soir ! Enfin, demain, c’est quand déjà ? Dans 24h, plus ou moins. Je ne la verrai que demain soir ! L’enfer. En fait, c'est elle, Lilith. Et moi, je suis… Prométhée, sauf que c'est elle qui dévore mon cœur chaque nuit. Il fait quoi mon doigt devant mes yeux ? L’attente est insupportable. J'ai compris ça et j’étais genre excité parce que Vi, je vais la voir demain soir, puis, j’étais énervé parce que je dois patienter. Et je vais devoir affronter l'issue. Pas de secours. Je le vois le néon vert là-bas. Il est hors de question de reculer.


Pourquoi préférer qu’on se voie là-bas, plutôt que dans un lieu privé où on pourrait vraiment parler ? Est-ce qu’elle veut éviter une confrontation ? C’est bon, je vais pas déraper, elle! C’est une diversion ? Et si elle ne prenait pas notre histoire, au sérieux ? C’est possible. C’est la pers... la pers… conm dit déjà ? Pers...tive. Non, per… putain ça veut pas sortir ! Faut que je me lève là. Ah non, non plus, ça sort pas C’est comme si mes pensées s'entrechoquent là. Je multiplie la table de huit. Pour quoi faire ?


Mais merde aussi ! Pourquoi elle a annulé le rendez-vous ? C’est Mati qui lui a dit d'annuler ? Ils son en train de baiser là ? Le connard, je vais le fumer moi… Oh non… Le verre a encore disparu… Qu'est-ce qu’il a à voir là-dedans celui-là ! Rien qu’à l’idée que ce soi-disant "patron" ait pu interférer. Je suis jaloux et alors ? En plus, elle veut que je la retrouve là-bas. Sur le territoire de ce type. Super.


Du coup, comme je voulais pas lui montrer mon malaise, j’ai envoyé un "Ok”. Au message. Et un petit smiley après. Histoire de ne pas paraitre trop distant. Comme si un smiley allait tout arranger. Non, mais, elle veut quoi ! Que je lui court après. Oui.

Antoine il m'a dit : viens on va à l’Hexa. Ah mais merde, c’est ici l’Hexa. Du coup, demain, je vais pas à l’Hexa. Super plan, James. Vraiment brillant. J’étais d’humeur maussade. Même Milo, ce balourd, il a compris. C’était leur manière délicate de m’encourager à me changer les idées. Les idées sont pas toujours brillantes dans le cerveau de ces deux-là. La vérité, c’est que je me suis totalement perdu. L’alcool n’aidant pas, me voilà maintenant embourbé dans les regrets et la douleur de l’absence. De Victoria dans ma vie. Je vais finir au fond du ravin. Avec la lumière au bout du tunnel. Je conduis pas ce soir. Pas de bécane non plus.

Je sors une nouvelle cigarette de mon paquet. Qu'est-ce qu'il dit lui ? Oh merde, oui pas dedans... Bon alors la bouteille, ça on peut. Je lui souris. Je crois. Il s'en fout. Ca commence à brûler sévère. Vous savez quoi ? Une petite dose dans tout ça, ça se tente, non ? Ils sont où les types de tout à l’heure ? Encore faudrait-il que je me lève. Je crois que l'alcool fait son petit effet. Je me cale dans mon canapé moelleux, mon petit royaume. Sauf qu’il n’y pas ma reine ce soir… De toute façon, peu importe combien je bois, je fume, je me came... peu importe combien je tente de la chasser de mon esprit, tout me ramène constamment à elle, à son regard pénétrant, à ses courbes divines, à sa bouche qui m’apaise et me brûle à la fois.

Où est-elle en ce moment ? Peut-être avec ses amis, riant, buvant, sans se soucier de moi. Cette éventualité m’irrite, mais pas autant que l’idée qu’elle puisse être avec Mati. Ce connard ! C’est qu'il est loin d’être laid le bougre ! Rien que d’imaginer ses mains sur elle, ça me rend fou. Tiens si j’allais foutre mes mains sur la chaudasse là-bas ? Elle me regarde en plus. Je la hèle. Elle se déhanche jusqu’à moi. Wow, quelle paire ! Les seins de Victoria sont parfaits ! Deux petites, non, c’est pas le mot, pas petites. Deux majestueuses montagnes dorées auréolées de rose. La beauté de la nature piégée dans un décolleté de rêve. La brunette en face de moi elle, c'est la générosité de la nature.

Elle s’installe sur mes genoux, et je me laisse faire un instant, appréciant la distraction. C’est un peu comme une fête foraine, sauf que je ne suis pas sûr d’avoir envie de monter sur ce manège. Elle ne plait même pas. Mais de quoi je me mêle. Elle me plaira si elle me suce bordel ! Elle glisse sa langue dans mon cou. En vrai, c’est… Désagréable. Putain, elle a des crocs ou quoi ? Je frissonne mais, c’est pas du désir là, du dégoût plutôt. Non, c’est trop, enfin, pas assez Victoria. Je la repousse doucement, réalisant que je ne veux pas de ça, pas maintenant. Moi, c’est pas la montagne que je cherche, c’est la mer, les vagues indomptables, c’est Victoria. Je la pousse franchement. Désolé ma belle. T'es pas à la hauteur. Merde, j’ai dit ça tout haut. Si je continue je vais avoir une troupe de furies, harpies à mes trousses. Allez, toi, tu dégages, et toi ma belle, tu reviens dans ma main. Whisky mon beau whisky.

Et si elle est chez elle, seule, qu’est-ce qu’elle fait ? Elle prépare la fête de demain ? Ou elle est étendue sur son canapé. Insensible au monde qui semble vouloir me torturer ? Elle lit ? Elle adore lire. Elle est mon héroïne. Putain pas de jeu de mots là ! Moi, je la veux dans mon lit. Chez moi à Edimbourg. Dans mes draps bleus nuits. Elle adore le bleu. Ses cheveux en désordre sur l’oreiller. Ses draps sont beiges, si je me souviens bien. Bleus ou beiges. Mer ou sable. Une vague de désir monte en moi, incontrôlable. Je la vois, ses courbes magnifiques dessinées par la lumière tamisée de la guirlande au-dessus de son lit. Ma main se crispe autour de mon verre. Il est revenu celui-là !

Mon esprit bascule. Putain de fantasme. Je suis là, à ses côtés. Je la touche. Je l’embrasse. Je ressens les soubresauts de son corps sous mes doigts. Corps à corps. Ses soupirs résonnent vivement. Son souffle contre ma peau… Ses lèvres qui murmurent mon nom... Elle donne tout, elle crie. J’aime quand elle est bruyante. J’imagine ses mains glissant le long de mes bras, de mon dos, de mes fesses, ses ongles et ses dents s’enfonçant dans ma chair alors que je l’emmène toujours plus loin, plus fort, jusqu’à l’orgasme… Un cataclysme.

La réalité m’échappe. Depuis un moment déjà. Depuis quoi ? Les trois quarts de la bouteille ? Je veux rire, je n’y arrive pas. Je me perds dans cette vision, dans cet instant volé où elle est tout à moi. Où rien d’autre ne compte que la chaleur de nos corps unis, que l’intensité de ce moment qui n’existe que dans mon esprit.

Je secoue la tête. Putain ça tangue. Elle m’obsède. Il ya de la fumée autour de moi. Et ça pue aussi. Je vais l'appeler. Une confrontation directe pourrait mettre fin à cette torture mentale. Si je pouvais juste la voir, échanger quelques mots, comprendre si elle est sincère ou si tout ceci n’est qu’une farce. Sauf qu'elle ne veut pas me voir. Le feu est trop fort. Je vais rentrer en Ecosse demain.

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