CHAPITRE 25.2 * JAMES
ATTENTION PASSAGE EROTIQUE
J.L.C
♪♫ SAIL — AWOLNATION ♪♫
Vi m’attrape par le poignet et nous précipite à l’intérieur. L’atmosphère élégante et sensuelle du lieu m’enveloppe immédiatement, mais il n’y a pas de temps à perdre. Alors que je cherche le chemin vers le lit, Victoria, à l’ardeur décuplée, ne me laisse pas le choix. Elle jette son sac sans ménagement et enlève son manteau avant de repousser ma veste. Ses doigts explorent mes muscles, s’attardent sur ma ceinture, se glissent sous mon T-shirt, tandis que je la fais reculer d’un pas, pour l’emmener plus loin. Mais elle n’a d’yeux que pour l’instant présent.
Elle s’accroche à moi, me plaque contre le mur près de la porte et nos corps s’enlacent dans une danse effrénée. Le matelas n’est qu’à quelques enjambées, et l’idée de l’étendre sur des draps soyeux m’enflamme. Je l’imagine, sa silhouette se dessinant dans la lumière diffuse, se dévoilant sous mes mains impatientes qui la déshabilleraient lentement, arpentant chaque courbe, chaque creux. J’aimerais tant me repaître de ses contours, goûter chaque millimètre de sa peau chaude et sucrée…
Je lutte contre ma retenue, déchiffrant sans mal que Victoria a d’autres plans en tête. Mon fantasme, ce sera pour plus tard. Mais si je cède à sa volonté, si je la prends là tout de suite contre ce mur, je me promets intérieurement de lui faire l’amour comme il se doit, dès que notre plaisir immédiat sera assouvi.
C’est ce qu’elle voulait de moi ? De nous ? Je peine à comprendre ce qui lui arrive. La fougue, elle en a toujours fait preuve. Quand je repense à toutes nos nuits ensemble, à chaque fois, elle s’est livrée sans réserve. On a sillonné toute la gamme de notre désir : tendresse, passion, complicité, abandon, sauvagerie. On a testé les préférences de chacun, joué avec des positions périlleuses, osé divulguer des fantasmes et des envies inavoués… L’audace, ont a déjà tapé dedans : toilettes d’un bar, plage, voiture sur une aire d’autoroute, ou même la veille sur le rooftop. Victoria se donne toujours à fond. Elle m’embrase, elle me consume et je suis subjugué par sa manière de faire l’amour. Mais là, il y a quelque chose d’étrange. Je le sens et je ne sais pas comment y répondre.
Alors pour l’heure, je me fais violence et accède à sa requête à peine voilée. D’un geste fluide, mes mains glissent autour de sa taille, modifiant notre position d’un mouvement précis, de sorte que Victoria se retrouve à présent entre moi et le mur froid. L’air est saturé du parfum vanillé de sa peau, une odeur que j’ai appris à reconnaître parmi toutes. J’enserre ses poignets et les plaque au-dessus de nos têtes. Ma paume rampe sous son T-shirt blanc, effleure le relief gracieux de son ventre, le creux nacré de son petit nombril, avant de venir palper l’ovale parfait de sa poitrine, dissimulée sous une lingerie minimaliste, en tissu léger, qui laisse deviner la fermeté de ses deux sphères généreuses. Ma langue découvre la saveur de sa gorge, la courbe délicate de sa clavicule, jusqu’au renflement de son décolleté.
Ma sirène envoûtante gémit, se débat avec une frénésie qui témoigne de son excitation croissante. Elle murmure mon nom, d’une voix basse, haletante. Dans mon élan de désir, j’empoigne une de ses cuisses et la hisse le long de ma jambe. Mon sexe contre le sien, leurs contours se frottent à travers le tissu rugueux de nos pantalons, alors que la chaleur de nos corps crée une connexion électrisante, une décharge qui nous traverse tous les deux.
— Maintenant, James ! m’implore-t-elle.
Suis-je fou d’accepter ? Ou simplement fou amoureux d’elle ? Ses yeux de braise me poussent à continuer, à ignorer mes hésitations. Les doutes qui me taraudent se dissolvent, comme le sable sous les vagues, et je choisis de vivre l’instant.
Je relâche ses poignets pour fouiller rapidement dans ma poche et en sortir mon portefeuille.
— Eh merde… soufflè-je, déjà blasé par l’évidence.
Vi fronce les sourcils, le regard interrogateur.
Je n’ai pas de préservatif. Sérieusement ? C’est maintenant que ça me frappe ? Je me redresse, le cœur battant face à la déception qui m’envahit.
— Qu’est-ce qui se passe ? s’inquiète-t-elle.
Je la scrute et je vois la désillusion s’incruster sur ses traits. Je comprends tout de suite qu’elle, non plus, n’en a pas.
Non, mais j’y crois pas ! Fais chier ! Non, vraiment, fais chier. Mais c’est pas ma faute, putain ! J’avais pas prévu de coucher ce soir ! J’avais pas prévu de voir Victoria, pour commencer ! Encore moins de me retrouver ici, dans cette chambre d’hôtel, avec la femme la plus sexy, la plus irrésistible, la plus… merde ! On a compris !
Un silence pesant s’installe entre nous. Ma petite dévergondée du jour appuie sa tête contre le mur derrière elle, ferme les yeux, puis pousse un long soupir. Génial. Le soupir. La double peine. Ses lèvres, qu’elle mordille délicatement, trahissent son agacement. Et moi, je reste là, planté, la culpabilité collée au front, fourrant mon portefeuille dans mon pantalon avec un cœur aussi lourd qu’un pavé dans une mare.
Il n’y a pas dix mille solutions. Peut-être est-ce le signe que notre nuit sera plus reposante qu’autre chose finalement. Une punition cosmique, tiens. Une revanche de la providence, qui a choisi ce moment précis pour me renvoyer toutes mes erreurs à la figure. Formidable, comme si le destin s’amusait jouer les trouble-fêtes pour m’humilier un peu plus. Parce qu’après tout, qui a besoin de préservatifs, quand on peut.... je sais pas, admirer la beauté d’un plafond blanc ?
Au fond de moi, je sais que je suis tellement à cran, tellement à l’agonie, que je ferais bien bien d’aller me plonger sous une douche glacée pour calmer mes ardeurs. Ce qui, soit dit en passant, ne pourra que nous faire du bien, à l’un comme à l’autre, vu l’état misérable dans lequel je suis.
Pourtant, la perspective de passer cette nuit avec Victoria — même sans aller jusqu’au bout —, c’est… supportable. Disons que je vais devoir m’en convaincre plutôt. Parce que c’est toujours mieux que dormir seul, dans un lit froid, avec pour seule compagnie mes regrets, mes rêves ratés et une playlist mentale de nos souvenirs.
Je pourrais improviser. Mes mains, ma bouche, ma créativité : j’ai tout un arsenal à ma disposition. Je pourrais la faire trembler sous mes doigts, me perdre entre ses cuisses, la dévorer millimètre par millimètre avec ma langue. Elle atteindrait des sommets, plusieurs fois, et moi, je savourerais chaque instant. Mais moi ? Ça ne suffira jamais. Pas si je ne peux pas la posséder entièrement, sentir son corps m’accueillir, devenir un seul souffle avec elle. Ça me rongerait.
— James ? m’appelle-t-elle.
Mais merde, c’est tellement frustrant. Terriblement frustrant. Je pourrais toujours aller en chercher, non ? Ce n’est pas comme si c’était une quête impossible. Les toilettes de l’hôtel doivent bien en avoir quelque part, ou même ces distributeurs devant les pharmacies.
— James.
Sa voix tranche à nouveau dans mon tumulte intérieur. Doucement, Victoria pose une main sur mon cou, puis, du bout de l’index, exerce une légère pression sur ma mâchoire pour m’obliger à tourner la tête. Ses yeux me capturent instantanément, emplis d’une lueur troublante qui me ramène à l’instant présent.
Elle est là, devant moi, vibrante de désir, et pourtant… vulnérable. Ses hésitations transparaissent dans ce regard, tout comme la déception que je ressens moi-même. Une pointe d’amertume, mélangée à une tendresse infinie.
Je repousse ses mèches blondes derrière ses oreilles et caresse la pulpe de ses lèvres du bout des doigts. Elle me saisit par les poignets et plonge ses magnifiques iris dorés dans les miens.
Je sais bien que le sexe n’est pas la priorité de notre relation. Ce que je convoite vraiment, c’est cette connexion intime, cette alchimie unique, quelque chose de bien plus profond que le plaisir physique. Retrouver ce lien perdu, la comprendre à nouveau, réapprendre à être ensemble, voilà ce qui importe. Notre histoire ne se joue pas seulement dans l’instant charnel, elle repose sur un échange de complicité, s’enracine dans le respect mutuel, se construit sur une harmonie des cœurs.
Je la veux ici, maintenant, dans cet instant fragile et précieux. Même si ça signifie que cette nuit, nos corps resteront bien trop sages. Nos âmes, elles, trouveront leur refuge. Je ne ferais pas l’amour à la femme de ma vie ce soir.
Mais avant que je puisse formuler mes pensées, Vi murmure :
— Tu peux me faire confiance, James. Je veux dire, par rapport au préservatif, si… on pourrait…
Entre sidération et fierté, je me sens… honoré. Ces mots font éclore en moi une joie intense, presque irréelle. S’ils symbolisent le fait qu’elle n’a couché avec personne d’autre, ou, du moins, qu’elle s’est protégée, alors c’est un soulagement immense — et, il faut bien l’admettre, une petite victoire pour mon ego. Mon cœur bondit, presque un clin d’œil à moi-même, comme s’il me félicitait d’avoir fait le bon pari.
Victoria est une fille responsable, sans aucun doute. Maniaque du contrôle comme elle peut l’être, il est évident qu’elle maîtrise cet aspect de sa sexualité, sans jamais laisser place à l’imprévu ou à la négligence. Je me demande quel genre de contraception elle utilise : il faudra que je lui pose la question. Je ne l’ai jamais vue prendre de pilule, mais je ne l’imagine pas flancher sur ces détails. Stérilet, implant, quelque chose de discret, d’efficace, en parfaite adéquation avec sa manière d’organiser sa vie. Mais pourquoi je pense à ça, moi ? C’est pas comme si j’allais faire un audit de sa vie sexuelle, hein. Ou peut-être que…
— James ? Tu… tu m’as entendue ?
Sa voix est presque vacillante, brisée par… l’attente. Putain, pourquoi je me lance dans ce genre de conjecture moi ? Pourquoi je ne réagis pas ? Il te faut quoi James ? Un panneau lumineux ?!
— Oui, je…
Mon dieu, si elle, si on… Sa foi en nous me touche profondément. Elle me donne les clés, mais en retour, requiers la preuve que je suis digne de cette intimité, de ce dévouement. Elle me met face à un miroir et attend de moi la réciprocité, la même sincérité, le même engagement que celui qu’elle s’apprête à offrir. Je scrute ses prunelles, cherche une confirmation, une assurance que nous sommes prêts à franchir ce cap ensemble. Ce serait… ce serait… j’ai même pas les mots.
— Tu me proposes qu’on… s’en passe ?
— Oui, enfin, seulement si…bafouille-t-elle, ses yeux glissant vers le sol. J’ai un implant et je suis en fin de cycle, donc, pour les…
Sa phrase reste suspendue, ma petite ingénue est gênée. J’ai compris. Peu de risque de grossesse. Voilà ce qu’elle n’ose pas formuler.
J’ai ma réponse.Toujours prévoyante. Son hésitation, ses joues légèrement rosies, tout en elle m’attendrit. Elle est si vulnérable et si sincère à la fois, qu’un sourire me vient malgré moi. C’est fou comme cette femme peut réveiller en moi un mélange de désir brûlant et de douceur infinie. Mais, sa question suivante s’apparente plutôt à une onde de choc. Elle n’a rien d’anodin.
— James, est-ce que moi, je… peux te faire confiance ?
Victoria m’étudie intensément, cherche quelque chose dans mon regard, peut-être une certitude ou la confirmation que je ne suis qu’un dépravé. Ses mains sont maintenant plus agitées, parcourent le tissu de ses vêtements pour y remettre de l’ordre, comme si elle essayait de se distraire de l’anxiété qui grimpe en elle, ou non, s’apprêtait à s’éloigner de moi parce que merde, je tarde à la rassurer. Elle se demande, sûrement, si je vais être honnête, si je peux lui offrir cette sécurité.
De but en blanc, je lui annonce :
— Je me suis fait tester il y a deux semaines.
Je vois sur ses traits qu’elle mesure la portée de cette confession. Si j’ai passé un examen médical, c’est qu’il y a une raison — une raison qu’elle n’ignore pas. La honte s’insinue en moi, sournoise, car le sous-entendu est sans équivoque : les excès, la drogue, les autres femmes… tout ce que j’ai tenté de fuir, tout ce que je voudrais oublier. Mais, c’est ma réalité, ma vérité.
Je baisse la tête, inspecte nos pieds avec une insistance absurde, les mains posées de part et d’autre de son visage sur le papier peint irisé. Le poids de ce moment m’écrase et m’élève tout à la fois. Hésitant, presque maladroit, je finis par lâcher, dans un souffle :
— Je n’ai… je… enfin, le test était négatif. Pas de MST. Et…
Je m’interromps, le cœur cognant à m’en briser les côtes. Une dernière phrase reste coincée au bord de mes lèvres et j’espère de tout mon être qu’elle me croira. Qu’elle comprendra que tout en moi, lui appartient déjà. Et pour ça, je dois lui dire droit dans les yeux.
— Vi… je n’ai été avec personne depuis mon arrivée à Toulouse. Ni même depuis que j’ai quitté Édimbourg, il y a trois semaines.
Ma jolie blonde m’observe. Et dans ce silence, quelque chose s’opère. Ses traits se détendent légèrement, comme si une partie de son inquiétude s’effaçait, remplacée par une forme d’acceptation et de réassurance.
Doucement, elle fait le premier pas. Ses doigts frôlent mon visage, une caresse tendre, pleine de promesses, avant de le prendre entre ses mains. Nos regards s’entrelacent une dernière fois, un accord tacite, une validation muette de l’instant à venir. Alors, sans attendre, elle m’embrasse — d’abord avec délicatesse, puis avec cette passion contenue qui ne demande qu’à être libérée.
Je l’enlace presque timidement, mes paumes s’aventurent sur ses flancs puis son dos, la rapprochent davatange. Le baiser s’intensifie, nos lèvres s’unissent avec une urgence retrouvée, et très vite, le désir, qu’on avait mis en pause malgré nous, resurgit avec force, brûlant tout sur son passage. Nos corps se reconnectent, affamés l’un de l’autre, et l’alchimie, celle que je recherchais, s’impose, palpable, irrépressible, bouleversante.
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