CHAPITRE 29.4 * JAMES

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ATTENTION PASSAGE EROTIQUE

J.L.C

♪♫ ♪♫

Un mouvement furtif dans mon champ de vision aimante mon attention. Je pivote brusquement, le cœur palpitant à mille, l’espoir au bord des lèvres.

C’est le coup de grâce.

Amy.

Un frisson d’incompréhension me traverse. Qu’est-ce qu’elle fout dans notre lit ? Où est Vi ? Où sont les enfants ? Je fronce les sourcils, traquant des indices dans le regard enflammé de mon ex-fiancée.

Amy, avec ses grands yeux bleus perçants, me darde. Ce regard, je l’avais enfoui si loin que je croyais l’avoir enterré. Et pourtant, il revient, chargé d’une intensité presque carnivore, comme si elle pouvait lire mes pensées et s’y lover.

Ce sourire… Non, cette grimace sarcastique. Je le reconnais trop bien. Un rictus qui mélange moquerie et conquête, qui éveille en moi une aigreur brûlante. Cette garce savoure ma chute.

Elle est belle, ravageuse, au-delà des éclats du passé. Et ténébreuse. Et diablement sexy. Ses lèvres écarlates, cette crinière épi de blé, ses griffes manucurées, son teint de porcelaine presque luminescent dans la clarté du matin. Ce profil, ce corps autrefois familier m’évoque un cocktail brutal de nostalgie et de répulsion. Mais cette perfection n’est qu’un masque. Sous cette façade, je le sais, se cache le chaos que j’ai fui, le chaos que je refuse de revivre.

Mon cpouls bat plus vite alors que les traces d’une passion dévorante, ciselée de trahisons et d’engagements non tenus remontent à la surface.

Je ne veux pas d’elle ici !

Je me réfugie à l’extrémité du matelas en secouant la tête, mais rien n’y fait. Elle est toujours là. Avant que je ne puisse réagir, son rouge à lèvres sanglant profane ma bouche.

Mon estomac se retourne.

Son baiser me donne un haut-le-coeur. J’ai l’impression de me noyer dans une marée noire. Comme on expulserait un poison, je la repousse violemment, le souffle court.

Je ferme les yeux. Juste une seconde. Une petite seconde pour me ressaisir. Quand je les rouvre, Amy a disparu et Victoria — ma tendre et douce Victoria — réapparaît. Bordel ! Qu’est-ce qui m’arrive ?

Je voudrais abandonner mes défenses à ce soulagement, mais son visage, nimbé d’un affolement teinté d’effroi, miroite un reflet méconnaissable de moi-même.

— Vi, mon amour, c’est moi !

Ses pupilles écarquillées, sa bouche oscillant entre cri et silence, son retrait instinctif. A-t-elle peur de moi ?

Dans un élan de panique, je saisis ses bras et l'épingle au matelas en l’enjambant. Mon propre désarroi me guide, l’angoisse brouille tout sens logique, l’urgence de la situation m’emprisonne. J’ai besoin d’elle pour déloger cette vision infernale. Pour effacer Amy. La posséder, la faire mienne, annihiler toute rationalité. Je fonds sur elle, la ravis dans un baiser désespéré. Un baiser qui dit : Aime-moi, accepte-moi, sauve-moi.

Victoria se débat un instant, surprise, mais sa résistance fléchit rapidement. Ses gestes hésitants se glacent sous mes mains, alors que mes doigts parcourent le relief sensuel de sa silhouette. Mes pensées ne sont qu’un chaos de nécessité et de terreur. La chaleur de son corps me réchauffe et me rassure, mais au fond de moi, un rouage intérieur déraille. La douceur de ses lèvres, le réconfort de sa peau contre la mienne, tout semble… différent. Une ombre insidieuse plane, refuse de décamper.

Le parfum d’Amy, son spectre rampant, sa voix fantomatique. Une dague invisible.

— Qui est Victoria ?

Quoi ? Je me fige. Un gouffre béant s’ouvre à mes pieds. Mon cœur rate un battement. Mon regard vacille. L’oxygène me manque. Le monde implose dans un fracas de cauchemar emportant tout repère dans une spirale effroyable.

Et là, la chute libre. L’horreur. Ce ne sont pas les traits de Victoria que je contemple.

Son ton dégoulinant d’une fausse candeur doublée d’une arrogance insupportable, ma satanée ex reprend la parole :

— Allez, bébé ! Baise-moi comme tu baises ta Victoria !

Un ricanement nerveux s’extirpe dans un souffle rauque, guttural, presque étranglé. Elle veut jouer ? Parfait, que le jeu commence.

La colère, cette vieille amie perfide, s’immisce sans crier gare, flanquée d’une rage incandescente prête à m’embraser. Tout en moi me somme de battre en retraite, mais une autre part, obscure et vicieuse, persiffle : Fais-le. Fais-la payer.

Mon sang martèle mes tempes, une alchimie toxique qui se déverse en moi, faite de désir corrosif, d’hostilité et de vengeance.

Je vais la baiser, putain ! Avec tout le dégoût qu’elle m’inspire ! Et après, je m’en débarrasserai, comme j’ai balancé ma dernière dose dans les chiottes.

J’attrape cette garce par les bras, la tire vers moi avec une force brutale. Son sourire triomphant me répugne autant qu’il ravive mes instincts les plus sombres. Ses yeux brillent de défi, mais je ne lâche pas prise.

Mes lèvres se referment sur les siennes avec une violence sauvage. Ce n’est pas un baiser, c’est une déclaration de guerre, une offensive brutale. Chaque mouvement, chaque souffle, exsude ma haine à vif. Je la retourne, sans ménagement, la plaquant face contre le matelas.

Ma vision se voile d'un aveuglement destructeur, caustique. Cette soif de revanche asphyxie ma raison. Ses courbes familières n’éveillent rien d’autre qu’une froide satisfaction. Elle va payer. Pour tout.

Son corps, ramené à un jouet de domination, se plie à ma volonté, obéit à mes impulsions. Mes mains empoignent ses hanches, la repositionnent pour l’aligner avec ma détermination. Tout ce que je veux, c’est l’écraser, la briser comme elle m’a brisé, comme elle a réduit mes rêves en poussière, anéanti notre avenir, me précipitant au fond de l’abîme vorace de ma propre déchéance, ce fossé qui me sépare irrémédiablement du bonheur. De Victoria. Parce que la femme que j’aime à la folie ne voudra jamais de moi !

D’un geste sec, je la débarrasse de son string rouge. Mes doigts verrouillent ses bras derrière son dos, la maintiennent immobile, soumise. La vue de son cul m’excite malgré moi, bien que je me foute de son corps, de ses désirs. Je veux la faire hurler. Qu’importe que ce soit dans la douleur ou dans un plaisir amer. Elle va souffrir pour tout ce qu’elle m’a pris, pour tout le mal qu’elle m’a infligé.

Je descends à la hâte mon boxer, prêt à me décharger en elle dans un dernier sursaut d'indignité, à m’avilir à jamais. Je suis sur le point de me perdre définitivement, de m'abîmer dans une bassesse irrémédiable, quand une image s’impose : Victoria.

Mon Dieu, non, pas ça ! Une salve de lucidité me foudroie. Comment puis-je croire, même un instant, que je dois m’abaisser à ça ?

Victoria… Mon véritable amour. Son sourire, son doux rire, ses beaux yeux cuivrés qui m’ensorcellent… Elle m’a offert sa confiance, livré son coeur. Elle mérite tout mon respect, toute mon affection, une loyauté sans faille. C’est à ses côtés que mon futur s’écrira. Je dois clore ce chapitre, renier mon passé. Amy n’est qu’un spectre vidé de substance qui n'a plus de place dans ma vie.

Je lâche mon ex d’un geste brusque, bondis du lit en me rhabillant à la sauvette.

— T’es qu’un putain de poison, Amy. Dégage !

Ma voix tonne, vibrante d’émotion. Cette connasse ne bronche pas d'un centimètre. Elle reste là, campée sur ses positions, le regard acéré et mauvais, un rictus de défi tordant ses lèvres.

— Je ne veux plus de toi, hurlè-je.

La garce me toise d’un air méprisant. Puis, ricane. Un rire glacial, polaire, une lame cruelle qui me lacère, aussi tranchante qu'un coup de scalpel. Avec une hargne perfide, elle avance à quatre pattes, telle une panthère sournoise prête à sauter. Ses mouvements méthodiquement lascifs composent une chorégraphie fielleuse où chaque courbe devient une arme de séduction massive.

Elle s’arrête juste devant moi, ses yeux brûlant d’une lueur prédatrice. Ses doigts s'égarent sur ma jambe, distillant une langueur provocante à chaque centimètre parcouru jusqu’à ma cuisse.

— Victoria ? Sérieusement, James ?

Elle arque son dos, balaie sa chevelure en arrière, exposant le tracé délicat et suggestif de son cou, qu’elle infléchit légèrement pour capter mes prunelles.

— Tu penses qu’une femme comme elle pourrait vouloir d’un mec comme toi ?

Chaque syllabe s’habille d’une gestuelle insidieuse : un roulement de hanches, un frôlement volontaire, une cambrure d’une précision assassine. Elle sait ce qu’elle fait. Et ça me débecte autant que ça me charme, un alliage honteux que je peine à contenir, à mon grand désespoir. Quelle désolation méprisable !

— Un junkie, un dépravé, me lapide-t-elle avec un sourire vipérin, son haleine torride m’écorchant la peau telle une griffure. Un pauvre type qui n’arrive pas à contrôler ses pulsions perverses. Un minable qui s’accroche à des rêves pitoyables. Un homme qui n’a jamais aimer véritablement…

Le serpent se relève, colle son corps sinueux au mien, aux aboies, sa bouche dangereusement proche de mon oreille.

— Elle finira par te détester et ira voir ailleurs, tout comme moi.

Ses paroles s’abattent sur moi comme une pluie d’acide, me rongeant de l’intérieur., mais elle n’a pas terminé.

— Peut-être que tu aimes ça, hein ? Être piétiné, abandonné, cocufié…

Ses doigts, jusque-là posés sur ma cuisse, remontent, s’attardant à des endroits stratégiques, tandis que son souffle reptilien s’insinue dans mon cou comme une corde prête à se resserrer..

— Elle te mettra dehors comme on jette les ordures dans ton genre ! crache-t-elle.Tu ferais mieux de continuer à baiser à tout va et à te foutre en l’air ! Une overdose, bébé, ça résoudra tous tes problèmes.

Non !

Sa voix se fait plus sourde, plus retorde encore :

— Parce que tu n’arriveras jamais à m’oublier, Jamie ! Tu resteras hanté par mon ombre jusqu’à ton dernier souffle, condamné à crever dans la solitude.

Une tirade venimeuse. Une sentence fatale. Un coup de fouet en plein coeur. Mais qui portent une part de vérité : l’écho terrible de mes échecs. Son rire cruel et malfaisant ricoche dans mes pensées, rebondit sur les murs, déchaîne la bête tapie en moi.

Je l’attrape à la gorge… mais mes doigts se referment sur du vide. Amy n’est plus.

Je chancelle, pris au piège dans ce cauchemar tissé de regrets et de douleurs. Mon souffle s'étrangle, et tout autour de moi commence à se tordre, se déformer. Les contours de cette chambre, ce cocon rêvé qui n’existera jamais, vacillent. Alourdi par le poids de ses mots, accablé par le fardeau de mes fautes, je m’effondre au sol. Mais au cœur de cette suffocation, quelque chose en moi résiste, refuse de sombrer davantage.

Victoria.

Son nom rayonne comme une lumière dans ma nuit intérieure.

Je veux crier, mais mon larynx est muselé. Le monde autour de moi s’écroule, les couleurs virent au noir et rouge, et un feu jaillit de nulle part. Les flammes viennent lécher les meubles, les rideaux, mes pieds. L’atmosphère se gorge de chaleur étouffante, d’un nuage de cendres âcres qui brûle mes poumons.

Dans un dernier éclat de désespoir, je ferme les yeux, me réfugiant dans le néant.

Soudain, tout s’arrête. Le silence s’abat d’un coup.

Je jaillis hors du cauchemar, happe l’air comme si je revenais à la vie après une éternité d’asphyxie.. Mon corps est trempé de sueur, mes membres vibrent. La réalité me frappe : je suis de retour. Dans la chambre d’hôtel. Seul. Non… Pas seul. Une femme, blonde, est étendue près de moi sous la couette.

Victoria ? Amy ? Elaine ? Une de ses filles avec qui je m’abandonne à loisir, fantômes de mes errances nocturnes ?

Mon cœur s’emballe alors que la terreur grandit. Et si ce n’est pas mon amour ?

L’idée m’arrache à ma torpeur. Je balance mes jambes par-dessus le bord du lit, prêt à fuir. Les muscles crispés, la nuque raide, je demeure statique, incapable regarder derrière moi.

— James ?

Mon Dieu… Cette voix de nacre : Vi.

Un soupir tremblant m’échappe, un mélange de soulagement et de fatigue. Mes coudes s’appuient sur mes genoux, mes mains viennent enserrer ma tête. Le cauchemar m’a laissé un goût amer, une lourdeur insoutenable, un vertige dans lequel je bascule encore.

Un petit corps frêle se love contre moi. Des paumes douces m’enlacent par la taille et une joue se niche sur mon omoplate. Elle ne dit rien, se contente de m’étreindre, diffusant une chaleur réconfortante jusque dans mes os.

Je prends une profonde inspiration. Les secondes s’égrainent, et je reste cloîtré dans le silence, incapable de me détendre complètement. Pas même la présence apaisante de Victoria ne réussit à percer ce nuage sombre qui persiste. Une brume qui n’est pas réelle, qui n’émane pas de l’extérieur, mais qui a été forgée par mon subconscient.

Je comprends maintenant. Ce n’était qu’un songe, un piège de mon esprit. Rien de plus qu’un tour cruel que mon cerveau m’a joué, un labyrinthe de peurs et de doutes où je me suis perdu. Amy, ses paroles… autant de reflets amers de mes propres fissures, surgis du tréfond de mes angoisses les plus viscérales.

Je tire sur mes mèches, sangle mes poings, lutte contre la tentation de partir loin d’ici.

— Je suis désolée, à gràidh… Je ne sais pas si je suis assez fort pour nous…

— Si, tu l’es.

Sa réponse est immédiate. Ferme. Douce.

Ses doigts se resserrent légèrement autour de moi, une pression délicate, mais puissante, suffisante pour ancrer sa phrase dans mon âme. Elle est là. Elle croit en moi.

Moi, je doute toujours. Tant que je ne serai pas parvenu à exorciser mes démons, je ne pourrai jamais être l’homme dont elle a besoin. Il faut que je m’en déleste, que je les purge, autrement, mon rêve d’une vie avec Victoria s’évaporera.

— Je ne peux pas te perdre.

— Tu ne me perdras pas.

Ses mots me frappent avec la force tranquille d’une certitude absolue.

Je m’effondre contre elle, exsangue, vidé par le combat acharné que je mène contre moi-même. Ses bras m’enveloppent, solides malgré leur finesse. Je discerne la lumière au bout du tunnel, mais je devrais m’y diriger de mon plein gré, seul. Victoria m’attendra, je le sais. Mais il est temps que je commence à me relever. Pour elle. Pour nous.

Et peut-être, un jour, pour eux…

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