CHAPITRE 30.3 * VICTORIA

6 minutes de lecture

V.R.S.de.SC

♪♫ ... ♪♫


Galvanisée par l'odeur douceâtre de l'eau, je me surprends à explorer les petits plaisirs matériels. Je me dirige d’un pas décidé vers le meuble vasque, où sont alignés divers échantillons. Je les effleure du bout des doigts, ravie de constater qu'il s'agit d'une marque dermatologique toulousaine, réputé pour ses produits bio à base de pastel. Je visualise parfaitement leur boutique près de la cathédrale Saint-Étienne, à François-Verdier. Une gamme écoresponsable, à base d'extraits naturels, avec une approche respectueuse pour la santé. Parfait. Avec ma peau sensible, je sais que ces produits seront doux pour moi. Je les saisis sans hésiter.

Un shampoing doux, le cube de cocagne à l’huile de pastel, et pourquoi pas le gommage corps : autant profiter pleinement de l’expérience. A quoi bon être dans un hôtel de luxe sinon pour s'offrir un petit moment de bien-être. Mon regard s’attarde encore sur le petit pot en verre portant la mention “Baume Repulpant Antioxydant” et sur l'élégante gua shua vere, posée à côté, comme un appel à choyer ma peau. Peut-être plus tard.

Toujours assis sur le rebord de la grande baignoire au design épuré, James m’observe, immobile. L'intensité de son regard pétillant me fait frémir, et je ne peux m'empêcher de sourire, flattée par l'attention qu'il me porte. Dans cette ambiance intime, je sens le poids de ses attentes, et une vague d'excitation me traverse.

— "Toujours pas décidé ?”, sa réponse se faisant attendre, je poursuis : “Bon, puisque c'est comme ça..."

Emcombrée de mes petits échantillons, je m'avance vers le bassin —une véritable oasis de détente, avec ses dimensions généreuses propices à la relaxation. Et pas que pour une personne. Pas embarassée le moins du monde — à quoi bon cacher mon corps que James connait déjà si bien —, je me débarrasse du dernier rempart de dentelle noire qui me sépare de mon bain chaud. Je jette mon dessous au sol d'un geste théâtral et sans attendre, j'enjambe la baignoire.

Le contact brûlant m’arrête net, mes orteils se repliant instantanément. Je marque une pause pour habituer mon corps à cette chaleur enveloppante. Puis, je pénètre prudemment dans l’écrin liquide, centimètre par centimètre, jusqu’à ce que l’eau m’engloutisse presque entièrement. Mes muslces se dénouent et se relâchent tandis que je me cale contre la paroi lisse. Un long soupir d’aise s’échappe de mes lèvres alors que je me prélasse, laissant mes membres jouer à la surface.

Le bruit de l’eau crépite autour de moi. Chacun de mes mouvements provoque des remous scintillants. James, attentif à chaque détail, semble figé dans le temps. Je sais qu’il est captivé, mais je ne laisse rien paraître. Je feins l’indifférence, tout en me délectant secrètement de l'attention qu'il me porte.

Je repère un plateau en métal argenté près de la robineterie. Une magnifique bombe effervescente bleu dragée, de petits flacons en verre dépoli ressemblant à des huiles essentielles, des récipients métalliques, probablement remplis de sels de bain ou d'autres trésors relaxants. La parfaite panoplie pour un festin sensoriel. Je souris face à la perspective de cette escapade lénitive. C’est comme un dernier cadeau d’anniversaire.

— “Passe-moi le pot qui est là-bas, s’il te plait”, demandè-je en l’indiquant du bout du pied.

L’eau éclabousse doucement lorsque mon geste caresse la surface avec sensualité. James sort de sa torpeur et de son mutisme.

— “Tu es vraiment incorrigible, tu le sais ça ?” lâche-t-il.

Ses yeux azurite balayent mon corps immergé avant de se poser sur ledit pot. Il l’attrape et ouvre le couvercle : une délicate odeur florale enveloppe la pièce d'une fragrance apaisante.

— “Des sels de bain”, commente-t-il en arquant un sourcil. “Tu seras heureuse : ils sont bleus”.

— “Parfait. Peux-tu en saupoudrer l'eau du bain s'il te plait, et plonge la bombe également, que je puisse enfin bénéficier de ce petit moment de relaxation”, rétorquè-je en coiffant mes cheveux pour les ramener sur le côté.

Je m’étire complètement, trouve une position agréable et ferme les yeux en soupirant.

D'abord, j'entends une pluie de cristaux qui percent le miroir liquide. Puis, un éclatement plus prononcée, suivi d’un léger pétillement, lorsque la boule bleue atterrit et se dissout près de mon mollet. Ensuite, une main. Qui glisse. Crée des vaguelettes qui chatouillent paresseusement ma nuque, le haut de mes seins.

Soudain, des gouttes s'écrasent sur ma peau, titillent ma poitrine qui flotte allègrement.

Alors que je m'aventure à soulever une paupière, une gerbe m’éclabousse le visage. Je fais mine de rien. Seconde projection d’eau, plus énergique cette fois. Quel gamin ! S’il croit me perturber, il se trompe royalement. J’ai soudainement une folle envie de m’immerger au complet. L’eau m’appelle et j’y réponds. D’un mouvement fluide, je m’introduis sous la surface en coupant ma respiration.

La sensation de l’eau qui me happe est fantastique. Cette impression d’apesanteur, de légèreté, les sons étouffés, les vibrations qui se répercutent contre les parois... le monde aquatique est si fascinant. Comme j’aimerais avoir une baignoire chez moi ! J’espère que James considérera ce critère comme primordial pour notre futur logement. Notre ? Non ! Son... Mais… pourquoi cette réflexion saugrenue ?

Avec un effort gracieux, je me propulse hors de l’eau. Je prends une profonde inspiration, remplissant mes poumons d'une délicieuse brise parfumée. Mes mains glissent sur mon visage, chassent les gouttes qui perlent encore, avant de lisser mes cheveux mouillés en arrière. Je me redresse, l’eau ruissele le long de ma peau, et j’ouvre enfin les yeux pour tomber nez à nez avec un James à l’air grave et aux sourcils froncés.

— “Qu’est-ce qu’il y a ?”, je l'interroge mi-taquine, mi-perplexe. A voir ton expression, je suppose que je suis un peu plus poulpe que sirène dans la réalité, c'est ça ?”

James reste coi un instant, ses yeux outremer me transpercent.

— “Tu plaisantes là ? Je n'ai jamais croisé de sirène, mais, putain, si elles sont toutes comme toi, trien d'étonnant à ce les marins perdent la tête !”

En réaction à sa flatterie, un frisson m’électrise et un petit sourire nait sur mes lèvres, à la fois fière de mon petit effet cinématographique et un peu intimidée par une situation qui m’est inédite.

— “Tu sais que dans certains mythes, les sirènes sont plus proches du monstre marin que de la beauté envoûtante ?”, expliquè-je en jouant la carte de l’humour, tout en baissant légèrement le menton pour masquer la chaleur qui monte à mes joues.

— “Vi, s'il y a des monstres comme toi, je signe tout de suite pour me faire capturer.”

Dans son regard, je devine quelque chose que je ne vois pas chez moi. Sa confidence m’enfièvre et je m’enfonce un peu plus dans ce voile revigorant.

— “Bon, sinon, dois-je te rappeler que l'eau est à la bonne température pour deux ?”

— "Je ne sais pas, Vi. On dirait qu’il n’y a plus trop de place pour moi là-dedans étant donné qu’une jolie petit sirène y a pris ses quartiers”.

Je lui tire la langue, railleuse.

— “Je vais me faire encore plus petite, promis, pour que ton fessier royal puisse s'installer confortablement… Devant ou derrière, d'ailleurs ?”

James semble hésiter, ses yeux pétillants alors qu’il soupèse ma proposition. Mais avant qu’il ne prenne une décision, je réalise que j'ai envie de le dorloter à mon tour, c qui me donnera par ailleurs une bonne excuse pour le sentir contre moi et l’admirer tout à mon aise.

— “Changement de programme”, je proclame. “Allonge-toi contre moi. Ce sera plus agréable.”

Je m’installe un peu mieux sur l’arrière de la baignoire.

— “Pour toi ou pour moi ?” questionne-t-il en levant un sourcil narquois, avant de se reprendre rapidement en voyant mon air renfrogné et mes mains prêtes à l’éclabousser. “Ok d’accord, comme il vous plaira votre Majesté aquatique !”

James me rejoint enfin. Son corps musclé trouve naturellement sa place contre le mien, créant un cocon chaleureux. Son dos, solide et réconfortant, se presse contre mon ventre, et sa tête vient se nicher contre ma poitrine. Le contact est intime, sécurisant, et je sens sa respiration se calquer sur la mienne, plus lente, plus profonde, comme si le poids du monde fondait autour de nous.

L'eau qui nous étreint continue de glisser doucement sur sa peau bronzée. Chaque goutte y trace un fil scintillant qui ruisselle avant de disparaître dans le bain. Mes doigts suivent leur chemin, survolent avec délicatesse ses épaules, puis son torse, là où ses battements calmes résonnent sous mes paumes. A chacune de ses respirations, des vagues légères créent une danse subtile à la surface. Je pose ma joue contre ses cheveux et je continue mon exploration méticuleuse. Je pourrais rester ainsi des heures, perdue dans cette bulle de sérénité. À l’abri de tout. Ici, dans cette intimité délicate, seuls comptent le poids de son corps alangui contre le mien, la douceur infinie de cet instant suspendu et le silence que nous partageons. Rien d’autre n’a d’importance, juste cette fusion parfaite, dans ce premier bain à deux, sous les premières lueurs d'un nouveau départ, d'un nous retrouvé.

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