CHAPITRE 37.1 * VICTORIA
TOME 2
24H POUR SE DECLARER
PARTIE 3
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DES PIQUES ET DES COEURS
ATTENTION PASSAGE EROTIQUE
PERSÉPHONE ET HADÈS
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V.R.S.de.SC
♪♫ ... ♪♫
Ses satanées mèches vont avoir ma peau. Je devrais peut-être juste renoncer à mon envie de chignon flou et laisser mes cheveux au naturel. Non. La soirée s’annonce agitée et je serais vraiment plus à l’aise s’ils sont relevés. Je m’échine à donner forme à un style faussement décoiffé, mais cette crinière infernale me donne du fil à retordre ! Je la déteste. Bonjour la sophistication et mon « effet sorti de lit » ! Mais zut aussi ! Ma coiffure doit être un savant mélange de désinvolture et de glamour, suffisamment lâche pour laisser entrevoir la couronne de tiges, branches et roses que je vais porter, tout en restant assez structurée pour ne pas que tout fiche le camp au beau milieu de la soirée. Après tout, je suis Perséphone, la reine des enfers, tirée à quatre épingles, mais diablement sexy, pas une sauvageonne sortie des ronces. C’est peine perdue…
Je tire aussi délicatement que possible sur une boucle folle, mais elle refuse de se plier à ma volonté. Je peste.
Une voix me parvient du salon.
— “Tu t’en sors ?
Bien sûr que non, je pense en enfonçant une énième tige en métal dans mon crâne. Voilà que je me fais mal maintenant. Je jure de plus belle. Silencieusement.
— “A moins que tu m’aies caché des talents d’architecte capillaire”, je lui lance tout en fouillant la trousse dans laquelle je garde mes accessoires.
Ma superbe idée de mise en pli façon coiffé décoiffé s’envole minute après minute. Pourquoi est-ce que rien ne se passe jamais comme prévu ? Ce n’est pourtant pas la première fois que j'essaie ce chignon alors pourquoi j'ai deux mains gauches aujourd’hui ? Pourquoi je suis incapable de rester calme ? Allez savoir.
Je perds patience et m'observe dans le miroir, l'air dépité. Au moins, ma peau est saine, pas de rougeurs ni tiraillements. C’est déjà ça. Mais eux là qui me narguent ! Ils me catapultent en plein mission impossible. Bon sang… C’est stupide, vraiment, mais il me faudrait au moins ça pour être à la hauteur. Ce soir, de tous les soirs, tout devrait être parfait.
Allez, on respire, c’est juste une coiffure. Rien de grave… enfin, en théorie.
La frustration se lit sur mon visage, et mes yeux, humides d’émotions, sont sur le point de déverser leur trop-plein. James apparaît soudain dans l’embrasure de la porte. Son regard glisse sur moi et un frisson court le long de ma colonne vertébrale, trop faible pour atténuer ma déception.
— “Oula, oui, je vois ce que tu veux dire...”, observe-t-il.
Voilà ! C’est bien ce que je me disais : c’est une catastrophe ! Je souffle totalement désenchantée. Mes cheveux défient toutes les lois de la gravité aujourd’hui. Un petit ricanement me surprend. Je jette un coup d’œil à James à travers la surface en verre qui me fait face. Il a la main posée sur le chambranle, son corps légèrement incliné vers l’avant. Ses muscles saillants, visibles sous son t-shirt blanc, me font perdre le fil de mes pensées. Mais, regardez-le, lui ! Impeccable. Sexy en diable alors qu'il n'est même pas coiffé du tout ! Il m'agace. Le monde m'agace, cette foutue crinière m'agace !
Il glisse une main dans sa poche, se frotte le front de l'autre et fixe le sol. C’est moi, où il se retient de rire ? Je suis à deux doigts de taper du pied par terre et d’envoyer valser ces saletés de barrettes qui retiennent que dalle ! Mais, alors, je contemple mon reflet et mes épaules s'abaissent et un soupir de désillusion s'échappe de mes lèvres.
— “Tu sais, même les reines des enfers ont leurs jours sans. Sur un malentendu, ça peut passer...”
Qu’est-ce qu’il en sait lui ? Je relève la tête et le toise intensément. C’est plus qu’exaspérant de voir à quel point il semble s’amuser de ma situation. Mais, puis-je lui en vouloir ? Non. C’est un désastre. Néanmoins, je ne vais pas me laisser démoraliser davantage. Il m'insupporte là.
— “C’est facile à dire pour quelqu’un qui ne se bat pas contre une chevelure récalcitrante !”, je bougonne.
Il sourit de plus belle, révélant des dents d’une blancheur éclatante, comme si le soleil lui-même avait pris place sur ses lèvres. Le rustre. Avec son charme à la star hollywoodienne, il réussit à faire palpiter mon cœur tout en m'irritant. Je pivote pour lui faire face, les bras croisés sur ma poitrine adoptant une attitude de défi et une mimique de nonchalance glaciale, même si je sens la chaleur monter à mes joues.
— “Puisque tu aimes jouer les spectateurs aguerris, pourquoi tu ne m'aiderais pas au lieu de rester planter là, Monsieur le commentateur du dimanche ?!”
James pénètre d’un pas feutré dans la pièce et se campe devant moi.
— “Je peux...”, commence-t-il d'une voix traînante, basse et — presque — sensuelle. “Mais tu devras te soumettre à mes doigts habiles.”
Je ricane. Je parie qu’il n’a jamais coiffé une femme de sa vie. Certes, ce matin, il m’a lavé les cheveux, mais ça ne veut rien dire. Je doute de ses compétences en la matière. Mais soit. De toute manière, la situation ne peut pas être pire que ce qu'elle est.
— “Très bien. Alors, vas-y l’expert !”, je lui lance sur le ton du défi.
Si James réussit à me sauver de ce fiasco, un remerciement pourrait être envisageable. Parce que pour le moment, il me donne surtout envie de l’envoyer sur les roses avec son air prétentieux, son sourire ravageur et ses manières de grand chevalier. Ses doigts habiles, hein ? J’attends de voir ça !
Mon prétendu sauveur s’avance encore, affichant soudain un regard sérieux et concentré. Je décroise les bras et m’appuie derrière moi. Ses doigts s’affairent avec délicatesse, démêlent par-ci, réajustent par là. Leur contact est… Curieusement agréable. Ne pouvant voir ses gestes, je ne peux pas me permettre de juger. Cependant, il semble parvenir à maîtriser son sujet.
Alors que je me détends lentement et mes muscles se dénouent peu à peu, James m’attrape par les hanches et me soulève pour m’asseoir sur le meuble vasque. D’une main, je m’agrippe au rebord, de l’autre à son épaule, pour éviter de dégringoler.
— “Qu’est-ce que tu fais ?”, je lui demande d’une voix paniquée.
Ses yeux bleus, à quelques centimètres des miens, me détaillent avec une intensité accrue. Je me presse un peu plus contre lui, mais il me soutient d’une poigne assurée.
— “Comme tu peux surement le deviner, ma petite fée capillaire, je n’ai aucun talent pour ce genre de prouesses techniques”, argue-t-il en esquissant une expression charmeuse. “Mais je peux te dire une chose : tu es tout simplement magnifique et ta coiffure est parfaitement arrangée. À la fois étudiée et négligée. Digne d’une couverture de magazine.”
Sous la lumière blanche de la salle de bain, ses pommettes saillantes, le léger ombrage de sa barbe de trois jours, et l’épaisseur de ses cils se dessinent avec précision, donnant à son sourire une insolence féroce. Mon cœur bat plus vite, mais je hausse un sourcil pour dissimuler mon trouble.
— “Oui, enfin, c’est juste ton avis, et ça ne veut pas dire que je dois te croire sur parole,” raillè-je en grimaçant.
— “Très bien, si tu refuses de me prendre au sérieux, tant pis pour toi. Mais j’ai une proposition à te faire.”
Son regard énigmatique est indéchiffrable. Sa bouche par contre…
— “Tu crains pour la tenue de ton joli chignon, c’est ça ?”
La pièce, pourtant familière, semble soudain trop petite, l’air trop lourd. Je hoche la tête en déglutissant, parce que, Mon Dieu, à l'instant où il prononce sa question, une vague d’anticipation submerge mes sens et mes pensées, mon bas-ventre se serre tandis qu'une douce chaleur s’y propage comme un courant électrique prêt à éclater.
— “On va tester ça ensemble, d’accord ? Mais, Vi, tu devras rester tranquille...”
Sa voix baisse d’un octave, devient plus rauque. Un sourire carnassier émerge et ses pupilles, sombres comme de l’obsidienne, ne me lâchent plus. Ses doigts glissent lentement jusqu’à mes épaules, m’obligeant à détacher mes bras de lui. Il encercle mes poignets et place mes paumes sur la vasque.
Je ne peux ni acquiescer, ni protester. Mes pensées se bousculent, se perdent dans la lueur qu’il me renvoie, et je me contente de le fixer, hypnotisée.
— “Bien. Pour la réussite de notre…”
Il s’interrompt, cherche ses mots et finit par me sourire en coin, avec cette étincelle espiègle au fond des pupilles.
— “Expérience, tu vas devoir me faire confiance, Victoria. »
Pour seule réponse, j’humecte mes lèvres. Il observe le mouvement de ma langue, il semble perdre sa concentration, l’ombre d’un désir venant assombrir davantage ses yeux. Doucement, il se faufile entre mes jambes. Ses mains, fermes et douces, remontent le long de mes membres, effleurent la peau avec une rare précision. Quand il atteint ma nuque, il réarrange quelques mèches rebelles minutieusement. Les battements de mon cœur s’accélèrent, et malgré mes efforts pour ne pas bouger, je sens mon corps réagir de plus belle.
— “Tu devras rester aussi immobile que possible...” me susurre-t-il à l’oreille.
Un frisson exquis, mélange de nervosité et de plaisir, parcourt mon corps. Il incline la tête, cherche mon regard. Ses doigts se posent sur l’encolure de ma robe chemise en velours acajou, que j’ai choisie spécialement pour éviter de ruiner ma coiffure ce soir, en passant la tenue qui m’attend au club.
Je l’observe, ce tentateur impitoyable, tandis qu'il s’applique à défaire le nœud de ma robe, pour s'attaquer ensuite méthodiquement aux boutons, un par un, jusqu’à découvrir ma poitrine, puis mon ventre, puis l’unique pièce de lingerie qui m'habille : un tanga couleur chair sans armature. La discrétion ou rien, telles étaient les seules possibilités sous la fameuse robe, tout en jeu de transparence. Évidemment, je ne sortirai jamais de chez moi sans un bas, donc l’option du rien n’en était pas une.
Mon bel amant finit par arriver au bout de sa tâche et fait glisser le tissu derrière mes épaules. Il m’aide à l’extraire totalement et la lance sans hésitation sur le panier à linge. Ses mains se posent sur mes cuisses avec une fermeté possessive, pressant ma chair, avant de se mordre les lèvres en fixant les miennes. Puis, sans prévenir, il me tire encore un peu plus près. Nos bouches se frôlent,à peine, juste un murmure, une invitation qui laisse ma respiration suspendue.
— “Tiens-toi avec tes deux mains sur la vasque et ne bouge pas”, m’enjoint-il d’une voix grave, une voix qui me transperce et fait vibrer chaque fibre de mon être.
Je m’exécute, profitant de ce moment pour me recaler contre le rebord étroit du meuble, une posture qui me maintient dans une étrange tension, entre équilibre et abandon. La fraîcheur du revêtement contre ma peau nue ajoute un contraste piquant, accentuant la chaleur qui se diffuse en moi.
James se recule d’un pas et me dévisage de haut en bas. Être ainsi exposé à son regard fiévreux, sous la lumière vive et froide de la salle de bain, propulse une bouffée d’adrénaline dans mes cellules. Son attention est monopolisée un instant par ma poitrine qui se gonfle au rythme de mes respirations somme toute mesurées — mais plus pour très longtemps.
— “N’oublie pas : c’est une mise en situation. Si tu gigotes trop, le chignon va se défaire. L'objectif, c'est de le garder intact.”, m’informe-t-il dans un léger mouvement de tête suivie d’une moue moqueuse.
Ses mots coulent comme de la lave incandescente dans mes veines. Mes doigts se crispent autour de la céramique blanche, et j’avale difficilement ma salive, mes sens en alerte, mon souffle court. La distance entre nous disparaît lorsque James revient dans mon espace. Ses mains chaudes coulissent sur mes seins, éveillant en moi des ondes de plaisir jusqu’au creux de mon ventre. Il laisse échapper un râle discret, diablement érotique.
Quand sa bouche vient happer mon téton, c’est de la glace en fusion qui inondent mon être. Sa langue descend ensuite le long de ma peau, traçant une ligne vers mon nombril, puis plus bas, jusqu’à ce que ses lèvres frôlent la barrière de tissu, à peine un souffle de distance de mon intimité. Instinctivement, je bascule ma tête en arrière dans un long soupir.
Tout à coup, James se relève et se plante devant moi, sourcils froncés.
Il ricane, un éclat mutin dans ses iris.
— “Je savais que tu ne tiendrais pas une minute.”
Le beau salaud ! Je m’apprête à répliquer, à lui faire tâter la répartie cinglante posée sur le bout de ma langue, mais mon cher partenaire me prend de court.
— “Si tu enfreins les règles, je serais obligé de tout recommencer depuis le début et... et il me semble que tu es attendue, non ?”
C'est un provocateur, un charmeur invétéré, un virtuose de la tentation, le diable en personne. Il sait exactement quel effet il a sur moi, et il en profite. Je lui lance un regard noir, mais au fond, comment pourrais-je vraiment lui en vouloir ?
— “T’es vraiment démoniaque, n’est-ce pas ?” rétorqué-je, feignant l’indignation alors que des milliers de papillons virevoltent dans mon cœur.
— “Ah, tu me gratifies enfin d’un gentil compliment ! Et ta jolie bouche a retrouvé l’usage de la parole”, me tance-t-il.
Je pince les lèvres, et réplique d’une voix lente et menaçante :
— “Mon genou peut aussi trouver le chemin de ta virilité, tu sais”.
La joie perce à travers son rire et résonne contre le carrelage blanc de ma salle de bain.
— “Putain, Victoria...”
Ses lèvres viennent capturer les miennes dans un élan spontané. Et moi, moi je lâche enfin le rebord de ce satané meuble pour enlacer sa taille avec mes jambes, emprisonnant son corps contre le mien. Nos langues se lancent dans une danse effrontée et nos mains explorent chaque centimètre de peau de l'autre, avides et insatiables . Soudain, une mèche indisciplinée échappe à son cantonnement forcé et vient chatouiller nos visages. James s’écarte, le sourire aux lèvres.
— “Au temps pour moi, j’ai dérogé à ma propre règle.”
— “Laquelle exactement ?”, je demande, curieuse et amusée.
— “Celle qui stipule qu’il ne faut pas toucher tant que tu ne restes pas parfaitement immobile,” explique-t-il, un éclat de malice dans les yeux.
Je lève un sourcil narquois.
— “Et tu as déjà oublié ta propre règle ?"
Il se rapproche derechef, son regard intense rivé sur moi.
— “Pour toi, Victoria, je suis prêt à quelques exceptions,” murmure-t-il.
Sa voix, tel du velours, me fait frissonner.
— “Mais pense à ton chignon.”
— “Je m’en fiche bien de mon chignon !”
— “Crois-tu qu'on doive redéfinir les règles, mo chridhe ?”, chuchote-t-il encore, avant de déposer un baiser léger sur ma bouche.
Je passe mes doigts dans ses cheveux, tandis que ses doigts joueurs et taquins tapotent mes hanches.
— “Oui.”
— “Dommage. Moi qui étais si impatient de voir combien de temps tu allais résister...”
— “Et toi, tu penses vraiment que tu pourrais faire face si je te soumettais à la même torture ?”
— “Là, tout de suite ? Probablement pas...”, me confesse-t-il, d’un air joyeux.
Les papillons dans mon ventre sautillent en battant frénétiquement des ailes.
— “On est d’accord alors ?”, je le défie.
Il hoche la tête.
— “Passons directement au dessert, veux-tu ? J’ai une soirée à laquelle Perséphone doit assister et elle a hâte de revêtir sa robe pour qu’un certain Écossais — ou devrais-je dire Hadès ? —, ait envie de la lui ôter.”
James me renvoie un sourire éclatant, son regard se faisant plus sombre et intense, comme s’il incarnait soudain cet Hadès mystérieux et magnétique, prêt à emporter sa bien-aimée dans les ombres. Ses mains se glissent avec précision le long de mes côtes puis de mes omoplates, remontant lentement le long de mon dos, déclenchant une traînée de frissons sur leur passage.
— “Le dieu des Enfers est très possessif, surtout quand il s'agit de sa reine...”
Sa langue glisse vers mon oreille.
— “Et Perséphone sait exactement comment convaincre son roi de satisfaire tous ses besoins”, dis-je alors que mes ongles griffent la chair tendre de son dos.
Les battements de mon cœur s’emballent lorsque James m’embrasse à nouveau passionnément. Ce qui a suivi n’a été que souffles précipités, gémissements incontrôlés, murmures tendres, corps qui s’entrelacent, se côtoient, se percutent. Comme deux mèches qui s'embrasent pour allumer un brasier unique. Comme deux gouttes qui fusionnent pour n’en faire plus qu’une. Nos bouches ont raconté leur propre histoire. Nos mains ont traqué chaque courbe, cartographié chaque recoin. Les caresses sont devenues promesses, les baisers, des aveux étouffés.
Mon chignon ? Il a résisté aux assauts d’un homme passionné. Il tiendra bien toute la soirée.
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