CHAPITRE 40.3 * JAMES
J.L.C
♪♫ ... ♪♫
Ah, mon gars, je pense plutôt que ce sont mes poings qui vont causer si tu viens me chercher des noises.
Je soutiens son regard en gardant mon sang-froid, glissant mon téléphone dans ma poche. La tension monte d'un cran alors que Mati se plante devant moi, sa mâchoire crispée, ses yeux braqués comme s’il s’attendait à ce que je m’excuse ou que je me défile.
— "T’as quelque chose à dire ?" je lance, sans masquer mon agacement.
Il esquisse un sourire amer, un de ceux qui en disent long sur l’orage qui gronde à l'intérieur.
— "Tu sais ce qu’on dit : jouer avec le feu, ça laisse des brûlures."
Je tire sur ma clope, en essayant de ne pas montrer que ses mots viennent d’éveiller l’animosité en moi. Ce type pense vraiment pouvoir débarquer ici et me faire la leçon ?
— "Tu veux être plus clair ?"
Il s’approche d’un pas, et je sens presque l’électricité de sa rancœur se frayer un chemin jusqu’à moi.
— "Victoria. T’es un mec trop instable pour elle."
Son avertissement a le don de me faire bouillir. Il croit que je ne le sais pas putain ! Mais je garde mon calme. Si je lui pète les dents, je ne vaux pas mieux que lui et Victoria m’en voudra.
— " Tu supportes pas l'idée qu’elle ne veuille pas de toi, c’est ça ?”, je persifle dans ma barbe.
Mati serre les poings, et je vois dans ses yeux qu’il est à deux doigts de déraper.
— “ Si t’étais pas réapparu dans...”
Je lui coupe la parole.
— “Quoi ? Tu l'aurais eu pour toi ? Je suis revenu. Et crois-moi, j’suis pas prêt de m’en aller.”
Mati me fixe avec un mélange de colère et de frustration, comme s'il espérait que ses mots finiraient par me faire reculer.
— “Vic est une amie. Je tiens à son bonheur et à sa sécurité”, affirme-t-il, la voix assurée.
Son "amitié", il peut se la foutre où je pense.
Il me toise, son regard brûlant de ressentiment, mais il n'aura pas le dernier mot.
— "Alors c’est pour protéger Victoria que tu t'envoies en l'air avec elle ?”
Ses yeux lancent des éclairs. Les dents serrés, il se retient visiblement de me frapper, et l’idée m’arrache un sourire narquois. Il n’aura jamais ce qu'il veut d’elle. Il en est conscient. Moi aussi. Comment ? Je n’en sais foutrement rien !
— "Contrairement à toi, je suis là pour elle, vraiment là. Et si t’as l’intention de la faire souffrir encore une fois…"
Je m'avance d’un pas, le défiant de terminer sa phrase.
— "Tu peux te persuader de ce que tu veux, mais t’as perdu d’avance," je souffle en tirant une dernière bouffée de ma cigarette avant de l'écraser.
Je tourne les talons, prêt à le planter là, avec sa rancœur. Mais avant de m’éloigner, je fais machine arrière, incapable de résister à l'envie de l’asticoter ou de le mettre en garde, selon le point de vue.
— " Au lieu de tourner autour de ma copine et de te mêler de nos affaires, pourquoi tu ne règlerais pas les petits soucis avec la tienne ?”
Son regard s’assombrit, et je note la tension qui passe dans sa mâchoire. Pas de doutes, il comprend de qui je parle.
— “Je pensais avoir été clair. Ne mêle pas Leslie dans cette histoire”, menace-t-il froidement.
Un rictus satisfait s'étire sur mes lèvres. Ce gars est mordu de sa brune. Raison de plus pour qu'il reste loin de Ma femme !
— “ Ça t’arrange de jouer les protecteurs auprès de Vi, hein ? Peut-être que t’as juste trouvé un moyen détourné de compenser ce qui t’échappe.”
Il se raidit, ses poings vissés. J'ai touché une corde sensible. Tant mieux, il est temps de lui balancer sa vérité en pleine face.
— " Victoria est assez grande pour décider de ce qu’elle veut. Et si ça te dérange, c’est ton problème, pas le nôtre. En attendant, demande-toi si tu fais vraiment ça pour elle… ou pour toi. Te servir de Victoria pour atteindre sa copine, c’est vraiment un coup bas de ta part.”
— “Tu ne sais pas de quoi tu parles !” vocifère le crétin, le regard noir.
— "Oh, mais si. Tu vas finir par briser une amitié juste parce que t’es incapable de garder ta queue dans ton froc.”
Je le fixe, prêt à en découdre, tandis qu’il fulmine, son masque de "justicier" craquant sous la pression. Ses traits se déforment en un rictus cynique et il finit par lâcher, venimeux :
— "Victoria est unique, mais des filles comme Leslie… tu n'as que l'embarras du choix. Il y en a à la pelle. Prend plutôt une de celles-là au lieu de t’attaquer à une femme de sa trempe."
Sa phrase résonne comme une insulte calculée. Une montée de colère me brûle la gorge. Je prends une grande inspiration, mais je me demande qui il tente de convaincre au juste.
— "Pardon !”, tonitrue une voix féminine dans son dos.
Je n’ai même pas le temps de réagir qu’une tornade déboule entre nous, se plante face à Mati. Leslie. Bras croisés sur sa poitrine, elle le toise de toute sa hauteur, et moi, je ne vois plus qu’une queue de cheval brune qui virevolte devant mes yeux.
Son ton est glacial, tranchant comme une lame lorsqu'elle s'adresse à lui.
— "Alors, comme ça tu t’éclates à vomir sur le dos des femmes ? C’est ta nouvelle manière de te donner de l’importance ? Ou c’est juste pour moi que tu réserves ce genre de conneries ? Baver sur mon cul comme un gamin planqué, ça t’excites, c’est ça ?”
Je ne peux retenir un sourire. La voir s’interposer, avec cette énergie prête à exploser, est presque jouissif. Elle sait se faire respecter, et visiblement, le connard va en prendre pour son grade.
Mati tente de garder contenance, mais je vois bien que la présence de Leslie le déstabilise.
— "C’est pas ce que tu crois," marmonne-t-il, jetant un regard noir dans ma direction.
Elle ne lui laisse pas le temps d’en dire plus.
— “Ce que je comprends surtout, c’est que t’as juste envie de me sauter comme d’habitude et puis tu vas tirer ton coup ailleurs en suivant. Genre avec ma meilleure amie par exemple.”
Je me demande ce que Leslie pense de leur “liaison” tiens ? En tout cas, elle semble bien au jus.
— “Tu te fous de ma gueule là ! Combien de minables tu te tapes, toi ? Et dans mon club en plus !”
La furie ne bronche pas. Lui, il mitraille en rafale. A ce rythme, il va finir par se prendre une balle perdue.
— “Ça ne te regarde pas !”, éructe-t-elle en relevant le menton.
Le mec ricane, amer, avant de cracher, sur la défensive :
— “Ah non ? Et en quoi ça te concerne avec qui que je couche au juste ? T’as les nerfs parce que c’est Victoria ? T’es juste jalouse et t’arrives pas à avaler que je prenne mon pied sans toi, pas vrai ?”
Putain ! Qu’il prononce encore le prènom de Victoria et il va goûter au pavé !
Leslie se redresse, fière, les bras le long du corps, les poings crispés. De ma position, je capte l’intensité de ses gestes, le ton polaire qu’elle emploie ; elle est prête à lui renvoyer chaque pique avec un aplomb inébranlable.
— “ Avaler ? Tu choisis bien tes mots mon grand ! T’en fais pas pour moi, j’ai de l’entraînement, mais ne compte plus sur moi pour te le rappeler ! Ce chapitre-là est bien refermé !”
Je m’abstiens de commentaire ou de pouffer de rire. Voir Leslie faire son numéro est un spectacle qui me régale.
Mati tréssaille et ses orbites ne sont plus que deux puits sans fond.
— “A part remuer tes hanches et exciter mes clients, je ne compte plus sur toi pour grand chose !”
Ouchh ! Mes yeux s'arrondissent de surprise. La rudesse de son reproche résonne comme un coup de fouet dans l'air chargé de tension. C'est brutal, c'est tranchant, et ça tombe comme une accusation, bien que je sente que derrière cette bravade se cache un homme en souffrance. La torture insidieuse qu'elle lui inflige — où qu'ils s'infligent mutuellement — doit lui peser sur la conscience à longueur de journée.
Le silence s’installe un instant, pesant, tandis que je sens l'atmosphère crépiter.
La gifle assourdissante qui lui percute la face deux secondes plus tard, par contre, est sans équivoque. Les clients dans la file d’attente et les passants se tournent vers nous, leur attention rivée sur la scène.
Mati réagit vivement en saisissant les poignets de Leslie et en la plaquant contre lui, son visage à quelques centimètres du sien. Il est rouge de colère et ses narines frémissent, je peux même voir les veines à ses tempes palpiter. Tornade se débat, mais il la maintient fermement.
Je fais un pas en avant, pour intervenir, mais il relâche soudain sa prise, comme s’il venait de réaliser la portée de son geste. Son regard accroche le sien, un mélange d'horreur et de douleur farde ses traits.
Leslie perd son équilibre, recule, se heurte à mon torse, s'accroche à ma manche. Elle se retourne brièvement, son regard perçant rencontre le mien, puis tout se déroule en une fraction de seconde. Sans un mot, elle se jette à mon cou et écrase ses lèvres sur les miennes.
Une paire de seins m’écrase contre moi, une langue s’insinue dans ma bouche. Puis, aussi vite qu’elle est apparue, elle disparaît. Leslie est projetée en arrière, propulser de force dans les bras de Mati, me laissant désorienté, et extrêmement incommodé surtout. J’ai l'impression d’être le dindon de la farce. Putain, par pitié faite que Victoria ne soit pas dans les parages !
Le regard possessif et endiablé du type ne m’échappe pas lorsque qu’il plonge sur sa chère et tendre la capturant dans un baiser passionné. Aucun doute sur ses intentions : remplacer mon goût par le sien dans un élan de pure vengeance. Leslie finit par se détacher, tremblante et chancèle. Son bras se lève aussitôt prêt à asséner un nouveau soufflet au pauvre idiot. Mati ne lui en laisse pas le temps.
— “Je n’oserais pas si j'étais toi. Parce que je te balance sur mon épaule et je te trimballe jusqu’à mon bureau en moins de deux devant tous mes clients. On verra bien avec quelle fougue tu essaieras de m'échapper… ou pas.”
Le double sens de son discours ne m’échappe pas, à elle non plus.
— “T’as vraiment envie de jouer à ce petit jeu ?”, roucoule Lara Croft en roulant des hanches vers lui. Tu sais que je suis plutôt douée pour échapper à mes poursuivants, non ?”
Cette fille est incroyable. Sa provocation est une danse audacieuse, un jeu de chat et de souris dont elle connaît chaque pas. Je l'observe, admiratif, alors qu'elle défie ouvertement Mati, qui à cette heure, a tout du lion en cage. Sa détermination est palpable, et malgré la ligne sous haute tension qui lui fait face, Leslie refuse de se laisser démonter. Elle est comme un courant électrique, vibrant et imprévisible, un orage en miniature qui s’exprime avec une intensité rare.
— “T’auras tout sauf envie de prendre tes jambes à ton cou, bébé. Je te vois bien les mettre là où je peux en profiter pleinement, autour de mes hanches ou...”
La tornade vrombit.
— “T'es vraiment qu'un connard prétentieux !”
Bien dit !
— “T’es vraiment qu'une garce sans cœur ?”
Il est vraiment en chien et bien accro de surcroît…
Leslie ne fléchit pas, elle ricane.
— “Oh, comme t’es mignon ! Si tu penses que tes promesses à deux balles vont m’émoustiller, tu te fourres le doigt dans l'œil. Mais tu sais quoi ? Ta raison, je commence à mouiller rien qu’à l'idée”.
Elle s'approche doucement de lui, à un souffle.
— “Que dirais-tu d’un petit plan à trois ? Je te laisse le choix : par devant ou par derrière l’Écossais ?”, me lance-t-elle par-dessus son épaule.
Merde, mais à quoi elle joue là ! Ma bouche s'ouvre pour décliner, moi je ne veux que Victoria, mais la diablesse enchaîne. Putain elle ne va faire qu’attiser sa colère là !
— “Tu ne vois aucun inconvénient à ce que James se joigne à la fête, bébé ?, ajoute-t-elle en direction de Mati.
Le type est tellement tendu, que sa bouche ne forme plus qu'une ligne fine, scellée par une colère sourde. Ses yeux, quant à eux, brillent d'une lueur dangereuse, creusés par la frustration et le mépris. Rage et impuissance se livre un combat acharné en lui. Si elle le touche… Elle plaque ses paumes sur son torse bombé.
— “Oh, attends une seconde, je pense que je peux juste me contenter de lui ce soir. Vu que t’as couché avec sa meuf, ce serait un retour de faveur, non ?”
Elle me lance un sourire provocateur, ses yeux pétillants de défi. Merde, ça va partir en couilles là !
— “J'ai eu un petit avant-goût de son... potentiel tout à l'heure”, minaude-t-elle en traçant des petits cercles du bout des ongles sur les muscles du pauvre bougre. “On dirait qu'il sait comment faire rugir une femme ! Au fait, big bosse, t’es au courant qu'ils ont saccagés ton bureau avec une petite sauterie improvisée ?”
Elle se penche dangereusement à son oreille. Mati ne bouge pas d'un pouce, tétanisé.
— “Va falloir que tu prennes des mesures, je crois... Je suis très intéressée par ses… talents. QuelLE ardeur à la tâche, t'aurais dû les entendre !, “balance-t-elle allègrement en se reculant. “Tu sais, on pourrait même faire une petite compétition pour voir qui fait le mieux trembler les murs !”
Les joues en feu, je n'ose même pas ciller ou répliquer, je me contente de baisser légèrement la tête. De l'autre côté, Mati se transforme en boule de rage. Son regard est comme du feu, ses mâchoires serrées, il réduit à nouveau la distance entre eux, le ton de sa voix grondant comme un orage.
— “Tu te crois drôle, n’est-ce pas ? À te planquer derrière ton sarcasme, ton exubérance et cette langue bien pendue. Personnellement, je la voudrais ailleurs ta langue, et j’ai de quoi remplir ta bouche pour que tu la gardes fermée !
Leslie ne lui répond pas. Elle claque des dents pour faire mine de le mordre.
Putain, une femme comme ça, on comprend vite pourquoi Mati est à bout, et à fond. Cette nana est exubérante, piquante, plutôt irrésistible dans son genre. En tout cas, pour ceux qui aiment les sensations fortes. Victoria éveille cette même fièvre en moi, mais si elle m'entraînait dans une scène pareille, j'aurais déjà craqué depuis longtemps. Pour tout dire, Mati a bien du mérite de tenir face à cette tornade de provocation et j'admire presque son sang-froid. C’est d'ailleurs sur un ton calme et impassible qu'il poursuit :
— “N’oublie pas que tu m'as déjà ouvert ton cœur et que je sais ce qu'il renferme.”
— “Tu ne sais rien de moi !”
Sa voix est basse, glaciale.
— “Je connais tes moindres failles, tes réticences, chaque putain de centimètre de ta peau et la manière dont tu cries quand tu jouis !”
Je baisse les yeux. Bon sang, je ne suis pas supposé entendre ce genre de confessions intimes moi... C’est le moment que choisi ma sœur pour voler à mon secours. Un klaxon strident me fait lever la tête. Le reflet familier sur la carrosserie rouge du SUV fait aucun doute. Isla se gare non loin, et, sans perdre une seconde, je plante là le joyeux couple, les laissant à leur joute verbale. Peu importe que ces deux-là continuent à se lancer des vérités, à s'écharper ou à flirter pour ce que j’en en sais, chaque couple à sa propre dynamique. C'est peut-être leur train-train quotidien, va savoir ? Tant qu’ils règlent leurs comptes et que Mati ne galope pas vers Victoria, ça me va.
Pour ma part, plus vite je quitte les lieux, plus vite je pourrais revenir auprès de Victoria. Franchement, c'est tout ce qui compte. Je prends mes distances d’un pas rapide, marchant vers la voiture de ma jumelle, laissant derrière moi cette atmosphère électrique que je connais trop bien.
Les non-dits, les peurs, les désirs refoulés… C'est un cocktail explosif auquel je n’échappe pas moi-même, avec Victoria. Mais au fond, j’ai envie de croire en nous, de croire qu’elle et moi, on peut vraiment y arriver.
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