VICTORIA 41.4 * VICTORIA
V.R.S.de.SC
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Dans cet univers où la lumière oscille, entre les halos argentés et les ombres sanguines, moi, je suis envahi par l’attente, par le désir qui monte en moi comme une marée implacable. James, l’ange et le démon qui se confondent dans mon esprit, se frôlant sans cesse, et notre danse entre la retenue et l’abandon est enclenchée.
N’y tenant plus, je prétexte une vérification de dernière minute pour m'éclipser momentanément. Dès que j'ai le dos tourné, je récupère mon téléphone et mes doigts frôlent la surface lisse sans que je puisse résister, ouvrant notre conversation restée en suspens. Avant même que la pensée n’ait complètement pris forme, le message est déjà en train de se matérialiser. Je tape précipitamment la réplique qui me vient en tête, presque comme un réflexe.
Mais déjà, un nouveau groupe d’amis me happe, m’entraînant dans leur joyeuse demande : une séance photo avec la reine des Enfers. Je n’ai pas d’autre choix que d’accepter, c’est la règle du jeu, après tout. C’est à contrecœur que je préviens James qu’il nous faut interrompre nos échanges. Je n’en ai pas la moindre envie, mais je suis face à mes obligations.
Je prends place dans l’univers des anges, assise au centre d’une bande de jeunes éphèbes en parure céleste. En réalité la scène m'amuse : que pensera James en la voyant défiler sur les réseaux ? Un sourire énigmatique, une pose exagérée et l’illusion prend vie.
Mon appareil vibre dans ma sacoche lorsque je me lève du Cherterfield capitonné. Je trépigne pour le saisir, mon cœur battant déjà la chamade. Une curiosité presque irrépressible me presse d’ouvrir le message. James me propose un défi. Un sourire d’anticipation effleure mes lèvres et un léger frisson me parcourt la nuque quand je l'invite à le formuler. Lorsque l’énoncé de sa requête apparaît enfin à l’écran, mon corps tout entier est fauché par l'impact des mots. C’est phénoménal, un choc brutal qui me traverse comme une décharge électrique, chaque syllabe résonnant dans mes veines.
… Plus de bas… Je te veux nue sous ta robe.
Mon corps se tend, une chaleur torride picote mes joues, mes mains tremblent légèrement tandis que je fixe l'écran, incapable de détourner les yeux. Je reste là, statufiée un instant, la respiration plus courte, un mélange étrange de désir et de stupeur se frayant un chemin dans mes entrailles.
Il n’y a aucune ambiguïté dans ses paroles. Elles sont directs, implacables et incroyablement érotiques. Le désir qu’il y a dans cette simple phrase, cette exigence brûlante, cette provocation insolente résonne au plus profond de moi.
Je m'efforce de rester calme, et pendant un quart de seconde, une étincelle de rébellion m’effleure l'esprit. Comment peut-il oser suggèrer ça, si soudainement, si crûment ? Pourtant, au fond de moi, je sais… il n’a pas besoin de demander autrement. Je suis déjà piégée dans les rouages de ce jeu.
Une partie de moi se sent irrésistiblement attirée par l’intensité de la proposition, mais l’autre partie lutte pour garder un semblant de contrôle. Comme toujours. Chaque fibre de mon être se tend, tiraillée entre la raison et cet appel ensorcelant. Le poids de la décision, de ce que je vais devoir assumer pendant toute la soirée si je consens à sa demande, pèse sur moi. L’idée de déambuler sans bas, chaque pas me rappelant l’absence de cette faible protection, me déstabilise. Sauf que voilà, les ténèbres de l'incertitude ne peuvent plus éteindre ce désir ardent. James savait que je ne voudrais pas ignorer cette tentation.
Je lui offre le dernier mot :
Challenge accepté.
Un frisson d’excitation me parcourt, incontrôlable, tandis que mes pensées se bousculent. Mon corps réagit à l’idée de sa proximité, au moment où il me verra et saura. Le simple fait de penser à la manière dont ses yeux glisseront sur ma peau, s’attardant là où il n’y a rien à cacher, fait accélérer mon rythme cardiaque. C’est une invitation silencieuse, mais indéniable. L'absence de bas n'est pas juste une perte de vêtement ; c'est une promesse qu'il me faudra tenir, que je vais lui offrir. Avec délectation.
Chaque petite marche, accolade, frôlement du tissu de ma robe contre ma peau nue, chaque fois que je me pencherai, baisserai, assiérais, chaque pas que je ferai, m’amènera un peu plus près de ce moment et cisèlera l'épanouissement de mon désir et ma reddition totale. James pourra confirmer cette vérité : que je suis prête à le laisser m’envahir, dans tous les sens du terme.
Je n’ai même pas le temps de remettre mon portable dans ma pochette que la LED de notification se met à clignoter. Stoppé dans mon élan, je m’immobilise à nouveau. Mon pouls se précipite. Je peux sentir la chaleur qui émane de mon téléphone, comme si James se trouvait juste là, à quelques pas de moi, bien qu'il soit à des kilomètres de distance. J’ouvre l’application.
Alors, prouve-le. Pas dans dix minutes, pas dans une heure. Maintenant.
Mon cœur rate un battement, puis s’emballe comme un tambour furieux dans ma poitrine. Je sens l’atmosphère devenir plus lourde. Maintenant. Ce mot vibre dans ma tête, me martèle plus fort que la musique autour de moi. Le bruit du club, les lumières dansantes, tout disparaît, s'évanouit. Je regarde les gens, je les vois bouger, rire, danser, mais je ne les perçois plus vraiment, comme si je me tenais dans une bulle, hors du temps. Je ne fais plus vraiment partie de cette scène, perdue dans l’urgence de ce mot : maintenant.
Je serre l’appareil dans ma main. Chaque cellule de mon corps est en alerte et une agréable combustion intérieure m'enflamme. Cette invitation est plus qu'un défi : c'est une preuve, un jeu de pouvoir. Un jeu de mots. Un jeu de regards. Et il a posé les règles : Maintenant.
Je respire profondément. J’avise les escaliers qui mènent au sous-sol. Je m’avance d’un pas résolu et m'y engouffre sans me faire prier ou repérer. Les premiers pas résonnent légèrement, mais la musique étouffe rapidement le bruit de mes talons. Je descends vite, presque précipitamment, chaque marche m’amenant plus près de cet endroit isolé. Arrivée en bas, je me fige un instant devant la porte scellée de la réserve.
Mes doigts s’activent sur le boîtier, le code s’enchaîne dans une série de chiffres que je connais par coeur. Lorsque la porte s’ouvre dans un claquement, je pénètre dans la cave à vin. La lumière automatique s’allume pour éclairer les étagères en bois sombre ou en métal, où des rangées de bouteilles s’alignent, l’éclat du verre brillant faiblement dans la pénombre. Des fûts de bière sont empilés contre les murs, des caisses en bois brut contiennent des bouteilles de spiritueux, les étiquettes légèrement éraflées, témoins de leur utilisation régulière.
Je dépose téléphone et pochette sur des palettes devant moi et je me tourne vers la lumière pâle qui baigne les lieux d’un halo feutré. L’air frais et légèrement humide de l’endroit me saisit. Je ferme la porte derrière moi avec un bruit sourd qui résonne dans la pièce. Le silence me serre comme un gant, mais il est relatif, seulement ponctué par le bourdonnement des réfrigérateurs au fond de la pièce, et les pulsations persistantes de la musique qui, bien que filtrée à travers les murs épais, parvient à titiller l’espace dans lequel je me tiens. Cette agitation lointaine semble se fondre dans l'atmosphère, comme une présence omniprésente, mais elle est bientôt balayée par la pensée qui m'obsède. Maintenant.
Mes mains se promènent lentement, presque solennellement, le long de ma robe, la caresse comme si chaque mouvement me rapprochait de ce moment crucial. Mes doigts frôlent le bas de ma taille, hésitent, puis s’aventurent un peu plus bas. Dieu que j’aimerais que ce soit James qui me touche à cet instant. Je remonte délicatement le bas de ma robe et une vibrante secousse me traverse des pieds à la tête lorsque je sens la texture de ma culotte, douce contre ma peau. Je suis immédiatement ramenée à l'ordre précis que James m'a donné. Il flotte dans mon esprit comme une promesse incandescente, une pression subtile qui fait battre mon cœur un peu plus vite.
Je retire lentement ma lingerie, la faisant choir le long de mes jambes, comme une partie de moi qui se défait du poids de l'attente. Lorsque le coton arrive à mes pieds, je le ramasse et le dépose soignesement près de mes affaires.
Je déglutis, mon portable toujours posé devant moi. Je sais ce que je dois faire. Les doigts légèrement tremblants, je prends à nouveau l'appareil en main. Mes doigts effleurent l’écran, un appui juste assez fort pour capturer la preuve de ce moment, le symbole de l'action accomplie, de notre pacte secret, de ma soumission silencieuse. L'image prend forme, son contenu précis, sans détours. Je clique sur "envoyer". Le message disparaît dans l'air, vers James. Il sait maintenant.
Je me redresse, l'urgence se mêlant à une sorte de calme intérieur. Avec une fluidité presque gracieuse, je réajuste ma tenue. Le tissu glisse sur moi, me couvrant de nouveau. Je ferme les yeux un instant, laissant la sensation de la robe sur ma peau me rappeler que ce n'est que le début.
Ce n’est qu’une fois arrivée en haut, au moment où mes pieds franchissent le seuil du sous-sol, qu'une vibration se fait entendre.
Tu es incroyable et tu fais de moi un homme fou de désir. L’attente va être insoutenable. Maintenant, tout ce que je veux, c’est te retrouver, mo chridhe, et te prouver à quel point tu comptes pour moi. Plus que jamais.
Je sais. Je suis prête à tout pour lui.
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