5-

7 minutes de lecture

Louis restait là, la mine sérieuse, à la regarder aller et venir, ranger son bureau, rassembler ses affaires, jusqu’à ce qu’il parvienne à accrocher son regard. Elle rougit légèrement mais ne déroba pas ses yeux.

- Et nous, qu’est ce qu’on fait de cette belle soirée ? Demanda t-il de sa voix profonde avec gentillesse.

- Hé bien… bon...ben on rentre chez nous, je suppose, bafouilla t-elle.

- Lequel de chez nous ? Suggéra t-il en s’approchant doucement, ses yeux brillants toujours rivés aux siens. Le tien ou le mien ?

Il était tout contre elle, quasiment collé à elle, elle sentait toute son énergie se diffuser dans son corps fatigué d’une journée de douze heures non stop. Ses mains reprirent leur place sur sa nuque, la massant et caressant doucement, l’attirant au contact. Sa tête au creux de son épaule, leurs désirs qui se mélangent.

- Le mien, répondit elle dans un murmure.

Il embrasse ses cheveux, son front, soulève son visage vers lui, effleure ses lèvres avec douceur. Elle adore !

- On prend ma moto, j’ai un deuxième casque, dit-il avec enthousiasme en lui prenant la main et l’entraînant dehors.

Elle prend ses affaires en vitesse, elle a conscience d’avoir un sourire idiot et ravi sur la face mais elle n’a pas envie de l’effacer, elle se sent bien. Cela faisait longtemps.

La virée en moto jusqu’à son appartement leur prend vingt minutes. Elle a un peu froid dans son court manteau mais ressent au plus profond d’elle le plaisir d’être collée à lui, ses mains sur sa taille pour se tenir. Il se souvient très exactement de son adresse, elle est épatée. Ils gravissent lentement les étages car ils s’arrêtent souvent pour s’embrasser comme deux collégiens à leur premier vrai rendez-vous.

La porte refermée, elle se sent intimidée et pas tellement à son avantage après ses longues heures de labeurs.

- Je..heu.. Je vais prendre une douche, tu m’attends ? Je ne me sens pas très jolie après cette journée à transpirer dans la poussière et ces lieux infects ; tu m’attends ?

Elle a peur qu’il la trouve stupide et chochotte et qu’il parte pendant qu’elle est enfermée dans la salle de bains. Il sent son inquiétude et sa vulnérabilité.

- Aucun risque que je m’en aille ! Mieux, je vais avec toi ! Tu veux bien ?

Et sans attendre la réponse, il se déshabille. Tee-shirt, bottes, chaussettes, pantalon, caleçon. Il est aussi nu qu’on peut l’être devant elle et la regarde et tend la main et l’attire vers lui. Il la déshabille lentement, elle ne le quitte pas des yeux et quand elle est entièrement nue, elle rougit.

- Où est la salle de bains ? Demande Louis.

Elle le guide et ils entrent ensemble, se serrant l’un contre l’autre sous le jet brûlant, il la savonne en la caressant, elle plane.

- Tu es magnifique ! Plus que belle ! Tu me fais un effet incroyable !

Elle lui rend la pareille et le savonne et le caresse à son tour, elle voit son désir d’elle. Ils se rincent rapidement, il la sèche avec lenteur et la prend dans bras, retour vers le salon. Jamais elle n’avait eu cette douce sensation d’être aimée et désirée en même temps.

- Où est la chambre ?

- Au bout du couloir.

Il la dépose sur le lit et s’allonge près d’elle, contre elle. Ils se regardent longuement. Elle lui caresse le visage, suivant tous les contours de ses traits quasiment parfaits.

- Tu es l’homme le plus beau et le plus doux que j’ai jamais vu.

Ils s’embrassent, se caressent, lui, glisse ses lèvres entre ses cuisses, puis sa langue ; elle se détend dans le plaisir et gémit. Ses mains sont chaudes et douces et elles explorent son corps sans aucune retenue. Elle aime ça et laisse ses mains à elle parcourir les courbes musclées des épaules de son amant. Il revient vers ses lèvres et l’embrasse passionnément, profondément, leurs langues s’enroulent et se caressent. Il embrasse ses seins et la pénètre doucement ; son cœur et ses nerfs s’emballent. Toutes ses terminaisons sont en transes, elle grimpe l’échelle du plaisir au rythme devenu long et puissant de son étreinte. Elle tend son corps vers le sien et il accélère son va et vient, elle sent mille frémissements le parcourir aussi. Ils jouissent ensemble le corps et l’esprit en feu.

Elle n’a jamais aimé un homme comme ce soir ; elle voudrait qu’il reste en elle encore un peu et dans sa vie pour un peu plus longtemps mais elle ne dit rien. Trop peur de l’effrayer.

- Je voudrais rester en toi tout le temps, lui murmure t-il, sentant son désir se ranimer. Garde-moi toute la nuit.

Il aurait voulu rajouter « et toute la vie aussi ».

- Reste ! Dit-elle tout bas, tant que tu voudras !

Le commandant Farouk attendait patiemment le matin au poste de gendarmerie local. Il était arrivé d’Agadir très tard dans la nuit avec son adjoint, le lieutenant Hamid, équipés de toutes les autorisations pour investir la résidence marocaine du couple Bachellerie.

Les deux acolytes semblaient sortis du même moule. Grands, minces et musclés, bruns, teint mat. Les yeux les différenciaient : fendus et bleus-gris pour Farouk ; ronds presque globuleux et bruns pour Hamid. Le premier était sans conteste beau, très beau même, une vraie publicité pour l’orient glamour. Le second avait des traits mâchés de boxeur rattrapés par une bouche des plus sensuelle et un sourire facile et irréprochable.

Farouk buvait café sur café tandis qu’Hamid carburait au tabac brun et fumait comme un pompier. Aucun des deux hommes n’aimait le thé et ça tombait bien ; on évitait ainsi tous les salamalecs autour du rituel « thé à la menthe ». Les deux gendarmes de permanence somnolaient sur leurs fauteuils. Farouk relisait ses notes avec tout ce qu’il avait déjà pu glaner sur le couple.

La petite bourgade était franchement isolée et le ksar des français l’était encore plus selon les informations. Une somptueuse demeure avec tout le confort collée à un hameau décharné de pisé et de tôles, quelques familles de bergers aussi démunies qu’on peut l’être. C’est tout ce que les gendarmes pouvaient en dire et c’était peu car ces français avaient la réputation d’être très discrets, n’entretenaient pas une grande domesticité contrairement à tous les résidents étrangers. Un restaurant de la bourgade la plus proche leur confectionnait et leur livrait deux fois par semaine des menus couleur locale et un couple se rendait une journée une fois par semaine pour l’entretien de la maison et des jardins. Ils avaient leur propre voiture et ne prenaient jamais de taxi ou chauffeur privé.

Il avait mis toutes les petits postes de gendarmerie rurale sur les disparitions d’enfants mâles sachant d’expérience que les familles vraiment frustes de ces campagnes perdues dans des bleds improbables ne signaleraient pas forcément la disparition de leur enfant. Elles avaient peur des autorités quel qu’elles soient et surtout, savaient que personne ne rechercherait vraiment leur progéniture; les pauvres n’intéressaient pas grand monde, ici comme ailleurs.

Il avait gardé son portable ouvert et attendait avec espoir des informations infirmant les soupçons des collègues de Paris. Les crimes impliquant des enfants l’avaient toujours perturbé.

A six heures, la brigade de jour, quatre hommes, arriva et il décide de lever le camp.

- Messieurs, on y va ! Comme convenu, deux d’entre vous nous accompagnent. On prend notre voiture. On ne sait pas s’il y a quelqu’un dans la maison, donc discrétion en arrivant.

Quand ils s’installèrent dans la Dacia banalisée des deux flics, les gendarmes remarquèrent les holsters des deux hommes équipés des Sig Sauer nouvellement attribués à la police. Ils tiquèrent ; la gendarmerie rurale avait juste droit à des fusils deux coups enfermés dans le râtelier et à des matraques. Celui qui monte devant à côté de Farouk, aperçoit subrepticement le flingue accroché au dessus de sa cheville. Il suppose que l’autre, le lieutenant Hamid, était pareillement équipé.

L’inquiétude le gagnait, les deux lascars ne leur avait pas lâché grand-chose ; qu’allaient-ils trouver là bas ?! Il guida le commandant une bonne partie du chemin et une heure plus tard, ils arrivèrent dans un hameau totalement perdu et d’une désolation déprimante. Pas de rue, des passages défoncés entre des gourbis, une dizaine d’habitations, en torchis et couvertes de vieilles tôles rouillées.

Farouk sentait le malaise. Pas âme qui vive, pas même un chien ou une chèvre faméliques cherchant leur pitance sur les pauvres tas de détritus disséminés ici et là au coin des baraques. Il se tourna vers les gendarmes :

- On nous avait dit au poste que quatre à cinq familles de bergers vivaient ici, où sont-ils passés ? Depuis combien de temps vous n’êtes pas venus dans ce bled ?

- Commandant ! Dit son équipier en lui posant une main sur l’épaule, arrêtez la voiture, je vais aller jeter un coup d’œil, et vous deux, vous venez avec moi, intima t-il aux deux autres. Laissez tourner le moteur par sécurité et armez votre flingue, ça sent pas bon tout ça.

Farouk avait stoppé, les trois autres sont déjà hors du véhicule, Hamid a son flingue, armé et tendu, le bras le long du corps. Il pria que son téléphone ait du réseau en cas de besoin, il vérifia, signal faible mais pas inexistant. Toujours aucune remontée des autres postes sur leurs recherches d’enfants disparus ou retrouvés dans des circonstances dramatiques de meurtre ou pire encore. Son malaise s’accrut, il n’aimait pas ce patelin, ça sentait la misère et le malheur. C’était le genre d’enquête qui lui vrillait les nerfs et prenait racine dans ses pensées pour le pire.

Annotations

Vous aimez lire Nora MARY ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0