11. Si proches

3 minutes de lecture

J'y étais... Enfin... Après trois semaines de voyage. Trois semaines à lutter pour ma vie, prendre des petites routes pour éviter les autoroutes saturées de cadavres ambulants. Trois semaines à tenter de devancer les tempêtes de sables dans le centre du pays. Trois semaines à me ronger les sangs, à m'inquiéter plus pour elle que pour moi, à guetter nos messages. Tout ce temps passé seule, je n'osais pas l'admettre mais l'arrivée de Shirahoshi m'avait redonné l'envie d'espérer que les choses pouvaient bien se passer.

On dépassa le panneau indicatif de l'entrée dans le Massachusetts. Je n'y avais mis les pieds qu'une seule fois pour aider à déménager les affaires de ma sœur à son entrée à Harvard quatre ans plus tôt. L'endroit était autrefois verdoyant, maintenant il était semblable à tout le reste. Un soleil de plomb, la chaleur de la route qui remontait et le sable qui recouvrait absolument tout. Elle ne se trouvait plus à l'université. Je lui avais dit d'avancer, de quitter la zone étudiante. Tant de personnes entassées les unes sur les autres n'avaient pas su résister longtemps. Et il suffit d'un seul infecté pour contaminer tout le groupe.

Alors elle était partie. Elle avait fait comme moi. Elle avait avancé jusqu'à la ville suivante. Mais, elle avait rapidement eu peur, elle n'avait pas mes nerfs d'aciers et je ne la blâmais pas pour ça. En plus, elle ne savait pas se servir d'une arme à feu. Elle s'était alors cachée dans un lieu sûr, une espèce de base militaire qui avait été désertée près de la frontière de l'état. Je respirai un grand coup pour me chasser tout cela de l'esprit pour l'instant. Il fallait que je garde la tête froide pour quelques heures encore. Shirahoshi regardait silencieusement le désert qui s'étalait autour de nous. Elle pointa un panneau directionnel au loin.

— C'est bien la base Kerwood ?

— Ouais.

— Plus que cinquante kilomètres.

J'acquiesçai avant de murmurer :

— Tiens bon, petite sœur, j'arrive.

Une si courte distance me séparait d'elle et pourtant, le temps sembla s'allonger à l'infini. Chaque seconde me parut extrêmement longue. Je venais de parcourir presque quatre mille kilomètres, j'avais traversé le pays d'Ouest en Est et ce fut ces quelques minutes qui me parurent les plus longues de toute ma vie. Après une interminable attente, la base n'était plus qu'à cinq kilomètres.

Et là, les ennuis ont recommencé. Tout ne pouvait pas se finir aussi bien tout de suite. Il fallait qu'on rencontre forcément de la compagnie avant d'arriver. On apercevait une horde au loin. Elle se trouvait pile au beau milieu de la route et avançait vers nous. Nous étions la seule voiture entourée d'une immensité de sable. Pas vraiment la bonne option pour passer inaperçues quand une bande de mangeurs de cerveaux vous passait à côté. Je ne voyais que deux solutions : s'arrêter pour tenter de faire passer la voiture pour abandonnée et espérer qu'ils ne nous sentent pas ou alors accélérer pour se frayer un chemin en priant pour que le pare-choc tienne le coup.

J'avais déjà renversé plusieurs zombies mais uniquement un à la fois. Comment savoir si nous n'allions pas être submergées après en avoir écrasé quelques-uns ? Pas question pour moi de prendre des risques inconsidérés, pas si proche du but. Je m'arrêtais alors que la horde était environ deux cent mètres de nous. Je réfléchis à toute allure. Et soudain, j'eus une idée. Ça ne ferait pas dans la dentelle mais ce serait certainement efficace. Je fis signe à Shirahoshi de rester dans la voiture alors que je sortais. Pas besoin de se précipiter, ils n'avançaient que d'un pas traînant et régulier. Le vent amenait notre odeur dans l'autre direction, nous avions de la chance, s'ils nous avaient senties, ils auraient probablement accéléré la cadence.

Je fouillai dans ma caisse de munitions avec précaution, la jeune fille s'était tournée vers moi pour m'observer. Ses yeux devinrent ronds comme des soucoupes quand je sortis une ceinture de grenades du coffre. Je la passai en travers de ma poitrine et m'élançai. Je m'approchai jusqu'à n'être qu'à une quinzaine de pas d'eux. Je goupillai une grenade et la lançai dans le tas. Je reculai un peu. Quand elle explosa plusieurs secondes plus tard, le plus gros de la horde vola en éclats. Des membres décomposés arrachés furent projetés partout. La vingtaine de zombies fut à terre. Pas besoin d'en lancer une autre, je repartis à la voiture et remontai au volant. J'évitais de passer sur le tas de chair mais on entendit très clairement le bruit spongieux d'un bras écrasé quand je roulai dessus.

Annotations

Vous aimez lire Shagya ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0