15. Dans mes bras
Tout se passa très vite. Mes yeux s'écarquillèrent alors que je faisais face à la fenêtre. Une partie du toit de l'entrepôt situé au fond de la base avait été soufflé par l'explosion. Elle était forcément là-bas. Mon sang ne fit qu'un tour. Mon cœur s'accéléra dans ma poitrine et mes doigts se crispèrent autour de la crosse de mon pistolet. Mais qu'avait-elle fait ? Allait-elle bien ? Je me mis une claque mentale pour me sortir de ma torpeur. Une poignée de secondes venait de s'écouler depuis l'instant de l'explosion.
Sors de là idiote !
Je fis un demi-tour rapide pour m'élancer en courant vers la porte. Je sautai par dessus les corps sans vie des deux zombies qui jonchaient le sol et manquai de tomber dans les escaliers tellement j'allais vite. La porte d'entrée du bâtiment administratif était déjà ouverte et j'aperçus Shirahoshi qui courait déjà vers l'entrepôt.
Elle avait une quinzaine de mètres d'avance sur moi mais la poussée d'adrénaline et mon entraînement me permirent de la rattraper sans trop de difficulté. L'entrepôt se trouvait beaucoup trop loin à mon goût. Même en courant à toute allure. J'avais les yeux rivés sur mon objectif. Plus rien d'autre n'importait. J'entendais vaguement les bruits de la course de la jeune fille derrière moi.
La construction était très simple, il s'agissait d'un vieux hangar en forme de demi-tube. Sauf qu'un morceau de toit manquait à l'appel. Je voyais de la fumée qui s'échappait par l'ouverture. Si c'était possible, mon cœur s'accéléra encore dans ma poitrine. J'arrivais enfin à la large porte pour rentrer à l'intérieur. Je m'engouffrai dans le bâtiment. Il aurait dû faire assez sombre puisqu'il n'y avait pas de fenêtre mais on y voyait presque comme en plein jour grâce au puits de lumière improvisé.
Quelques caisses se trouvaient à l'intérieur, ainsi que des véhicules de l'armée. Je me précipitais vers le fond du hangar, là où l'explosion avait eu lieu. Mes bottes claquèrent sur le béton du sol à cause de mes pas précipités. Bientôt, la démarche plus souple de Shirahoshi se fit entendre. De la fumée noire se dégageait d'une machine étrange près du mur le plus éloigné du hangar. Le morceau de plafond manquant avait heureusement été soufflé à l'extérieur. S'il était retombé dans le bâtiment, la machine aurait été écrasée. Et Gretha avec. Elle était étendue sur le dos devant l'appareil. Mon cœur affolé fit encore un bond. Je ne la voyais pas bouger. Je finis ma course désespérée en glissade pour m'agenouiller près d'elle le plus rapidement possible.
— Gretha ?
Shirahoshi arriva à mes côtés et m'interrogea du regard, paniquée. Ou était-ce moi qui l'était ? J'avais perdu tous mes moyens. Je détachai à grand peine mes doigts crispés de mon arme que je posais à terre près de moi. Je les tendis maladroitement vers le cou de ma sœur pour prendre son pouls. Mon index et mon majeur trouvèrent enfin sa veine jugulaire. Je sentis son cœur battre sous mes doigts. Je soupirai de soulagement et adressai un signe de tête approbateur à la jeune fille inquiète. Elle sourit faiblement. Je palpai doucement le corps de ma sœur pour essayer de déterminer si elle avait des blessures. Je me détendis un peu en remarquant qu'elle n'avait pas reçu d'éclats venant de la machine. C'était le souffle de l'explosion qui l'avait assommée. Je vérifiai sa respiration en me penchant pour sentir l'air expiré avec ma joue. Sa poitrine se soulevait de manière régulière et son souffle était normal. Je l'étendis alors sur le côté. Cela permettait de dégager les voies respiratoires et empêchait la langue d'obstruer la trachée. Au moins elle ne s'étoufferait pas.
— Je peux faire quelque chose ? demanda Shirahoshi.
— Tu peux aller chercher une couverture ? Le sol est froid ici... fis-je d'une petite voix que je ne reconnus pas.
— Tout de suite.
Elle partit vers l'entrée du hangar en petites foulées. Je m'assis en tailleur à côté de ma jumelle. Je gardais constamment un œil sur elle pour vérifier qu'elle respirait toujours. Elle avait des petites cernes sous les yeux, probablement dues à l'inquiétude de me savoir dehors. Moi non plus, je n'avais pas bien dormi ces dernières semaines. Mon regard s'arrêta sur un bandage qu'elle avait au bras gauche. Je lui pris la main et la serrai légèrement. Shirahoshi revint et déposa doucement la couverture sur elle. Je la remerciai d'un signe de tête.
— Hey, c'est moi... Je suis là. Je suis avec toi. Je ne te quitterai plus. Serre ma main si tu m'entends.
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