37. Interrogations hasardeuses

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Le corps mit longtemps à brûler entièrement. Nous enterrâmes dans le sable les os qui restaient. Quand nous rejoignîmes les filles, la chaleur écrasante de la mi-journée nous acheva. Après un repas rapide, avec l'accumulation des émotions et la retombée d'adrénaline, nous nous reposâmes tous. Sans nécessité de monter la garde, nous sombrâmes tous dans un sommeil réparateur. Après un moment, je me réveillai et restai étendue sans bouger sur mon matelas, laissant mon esprit vagabonder. Incapable de lâcher prise totalement, je pensai sans relâche à la future marche à suivre.

Mes doigts s'attardèrent sur mon cou, où la marque de griffure me rappela que je devais aborder le sujet. Les autres étaient réveillés et commençaient à s'assoir sur leur propre matelas. Je fis la même chose avant de déclarer posément :

— J'ai été griffée par un zombie il y a trente-six heures.

Tous les trois se redressèrent soudainement à cette annonce et tournèrent des regards inquiets vers moi. Je me rapprochai pour leur montrer que la griffure n'avait pas l'apparence d'une attaque de zombie, on avait tous déjà vu les croûtes noires que formaient les plaies des infectés. Par comparaison, la mienne commençait déjà à cicatriser. Finalement G fronça les sourcils.

— Au début... euh... la première semaine après... l'éruption solaire... j'ai vu des gens se transformer en moins de cinq heures. Ceux qui avaient été mordus au cou pouvaient aussi se transformer presque instantanément... dit-elle tristement, en repensant sûrement à ses camarades de l'université qui avaient subi ce triste sort.

— Alors si ça fait trente-six heures... commença Shirahoshi.

— Quand j'ai réalisé que j'avais été griffée, je me suis dit que je n'en aurais pas pour longtemps alors j'ai essayé d'en finir. Mon arme s'est enrayée et je me suis évanouie, dis-je le plus rapidement possible, en évitant de croiser les yeux de Gretha. Je me suis réveillée quasiment vingt-quatre heures plus tard, toujours humaine. Et je suis revenue ici.

Ma soudaine déclaration sur ma tentative de suicide ratée m'attira un regard noir de la part de ma sœur jumelle. Mais elle savait que je préférerais en finir plutôt que me changer en cadavre ambulant. Et puis j'avais échoué, elle se détendit alors un peu et fixa la griffure.

— Peut-on parler... je sais pas... d'immunité ? hasarda Max.

— Aucune idée. C'est fort probable vu le délai. Je ne vois pas comment le prouver cela dit. On a aucun matériel médical pour faire des prélèvements et je n'ai absolument pas la formation nécessaire pour les interpréter. Un médecin ou un chercheur sur les épidémies pourrait peut-être trouver des pistes. S'ils sont toujours en vie, réfléchit G à voix haute.

— Tu parles du Centre de Contrôle des Maladies ? À Atlanta ?

— C'est sûr qu'eux ont tripoté des virus mortels durant toute leur carrière... approuva Max.

Je réfléchis un moment. Atlanta n'était pas très loin de notre position actuelle, après tout le Tennessee et la Géorgie étaient des états frontaliers. Mais nous étions installés dans une zone bien sécurisée. Partir ne semblait pas être une bonne idée. Surtout qu'on était assis sur une source souterraine d'eau potable et qu'on avait les meilleures terres cultivables à des centaines de kilomètres à la ronde. Si les plantes du Mexique et du Moyen-Orient avaient été aussi vaporisées, c'était alors le dernier lopin de véritable terre du monde.

— Vous croyez que ça vaut le coup d'essayer d'y aller ? chuchota la jeune fille.

— Risquer tout ça ? s'interrogea G en tendant les bras pour englober notre confort, l'eau, la machine miraculeuse.

Ces paroles étaient comme un écho à mes précédentes pensées et jetèrent un froid. On savait tous que ce que nous avions était inespéré. Une telle chance ne se représenterait peut-être jamais. Partir pouvait très bien être synonyme de mort à cause de la faim, de la soif, des revenants.

Mais si on pouvait arriver en un seul morceau à Atlanta, si on trouvait des chercheurs et s'ils découvraient pourquoi j'avais survécu, peut-être qu'ils pourraient mettre au point une sorte d'antidote. Ça faisait quand même beaucoup de « si ». Mais il restait une autre solution...

— On pourrait se séparer pour un temps, proposai-je.

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