39. Atlanta
Nous continuâmes à discuter des préparatifs pour notre départ. Je voyais bien que G était soulagée que je n'y aille pas seule mais l'inquiétude se lisait toujours sur son visage. Je n'avais pas assez observé les compétences de Max pour le choisir comme compagnon de voyage. D'ailleurs il laissait dans la quasi-totalité des cas Jared aller au-devant du danger et évitait la confrontation autant que possible. Je n'avais rien contre ça, tout le monde ne pouvait pas se jeter dans le feu de l'action mais j'avais besoin d'un allié fiable pour cette sortie. Et la jeune fille avait largement fait ses preuves durant la première partie de notre voyage.
Nous partîmes le lendemain matin après avoir pris quelques provisions. Nous n'étions pas très loin de notre destination. Il fallait espérer que notre chance allait durer. Après une étreinte, Max et Gretha ouvrirent le portail et nous nous mîmes en route. Je vis dans le rétroviseur leurs airs inquiets et jetait un regard à la jeune fille assise à côté de moi. Elle semblait aller bien ou elle cachait mieux ce qu'elle ressentait.
La durée normale du trajet était deux heures vers Atlanta. Nous mîmes le double pour atteindre la grande ville. Nous avions été ralenties par des embouteillages sur une partie de la route qui m'obligeaient à rouler doucement afin de zigzaguer entre les voitures abandonnées. Nous avions aussi fait du hors-piste dans le sable. Shirahoshi m'avait demandé ce que nous ferions si une roue se coinçait dans un trou mais ce n'était pas arrivé, fort heureusement car nous aurions été bien embêtées. Nous avions aussi doublé quelques revenants sur le bord de la route. Shirahoshi et moi discutâmes aussi un moment de la vie au complexe. La jeune fille avait bien changé depuis notre première rencontre et nos premières conversations dans cette voiture. Son caractère avait changé depuis la première impression pleurnicharde et timide. Elle avait cependant mis son sabre le plus loin possible d'elle. Je haussai un sourcil. D'ordinaire, l'arme était toujours à sa portée.
Je sus que je devrais aborder un sujet difficile mais un barrage obstruait la voie. Je ralentis et m'arrêtai au beau milieu de la route. Nous étions en bordure de la ville et notre destination se trouvait dans la banlieue opposée. Tant pis, nous allions devoir marcher à partir d'ici. Je regardai ma passagère, vérifiai mon arme et m'apprêtai à sortir du véhicule, un sac sur l'épaule, quand je me ravisai.
— Tu vas bien ?
— Euh... commença la jeune fille. Ou..oui.
Je vis bien que ce n'était pas le cas. Je lâchai la portière et cherchai mes mots un instant.
— Je ne sais pas ce que tu penses à propos de Jared, à propos de ce qui s'est passé. Aucun de nous n'a changé d'opinion sur toi. Il était en train de me tuer, vous vous êtes interposés. Tu as été la plus rapide c'est tout. G l'aurait étripé s'il m'avait tuée... Puis elle serait sans doute morte de chagrin... déclarai-je.
Décidement, les discours de réconfort ne constituaient pas ma principale qualité.
— C'est... je... c'était un être humain ! dit-elle finalement en insistant sur le dernier mot.
— Il valait autant qu'un zombie. Encore quelques nuits à le surveiller et il lui aurait suffi de me souffler dessus pour me tuer, soupirai-je.
J'espérais qu'elle ne serait pas trop occupée à s'en vouloir, j'allais avoir besoin de toute son attention dans quelques instants. Elle me fit un petit sourire, hocha la tête et prit son arme.
— Max te l'a dit, si tu ne ressentais rien, ce serait comme si tu étais devenue aussi pourrie que lui. On sera toujours là pour t'épauler. Mais maintenant, je dois pouvoir compter sur toi pour traverser cette satanée ville.
Elle acquiesça et nous sortîmes de la voiture sans un bruit. A présent, il valait mieux ne pas parler du tout. Je lui montrai un grand bâtiment que l'on apercevait à l'autre bout de la ville. Une partie de l'immeuble s'élevait haut dans le ciel, ce qui le rendait reconnaissable au loin. Nous avions un visuel de notre objectif.
Nous pénétrâmes en ville d'un pas vif, tendant l'oreille. Les grandes routes étant trop dangereuses, nous prîmes des ruelles moins fréquentées. Utiliser mon pistolet n'était pas une bonne idée alors j'enfonçai un couteau dans le cerveau des zombies qui nous barraient la voie. Heureusement la jeune fille n'hésita pas lorsque j'eus besoin d'elle. Nous laissâmes derrière nous une traînée de sang noir et de cadavres aux cerveaux transpercés.
Il faisait un peu moins chaud dans la ville, les bâtiments apportaient un peu d'ombre dans le désert. Mais c'était trop demandé d'avoir une petite brise pour nous rafraîchir. L'air était aussi sec que d'habitude. Il nous fallut une heure supplémentaire pour atteindre l'autre côté de la ville et nous soupirâmes d'aise en voyant enfin le bâtiment tant convoité.
— Les mains en l'air ! s'exclama alors une voix autoritaire dans notre dos.
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