14. S'apprivoiser
14. S’apprivoiser
Ils restèrent quelques instants enlacés, reprenant leurs esprits. Christophe se dégagea pour se débarrasser du préservatif et lui proposa de revenir sur le sofa, moins dur que le sol. Elle acquiesça.
— Clémence, est-ce que ça va ? Là tantôt, je crois que je n’ai pas tout compris… J’ai cru à un moment que cela ne te plaisait pas, je me suis trompé ?
— Ah… Écoute, c’était un peu bizarre pour moi aussi, mais je crois savoir d’où ça vient et ce n’était pas négatif, loin de là, mais « nouveau ».
— Euh… Ce qui veut dire ? Parce que là, je suis un peu largué si tu veux tout savoir.
Elle ferma les yeux, lui embrassa le haut du torse contre lequel elle était appuyée puis le regarda et tenta de lui expliquer ce qu’elle avait ressenti.
— Je crois que j’ai été terrassée par ton désir pour moi.
— Pardon ? Et, c’est positif ? Parce que pour moi, être terrassé, c’est être abattu, démoli…
— Oui, j’ai été abasourdie par ça… Je… En fait, je n’ai jamais vu quelqu’un me désirer comme tu l’as fait là tantôt, ce que j’ai vu dans tes yeux m’a fait me sentir toute… Toute à vouloir m’offrir à toi, à fusionner avec toi. C’était étrange et nouveau pour moi. Je me suis sentie assez en confiance avec toi que pour me laisser aller à ce que je ressentais.
Il la regardait en lui caressant le bras, la laissant terminer le récit de son expérience.
— Et j’ai bien fait de me laisser aller, enfin, moi, j’ai eu du plaisir à cela, et toi aussi, non ?
Elle le regarda, un peu soucieuse quant à sa réponse,
— Oui, j’ai bien aimé quand tu as commencé à bouger… Et je n’ai eu besoin que de t’effleurer pour que tu décolles… Et que je te rejoigne.
Elle sourit,
— Je crois que c’est ton regard qui m’a fait me rendre compte que je suis bien réellement amoureuse de toi. Sur le moment, j’avais l’impression que ton regard me transperçait et que toute cette énergie passait directement dans mon bas-ventre.
Elle leva vite les yeux vers lui puis les baissa en rajoutant,
— Je vais peut-être te sembler gourde, mais j’avais l’impression que tu pouvais me donner un orgasme rien qu’en me regardant comme tu l’as fait là de suite.
Elle leva à nouveau les yeux vers lui, il la regardait, il ne se moquait pas, elle avait l’impression de percevoir un regard protecteur, mais n’osait pas trop y croire.
Il sourit en voyant ses sourcils se froncer légèrement.
— Et toi, rien que de me parler de ça, tu déclenches chez moi une nouvelle érection…
Ils rigolèrent.
— Oh, t’es con Christophe !
Elle le repoussa un peu, il se rapprocha d’autant plus. La serrant dans ses bras, il lui dit,
— Je trouve cela beau, ce que tu viens de me dire, tu te dévoiles, je suis heureux de te mettre assez à l’aise que pour que tu puisses me dire ce genre de choses.
Il la sentait un peu sur ses gardes
— Et je respecte ce que tu dis. Et je pense comprendre.
Il la berça un petit peu
— Tu sais, quand je te regardais alors que nous étions à terre, je te désirais, effectivement, mais pas que charnellement, j’avais envie de toi en entier, tes rires, tes blagues, ta patience et ta ténacité à me lancer des perches, les discussions que nous avons, les choses que nous pourrions faire ensemble… C’est ça que je désirais quand j’avais tes chevilles sur mes épaules. Je ne sais pas si c’est ça que tu as perçu, mais c’est ce que je ressentais.
Clémence respira profondément, appuyée sur son torse, et lâcha,
— Oui, j’en ai bien l’impression Christophe et j’apprécie.
— Moi de même.
Ils s’embrassèrent encore longuement puis restèrent enlacés, jusqu’au moment où Clémence déclara,
— Dis, on fait quoi pour manger ? On commande chez le chinois ? Il est bon le resto d’à côté.
— Oh oui tiens, ça fait longtemps que je n’ai pas mangé asiatique.
— Il faudrait penser à commander alors, c’est juste à côté, ils préparent en trente minutes.
— Je vais devoir m’habiller alors ?
— Ou moi…
— Ou tous les deux ?
— Pourquoi pas tous les deux, comme cela, tu connaîtras, pour la prochaine fois. Je vais prendre le menu, je reviens.
Elle se leva et fouilla dans l’un des tiroirs d’une commode, Christophe la regardait déambuler nue dans son appartement, il soupira tout en souriant puis chercha à retrouver ses vêtements.
— Ça va ? Tu retrouves tes affaires ?
Clémence revenait avec le menu et un téléphone, elle souriait de le voir chercher les vêtements qu’ils avaient éparpillés sans faire attention un peu plus tôt.
— Oui, je crois que j’ai tout, et toi, tu comptes te rhabiller… Ou tu veux que je te rhabille ?
Il lui fit quelques œillades suggestives.
— Pourquoi pas ? Tu as retrouvé mon slip et tu as envie de me l’enfiler ?
— Non, je ne l’ai pas retrouvé… Mais je trouve que tu es très bien sans…
Il rigola et la chatouilla, Clémence se laissa faire avec bonheur puis lui lança :
— Christophe… Tu n’as pas faim ? Tiens, choisi ce que tu comptes manger avant que je ne téléphone. Je me rhabille entre-temps.
Ils commandèrent puis descendirent chercher leur commande dans le restaurant qui était vraiment à deux pas de l’appartement de Clémence.
Entre-temps, Clémence avait préparé la table qui les accueillerait dès leur retour, elle avait mis une bouteille de vin blanc au frigo pour accompagner le repas, tout était prêt lorsqu’ils quittèrent l’appartement.
Une fois de retour, ils déballèrent leur colis et Christophe découvrit les saveurs de ce restaurant.
— Mmh, c’est bon, bonne adresse !
— Oui, et ce qui ne gâche rien, il est juste à côté !
— De fait, et ton vin est bon aussi.
— Supermarché du coin aussi…
— Mais tu choisis bien.
— Merci.
Christophe se tut, Clémence lui demanda,
— Qu’est-ce qu’il y a ?
— En fait, je voulais savoir, demain, tu te lèves tôt ?
— Pourquoi, tu comptes m’empêcher de dormir cette nuit ?
Il sourit,
— Non, mais je voulais savoir, tu sais, pour le réveil, l’embouteillage dans la salle de bains tout ça.
— Prévoyant… Je mets le réveil à 6h15, je prends le temps de déjeuner et je pars au plus tard à 7h15, ça te va comme programme ?
Il mâchait une bouchée de son plat, après l’avoir avalée, il lui dit,
— Oui, ça me va très bien, je me calquerais sur toi, je déjeune aussi le matin, et j’aurais le temps d’aller à mon boulot bien à l’aise.
— Rassuré ?
— Oui, rassuré.
Elle lui sourit,
— Ce n’est pas évident pour toi, j’imagine, tout est nouveau, nouvel endroit, nouveau lit, nouveaux bruits, nouvelle nana dans le lit…
— Ah non, celle-là, je la connais, j’ai déjà dormi avec elle !
— Mais dans ton lit à toi, dans tes habitudes…
— Quoi, tu as un lit qui craque ? Tu ronfles uniquement quand tu es chez toi ?
— Non… Mais je pourrais comprendre que tu ne sois pas aussi à l’aise que chez toi.
— Je dors n’importe où, ne t’inquiète pas, et puis… Avec toi dans mes bras, je ne pourrais être que bien.
— Flatteur… Viens, je te fais visiter, tu n’as pas encore vu l’endroit où tu dormiras. On terminera le vin après, avec le dessert.
— Ah, ce n’est pas toi le dessert ?
Elle le regarda en oscillant la tête, mais avec des yeux brillants.
— Non, il y a de la mousse au chocolat que j’ai préparé hier, tout spécialement.
— Mmh, j’en salive déjà.
Elle le fit entrer dans sa chambre et alluma la lumière.
— Waouh, le bordeaux, c’est beau, un côté chaleureux comme ça, j’ai l’impression d’entrer dans un écrin. C’est quoi comme vert qui coupe un peu le bordeaux ?
— Un vert mousse, tu aimes ?
— Oui, c’est à la fois soutenu et clair dans ce bordeaux chaleureux. C’est un beau mélange.
— Merci.
— Et donc, c’est ici que nous allons dormir...
— Oui, dans ce lit, tu veux l’essayer ?
Il ne répondit pas, mais sauta sur le lit où il se retrouva sur le dos, bras et jambes en étoile. Clémence grimpa, elle aussi sur le lit.
— Ça te va ? Le matelas est à ton goût ?
— Oui, ni trop dur ni trop mou. Viens !
Il lui tendit la main pour la rapprocher de lui.
— Christophe, si je me rapproche, je vais t’embrasser… Alors que je voulais te montrer la salle de bains.
Elle se rapprocha quand même et se plaça à quatre pattes au-dessus de lui,
— Tu vois !
— Oui, et j’aime bien… Ta salle de bains ne va pas disparaître si nous faisons une petite pause ici, non ?
— D’accord, petite pause alors.
Ils firent une pause câline avant de reprendre la visite de l’appartement.
Une fois de retour dans le living, Clémence s’éclipsa pour aller chercher la mousse au chocolat maison qu’elle avait préparé et ramener le vin blanc qu’elle avait gardé au frais.
— J’ai pris les assiettes à dessert et les petites cuillères… J’ai hâte de goûter Clémence !
— J’arrive ! J’espère que cela te plaira, tiens !
Elle lui tendit une portion en utilisant la cuillère de service. Devant le fait qu’il maintenait son assiette à proximité, elle lui en donna une autre ration, puis se servi elle-même.
Elle le regarda goûter et fermer les yeux, avec les commissures de ses lèvres qui remontaient légèrement.
— Alors ? C’est bon ?
Elle goûta sa préparation, elle aussi, et la trouva très bonne, mais attendait l’appréciation de Christophe. Elle l’observait toujours, il avait repris une deuxième bouchée et gardait toujours les yeux fermés. Finalement, il ouvrit les yeux et répondit ;
— Elle est excellente ! Il t’en reste ?
— Merci, oui, il en reste deux fois autant.
— Cela ne fera pas long feu avec moi.
— Avec moi non plus, nous allons devoir nous battre alors ?
— Oui, enfin, non, je pourrais me montrer partageur.
Ils éclatèrent de rire.
— Elle est vraiment excellente, meilleure que celle de ma mère, mais il ne faudra surtout pas le lui dire.
— D’accord, je garderais ça pour moi alors, je n’ai pas envie de me fâcher avec ta mère.
Le silence qui suivit leur permit de terminer leur assiette de dessert.
— Tu serais toujours d’accord de revenir chez moi ce weekend alors ? Et de risquer de croiser mes parents ?
Elle le regarda et lui prit l’une de ses mains sans la sienne.
— Je crois que je suis prête à prendre ce risque Christophe, oui.
— Tant mieux.
Il serra la main de Clémence qui lui demanda,
— Mais, dit-moi, avant ça, on pourrait faire plus ample connaissance ; j’aimerais savoir ce que tu aimes et ce que tu n’aimes pas dans la vie, tes goûts littéraires, culinaires et autres, quelles séries télévisées tu aimes… Histoire de savoir si nous risquons de nous disputer pour la télécommande, tu vois ?
— Si on allait dans le sofa pour en parler ?
Ils se levèrent et s’installèrent à l’aise pour papoter de divers sujets.
La soirée s’avançant, les tous deux se résignèrent à admettre qu’ils avaient sommeil.
— Toi comme moi, nous devons être en forme pour continuer la semaine de travail, je serais d’idée de ne pas trop tarder pour aller dormir. En tout cas, personnellement, j’ai besoin de mes heures de sommeil.
— Je suis d’accord Clémence, j’ai sommeil et si je ne dors pas assez, je deviens un vrai zombie !
— Mmh, je n’ai peut-être pas envie de voir ça !
Elle rigola. Christophe lui dit,
— Mais en même temps, je n’ai pas envie que cette soirée se termine.
— Moi non plus, mais j’ai envie d’en connaître d’autres, avec toi.
— Oui…
Il se tut et son regard se perdit dans le vide.
— Christophe ?
— Oui, pardon, j’étais dans les nuages, désolé.
— Je l’ai bien vu, c’est sur la durée de notre relation que tu te poses des questions ?
— Non, c’est sur la qualité de ce qui nous lie.
— C‘est-à-dire ?
— Tu sais, quand la tantôt, tu m’as avoué ce que tu ressentais, j’ai du mal à pouvoir t’expliquer combien cela m’a fait du bien et que cela m’a rempli de confiance, en toi et en moi.
— J’étais sincère Christophe. Tu appréhendes toujours que je ne veuille plus de toi ?
Il sourit,
— Oui, j’ai toujours ce spectre-là.
— Je ne sais pas si j’arriverais à dissiper cela, mais je te propose qu’on se donne une chance pour tenter d’être heureux, le temps que ça durera. Mais j’espère que cela durera longtemps entre nous.
Elle le prit dans ses bras, plaçant la tête de Christophe sur sa poitrine et en posant la tête sur la sienne.
Elle sentit qu’il se relaxait, il l’enlaça et ils restèrent un moment ainsi.
— Christophe, je te propose d’aller nous coucher, il est passé 23h.
Il leva la tête et lui répondit,
— Oui, je te suis…
Elle le guida, ils s’installèrent dans le lit, après s’être déshabillé. Nus, tous les deux, ils se pelotonnèrent l’un contre l’autre.
— Je suis bien avec toi Clémence,
— Moi aussi, Christophe et je suis sure que cela fonctionnera bien entre nous.
— J’y crois aussi et je compte faire ce qu’il faut pour que cela dure, n’hésites pas à me dire s’ils y a des trucs qui te dérangent.
Elle lui posa un baiser sur les lèvres et lui dit,
— Je n’y manquerais pas Christophe, mais pour le moment, je n’ai qu’une envie, te sentir près de moi, de te sentir tout court.
— Moi aussi.
Il l’enlaça et ils se laissèrent aller vers les bras de Morphée.
Au petit matin, Clémence fut réveillée par son radio-réveil. Elle se retourna et se trouva nez à nez avec Christophe qui avait du mal à ouvrir les yeux.
— Eh oui Christophe, il est l’heure de se lever…
Elle lui caressa le visage puis se leva et quitta le lit. Comme il tentait de la retenir, elle lui dit,
— Si je reste au lit, je risque de me rendormir !
— Mmh, je dois me lever aussi…
Christophe s’étendit et prit toute la place dans le lit.
— J’arrive… Je prépare le petit-déjeuner pendant que tu es dans la salle de bains ?
— Ok !
Elle fila se rafraîchir et s’habiller en souriant, quelques minutes plus tard, elle lui lança,
— Salle de bains libre, je t’attends pour déjeuner ?
— Oui, je me dépêche !
Quelques minutes plus tard, ils déjeunaient à deux.
— Bien dormi, Christophe ?
— Très bien dormi, et toi ?
— J’ai bien dormi, je n’ai pas trop bougé ? J’ai tendance à bouger la nuit.
— Non, ou alors j’ai dû bouger en même temps que toi.
Il sourit et la regarda, elle sirotait son thé au lait après avoir avalé deux tartines couvertes de pâte à tartiner au chocolat, lui-même sirotait aussi, mais un café. Il se décida à lui demander,
— Clémence, que penserais-tu si je te proposais de revenir ce soir chez toi ?
Elle leva les yeux vers lui et lui répondit,
— Tu es prêt à mettre ta brosse à dents en colocation avec la mienne dans ma salle de bains ?
— Oui… Si tu es d’accord avec cette possibilité ? Mais tu trouves peut-être que cela va trop vite ?
— Oui, c’est rapide, mais j’en ai envie, j’ai envie de tester quelque chose à deux et il n’y a que comme cela que nous pourrons tester nos compatibilités au quotidien, enfin, je trouve.
— C’est effectivement le seul moyen.
Ils tombèrent d’accord sur le fait qu’il ramènerait aussi un peu de linge et autres effets personnels, elle allait réorganiser ses tiroirs et lui réserver un peu de place.
Ils se quittèrent au moment d’aller travailler,
— Bonne journée à toi Clémence,
— Bonne journée à toi aussi Christophe, à ce soir.
— Oui, à ce soir !
Un fougueux baiser et chacun prit le chemin de son travail.
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