Chapitre 3

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Il n’y avait pas à dire, Mili ne mentait pas quand elle disait que les Hamner étaient pleins aux as. Ils possédaient un vieux corps de ferme rénové. L’herbage accueillait toujours deux cheveux et d’autres animaux sauvages libres de faire leur vie sur leur domaine. La ferme était encerclée par de la verdure abondante et bien entretenue et garnie de fleurs sauvages et exotiques. Une forêt immense bordait les côtés de la bâtisse, il n’y avait pas de voisins à des kilomètres, seuls des animaux sauvages et le silence de la nature.

La ferme était principalement faite de vieilles pierres polies et de poutres usées. De longues fenêtres prenaient essentiellement l’avantage sur les pierres et reflétaient le ciel bleu sur chacune d’entre elles, jusqu’à la fenêtre oubliée du grenier. L’intérieur était aussi spacieux et d’un blanc éclatant, un mélange de bois ancien et de marbre brut. L’intérieur était aussi froid et distant.

Rosé ouvrit la porte d’entrée d'un bruit sinistre, la fraicheur courait déjà sur sa peau collante de sueur, elle accueillit avec plaisir le courant d’air.

— Grouille-toi de fermer la porte ! s’écria Adam en passant, vêtu d’un simple short de plage et d’un t-shirt délavé. Je ne me suis pas épuisé à chasser la chaleur pour rien !

Rosé roula des yeux et ferma la porte d’un coup de pied.

— La porte ! s’écria une voix féminine quelque part dans la maison.

— C’est Rosé ! hurla à son tour Adam en lui lançant un sourire suffisant.

Rosé lui montra son majeur pour simple réponse. Adam haussa les sourcils, le regard rempli de malice, et leva la main. Le simple geste aurait pu être tout à fait normal, sauf si on ne faisait pas partie d’une famille royale dotée de super pouvoir. Rosé perdit l’équilibre sans avoir fait aucun pas. Elle jura et se rattrapa à la commode noire et dorée qui trainait contre le mur.

— Putain, Adam !

— Maman ! Rosé a touché la commode du roi Kepler !

Rosé jura une seconde fois et lâcha aussitôt le meuble en grimaçant. Elle baissa les yeux sur sa main moite, elle grimaça de plus belle. Ses traces de doigts étaient apparues sur le verre noir de la commode. Elle était morte.

La commode avait quelques années de plus qu’elle, un cadeau du roi Kepler pour la naissance d’Edward. Le meuble était d’une beauté étrange, mais à première vue elle était un meuble horrible venu des profondeurs d’une galaxie sombre. Tenu par deux simples pieds en or massif, un bloc de verre noir reposait fragilement sur les deux pieds. La commode n’avait rien d’extraordinaire, mais le verre noir de Kepler était un élément rare et cher.

Rosé grimaça et renvoya un long regard à Adam.

— Tu es con ou quoi ? s’écria-t-elle. J’aurais pu la casser, idiot.

Adam grimaça à son tour et haussa les épaules. Il posa sa bouteille d’eau sur le pied du grand escalier en bois et s’avança.

— Comment aurais-je pu savoir que tu te rattraperais à ce vieux truc, moi ?

Rosé ouvrit la bouche et la referma aussitôt, chercher à avoir une discussion avec lui ne servirait à rien d’autre que se battre et se faire punir par leurs parents.

— Regarde, tu as laissé tes empreintes, idiote.

Il insista sur les dernières paroles avec un petit sourire.

— Si tu veux un conseil, nettoie ton merdier avant que papa ne rentre avec Kaïs Kepler.

Les yeux écarquillés, Rosé tira sur son t-shirt et frotta doucement le verre noir. Rosé se demandait pourquoi ces Kepler le vendaient très cher et pourquoi était-il si rare, mais son père l’avait emmenée dans son bureau et lui avait montré un cristal de la taille d’un poing. Il lui avait mis dans les mains et lui avait dit d’une voix étonnamment surprise.

— Les Kepler n’ont pas beaucoup de ressources en matière de matériaux premiers, ils se contentent de roches volcaniques et de sable noir. Leur planète et l’une des plus sombres jamais comptées, elle n’a aucune source de lumière, mais ils étouffent sous une chaleur horrible. Il marqua une pause, ses yeux étaient posés sur le cristal que Rosé tenait dans la main. Regarde bien, dit-il d’une voix calme.

Rosé rapprocha la pierre devant ses yeux. Elle lâcha un bruit d’exclamation en découvrant des reflets verts et roses. Elle tourna la pierre dans tous les sens. D’autres reflets argentés brillaient sous d’autres angles.

Elle leva la tête pour regarder son père impressionné par cette découverte.

— Les Kepler possèdent une mine de diamants, commença-t-il d’une voix aigüe, l’absence de lumière a noirci la pierre d’habitude brillante comme la lune.

— Un diamant privé de lumière…, murmura Rosé, sous l’extase de la beauté de la pierre froide.

Hector Hamner hocha la tête et sourit à sa fille.

— Mais un diamant a besoin de lumière pour vivre, dit-il, alors il se nourrit de tout ce qu’il trouve. Ce que tu vois n’est que le reflet des galaxies, gaz et lumières environnant Kepler.

Rosé fronça les sourcils et lança un regard accusateur à son père.

— Je pensais qu’ils étaient plongés dans le noir total.

Hector s’esclaffa.

— Ils le sont, dit-il avec un petit rire, mais le diamant peut faire des kilomètres d’années-lumière pour trouver un tout petit peu de lumière.

Rosé s’arrêta de frotter un court instant pour se concentrer sur le diamant noir de la commode, elle avait essayé à multiples reprises de chercher un reflet de galaxie ou le reste d’une étoile qui aurait sûrement disparu depuis des années. Mais rien, elle ne trouvait que son visage. Elle soupira et reprit son geste doucement pour effacer les traces de doigts.

— Rosé…

Adam lui tapa doucement le bras.

— C’est ta faute, Adam, répondit-elle en frottant un peu plus fort.

— Rosé, prévint son frère en lui lâchant le bras.

Rosé le vit se courber du coin de l’œil. Elle laissa son geste en suspens et n’osa même pas se tourner pour faire face à son père et au fils du roi de Kepler. Elle ne savait pas ce qui lui faisait peur. Le regard de son père sur son geste presque blasphématoire, ou rencontrer un Kepler pour la première fois. Elle jura mentalement. Elle avait toujours voulu savoir à quoi ressemblaient ces habitants d’une planète inconnue. Ses frères lui avaient toujours fait une description caricaturale, elle n’avait jamais mis les pieds en dehors de la planète Terre, même lorsque Dylan et Evan avaient eu leur remise de diplôme, elle restait toujours chez Mili pour une soirée pyjama. Jamais, elle n’avait rencontré des « extraterrestres ». Elle ne savait pas à quoi ressemblait un Pluton, ni un Kepler. Elle ne savait rien. Son père lui avait dit que si elle voulait découvrir son monde, elle devait y rentrer, donc aller à Europe, mais elle n’en avait aucune envie. Alors, elle s’était contentée de ne pas savoir et rester dans l’ignorance totale à écouter Adam déballer ses histoires d’amour avec des Pluton ou des Kepler. Il lui avait dit qu’ils n’avaient pas de tentacules et ne possédait aucune antenne, c’est la seule chose qu’elle savait.

Elle prit une longue inspiration et leva doucement les mains de t-shirt et le remis en place. Elle ferma les yeux, un instant. Elle allait se prendre une honte intense devant le futur roi de Kepler.

— Rosé.

Elle grimaça. La voix de son père était dure et une pointe de colère irritait sa gorge. Elle pouvait déjà savoir que ses yeux gris étaient dorénavant sombres et une ride avait dû se frayer un chemin sur son front. Elle se tourna doucement et fit face à son père, mais son regard était déjà attiré sur le jeune prince Kepler. Il se tenait droit et bombait presque le torse, ce qui faillit faire rire Rosé. Il semblait, lui aussi, la détailler autant qu’elle le faisait. Ce n’est pas le teint anormalement pâle qui étonna Rosé, mais ces yeux noirs ténèbres qui la fixaient. Ses pupilles étaient entièrement noires et lui faisait froid dans le dos. Elle manqua de reculer d’un pas, mais resta stoïque.

Elle força un simple sourire.

— Salut, lança-t-elle d’un ton enjoué.

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