Partir là-bas
« Je donnerais tout ce que j’ai pour partir d’ici
Pour caresser les grains dorés du sable chaud. »
Nous sommes revenues sur la plage où nous observons la nuit et son manteau d’étoiles. Elles scintillent au-dessus de nos têtes et je songe que cette immensité-ci m’effraie. Allongées, pensives, je finis par tourner mon visage vers Satine qui a les yeux fermés. S’est-elle endormie ? De nouveau, le doute me gagne et l’idée de me lever pour partir trouver le Prince est tentante. Non, je ne désire pas l’abandonner. Puis, je voudrais avoir des réponses. Endymion n’a-t-il pas dit qu’elle était princesse ?
« J’y pense, mais il a pas tort. »
J’arque un sourcil, secoue la tête quand elle lève ses yeux vers moi.
« Non, j’veux dire… son idée, former un équipage composé uniquement de femmes ! T’imagines ? »
Je l’écoute, intriguée.
« J’pense que tu l’sais, mais nous, nous vivons dans un monde d’hommes. Pour eux, la liberté est facile d’accès ! Ils ont inventé des superstitions stupides pour nous évincer. Pourquoi on porterait malheur sur un bateau, tu m’expliques, hein ? »
Je fais une petite moue gênée, incapable de traduire ma réponse autrement qu’avec les mots dont je suis privée. Avec des dessins, peut-être ? Non, je suis trop mauvaise et je suis déjà bien assez ridicule comme ça.
« Dit. Une nouvelle aventure, ça te dit ? »
Incrédule, je penche la tête sur le côté. J’ai décidément bien du mal à la suivre.
« Comme l’autre zouave a vendu la mèche, autant te l’avouer franchement : je suis la sœur du Prince Éric. Me regarde pas comme ça ! Je vais tout t’expliquer, mais avant, tu dois me promettre de pas me laisser et de m’accompagner au château, d’accord ? »
Comment refuser une occasion pareille ? En fin de compte, le Destin décide de m’aider. J’hoche de la tête pour toute réponse. Je suis tellement heureuse que je n’écoute même pas ses explications. Les astres me paraissent plus brillants que jamais. Notre accord est scellé par une invitation à danser. Je découvre ce plaisir avec elle, bercée par une douce euphorie.
Nous ignorons toutes les deux que des personnes, dans l’ombre, nous observent.
Annotations
Versions