L'histoire d'un regard
Je me suis beaucoup retrouvée, dans l'histoire d'une jeune femme, se nommant Elisa, qui passa de l'extase d'un amour fulgurant à l'amertume d'une funeste perte. Elle chutera dans des abysses encore inexplorés, par beaucoup d'entre nous, jusqu'à ce qu'un vieillard, se prétendant être un roi d’une contrée lointaine, lui montra du doigt un petit chemin lumineux.
Son récit, débuta par un regard fougueux, une ode à la vie dans les beaux quartiers de Paris. La flèche de Cupidon transperça son coeur d'artichaut, faisant d'elle une princesse entichée. La dévotion n'est-elle pas l'une des sept merveilles du monde ?
Dans un café près du Sacré-cœur de Montmartre, au crépuscule, il a suffi d’un regard pour éveiller ma journée et me faire succomber à la plus grande des tentations.
Il m’arrivait souvent de venir ici, quand je ressentais le besoin de m’évader. Ce lieu quelconque était devenu, peu à peu, ma seconde maison, entre son ambiance bon enfant et un patron d’une rare authenticité.
Je vivais un moment difficile, entre ma mère dont la vie se résumait à se trouver un nouvel amant et mes professeurs qui ne comprenaient pas, que leurs cours n’avaient pas grâce à mes yeux. J'étais une aventurière intrépide qui rêvait d’un ailleurs, mais qui s'enlisait inexorablement dans une prison dorée.
Quand l'asphyxie de cette vie sans issue, atteignit son paroxysme, la rencontre cocasse entre nos deux êtres se produisit, pour transformer ma fatalité en cauchemar oublié ...
Dans le plus grand secret, une communication énigmatique s'engagea entre nos deux existences, dans une langue mystérieuse, certains l’appellent : « La langue du cœur », en tout cas, elle m’était inconnue à l’époque. J’avais la drôle d'impression qu’un complot, se fomentait dans mon dos, pour me déposséder de ma liberté si durement acquise, comparable à ce pauvre matelot incapable, de résister à l’appel des sirènes.
Cette mécanique bien huilée se mit en place en un clin d’œil, en nous confisquant à tire-d'aile notre raison, pour courtiser les faveurs de Dionysos grâce à une nuit d’ivresse incontrôlable. Le bal en notre honneur, commença en grande pompe avec les cris de l'assemblée, l'attente de notre première danse se faisait sentir. Je devais à mon grand dam, accepter ce saut vers l’inconnu comme si ce dernier était devenu ma destinée.
Un flot incessant de questions, se présentait à moi, face à l’angoisse de commencer ma toute première représentation, devant un parterre de poivrots désabusés. Est-ce un piège d'une succulente chimère ? Devrais-je déguerpir avant qu'il se referme derrière moi ? Une sensation confuse m'envahit, partagée entre une envie de m'échapper et celle de rester, pour percer le secret de cette douce alchimie.
Quelle est la raison de ce choix saugrenue ? Je ne suis qu'une néophyte dans l'art de faire la cour, une prosaïque demoiselle, d'un lycée de seconde zone. Mes résultats scolaires n'étaient guère en ma faveur, mais il est indéniable que certains garçons, ne tarissaient pas d’éloges pour acquérir ma bénédiction. Malheureusement pour ces derniers, mes yeux ne se posaient que sur les hommes émérites, ayant une expérience indiscutable dans la pratique des jeux amoureux.
J’entendis une petite voix intérieure me rassurer, soudainement, les portes se fermaient à une vitesse vertigineuse, mon cœur battait la chamade. Ton regard impassible m'épiait de long en large, j'étais sujette à ton jugement de valeur, la moindre imperfection aurait une erreur, fort tragique et sans doute éliminatoire.
Quand mon café latté arriva, dans cette atmosphère pesante et ce brouhaha incessant, je sus dans mon fort intérieur que le bal venait de démarrer. Ma première gorgée de ce mets exquis, avec sa mousse voluptueuse, avait lancé les hostilités, devant un couple en pleine dispute conjugale où l’épouse, assénait des coups d’une violence ébouriffante à son conjoint. Je te vis avancer vers moi avec l'élégance d’une cigogne, comme si tu avais pris ma main droite pour ouvrir la danse, entre nos deux êtres et que rien ne pouvait t’arrêter.
Chacun de tes pas dans ma direction augmentait ton emprise sur moi comme si nos corps se resserraient et que nous tournions sur nous-mêmes de manière effrénée avec une synchronicité presque parfaite, peu à peu, nous faisions plus qu’un.
Quand tu dépassas la table de mon voisin, je me sentis partir dans un volte-face non maîtrisé, que je réussissais à merveille comme si le talent naturel, avait pris le dessus sur l’inexpérience.
Puis te voilà arrivé à ma table, me demandant gentiment l’autorisation pour t’asseoir, ce que je t’accordai bien volontiers, il faut dire que j’étais déjà conquise par l’aura que tu dégageais. Chaque mot prononcé était comme une vague qui s’abattait contre ma forteresse. Bientôt, il ne resterait plus aucune résistance, à ce que tu puisses être le nouveau monarque, de mon royaume en pleine édification.
Je te voyais déjà m’accompagner dans les soirées mondaines ou encore avoir des discussions philosophiques, près du feu de cheminée. J’étais fascinée par ton intelligence et ta cultur qui dépareillaient des garçons de mon âge. Ils ne pensaient qu’à s’amuser et ne pouvaient aucunement se prévaloir d'une finesse d’esprit.
Au moment de prendre congé, une panique s'immisça en toi, la peur de laisser s'envoler l'être de ses désirs vers de nouveaux horizons, était devenu palpable. Je ressentis sous l'impulsion d'une passion brûlante, mon plus beau baiser.
Ma conquête fut implacable, mon coeur empli de romantisme, me faisait imaginer une fin digne de cendrillon, ayant trouvé son prince charmant. Très loin des tumultes que tu allais m’occasionner, en incarnant le funeste rôle, d’amant de ma mère. Sans oublier à mon affliction, ta promotion inopinée, en tant que directeur de mon établissement, comme quoi derrière chaque rêve, se cache toujours une réalité moins rose …
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