« Pendant que nous mangeons, si elle essaie de mettre en avant les poussières magiques qui jaillissent de notre corps, je reste fixé sur le fait qu’elle mange une pizza avec une base de crème fraîche. Honteux. »
Jules
La lèvre inférieure de Kira frémit, certainement à cause du froid. : en douceur je me rapproche d’elle, avec l’intention de lui prêter ma veste. En plus, soyons honnête, ce geste pour la réchauffer me donne l’excuse parfaite pour céder à l’envie irrésistible de me coller à elle.
Tout à l’heure, lorsqu’elle a posé sa main sur mon avant-bras, pour la première fois de ma vie, un contact a été bon et doux. Depuis, j'ai qu'une envie, recommencer.
Je pouvais plus la suivre, plus l’observer, c’était plus possible de continuer ainsi. Il fallait que je la rencontre, et, je pense que c’est à ce-jour la meilleure chose qui me soit arrivé.
Son regard regorge de questions, et maintenant que nous sommes enfin en face à face, y a plus moyen de faire demi-tour, surtout que je suis très impatient de faire plus connaissance avec elle.
— Pourquoi vous m’avez suivie ? Vous auriez pu venir me voir directement, elle demande, agitée et non sûre d'elle.
La justification, je décide de pas la lui donner : comment avouer à une femme que je connais pas que j’ai refusé il y a plus de trois mois de m’approcher d’elle pour pas lui ruiner sa vie et la laisser en sécurité ? N’ayant pas de réponse toute faite, je lui souris.
Il est envisageable qu’elle ait ressenti une certaine gêne de ma part, car elle insiste pas. Elle lève le bras droit. De la lumière dorée scintille. Fasciné, sans réfléchir, je m’empare de sa main menue, brillant dans la mienne, qu’elle ne lâche pas du regard. Sa peau froide m’invite une fois de plus à vouloir la réchauffer. Je pose à mon tour les yeux sur nos doigts. Des particules argentées s’extraient des miens.
Nous restons ainsi un moment, muets, déconcertés par ce qui nous arrive, subjugués par la magie qui émane de nos corps et coule à flots vers le sol pour s’éteindre lorsqu’elle le touche.
— Vous avez mangé ?
Je refuse d’accepter de devoir mettre déjà fin à notre rencontre. Je l’ai tant rêvée, j’ai tant imaginé sa voix qu’elle sonne comme une douce mélodie.
— Non, mais… je n’ai pas très faim.
Je souris à sa réponse désorientée.
— C’est une simple proposition, à prendre ou à laisser.
Trahissant sa gêne, ses pommettes se mettent à rougir.
— Avec tout ça, je crois que ça m’en a coupé l’appétit. elle chuchote.
— Et vous boire un verre ?
Je multiplie les propositions, je prends pas le risque que notre première soirée s’écourte. Je suis insatiable lorsqu’il s’agit d’elle.
D’abord, elle répond pas, elle semble encore plus timide que je l’avais perçu. Alors, pour pas la mettre encore plus dans l’embarras, délicatement, je pose ma main sur son épaule, elle me regarde.
— Allons-y.
Elle sourit, ça doit vouloir dire qu’elle est d’accord. On tourne les talons et c’est à ce moment-là que je constate que les lumières dorées et argentées se sont arrêtées. Je comprends pas ce qui les active et les désactive ses lucioles. Mais bref, on verra ça plus tard.
J’espère que ma veste ainsi que la marche l’aide à se réchauffer. Elle est collée à mon bras droit, sans dire un mot. Je souris car plus de quarante centimètres nous séparent et si je fais des pas normaux, elle semble en faire des géants.
— Un verre et je vous raccompagne. je dis pour la rassurer sur l’endroit où je nous dirige et aussi, pour que nous reprenons une discussion, peu importe laquelle.
Mais elle hoche juste la tête. Loupé. Heureusement, au bout de la rue, un bar est ouvert. Nous entrons. Je tire sa chaise pour qu’elle s’assoit et qu’elle soit pas dans l’obligation de la soulever.
Elle baisse les yeux en souriant : elle a apprécié mon geste. Elle enlève ma veste pour la déposer sur le dossier, attirant mes yeux sur son magnifique corps.
Sa robe lui va à ravir, comme si elle avait été confectionnée sur elle. Elle moule à merveille ses courbes et je sais pas si c’est la différence de température entre l’extérieur et l’intérieur qui me donne chaud mais je halète. Elle croise les bras sur la table, ce qui fait accentuer la naissance de sa poitrine auparavant dissimulée, mon regard plonge dedans : mes idées perverses sont déjà en train d’imaginer la suite.
Pour une fois, c’est elle qui prend la parole :
— Qu’est-ce vous buvez ?
— Un whisky, et vous ?
— Une grenadine à l’eau.
J’éclate de rire à sa réponse.
— Vous n’aimez pas ça ?
Je lui renvoie son interrogation et elle me dit non de la tête.
J’interpelle le serveur qui se trouve à proximité et commande nos consommations. En patientant, je l’interroge :
— Vous permettez que je vous appelle Kira ?
— Oui, bien sûr, et vous avez même déjà commencé, Mademoiselle Miller ferait beaucoup trop professionnel.
Je réfléchis quelques secondes… C’est vrai, je l’ai déjà appelée par son prénom. Mais en même temps, lorsque je parle d’elle à mes proches, jamais il m’est venu à l’idée de l’appeler par son nom de famille.
— Pourtant, on va devoir travailler ensemble.
Je la fixe pour voir sa réaction : je veux savoir si elle serait prête à me revoir, si elle en a envie. Je crois que ses pommettes se sont légèrement mises à rosir, mais rapidement elle pris son verre pour en boire une bonne gorgée.
Je reprends :
— Pour ma part on s’en tiendra à Jules, pas de Monsieur où toute autre débilité de ce genre.
Ses lèvres s’étirent, et si j’en crois ses petites mimiques, elle aime le personnage que je représente.
— En tout cas, sachez que j’ai jamais fait tout ça pour vous faire peur, mes actions étaient pas réfléchies, j'avoue à demi-mot.
Elle me regarde avec insistance, mais rien d’accusateur, enfin, je le sens pas. Perdu dans ses yeux, je remarque que la teinte de ses iris est identique à celle des miens. Encore une nouvelle étrangeté qui vient s’ajouter aux autres. Moi qui pensais être unique grâce à la couleur de mes yeux, finalement, non.
— Vous aussi vous avez remarqué ?
— Oui, sans aucun doute, elle finit par admettre comme à contrecœur. Vos yeux semblent être un reflet de moi-même.
Putain, c’est déroutant, pour la première fois de ma vie, je rencontre une personne qui est capable de me fasciner et surtout de m’intéresser plus de cinq minutes. Tout tourne trop vite dans mon esprit au point que je me demande si c’est réel. Ce moment remet en cause littéralement toute mon existence. Je savais qu’en faisant sa connaissance, mon univers allait changer… Possible que j’aie eu peur, ça expliquerait que j’aie évité de m’approcher d’elle. Qu’est-ce je dois penser maintenant vu que mes envies ne sont plus les mêmes, que les têtes fixées aux murs allaient perdre de leur valeur et que la tentation de me suicider deviendrait plus qu’un souvenir. Pourtant, je m’efforce d’y croire encore.
— Jules ? Vous allez bien ?
Lui affirmer que oui serait lui mentir, lui dire non serait me dévoiler.
Puis, je suis en train de faire la plus grosse connerie que je pouvais. Je suis en train de fixer sa petite bouille d’empathie qui est prête à m’écouter. Mais qui pourrait résister, qui ?
— Non, Kira, ça ne va pas, je confesse en baissant les yeux.
— Je sais que nous ne nous connaissons pas, mais voulez-vous en parler ?
Au plus profond de moi, j’en meurs d’envie, pourtant je change de sujet. Mais de lui avouer que ça allait pas, au moins, je lui ai pas menti.
— J’suis content que la statuette vous fasse plaisir, j’ai compris que ce vieux con voulait pas vous la laisser.
Dans les premières secondes, elle ne comprend pas ma réponse, car elle ne s’attendait sans doute pas à ce que je revienne sur ça, puis elle se met à sourire.
— Je… je ne vous l’avais pas demandée.
Certes, nous ne nous connaissions pas encore, réponse typique lorsque que l’on se sent embarrassé.
— Vous savez pourquoi j’aime la France ?
— Non, comment pourrais-je le savoir ?
— Parce qu’avec de l’argent on peut tout avoir.
Ses sourcils se froissent et si j’en crois mes maigres connaissances des caractéristiques humaines : elle me soutient pas.
— Je ne suis pas entièrement d’accord avec vous, il existe des milliers de choses qui ne s’achètent pas.
— Ouais, ouais, j’sais, l’amour, l’amitié et j’en passe, mais je parle du matériel.
— Dans ce cas alors, on peut dire que je suis d’accord. Vous avez répondu à la première question, vous pouvez passer à la suivante.
Je ris : elle ne renonce jamais. Et derrière sa timidité se cache une femme pleine de savoir et d’humour.
— Eh bien, j’ai passé mon bac en candidat libre, et vous ?
— Au lycée Louis le Grand.
A sa réponse, je comprends qu’elle vient du 5 -ème arrondissement de Paris, quartier chic et paisible. J’en conclue qu’elle est issue d’une bonne famille.
— Mes félicitations, j’ai bu mon premier verre d’alcool à quinze ans, et vous ?
— Dix-huit ans, quand j’ai obtenu mon bac, mon père à ouvert une bouteille de champagne. J’ai gouté… et je me suis demandé pourquoi les gens dépensaient autant d’argent pour ça.
— Ahah.
— Pourquoi vous ricanez ? Qu’elles sont vos passions ? elle me demande avec les pommettes rosies.
Ce petit jeu de questions-réponses est une bonne idée, car son côté ludique permet à Kira de se détendre.
— Vous trichez déjà… ça fait deux questions. je dis d’un ton faussement agacé.
Elle esquisse une moue amusée. Elle a compris
— Vous m’en poserez deux à votre tour.
— Le sport, les arts-martiaux précisément, votre couleur et votre film préféré ?
— Au fait, félicitations pour votre titre de directeur, J…Jules. Ma couleur favorite est le vert et pour ce qui est cinématographique, j’aime les histoires d’amour, vous savez, celles dont l’on sait déjà comment elles se terminent, rien qu’en regardant la jaquette.
Cette fois j’éclate franchement de rire, même si je ne sais pas à quel genre de films elle fait référence. Et j’apprécie qu’elle m’ait appelé par mon prénom, même si elle a hésité.
— À mon tour, est-ce que vous fumez ?
— Ouais, occasionnellement, je réponds en toute franchise.
— Vous m’en offrez une ?
— Avec plaisir Kira, mais j’ai encore deux questions d’avance.
Nous allons sur la terrasse, je lui tends mon paquet de clopes pour qu’elle se serve et on continue notre jeu sur quelques questions supplémentaires. Beaucoup de détails cruciaux pouvaient pas être connus par Loïs, comme le nom de son parfum, ses traits de personnalité, ou ses différentes mimiques corporelles selon nos sujets de conversation.
J’avance le briquet allumé vers sa cigarette, faisant attention au vent pour pas qu’elle se brûle. Lentement, elle approche son visage, je la fixe, elle est magnifique.
Je sais que j’ai attendu trop longtemps pour tout savoir sur elle, mais ce soir, je suis heureux de la découvrir par moi-même.
Je remarque qu’elle s’asphyxie pas avec la fumée nocive de cette merde, comme moi, mais qu’elle en fait de grande bouffée et la rejette rapidement. Je fini la mienne et l’écrase dans le cendrier en attendant Kira.
Elle grelotte sur place en frottant ses mains l’une contre l’autre.
— Vous n’avez pas froid juste en chemise ?
— Non, Kira, j’ai pas froid, vous en faites pas.
J’en dis pas plus, j’ai pas envie de parler de moi, je veux qu’elle monopolise toutes les conversations, qu’elle me confie tout sur elle.
Ses mains glissent à l’intérieur de ma veste pour la refermer sur elle. Je comprends que le vent lui est mordant, on peut pas rester ici.
Nous quittons le bar, et chaque minute qui passe me rapproche du moment ou je vais devoir la raccompagner en bas de chez elle et lui dire au revoir.
Nous marchons. Je la regarde souvent, elle est si jolie, si gentille. C’est la première fois ou je me promène avec une femme à mes côtés dans la rue. Je remarque qu’une fois de plus elle est presque collée à mon flanc, la raison ? je l’ignore. J’ai qu’une envie, passer mon bras autour de ses épaules et la serrer contre moi. Mais sachant pas comment elle réagirait, je fais rien.
— J’sais pas c’qui s’passe avec nos doigts, mais c’est quand même bizarre.
Aucune personne de mon entourage me reconnaitrait en cet instant, même moi je l’explique pas, je déteste parler, j’adore le silence, mais avec elle, il me pèse.
— Je vous avoue que moi non plus, vous ne pensez pas que d’autres personnes ont ça ?
Rien à foutre des autres…
— Non, enfin, j’sais pas, mais surtout, pourquoi pas nous ?
Elle s’arrête de marcher et me fixe avec de grands yeux.
— Quoi ?
— Vous avez de la poussière argentée qui tombe de vos ongles et vous vous dites pourquoi pas ?
À mon tour je la fixe en haussant les épaules.
— Que voulez-vous que j’y fasse, j’vais pas m’couper les doigts ?
Elle me dévisage à savoir si je suis sérieux ou non, je reprends :
— Ahah, quoi, c’est vrai ?
— Euh oui, vaut mieux. Mais cela ne vous fait pas peur ?
— Non, j’suis juste curieux de savoir d’où ça vient. Mais vous, vous avez peur.
Son regard est pensif quelques instant puis elle reprend :
— Oui, car ce n’est pas réel, et c’est ça qui me fait peur en plus de la statuette qui s’efforce de rentrer en conversation avec moi. Et comme vous l’avez remarqué, je ne parle pas le japonais, mis à part quelques anime que j’ai vus.
J’éclate de rire, j’adore sa repartie.
Dès lors, elle me confie ce qu’elle a fait interpréter à l’aide d’un traducteur en ligne, je lui soumets que si elle le souhaite, je pourrais tenter de communiquer avec elle. Elle acquiesce vivement de la tête.
Afin de la rassurer, je pose délicatement ma main sur son épaule et elle me dit :
— Vous savez, je pensais que je devenais folle, que j’avais des hallucinations, elle me confie avec un regard triste.
— Non, vous êtes pas folle, vous êtes même saine d’esprit. En revanche, vous êtes pas non plus très méfiante, car une jeune femme sans défense ne traine pas dans les ruelles sans vie de Paris avec un homme qu’elle connait pas.
Elle regarde autour d’elle et voit que je lui mens pas, mais elle se ravise très vite lorsqu’elle reconnaît que nous sommes qu’à quelques pas de chez elle.
— Et qui vous a dit que j’étais sans défense ?
— Ahah, je me trompe ?
Elle dit non de la tête en inclinant les yeux. Je déteste quand elle fait ça ! Je veux qu’elle reste digne, la tête haute !
— Je pense que, si je suis en danger, je sais frapper là où ça fait mal, elle ajoute en chuchotant et le regard toujours dirigé vers ses chaussures.
— C’est un bon début. Je dis d’un ton plein d’entrain pour la rassurer.
— Mais ce n’est pas très fair-play ! elle crie en relevant brusquement la tête.
Au moins ça a fonctionné.
— On s’en fout ! si on est menacé, il faut s’en extraire et donc tous les moyens sont bons à prendre. j'insiste pour la déculpabiliser.
Une nouvelle fois elle sourit, avoir mon approbation est important. Le nombre de fois que je l’ai fait rire en cette soirée, j’aurais dû les compter. Jamais j’aurais pensé me sentir aussi bien avec une personne que je connais pas.
Le manque d’un repas se fait entendre dans mon ventre, elle sourit discrètement.
— Ça vous dit pas qu’on aille manger un p’tit truc ?
— Non, je ne peux pas.
— La raison ?
Elle plonge son regard dans le mien, mal à l’aise au possible, j’ai l’impression que j’arrive aussi bien à la rassurer qu’à la déstabiliser, peut-être que je suis trop direct dans mes questions, mais je veux pas qu’elle parte !
— Eh bien, tête en l’air comme je suis, j’ai oublié mon portefeuille, il n’y a rien dans ce sac à main… juste un effet de mode.
Elle me fait rire, elle a cette manière à elle de dire les choses qui l’a rendent authentique et surtout, c’est pas mon franc parlé, uniquement qu’elle n’a pas pris le nécessaire pour se restaurer à l’extérieur. Qu’est-ce qu’on s’en fout de ça…
— Je vous offre une pizza, pas la tour d’Argent.
Elle rit de ma désignation et hausse les épaules, les choses deviennent claires, elle doit se sentir honteuse que je lui paie à bouffer, mais quelle idée.
Je pose une main dans le creux de ses omoplates, l’invitant à avancer. Coup du destin, une pizzeria est ouverte jusqu’à deux heures du matin. On commande la première qui nous tombe sous les yeux, toujours devant le comptoir, je me retourne face à elle et j’écarte le pan de ma veste qui est toujours posé sur ses épaules, si elle se contracte sur elle-même par mon acte, très vite elle sourit et fait un pas vers moi.
J’arque un sourcil.
— Excusez-moi, mais… j’ai besoin de ma carte de crédit.
J’attrape mon portefeuille et je paie l’addition sans même prendre connaissance du montant. À nouveau je le range dans sa poche initiale, nous ne nous lâchons pas du regard, jamais je n’ai été aussi proche d’elle, et si elle était attentive, elle entendrait que mon cœur tape un sprint. Obligé de sourire, je l’ai jamais vu aussi rouge.
— La prochaine fois, c’est moi qui offre.
Sa phrase résonne tel un uppercut, elle insinue qu’elle veut que l’on se revoit, pas comme tout à l’heure où c’est moi qui ai mis en avant le fait que je pouvais être le traducteur entre elle et la statuette. Elle compte vraiment me revoir, je suis incapable de cacher le sourire niais qui se marque sur ma tronche.
— Ressaisis-toi, grand con.
Pendant que nous mangeons, si elle essaie de mettre en avant les poussières magiques qui jaillissent de notre corps, je reste fixé sur le fait qu’elle mange une pizza avec une base de crème fraîche. Honteux.
J’écoute à peine ce qu’elle me dit, perdu dans mes pensées par sa beauté, sa façon douce de s’exprimer.
— Jules ?
Je me secoue la tête en me raclant la gorge, elle a compris mon absence à la bouffer des yeux, au point que j’ai fait qu’une bouchée dans ma part de pizza. Tandis qu’elle a fini la sienne.
— Ouais, désolé, j’étais ailleurs, je dis pour m’excuser.
— Vous devez être fatigué, il est tard.
Quelle innocence, j’adore.
Elle cache un petit bâillement derrière le dos de sa main.
— Hmm, moi aussi je suis fatiguée, cette journée a été épuisante.
C’est pas le qualificatif que j’aurais employé, mais plutôt captivante.
Je me lève, elle en fait de même, finalement, j’ai plus faim, elle m’a rassasié. J’ai bu ses paroles et j’ai ravalé mes envies, ça a comblé le vide dans mon estomac.
Elle regarde la boîte de carton quasiment encore pleine là où j’étais assis. Je comprends pas où elle veut en venir.
— Vous n’avez presque rien mangé. Vous vous sentez mal ?
— Non, je réponds en prenant la boîte et la tendant vers elle.
— Prenez-la, j'en ferai rien.
Elle hésite, j’insiste, puis, elle finit par la prendre et me remercie.
Comme prévu, je la raccompagne en bas de son immeuble, hors de question que je la laisse rentrer toute seule. Je prends sa main dans la mienne et j'y dépose lentement mes lèvres dessus. Ses joues s'empourprent encore plus vite que mon baise-mains.
— Bonne nuit Jules, et merci… merci infiniment pour cette soirée, elle souffle avec un sourire dissimulé.
— C’était un plaisir partagé, Kira.
Elle se retourne et traverse le couloir de son immeuble, sa démarche est légère, j’attends que la lumière éclaire chez elle avant de rentrer chez moi.
Annotations
Versions