Chapitre 12 :
La petite fille se fixait dans le miroir que possédait Alma dans sa tente. Elle faisait cela tout les jours à présent. Cela ne servait à rien, et elle le savait, sauf qu’elle avait pris l’habitude de se regarder chaque matin dans la glace pour se rendre compte de tout ce qu’elle avait traversé. De son changement physique aussi. Elle n’était plus la petite fille légère et fragile, à la peau extrêmement pâle. Elle ne cessait de se faire la remarque dans sa tête en s’observant. La petite fille ne savait pas comment elle trouvait son nouveau physique, elle savait juste qu’elle ne ressemblait plus à ce qu’elle était. La jeune fille venait tout juste d’avoir ses dix ans, et elle ne pensait pas les fêter quelque part d’autres quand Opartisk à l’époque. La petite fille était certaine d’une chose : personne ne la reconnaîtrait. La peau de la jeune fille était désormais très bronzée, elle avait pris plus de cinq centimètres et ses cheveux avaient un tout petit peu repoussé même s’ils étaient désormais bruns clairs avec les pointes blondes. Sans compter le tatouage, le symbole de la famille Sionava, celle d’Alma, Gabriel et Angelo. C’était une sorte de tige épaisse qui partait de son épaule gauche, qui remontait dans le cou, puis se séparait en deux pour faire une spirale vers le bas juste en dessous du menton et une autre derrière l’oreille. Cela se voyait beaucoup plus sur la peau de la jeune fille lorsqu’elle n’était pas bronzée. Kendra n’arrivait même pas elle-même à se reconnaître. Qu’en penseraient ses parents ? Iris ? Samuel ? Les autres surdoués ? La petite surdouée n’avait plus l’impression d’être une Opartiskaine à part entière, néanmoins, elle ne se sentait pas tout à fait à l’aise dans la tribu de nomade. Ce n’était pas sa culture, et auparavant, elle ne savait pas que des peuples vivaient dans le désert, elle pensait qu’il n’abritait personne. Kendra avait eu de la chance de tomber sur eux, sinon, elle serait morte, ou rattraper par les soldats de l’état. Soldats, qu’ils avaient réussis à duper lors de leur visite de vérification du clan. Ils ne l’avaient pas reconnu. Ils n’avaient pas tué Past, et Kendra ne savait pas ce qui c’était passé, mais même s’il l’avait embarqué, ils n’étaient pas revenus la chercher. Elle s’en était sortie.
— Oui, c’est toujours toi dans ce miroir. Tant que tu t’y mets en face, cela sera toujours toi, déclara une fois féminine derrière elle.
La petite fille se retourna face à une belle et séduisante jeune femme aux magnifiques yeux bruns et aux cheveux d’un brun clair virant au blond à cause du soleil. C’était Alma, la sœur d’Angelo et Gabriel à qui appartenait cette tente. La jeune femme était d’une beauté éblouissante et l’entretenait chaque jour. Elle vivait une relation amoureuse avec un fils des leaders. Cette relation était interdite, les leaders choisissaient les fiancés de leurs enfants, et Alma n’avait pas le droit de se marier. Pour une raison que Kendra et Gabriel ignoraient. La créatrice de vêtements de la tribu n’avait pas l’air dans son assiette même si elle essayait de paraître heureuse. Même si son sourire y était, son regard la trahissait. Elle prit une chaise pour s’asseoir à côté de miroir.
— Tes parents te manquent, devina-t-elle en fixant la petite fille.
— Bien sûr, mais Iris et Samuel aussi. Lilian, Sandra et les jumeaux aussi. Ils me manquent tous, souffla la petite fille.
— Oui, évidemment, c’est normal. Angelo n’est pas loin de trouver la bonne fréquence du talkie-walkie. Je ne sais pas encore combien de temps cela va prendre, mais on va peut-être bientôt réussir à contacter la base de cette organisation secrète. Je ne sais pas ce qu’ils feront par la suite. Tu t’en sortiras je pense, tu es une battante.
Kendra ne répondit pas. La petite fille ne savait pas si elle avait hâte de rentrer en Opartisk. Elle n’en était pas si certaine. Le peuple était sûrement encore plus révolté qu’auparavant, la guerre civile pouvait sûrement éclater à tout moment, peut-être qu’elle y était déjà. En quelque sorte, elle y était déjà, mais Kendra ne le savait pas. La petite fille savait juste qu’elle ne voulait pas rentrer dans son pays qui était déchirée, mais elle voulait retrouver ses parents, sa famille, et sa seconde famille, les autres surdoués. Elle s’était tout de même attachée au membre de la famille Sionava, et elle savait qu’ils étaient gravés en elle, et qu’elle allait se souvenir d’eux toute sa vie.
— Qu’est-ce que tu as ? s’enquit la petite fille anciennement blonde. Je vois bien que quelque chose ne va pas.
Alma soupira avant de se relever et de passer sa main dans un tissu qui pendait, attaché un des fils qui faisaient la longueur de toute la tente. C’était cela que Kendra aimait dans cette espace, il faisait sombre et il y avait plusieurs lignes de tissus qui formaient des rideaux fins mais colorés. La petite fille aimait bien, elle avait l’impression de se sentir cacher. Dans la plupart des autres tentes, elle avait l’impression que tout le monde pouvait regarder ce qu’ils se passaient à l’intérieur, et la surdouée n’aimait pas s’être sensation d’être épiée. C’était dérangeant. Alma connaissait l’art de la cachette puisqu’elle ne pouvait rejoindre Quentin, le fils d’un leader. La petite fille avait appris qu’Alma n’était pas qu’une couturière. La jolie jeune femme avait de grandes connaissances au niveau pharmaceutique et des bases solides dans le domaine de la chasse. Elle avait été chasseuse, mais suite à une blessure, on lui avait interdit d’y retourner, et forcé à se tourner vers un autre domaine. Les gens ne venaient pas que pour qu’elle leur choisisse des vêtements qui leur allait à merveilles, mais elle vendait certaine lotion pour les vêtements, la peau, les cheveu et contre certaines maladies ou juste un mauvais rhume. Angelo ne cessait de répéter qu’elle était très talentueuse et qu’elle méritait mieux. Son frère voulait qu’elle demande une remise de peine, mais Alma s’y refusait même si son amant lui assurait qu’elle pouvait le faire. Gabriel et Kendra avaient surpris cette discussion un soir, mais ils n’avaient pas compris grand-chose, ils savaient juste qu’Alma avait été punis de quelque chose.
— C’est juste qu’aujourd’hui, la fiancée de Quentin est annoncée. Lors de cet événement, tout le monde est obligé de se rassembler auprès d’un feu de camp, mais je n’ai tellement pas envie d’y être. Je ne veux même pas savoir, mais je n’ai aucun motif convenable à présenter pour ne pas être présente. C’est ce soir. Je n’arrive pas à comprendre Quentin, lui-même ne sait toujours pas, mais cela ne semble pas le préoccuper…
— Alma, je… Pourquoi n’as-tu pas le droit de te marier ? C’est en rapport avec ta peine ?
La jeune femme entrouvrit sa bouche, les yeux ronds. Elle les plissa aussitôt avant de se lever pour fermer la tente, dans le but que personne ne rentre. Personne d’autre ne devait en entendre plus. Ces genres d’histoires ne devaient pas être ébruite, et les leaders prenaient cela au sérieux. S’ils apprenaient qu’elle en avait parlé à Kendra, elle risquait gros. Si cette histoire se répandait dans toute la tribu, elle était morte.
— Comment as-tu su pour la peine ? Gabriel est-il au courant ? s’inquiéta la sœur d’Angelo.
— Oui, on a entendu votre discussion un soir avec Quentin et Angelo. Mais nous n’avons pas vraiment compris.
— Kendra, commença Alma en se baissant à la taille de Kendra puis en la prenant par les épaules. Il faut que tu me promettes, que tout ce que je vais te dire ici, ne sortiras pas d’ici. Tu dois le dire à personne, et surtout pas à Gabriel, tu comprends ? Jure-moi que tu n’en parleras pas. Jure-le-moi !
— Oui, oui, je te le jure Alma. Je te le promets je n’en parlerai pas.
Alma se calma un peu et lâcha la jeune fille pour retourner s’asseoir. Ses yeux étaient brillants, et elle semblait confuse. En vérité, elle cherchait juste à mettre de l’ordre dans ses pensés pour pouvoir fournir des explications claires. La petite surdouée l’observa sans parler, ne voulant pas la déranger ou la perturber. Elle pensait à Gabriel qui était à une épreuve de chasseur. Le garçon voulait devenir chasseur, et il était en pleine formation pour en devenir un, mais il devait passer les épreuves et les réussir. Il y en avait plusieurs, mais s’il en ratait une seule, c’était fini. Il ne pourrait pas. Angelo, lui, se trouvait la plupart du temps, avec le leader qu’il aidait, mais il ne se cantonnait pas que de cela. Il aidait beaucoup de monde, ceux qui avaient besoin d’aide, il servait de messagers entre les différents leaders et entre certaines personnes d’une tente à l’autre, même si le boulot des messagers servaient aussi à cela. Kendra avait vite remarqué que la fratrie était très active au sein de leu tribu et y contribuait plus que quiconque, malgré tout, cela ne les empêchait pas d’être avec Kendra. La petite fille avait passé la journée d’avant avec Gabriel qui n’avait rien à faire, et celle d’avant avec Angello, à se déplacer partout dans la tribu. La petite aidait aussi Rosa à faire la nourriture à toute la tribu et à rapporter de l’eau, de la source près de laquelle ils s’étaient installés. Depuis que la surdouée était arrivée, la tribu n’avait pas encore changé de position, ils étaient restés à la même. C’était sûrement une décision des leaders qui avait été influencé par son arrivée imminente et la fouille menée par les soldats de l’état Opartiskain. Il se pourrait bien que des soldats surveillent tout de même le groupe de nomade. Kendra n’en serait absolument pas étonné. La petite fille reporta son attention sur Alma qui s’apprêtait à parler.
— Bon, je pense que tu as compris que c’était une histoire de punition. Je ne désobéis pas aux règles de la tribu, pourtant, j’en ai deux à mon actif. La première je la connais un peu : je n’ai plus le droit d’être chasseuse. C’était mon métier de base, et j’aimais tellement faire, cela, c’était un métier auquel je prenais vraiment plaisir à exercer. Malheureusement, comme tu le sais, j’ai été blessé, et je ne pouvais donc plus chasser. C’était faux, c’était juste un prétexte à fournir à toute la tribu pour expliquer mon départ des chasseurs. C’était plus facile que d’expliquer ma raison. La vraie raison, c’était que je rappelai beaucoup trop mon père. En plus d’être un leader, il était chasseur lui aussi. Le problème vois-tu, c’est que moi et mes frères, nous sommes en sursis. Mon père était un membre et un leader incontestablement grandiose et apprécié, mais pas de ses collègues leaders qui le jalousaient et le détestais. Les conseillers ont pris ce prétexte-là, pour ne plus voir un individu de la famille Sionava exercé un métier de haut-rôle. Si nous travaillons si dur, c’est parce que nous savons que nous sommes sur la sellette à tous moments.
— Mais… Je ne comprends pas, Gabriel va peut-être bien devenir chasseur, et Angelo leader. Pourquoi il n’y a que toi qui as été touché par cette injustice ?
— Déjà parce que je suis une femme. Les leaders sont profondément sexistes, et ils ont trouvé la faille. Ma blessure à permis d’enclencher ma punition pour porter le nom Sionava. Pour ce qui est de Gabriel, rien est encore gagné pour ce bonhomme, mais lorsqu’il aura réussi toutes les épreuves, il va devoir s’imposer pour se faire respecter et montrer sa force. Le problème, c’est qu’il y a un fils de leader qui a son âge, cela ne m’étonnerait pas qu’il demande à son fils de le blesser exprès pour qu’il finisse comme moi. Il va devoir faire très attention.
— Ce n’est pas juste ! Mais, je croyais que l’on avait pas le droit de blesser volontaire quelqu’un de la tribu.
— Les leaders magouillent, ils ont tous les pouvoirs ici et sur tout le monde. Tout paraît beau, mais ce n’est pas forcément mieux que vos autres pays, même si nous au moins, nous ne nous entre-tuons pas à chaque minute. Tout le monde n’est pas au même pied d’estrade, et ils font tout pour nous garder au plus bas car nos parents sont morts, donc ils ne sont plus là pour nous assurer une place haut, ni un métier glorifiant, ni pour nous défendre. On a juste Rosa, qui ne peut pas faire grand-chose pour nous même si elle aimerait.
— Et Angelo ? On dirait qu’il a eut la chance de s’en sortir, remarqua la petite Opartiskaine.
— Oui, je suis fière d’Angelo, il a eu cette chance. Il est intégré maintenant. Il n’est pas rejetée par les leaders comme moi et Gabriel on peut l’être. Lorsque sa génération passera au pouvoir de la tribu, j’aurais sûrement une chance, déjà il y aura Quentin pour me défendre, mais en plus, je suis certaine qu’Angelo va se faire élire leader. Tout le monde le veut, et en plus il le mérite. Cela ferait débat s’il ne l’était pas.
— Et ta deuxième punition ? Qu’est-ce ?
— La deuxième, et tu la connais aussi, c’est que je n’ai pas le droit de me marier. D’une part, c’est aussi parce que je suis une Sionava. Ma famille est tellement rebutée par les leaders. Ils sont idiots, ils pensent que comme ma mère était malade et qu’à la fin de sa vie, ma grand-mère était un peu touchée elle aussi, je serais moi-même touché. Ils pensent que je finirais morte comme ma mère, à agoniser d’une maladie, et ils pensent que cela ne ferait pas une bonne réputation pour n’importe quelle famille, et que cela ne devait pas continuer comme cela, et que le problème ne devait venir que des femmes de ma famille et donc, venir de moi aussi. Je suis don aussi interdite d’avoir des enfants. Et l’autre détail qui me condamne à cela, c’est ceci.
La jeune femme remonta sa manche en ce pinçant la lève. Elle tourna son bras pour que la petite fille puisse voir la face intérieur de la droite. Une forme rouge ressemblant très fortement à un fer de cheval avec à l’intérieur un trèfle à quatre feuille était maqué en petit, au plein milieu de son bras. Kendra fronça les sourcils, ne voyant pas quel impact cela pouvait avoir sur le sort d’Alma.
— Tu ne comprends sans doute pas le rapport, murmura Alma en remettant sa manche en place. C’est une vielle croyance idiote à laquelle, seuls les vieux leaders croient encore. D’après une légende du désert, la personne ayant ce symbole attirait le danger à tout le monde, cela vient d’un mythe dans lequel toute une famille portant ce signe serait retrouvé mort. Toujours d’après la légende, le père aurait tué ses trois enfants avant de passer une dernière nuit avec sa femme après l’avoir empoisonné. Après cela, il se serait suicidé. Plus personne n’y croit à part les vieux leaders, et d’après eux je suis une sorte d’esprit du mal qui amènerait tous les ennuis alors que nous n’en avons jamais eu beaucoup dans cette tribu. Lors d’une période, lorsque j’avais perdu mon travail, et que j’étais forcée d’en faire un que je n’aimais pas autant, je pensais à croire que c’était peut-être. Je me suis ressaisie grâce à Angelo et Quentin. Cette une histoire qui n’a sûrement jamais existé puisqu’elle ne peut être vérifiée, et ce signe ne veut sûrement rien dire. On peut sûrement le retrouver autre que sur une personne. C’est juste une tache de naissance qui a une forme spéciale, et qui est dans mon cas, vraiment très mal tombée.
— C’est tellement absurde. Tout le monde t’adore. Je ne comprends pas pourquoi là plupart des leaders s’acharne sur toi juste parce que tu fais partie de la famille Sionava et que tu as une blessure qui n’existe même plus. C’est malheureux.
— Je sais bien Kendra. Le seul leader qui me soutient un minimum est le père de Quentin. Il est plus jeune que les autres, il n’est plus dans toutes ses croyances stupides. Et c’est bien le seul.
Alma soupira. Kendra avait extrêmement de peine pour elle. Alma était une personne serviable, aimable et talentueuse. Elle ne méritait pas un tel acharnement des leaders alors que tout le monde l’aimait. D’ailleurs, comment les autres prenaient le fait que le mariage ou la procréation lui était interdit ? Comment les leaders avaient justifié un tel choix ? Rosa était sûrement au courant des réelles raisons. Alma et Kendra sortirent de la tente alors que Gabriel courait vers la tente, tout souriant. Alma consulta son semblant de montre avant de se rappeler qu’elle était déréglée. Elle jura alors que le garçon s’arrêta devant elles.
— J’ai réussi ! J’ai réussi cette épreuve ! s’écria-t-il fier de lui. En plus, le fils de leaders Kurt a raté, il ne passe pas !
— Mais c’est génial mon grand ! Je suis tellement fière de toi ! s’exclama Alma, les larmes aux yeux.
Elle le prit dans ses bras en étouffant quelques sanglots dans sa gorge. Kendra se demandait si elle était heureuse car il était passé, ou si s’était parce qu’aucun fils de leader ne pouvait lui mettre des bâtons dans les roues. Sûrement les deux, car Gabriel avait un talent inné pour la chasse comme son père et sa sœur, et son avenir s’annonçait plutôt très bien. La petite fille était très heureuse pour son ami. Il l’étreignit elle aussi dans ses bras avant de sautiller partout.
— Il faut se dépêcher ! C’est aujourd’hui le grand conseille des nouvelles, j’ai horreur de raté ne serait-ce qu’une seconde. En plus les leaders n’aiment pas les retardataires et les absents. Allons-y !
Alma hocha la tête et referma sa tente. En se dirigeant à la place des grands conseils, le groupe fit un crochet à la tente des repas, celle de Rosa pour la prendre au passage. La dame ne ferma pas la sienne puisqu’elle était tout publique. De toute manière, elle en avait deux. Celle-ci, pour nourrir toute la tribu, et une autre, dans laquelle elle dormait, son chez elle. Ils reprirent le chemin pour s’arrêter à la place : un feu de camp. Il y avait un grand feu de camp qui n’était pas encore allumait, mais qui allait l’être, d’un côté, il y avait plusieurs troncs de bois suspendue à des piquets en bois pour s’asseoir, et d’un autre, il n’en avait qu’un seul. Les côtés étaient distincts, et la petite surdouée n’eut aucun mal à deviner à qui appartenait les deux côtés. Il n’y avait que deux ou trois personnes qui étaient arrivés, ils parlaient debout, ils n’étaient pas encore assis. Alma décida qu’ils prendraient place au premier rang, c’était non négociable. Les troncs d’arbres n’étaient très confortables, mais ils devaient se contenter de cela.
— Je sens que l’on va apprendre pas mal de décision lors de ce conseil. Il ne sera peut-être pas long, mais je le sens, dévoila Rosa en regardant tout autour d’eux.
Alma marmonna quelques phrases du style « cela c’est certain » avant de faire s’asseoir Gabriel qui vagabondait près du feu. Kendra resta discrète. La petite fille n’avait encore jamais assisté à ses fameux conseils. Un petit groupe de leader arriva et Alma baissa les yeux même s’ils ne la fixèrent pas. Ils se mirent en rond, entre eux, comme une secte, tout en parlant. Angelo n’était pas avec eux. Un beau jeune homme à la teinte mâte, au cheveu frisé couper court et aux yeux gris posa ses mains sur les épaules d’Alma qui tressaillit, surprise. C’était Quentin.
— Tu m’as fait peur, souffla-t-elle en posant ses mains sur ceux de l’homme et de tourner la tête vers lui, un sourire timide aux lèvres.
— Et toi, tu devrais arrêter de stresser et de psychoter ! Tu vas finir par me faire stresser moi-même. Et je suis persuadé que nous n’avons aucune raison de stresser, de psychoter, ou d’être triste.
— C’est normal. Tu es toujours optimiste dans n’importe quelle situation, reprocha Alma en regardant son amant dans les yeux.
— C’est mieux d’être optimiste que pessimiste. Sur ceux, à tout à l’heure mon amour, murmura-t-il à l’oreille d’Alma.
Le fils du leader le plus sympa salua le reste du groupe et parti de l’autre côté. Les enfants des leaders se trouvaient dans le même camp que leurs parents. Alma le fixa discrètement, sentant les leaders l’épiée. Ils avaient dû voir la proximité entre les deux adultes. Sauf que rien pour le moment pouvait démontrer qu’Alma entretenait une relation plus intime avec Quentin. Le jeune homme n’était absolument pas triste et angoissé par l’annonce de sa future fiancée. Kendra trouvait cela bizarre, mais Alma connaissait sa nature très optimiste.
— Alma, il va falloir que tu t’y habitues. Il va être marié. Vous ne pourrez plus être ensemble, c’est trop dangereux pour lui et pour toi. Il va falloir que tu l’oublies, confia Rosa à Alma qui hochait la tête comme un robot.
— Pourquoi Angelo n’est-il pas là ? Il n’a pas intérêt à être en retard. Ce n’est pas bon pour lui s’il arrive en retard, répéta Alma en regardant tout autour d’elle.
Angelo finit par arriver et s’assit au côté de son petit frère. Il était étrangement mieux habillé que d’habitude et sa petite sœur ne se priva pas d’en faire la remarque. Cela fit sourie le jeune homme qui se passa une main dans les cheveux. Il ne parla pas de ses avancées sur le talkie-walkie même si Kendra avait très envie de lui poser la question, elle ne le fit pas. La petite fille fixait les leaders qui étaient tous présents et réunis. Ils avaient l’air d’être gentils pourtant, c’est l’impression qu’ils lui avaient donnée. Sauf que maintenant, il la dégoûtait presque. Une bourrasque souffla, marquant aussi le début du conseil puisque les leaders se tinrent en ligne avant de s’asseoir sur leur tronc. Un vieil homme à la peau noire et toute ridée s’avança. Un rictus aux lèvres, il contempla toute l’assemblé avant d’éclaircir sa gorge pour parler.
— Mes chers frères et sœurs ! Et notre nouvelle petite arrivante. J’ai l’honneur de pouvoir vous dire quelques mots en guise d’introduction de notre nouveau conseille semestrielle. Nous n’avons que deux sujets importants auxquels parler lors de ce conseil, ce qui est à la fois peu mais beaucoup pour nous. Dont une, ou je pense que les charmantes demoiselles de notre tribu attende les résultats avec impatience.
Alma lançait des regards noirs aux autres jeunes femmes de son âge qui faisaient le visage doux et les yeux de biches comme si cela allait leur permettre de toucher la jack-pot. Les regarder faire les belles plantes étaient à la fois drôles mais assez énervant. Quentin ne les regardait même pas, et les autres leaders s’échangèrent des regards inquiets.
— Bien évidement, le résultat que nous, leader, connaissons déjà, dépend de Nill. La deuxième annonce ce fait juste après, et c’est une surprise pour vous. Avant de commencer, j’aimerais vous parle un peu. On a longtemps vécu dans un calme paisible, il y a eu quelque changement ses derniers temps, des événements qui ont pu être assez perturbants, et au nom de tout les leaders, je suis désolé. Néanmoins, je suis tout de même heureux de voir à quel point cela ne vous a pas embêté et que vous avez su vous adapter à tout cela. Je vous en remercie.
Alors qu’il rejoignit ses compères, le reste de la tribu l’applaudis. Kendra avait l’impression d’entendre les politiciens de chaque pays, mais surtout les discours idéalistes et encourageants des conseillers d’Opartisk qui ne faisaient qu’empirer la situation. Le fonctionnement des tribus n’étaient peut-être pas mieux finalement si on observait bien l’envers des décors. Les non-dits, les secrets, l’hypocrisie. Ce n’était plus le beau petit monde que la petite surdouée avait découvert tout au début. Un homme d’une soixantaine d’année se leva et se plaça exactement au même endroit que son collègue. Kendra finit par remarquer qu’ils avaient tracé un cercle exprès.
— Ma chère tribu. Aujourd’hui, nous devons vous annoncer une grande nouvelle. Après maintes et maintes réflexions, hésitations et concertations, j’ai l’honneur d’être le porte-parole de tout les leaders pour vous annoncer une grande, et j’espère aussi joyeuse, nouvelle. Pendant des années, cet homme à été là, c’est occupé de la tribu comme une famille, a aidé chacun d’entre vous et certains leaders aussi. C’est pour cela, qu’après tant d’années de dur loyauté, qui, j’espère, restera toujours en lui et ne partira jamais, nous avons décidé de le récompenser pour ses braves efforts au sein et pour la tribu. Monsieur Angelo Sionava, venez me rejoindre je vous pris.
Angelo se leva alors que sa sœur le regarda, inquiète. Elle avait beau savoir que l’entende entre son frère et les leaders était en beau fixe, elle restait méfiante. La seule femme Sionava ne leur faisait pas confiance, loin de là. Elle effleura la main d’Angelo alors qu’il se passait. Il se retourna furtivement pour lui offrir un sourire rassurant, comme pour lui dire que tout allait bien se passer. Pas seulement pour lui, mais pour eux, l’ensemble de la fratrie. Alma continua de le fixer en serrant les mains de Rosa et Kendra toujours plus fort. Elle croyait en son frère, mais elle redoutait quand même. Gabriel s’était levé mais restait appuyé sur le tronc d’arbre servant de banc. Angelo s’était avancé juste à côté du leader et se tourna vers le reste de la tribu qui le regarda muet. Le vieux leader se tourna lui aussi et prit le poignet d’Angelo pour lever le bras du jeune homme comme un signe de victoire. Kendra ne comprenait pas ce qu’il se passait. Tout le monde applaudit, et Alma serrait Rosa dans ses bras, toute tremblante mais souriante.
— J’ai l’immense honneur et plaisir de vous annoncer qu’Angelo Sionava, ici présent, et un nouveau leader et qu’il le restera jusqu’à la fin de sa vie ! Au prochain conseil, il sera de l’autre côté désormais.
Un torrent de cri de joie, d’acclamation et de sifflement heureux éclatèrent et se répandaient grâce au vent. Angelo ne prononça que quelque mot dans lesquels il disait sa gratitude envers toute la tribu et sa joie de devenir leader. Certains leaders, les plus vieux, n’avaient tout de même l’air pas très heureux, sûrement car il savait que maintenant que la jeunesse commençait à les remplacer, le sort d’Alma serait autre que d’être une jeune femme punie et isolée injustement sans que personne ne s’en rende réellement compte. L’homme nouvellement leader et l’ancien regagnèrent leur place respective. Angelo s’arrêta devant le banc alors qu’Alma se jeta dans ses bras, suivis de Gabriel. Alma était si fière de ses frères. Il serra ensuite Rosa dans ses bras.
— Après le conseil, tu viendras avec moi, chuchota rapidement Angelo à l’oreille de Kendra en passant.
Un homme qui ressemblait à Quentin, mais en plus vieux se leva, il ne devait être âgé que de la cinquantaine. C’était le père de l’amant d’Alma. Le visage de cette dernière se ferma et elle regarda les autres femmes de son âge de la tribu qui lâchaient des soupirs admiratifs en essayant de faire les douces. Alma en leva les yeux au ciel avant de rapporter son regard vers le leader. Kendra sentait la tension d’Alma, elle lui prit la main au moment où Rosa plaça la sienne dans le dos de la jeune femme en signe de soutien. Le leader avait l’air d’aimer laisser le suspens car il attendit un moment après être rentré dans le cercle pour parler.
— Chère tribu ! Je suis le leader Nill. Quentin, mon fils, est venu à l’âge où je suis obligé de le marier avec jeune fille. Il m’est venu l’heure de devoir marier mon fils à l’une d’entre vous, et donc, de choisir la fiancée parfaite pour mon fils. Je dois avouer que le choix n’a pas été facile à faire car vous avez toutes vos qualités et vos défauts. Néanmoins, j’y réfléchis depuis quelques années déjà, ce qui m’a permis de toutes vous observer ainsi que d’observer mon cher fils. Mon choix a donc été pris il y a un moment, et il est irrévocable pour quiconque.
Toutes les femmes, mises à par Alma s’étaient levés, et s’accrochaient au moindre geste des lèvres du leader. Les yeux grands ouverts, certaines bougeaient leur main rapidement pour se faire de l’air, Alma resta stoïque, fixant désespérément Quentin qui la dévorait du regard. Il se leva sous l’ordre de son père et le rejoignit. Finalement, lui aussi était gagné par le stress et la préoccupation. Pourtant, il restait tout sourire alors que son père qui le tenait par les épaules, continuait son discours :
— La personne que j’ai choisie, est une fille talentueuse, et exceptionnelle, qui possèdent de multiples talents et qui est d’un naturel à vivre très facile. Je ne doute pas qu’ils seront heureux et que leur mariage se couronnera de plusieurs succès personnels pour chacun d’entre eux mais aussi communs. J’espère, et je pense que l’heureuse élue sera très contente d’être l’élue. Pour accompagner mon fils pour toute sa vie, j’ai choisi : Alma Sionava !
La jeune femme porta une main à sa bouche alors qu’une larme coula d’un œil. Elle regardait toujours l’homme de sa vie qui lui souris, et Angela la serra contre lui lorsqu’elle fut levée. Certains leaders poussèrent quelques jurons, c’étaient les anciens, mais les plus jeunes sourirent eu aussi par cette annonce, regardant Alma avec le sourire. Les applaudissements ne se firent pas attendre même si des protestations des autres femmes s’élevèrent encore plus fort.
— Écoutez-moi ! rugit le leader pour se faire respecter. Je sais bien que Alma Sionava est interdite de se marier ou de procréer, loi, que vous me direz sûrement assez injuste, loin vote par les anciens. Les seules personnes pouvant se permettre de la briser est un leader. Et j’en suis un, et je me permets ce droit ultime. Et, en plus de cela, mademoiselle Sionava pourra reprendre son poste chez les chasseurs si elle le souhaite, il serait dommage de se priver d’un si bon élément. Sur ceux, je déclare la fin de ce conseil !
Alma serra ses frères, Kendra et Rosa encore une fois avant de rejoindre Nill pour le remercier. Toute la tribu put assister au baiser que Quentin offrit à Alma lorsqu’elle l’eut rejoint. Angelo prit la main de Kendra et l’entraîna avec lui. La petite fille reconnue exactement le chemin qu’emprunta le nouveau leader de la tribu. Il la menait jusqu’à l’infirmerie sans un mot. Une fois là-bas, il la referma pour qu’ils ne soient pas dérangés. La petite surdouée fixa le talkie-walkie qui était restée sur la même table.
— J’ai trouvé la bonne séquence, je pense que c’est à toi de leur parler même s’il n’y a pas grand-chose à dire, déclara Angelo en lui tendant.
Il alluma et la jeune fille hocha la tête en le prenant, la main moite.
— Frank ! Bon sang, cela fait des jours que nous te cherchons ! Mme. Keys n’est pas contente, tu vas avoir le droit à plein de reproche mon pauvre. Où es-tu ? Que l’on te ramène pour continuer nos recherches sur la petite en espérant qu’elle soit encore vivante.
Kendra échangea un regard gêné avec Angelo qui lui fit un signe de la main pour l’encourager à débuter la discussion. Kendra allait être rapporteuse de mauvaise nouvelle pour cette faction de l’association. Elle prit le talkie-walkie des deux mains et prit une grande inspiration.
— Frank est mort, lâcha la petite surdouée d’une voix suraiguë.
La petite fille pouvait deviner son interlocuteur se décomposer au bout de l’autre appareil. Elle entendit quelques murmures de fonds et des sanglots. Non, c’était bien plus que des sanglots, c’était des pleurs. La surdouée n’arrivait pas vraiment a identifié la nature des bruits. Elle décida d’attendre une réponse plutôt que de continuer à parler, surtout qu’elle n’était pas sûre qu’ils écoutaient toujours.
— Qui êtes-vous ? demanda la même voix. Comment Frank est-il mort ?
— Je… Je suis Kendra, la petite que vous recherchez. Je suis dans une tribu qui m’a recueillie et qui avait accueilli Frank. Ils ont fait du mieux qu’ils ont pu. Frank à juste succomber à ses blessures suites à la fusillade des militaires de l’État. C’était le seul survivant mais il savait qu’il allait mourir donc il ne voulait pas vous appelez lui-même car il ne voulait pas vous faire de faux espoir. Il n’est plus là.
— Oh ! Kendra, où es-tu ? Il faut que l’on vienne te chercher.
— Je suis dans une tribu, je ne saurais vous dire où je suis exactement. Je ne sais pas.
Angelo prit l’appareil, il savait où ils se trouvaient actuellement dans le vaste désert et informa donc l’agent de l’association du QG du désert. Après quelques minutes de discussions, ils coupèrent la communication et le nouveau leader se tourna vers elle avec un sourire triste. Il rouvrit l’infirmerie, laissant Alma qui était toute joyeuse et Gabriel pénétrer dans la tente. Angelo se retourna et fit un sourire sincère mais triste à Kendra avant d’annoncer :
— Tu vas bientôt rentrer chez toi.
La petite fille ne sut quoi répondre. Elle était partagée entre plusieurs sentiments d’affections envers tellement de personne, elle allait revoir les surdoués et peut-être même ses parents, sans que cela soit certain car elle était sûrement très recherchée en Opartisk. Mais la fratrie Siovana allait lui manquer. Ils l’avaient aidée à s’intégrer dans la tribu, à la faire sentir moins seule, Alma l’avait rassuré sur le sort de Marin et Maryline même si cela c’était sans doute mal passer pour eux. Ils étaient devenus comme sa famille même si les surdoués l’étaient toujours au fond d’elle. Mais en faites, ils avaient été les frères et la sœur qu’elle n’avait jamais pu avoir. Kendra sentait déjà la nostalgie en elle.
— Par contre, je ne te laisserai pas partir avant mon mariage ! Tu dois y assister ! J’y tiens vraiment, imposa Alma.
Kendra sourire et Alma vint la serrer dans ses bras, suivis de Gabriel, et Angelo les regarda un moment avant de s’ajouter à leur câlin collectif. Il ne manquait plus que Rosa, mais la cuisinière était retourne dans sa tente. L’air du désert avait pu être stressant et oppressant pour la petite surdouée, il allait tout de même lui manquer car c’était là où ses trois amis se trouvaient toujours, dans une tribu qui n’avait pas toujours été sympa avec eux, mais ils avaient survécu. Ils allaient terriblement lui manquer.
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