Chapitre 14 :

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La balle ne fit pas exploser la tête de sa mère. Il bougea l’arme pour que la balle effleure sa mère et transperce la vitre alors que Maryline l’évitait de peu. La jeune femme regarda sa mère apeurée et perdit tous ses moyens en croisant son regard de détresse. Elle se mit à pleurer, enfouissant sa tête dans ses mains. Le surveillant qui l’avait emmené émit un bruit sonore et se tordit de douleur. Alors qu’elle se laissa tomber dos à la vitre, dos à ses parents, la surdouée contempla celui qui l’avait amené se tordre et gésir au sol dans une mare de son sang. C’était son sang à lui, qui s’écoulait de son cœur. Maryline resta sous le choc, les autres ne firent rien, ils n’aidèrent pas leur coéquipier alors qu’il était sur le point de mourir. Cet homme, qui l’avait traînée jusqu’ici à lui en blesser les genoux mourait. Ce n’était pas lui qui méritait cela, mais ce type qui pointait un revolver sur sa mère et tous ses conseillers aveuglés par l’ignorance. La surdouée serra les poings et se releva d’un pas décidé, pourtant, ses jambes flageolaient dangereusement. Elle donna un coup dans la vitre et se coupa la peau par la même occasion. Le trou fut assez grand pour qu’elle puisse rentrer. Elle se rapprochait de ses parents. Ses jambes vacillaient, et elle avait peur, pourtant, elle se concentra pour oublier l’odeur infecte de décomposition. Tout le monde la regardait, mais elle fixait le conseiller Christian. Il l’avait fait emprisonner, il avait réussi à convaincre Kilian, Cassandra, Liam et Charles d’être de leur côté. Jusqu’où allait-il aller ?

J’attends une réponse et des informations concrètes, rajouta-t-il en pressant sa main droite sur l’épaule droite de sa mère et la gauche sur l’épaule gauche de son père.

Qu’est-ce que vous ne comprenez pas, dans « je ne sais pas » ? Je n’ai aucune information à vous donner. Ils comptaient sûrement tout nous expliquer en arrivant à leur QG d’Opartisk. Je ne sais même pas où il se situe.

Un rire nerveux sortit, alors que le surveillant plaquait son arme sur la tempe de la jeune fille. Le conseiller agita sa main pour lui faire signe de s’éloigner. Il se dirigea vers elle en essayant de l’impressionner en la dominant de toute sa hauteur.

Je sais que tu mens, alors dis-moi, sinon tu le regretteras.

Sa main partit toute seule. Avant les bâtiments, Maryline aurait été épouvantée à l’idée de toucher ou blesser un conseiller. Désormais, elle n’en avait rien à faire. Une empreinte rouge resta sur la joue de Christian, sans s’en aller pour autant. Il la fusilla d’un regard sombre.

Si vous prenez toutes les vérités pour des mensonges, et tous les mensonges comme des vérités, vous êtes vraiment mal barrés. Je ne sais rien ! Marin saurait peut-être des choses, mais il ne vous le dira sûrement pas, et vu votre attitude, il ne vous a rien dit. Je ne vous comprends pas. Pourquoi faites-vous cela ? Si c’est juste car vous ne supportez pas les rebelles, c’est d’un ridicule vraiment stupide et affligeant. Vous êtes prêts à blesser des Opartiskains pour obtenir des informations qui ne vous feront même pas avancer sur les solutions à apporter aux vrais problèmes… Dans quel monde vit-on ? Il est horrible.

Christian fit un signe de la tête. Cette fois, la détonation finissait bien par mutiler quelqu’un. Le surveillant encore vivant détacha le père de la surdouée. Il tomba à terre, toussant du sang tout en pressant le bas du ventre pour ralentir l’hémorragie. Maryline prit son élan mais le conseiller la retint et la repoussa, si bien, qu’elle recula de plusieurs pas, alors que son visage racla la vitre, faisant saigner sa joue gauche. La jeune fille ne remarqua pas cette petite blessure saigner.

Puisque je vous le répète que je ne sais rien !

Il jaugea la jeune surdouée d’un œil mauvais puis fit un vague signe de la main. Le surveillant en vie grogna et lâcha son arme pour tirer Maryline avec lui. La jeune fille avait beau se débattre, il était beaucoup plus fort qu’elle. Il la traîna en dehors de la salle, contournant le corps du garde mort, mais marchant dans l’immense mare de sang qui se propageait sur le sol. La jeune fille hurla en voyant son père et l’expression horrifiée de sa mère. Cette dernière allait lui dire quelque chose mais la main du conseiller Christian recouvra sa bouche.

C’est à cause de toi s’ils finiront morts.

Sur cette phrase, tout s’arrêta. Le surveillant l’avait fait sortir de la salle avant même qu’elle puisse revoir sa mère ne serait-ce qu’une fois. Ils n’avaient pas le droit de faire ça. C’était interdit, et cela valait aussi pour l’État. Comment maquilleraient-ils leurs meurtres ? Que diront-ils aux grands-parents de Maryline ? On a retrouvé vos enfants morts ? Maryline bouillonna, elle ne pouvait ni s’enfuir, ni les aider. Et maintenant, elle payait le prix de ne pas coopérer avec eux pour en finir avec l’association. Mais la seule chose qui lui importait pour le moment, c’était de s’enfuir et de retrouver sa liberté. Pour cela, elle devait commencer à réfléchir et vraiment utiliser son cerveau. Le garda la jeta littéralement. Maryline resta agenouillée là pendant un moment. Lorsqu’elle se releva, son genou la relança. Elle s’assit lourdement sur son lit et se laissa tomber. Ses parents allaient mourir par sa faute. Pourquoi aidait-elle l’association au péril de sa famille ? Marin l’avait fait. Sauf qu’elle en avait vu les conséquences. Son père se retrouvait dans un état critique, et sa mère pourrait bien mourir à son tour. Son père était-il mort ? Maryline savait juste qu’il souffrait. Lorsqu’elle entendit des pas, elle n’y prêta pas attention. La jeune fille contempla le sang qui coulait le long de sa jambe, venant tacher sa couverture d’un blanc éclatant. Elle avait été changée il n’y a pas longtemps. La porte s’ouvrit et se referma dans un claquement brutal. Maryline releva la tête. Théo laissa tomber le sac à dos qu’il portait. Il semblait catastrophé et énervé.

Je suis désolé. Je n’étais pas au courant de ce qui s'est passé.

As-tu vu Marin ? Comment va-t-il ?

Théo hésita avant de répondre :

Comme quelqu’un ayant perdu ses parents mais en plus fort et en moins affecté. Bon, il n’est pas au meilleur de sa forme je te l’avoue. Mais cela pourrait être encore pire. Il arrive à faire abstraction de la douleur pour l’instant. Je le garde tout de même à l’œil. Je n’aimerais pas que sur un coup de tête, il décide de faire quelque chose de mal. Je sais que c’est dur, mais ce n’est pas une raison de vouloir mourir, il faut surmonter le deuil.

Et elle ? Il ne sera pas là pour elle ? Maryline baissa les yeux alors que Théo s’approcha. Il effleura sa coupure avant de lui caresser sa joue et de se baisser pour pouvoir capter son regard. Ses parents allaient mourir par sa faute. Pourquoi les conseillers refusaient totalement de la croire ? Si stupides, ils étaient.

Écoute, j’ai deux bonnes nouvelles… Ils ne tueront pas tes parents, déclara-t-il.

Comment tu sais ça ? Mon père est mortellement blessé.

Il lui prit la main, et traça des cercles sur sa paume.

Parce qu’ils ont déjà tué les parents de Marin, et que quatre morts d’un coup, ce serait trop suspect. Je sais que cela n’empêchera pas de t’inquiéter. C’est normal, et je ne peux pas te garantir qu’ils ne les tueront pas. Pour le moment non… Ils sont en train de soigner ton père. Son pronostic vital n’est pas engagé même s’il est lourdement blessé, il va s’en sortir.

Et la deuxième bonne nouvelle ?

Je suis tout seul de garde ce soir. Certes, te laisser t’enfuir n’ait pas la bonne solution, car tu ne saurais où aller. Mais je te promets que je prendrais contact avec l’association. Et je t’aiderai à te libérer. Non. Ce soir, je vais essayer de faire venir ta mère ici pour que vous retrouvez un peu. Tu ne l’as pas vue depuis que tu étais dans les bâtiments. Elle te manque. Sauf que je vous laisserai une heure pas plus. Sinon ils sauront que ta mère n’est plus dans la cellule et on aura des ennuis, annonça-t-il.

Je… Tu n’es pas obligé de faire cela pour moi, souffla faiblement la surdouée.

Avant toi, les prisonniers ne restaient même pas une journée, et ils se faisaient tuer ensuite. En tant que surveillant novice, je devais les observer et non reproduire. C’était horrible, et ils ont compris que je n’étais pas capable de reproduire leur acte. Si tu n’avais pas de l’importance aux yeux de l’association, tu serais déjà morte. J’aurais essayé de te protéger et de te réconforter. Ici, tu ne risques rien par rapport au désert puisqu’ils ne veulent pas te tuer. Alors je te protège et je te soutiens quand même.

Il lui déposa un baiser sur le front alors que la jeune fille le serra dans ses bras. Comment pourrait-elle le remercier pour tous ce qu’il avait fait pour elle ? Le jeune homme tira le sac vers lui et en sortit des pansements, des désinfectants et du coton. Après avoir désinfecté les plaies, surtout celles du genou, il mit des pansements sur les joues de la jeune fille et un bandage à son genou.

Il resta un moment pour parler avec elle et lui remit une couverture propre. Il finit par la laisser pour ne pas se faire prendre et pour passer un coup de fil à sa mère avec qui il n’avait pas discuté depuis un moment. Maryline ne put s’empêcher de penser à lui et de sourire bêtement, grâce à lui, elle allait pouvoir parler à la sienne. Elle s’efforça de mettre sa douleur aux genoux de côté. Finalement, contrairement à Marin, elle ne s’en tirait pas si mal. Comment allait-il d’ailleurs ? La jeune fille se sentait de plus en plus oppressée dans cet endroit, en plus de cela, elle n’avait pas respiré d’air frais ni d’être face à la lumière naturelle depuis un certain temps. Mais elle savait très bien, que pour le moment, elle ne pouvait pas s’enfuir. La perspective de sortir la réjouissait malgré tout. L’attente pendant la journée fut difficilement soutenable. Tous les quarts d’heures environ, la surdouée regarda l’heure à la montre que Théo lui avait donnée. Elle sut donc, que c’était à vingt-trois heures cinquante-huit que la porte de sa cellule s’ouvrit. Malgré sa douleur aux genoux qui ne cessait de la lancer, la jeune fille bondit de son lit. Sa mère la prit directement dans ses bras, et Théo referma la porte derrière la femme. Maryline se laissa aller en larmes dans les bras de sa génitrice. Cela faisait si longtemps qu’elle ne s’était pas lâchée, qu’elle n’avait pas vu sa mère non plus. Maryline ne put humer le parfum de sa mère qui semblait s’être dissipé. Cela lui manqua énormément. Sa mère lui frotta le dos avec sa main. Puis, elles se séparèrent l’une de l’autre. La maman de Maryline lui caressa la joue tout en chassant une larme qui parcourait la pommette de la jeune fille sans se décrocher.

Ton père se fait soigner dans un de ces bâtiments. Il n’est pas mort. Il ira mieux, ne t’inquiète pas pour nous.

Je ne peux pas m’en empêcher, c’est normal. Je donnerai ma vie pour vous.

Le plus important pour nous, c’est que toi, tu sois en vie, que nous devons mourir ou non pour cela.

Maryline prit les mains de sa mère avant de s’asseoir sur son lit, cette dernière les lâcha pour s’installer au côté de sa fille. Elle frotta ses mains sur ses cuisses dans l’espoir de se réchauffer un peu puis offrit un petit sourire à sa fille. Maryline replaça une mèche derrière son oreille, elle ne savait pas vraiment quoi dire.

Je suis contente, qu’au moins, un des surveillants ne soit pas sans cœur et n’adhère pas à ces barbaries. C’est sans doute le seul, je le plains de devoir être ici. Mais c’est grâce à lui si tu vas mieux ! Je ne le remercierai jamais assez de veiller sur toi. Chérie, dit-elle en coinçant une mèche de cheveux de Maryline, comment cela s’est passé pour toi dans le désert ? Que s’est-il passé ?

Maryline soupira et commença à tout expliquer à sa mère. La séparation dans les bâtiments, les doutes, le moment de torture, l’explosion, et pour finir l’emprisonnement.

Comment c’est possible ?

Je ne sais pas, admit Maryline.

Après que les sujets les plus lourds furent abordés. Les deux femmes parlèrent de tout et de rien. Durant une heure, Maryline eut le plaisir de revoir sa mère. Cela lui permit de se ressourcer, et de repartir plus sereine, moins usée et plus forte psychologiquement. Maryline était à nouveau prête à affronter les prochains pics des conseillers. Elle offrit son plus beau sourire à Théo lorsqu’il revint chercher sa mère pour la ramener dans sa cellule . La jolie blonde se laissa tomber sur son lit de fortune et sourit bêtement. Que ferait-elle sans lui ? Grâce à lui, elle avait pu passer une heure avec sa mère, et il lui avait garanti qu’il l’aiderait à s’échapper. Théo était vraiment un garçon incroyablement généreux et gentil. Maryline le pensait réellement, elle ne voyait que le bien en lui. Lorsqu’il retourna la voir, elle vint le serrer dans ses bras alors qu’il refermait la porte derrière lui.

Merci pour tout ce que tu fais. C’était vraiment chouette de revoir ma mère, et de pouvoir lui parler. Tout ça c’est grâce à toi. Si tu n’avais pas été là, rien n’aurait pu être possible. Je ne sais pas comment te remercier.

Le jeune homme se libéra doucement de son emprise pour s’asseoir sur le lit. Il était assez fatigué, il dormait très peu en ce moment. Entre les gardes et les réunions avec les conseillers. Théo n’avait plus l’impression d’avoir un moment pour lui tout seul. Quelquefois, cela lui manquait, sauf qu’il avait fait de trop belles rencontres en prison pour regretter son travail de surveillant.

Que t’es-tu fait à la main ? demanda Maryline.

Je me suis refermé une porte dessus. Cela fait assez mal. Les autres gardes se sont moqués de moi, mais apparemment j’ai eu de la chance, ce n’est pas trop grave.

Le jeune homme se décala pour faire une place à Maryline. Elle vint s’asseoir en tailleur sur le matelas et pivota la tête pour l’observer. Elle contempla ses fossettes quand il souriait. Et, elle se rappela sa manie de passer sa main dans ses cheveux quand il était gêné, sa façon de la regarder en voulant la mettre sur un piédestal, de la rassurer, de l’aider. Et elle, qui ne pouvait s’empêcher de sourire quand il était là, à ses côtés.

J’ai de la chance de t’avoir, trop même.

Il émit un petit rire avant de se tourner pour être face à elle.

Tu as vraiment récupéré la cellule la plus froide. J’en suis vraiment désolé pour toi.

J’avais remarqué, mais ce n’est pas le plus grave. Les murs sont bien plus dérangeants.

La jeune fille s’arrêta puis croisa le regard bienveillant du jeune homme. Ils se regardèrent dans les yeux en souriant, gênés mais apaisés, libérés du stress. Finalement, ce qu’ils ressentaient était fort.

Comment les autres font-ils pour ne pas remarquer que tous les jours tu viens me voir et tu restes un moment avec moi ? Tu te débrouilles, vraiment très bien, commenta Maryline.

Ils sont juste stupides, susurra-t-il en prenant les mains de la blonde. Écoute, je ne sais pas si je vais réussir. Mais je vais essayer de prendre contact avec l’association. Mais je te jure, et je te le promets de tout mon âme, je réussirais à t’évader de là et à retourner en Opartisk avec l’association, en sécurité et loin des conseillers.

Même si je dois être loin de toi ? murmura-t-elle d’une voix triste.

Oui. Je n’en ai pas vraiment envie, mais il le faut. C’est pour ton bien-être.

Maryline lâcha ses mains et se mit sur les genoux malgré sa douleur qui réapparaissait de temps à autre. La jeune fille agrippa les épaules du jeune surveillant et le regarda, esquissant un sourire. Elle approcha doucement son visage du sien. Ce fut lui qui combla le peu d’espace entre eux et pressa ses lèvres contre celle de la jeune fille. Cette dernière fit rejoindre ses mains derrière le cou de Théo alors qu’une des mains de celui-ci s’aventurait dans la chevelure blonde de la prisonnière et l’autre restait sur sa joue.

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