Chapitre 4

6 minutes de lecture

Mardi 29 juin 2037

Maxime prit une autre gorgée de son café, laissant le liquide chaud apaiser ses nerfs tendus. Le silence entre eux était ponctué par le brouhaha distant du café : le tintement des tasses, les murmures des conversations, et le léger cliquetis des cuillères contre la porcelaine. Les grandes fenêtres du café laissaient entrer une lumière douce et dorée, éclairant les particules de poussière en suspension, créant une ambiance paisible, presque hors du temps. Antoine, de son côté, semblait à l'aise, observant calmement Maxime, sans forcer la discussion.

Après quelques instants, Maxime se décida à briser le silence.

  • Tu viens souvent ici ? demanda-t-il, cherchant désespérément à engager la conversation, même si cela semblait banal.

Antoine hocha la tête avec un sourire.

  • Oui, de temps en temps. J'aime bien l'atmosphère, c'est tranquille et chaleureux. Ça change de l'agitation extérieure.

Maxime acquiesça, son regard se perdant à nouveau sur la table. Le bois de la table était marqué par le temps, chaque rayure et chaque éraflure racontant une histoire, les souvenirs de tant de conversations passées.

  • Je... Je n'étais pas sûr de venir, avoua-t-il enfin, d'une voix presque inaudible, fixant un point invisible devant lui.

Antoine le regarda avec une attention accrue, sans aucune trace de jugement dans ses yeux. Il était assis légèrement penché en avant, les coudes sur la table, ses doigts jouant distraitement avec le bord de sa tasse.

  • Je comprends. Ce n'est pas toujours facile, surtout quand on n'a pas l'habitude de sortir de sa zone de confort.

Maxime releva les yeux, surpris par la compréhension dans la voix d'Antoine. Le regard d'Antoine était franc, ses yeux bruns reflétant une sincérité et une chaleur qui commençaient à percer les défenses de Maxime.

  • Oui, c'est exactement ça. Depuis... enfin, ces dernières années, je me suis un peu renfermé.

Antoine hocha la tête doucement, son expression se faisant plus grave, mais toujours bienveillante.

  • Je ne veux pas être intrusif, mais si jamais tu veux en parler, je suis là. Sinon, on peut parler d'autre chose, de tout et de rien.

Maxime hésita, luttant intérieurement. Il n'était pas certain d'être prêt à s'ouvrir à un quasi-inconnu, mais il y avait quelque chose chez Antoine, une sorte de bienveillance tranquille, qui l'incitait à le faire. Les lumières douces du café rendaient l'atmosphère intime, comme si le monde extérieur s'était soudainement éloigné, les enveloppant dans une bulle de sérénité.

  • J'ai perdu ma sœur il y a quelques années, finit-il par dire, ses mots lourds d'émotion. Ça m'a complètement bouleversé. Depuis, j'ai du mal à... reprendre une vie normale.

Antoine resta silencieux un moment, respectant le poids des mots de Maxime. Il acquiesça lentement, ses yeux brillants d'une compréhension silencieuse.

  • Je suis vraiment désolé d'entendre ça, Maxime. Perdre quelqu'un de proche, c'est... inimaginablement difficile."

Maxime sentit sa gorge se nouer, mais il se força à continuer. Il porta son regard sur la fenêtre, où les gens passaient sans se soucier du monde intérieur de ceux qui se trouvaient dans le café.

  • Elle... elle était tout pour moi. Après son départ, j'ai juste... tout laissé tomber. Les amis, le travail, tout."

Antoine hocha la tête, son regard toujours plongé dans celui de Maxime, comme s'il cherchait à transmettre une part de sa propre force à travers le contact visuel.

  • C'est normal de se sentir perdu après une telle perte. Mais c’est aussi important de ne pas rester seul avec cette douleur.

Maxime respira profondément, se sentant étrangement soulagé de pouvoir enfin dire ces mots à haute voix.

  • Je suppose que c'est pour ça que je suis venu aujourd'hui. Pour essayer de... de sortir de cette solitude.

Antoine sourit doucement, un sourire qui transpirait la compréhension et l'empathie. Il ajusta sa position sur sa chaise, se rapprochant légèrement, comme pour réduire la distance entre eux, tant physique qu'émotionnelle.

  • C'est déjà un grand pas en avant. Et tu n'as pas à te précipiter. Prendre son temps, c'est bien aussi."

Le serveur s'approcha alors, interrompant leur échange pour demander s'ils désiraient autre chose. Le serveur, un homme d'âge moyen avec une moustache soigneusement taillée, avait un air professionnel mais amical. Maxime secoua la tête, tandis qu'Antoine commanda une pâtisserie, suggérant à Maxime d'en faire autant.

  • Tu devrais essayer leur tarte au citron, dit Antoine avec enthousiasme, se redressant légèrement sur sa chaise. Elle est incroyable, vraiment.

Maxime se laissa tenter, sentant que ce petit plaisir simple pouvait lui faire du bien. Lorsqu'elle arriva, la tarte était un chef-d'œuvre miniature : parfaitement dorée, le citron brillant sous une fine couche de sucre glace, avec une croûte qui paraissait à la fois croustillante et fondante. Il prit une bouchée, et le goût acidulé éveilla ses papilles, provoquant un léger sourire sur son visage.

Antoine sembla le remarquer et sourit à son tour.

  • Je savais que tu aimerais. Parfois, ce sont les petites choses qui rendent une journée un peu meilleure.

Maxime acquiesça, savourant chaque bouchée. Le contraste entre l'acidité du citron et la douceur de la croûte lui rappelait que le bonheur pouvait parfois se trouver dans les choses les plus simples. Puis, Antoine reprit la parole, l’air plus détendu, prêt à aborder des sujets plus légers.

  • Alors, tu es plutôt sucré ou salé ? Parce que si tu aimes les deux, on peut déjà dire qu’on est faits pour s’entendre, plaisanta Antoine, son sourire se reflétant dans ses yeux.

Maxime haussa légèrement les épaules, son sourire persistant. Il remarqua la manière dont Antoine jouait distraitement avec sa fourchette, une habitude qui semblait naturelle et apaisante.

  • Je crois que je penche plus vers le sucré. Mais j’ai un faible pour tout ce qui est fromage… Alors, peut-être un peu des deux.

Antoine rit doucement, un rire léger qui semblait presque contagieux.

  • Ah, un homme de goût ! Le fromage, c'est sacré, surtout ici en France. Tu as un favori ?
  • Le brie, répondit Maxime après une courte réflexion, son esprit vaguement réconforté par ce sujet sans enjeu. Simple, mais tellement bon quand il est bien fait.
  • Excellente réponse, approuva Antoine en hochant la tête. Moi, je suis plutôt camembert. Le genre bien coulant, avec une baguette bien croustillante… Je pourrais en manger tous les jours.

Maxime sourit de nouveau, trouvant une certaine réconfortante dans la simplicité de la conversation.

  • Et pour la musique ? Tu écoutes quoi en ce moment ?
  • Un peu de tout, en fait, répondit Antoine, posant sa fourchette et s'adossant à sa chaise, l’air pensif. Mais dernièrement, je suis obsédé par un groupe de jazz moderne. Ça te parle ?

Maxime secoua la tête, curieux.

  • Je connais un peu de jazz classique, mais je n'ai jamais vraiment exploré le jazz moderne.
  • Ça pourrait te plaire, dit Antoine avec enthousiasme, ses gestes devenant plus expressifs. C’est un mélange de sons traditionnels et de rythmes contemporains. Je t’enverrai quelques titres si tu veux.
  • Pourquoi pas, répondit Maxime, son intérêt piqué. J'aime bien découvrir de nouvelles choses.

Ils continuèrent ainsi, leur conversation se déroulant naturellement, passant d’un sujet à l’autre. Antoine parla de son dernier voyage en Bretagne, des paysages marins qui l'avaient inspiré, et Maxime, à son propre étonnement, se laissa entraîner à partager des anecdotes sur ses promenades préférées dans Paris, notamment sur les quais de Seine au crépuscule.

  • Les quais au coucher du soleil, c'est magique," dit Antoine, son regard se perdant un instant dans la contemplation de ce qu'il décrivait, ses yeux brillants d'une lueur de nostalgie. "C’est comme si le temps s’arrêtait, juste pour te laisser profiter du moment.

Maxime hocha la tête, son esprit vagabondant un instant dans ces souvenirs partagés avec sa sœur.

  • C'est vrai. Clara, ma sœur, aimait beaucoup s'y promener aussi. Ça me rappelle de bons souvenirs.

Antoine lui sourit, compatissant, ses yeux reflétant une compréhension silencieuse.

  • Il faudra qu’on y aille un de ces jours. Je te montrerai un coin que j'adore, pas trop fréquenté, parfait pour se poser et profiter du calme.
  • Ce serait sympa, murmura Maxime, touché par la simplicité de la proposition.

Alors que l'heure avançait, Maxime se rendit compte qu'il avait parlé plus que d'habitude, mais cela ne le dérangeait pas. Antoine avait su créer un espace où il se sentait en sécurité, suffisamment pour s'ouvrir un peu. Les lueurs du crépuscule commençaient à filtrer par les fenêtres, baignant le café d'une lumière dorée qui adoucissait les traits des visages et réchauffait l'atmosphère.

Lorsqu'ils se levèrent finalement pour partir, Antoine proposa à Maxime de se revoir un jour, sans pression. Maxime hésita un instant, mais répondit par l'affirmative, ses mots porteurs d'une légère mais réelle conviction.

  • Oui, pourquoi pas.

Ils se quittèrent sur cette note simple, Maxime sortant du café avec une sensation d'espoir timide. La douce brise du soir le salua en sortant, et pour la première fois depuis longtemps, il se sentit un peu plus léger. Ce n'était pas grand-chose, mais c'était un pas dans la bonne direction.

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