Avant propos: Mon enfance, la famille toussa, toussa
Avant de rentrer dans le vif du sujet, je tenais à parler de mon enfance, de certains points occultés lorsque j'ai commencé à écrire mon histoire, en 1997. Et puis, il faut bien commencer par se présenter, non ?
Je suis né une nuit enneigée de novembre 1980, le même jour que ma grand-mère paternelle. Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été ce que je qualifie d'hyper sensible. Je ressens énormément de choses, j'ai toujours de l'empathie pour les souffrances que je voyais au quotidien. Cela m'a souvent joué des tours, et même lorsque je faisais mes stages pendant ma tentative de formation pour devenir assistant social, je rentrais parfois le soir, fatigué, lessivé par les émotions des personnes que je côtoyais. Cela m'a valu un reproche de mon maître de stage, qui trouvait justement que j'étais beaucoup trop proche des usagers. Et même lorsque je lis, regarde un film, je suis comme plongé dedans. Je ressens les émotions (sauf dans le cas de gros navets ou que je n'accroche pas du tout). Et lorsque j'écris, je me remplis d'émotions, pour justement les coucher sur papier et tenter de rendre mon texte le plus vivant possible. C'est d'ailleurs les textes dans lequel je me plonge le plus qui rencontrent généralement le plus de succès (le dernier en date : le gars qui voulait changer le monde).
Mes souvenirs d’enfance ne sont que des flashs, de certains coups durs et émotions fortes. Il y a des choses que j’ai totalement effacées. Je n'ai pas cherché à combler les trous, sauf pour certains points où j'ai demandé des informations à ma gentille maman pour la rédaction de cette histoire. Mais tout ce qui est bien enfermé dans mon subconscient, non, je n'ai jamais tenu à le faire remonter à la surface. Même encore maintenant j'en ai peur. Peur de ma réaction, peur de ce que cela engendrerait. Et je me dis, peut-être pour fuir ou masquer cette peur, que le passé est le passé et qu'il faut regarder devant soi et non derrière.
De la famille
Ma mère est enseignante, et mon père, ancien gendarme, était employé puis gérant puis cadre dans une grande société de distribution belge. J’ai très peu de souvenirs de ma petite enfance, je sais juste que j’ai commencé ma vie à Bruxelles, que nous avons déménagé d’abord à Chastre, puis à Hamme-Mille ou j’ai vécu jusque mes 13 ans. D’ailleurs, je me rappelle très bien le jour ou nous avons quitté cette « tour » à HM pour Beauvechain quelques kilomètres plus loin. C’était le jour où le monde apprenait avec stupéfaction la mort de Kurt Cobain. J'ai passé presque la journée entière dans la voiture, écoutant du Nirvana. La mort de Kurt m'avait bouleversé, j'aimais beaucoup ce qu'il faisait. J'écoute encore beaucoup Kurt, surtout l'album Unplugged, qui est pour moi le meilleur de Nirvana. Et la personne, en elle-même, est encore pour moi un modèle (hormis sa descente aux enfers, bien entendu!), car dans la manière de penser, dans la douleur que l'on ressentait, j'avais l'impression que nous étions un peu pareil, lui et moi.
Mon père n’était presque jamais à la maison. En étant cadre, il bossait beaucoup. Il s’énervait vite, n’avait pas beaucoup de patience. Il me criait souvent dessus. Je n’ai pas eu de bonnes relations avec lui jusqu’à l’âge adulte, et même encore maintenant, les relations, bien que nettement plus cordiales, restent pour moi assez tendues. Je sais qu’il essaie de faire des efforts, mais je pense qu’inconsciemment encore maintenant, je me méfie. Je n’ai pas eu souvent de soutien de sa part, et même, lorsque cela n’allait pas, j’avais droit à des remarques du genre que je faisais la comédie pour éviter d’aller à l’école ou autre. Il m’a fallu beaucoup de temps pour pardonner ses cris, colères et quelques rares fois ses coups. Même si j'ai encore certaines images en tête, comme le voir me courir après en furie et m'étrangler dans l'escalier, j’ai pardonné, mais pas oublié. Parce qu’il y a des choses qui m’ont fait tellement souffrir dans son comportement que je ne veux plus les revivre et maintenant, que je suis papa, j’essaie de tout faire pour ne pas reproduire ces schémas-là pour mon fils.
J’ai été fils unique jusqu’à l’âge de 8 ans. A cette période, nous avions pris une fille en famille d’accueil pendant quelques années. Nous la voyons encore maintenant, et même si ce n’est pas une sœur génétique, elle n’en reste pas moins ma petite sœur. Je suis le parrain de son troisième garçon, Hugo qui est une véritable fripouille adorable.
J'eus ensuite deux petites soeurs, bien plus tard. Doriane est née en 1993 et Margaux en 1994. Je me suis beaucoup occupé d'elles, quant elles étaient petites, leur donnant biberons et panades (mais déjà à l'époque, changer les langes c'était une autre histoire!). Elles sont grandes maintenant, et même si on ne partage pas la même vision de la vie, elles restent deux petites demoiselles adorables.
De l’école maternelle et primaire
D’après ma mère, mes premiers soucis à l’école remontent à la maternelle. Elle m’en a parlé quelques-fois, mais pour moi, c’est le passé. Elle m’a raconté des heures de punitions pour des bêtises, que j’étais une bête noire pour une des institutrices. Des heures à passer à faire du « picotage », sans pouvoir, comme les autres enfants, manger mon repas de midi. Ma mère avait pris les enseignants sur le fait, étant rentrée un jour plus tôt de son travail. Ce calvaire aurait duré quelques mois, jusqu’à notre aménagement à Hamme-Mille. Nous habitions dans ce que j’appelais la tour, une grande maison à deux étages, toute peinte de blanc et en face de ma future école. Ma mère devait partir très tôt, et ce sont les personnes qui s’occupaient de la conciergerie qui me gardaient jusqu’à ce que l’on puisse aller dans la cour de récré. J’ai passé trois années dans cette école, jusqu’à cette année de misère, la deuxième primaire.
Là encore, je n’ai que des flashs. Mais je me rappelle bien de cette institutrice. Les autres gosses l’adoraient, moi pas. Elle avait la manie de récompenser les élèves avec des points pour à peu près tout, et chaque fin de semaine ou mois, je ne me rappelle plus, elle récompensait avec des cadeaux les plus méritants. Le gros hic, elle avait ses têtes de turc. Ma mère m’a dit qu’elle avait annoncé à l’instit à un moment de l’année, que je changerais d’école l’année suivante, me prenant dans son établissement. Elle lui aurait répondu tout simplement que dans ce cas, elle ne me raterait pas. J’ai passé des heures au fond de la classe, sous les rires moqueurs des autres élèves, avec un bonnet d’âne sur la tête. Il y avait aussi Charles, un grand gaillard un peu plus lent que les autres. Je me rappelle des rires des autres lorsqu’il devait faire la lecture à voix haute. Et, vers la fin de l’année, est venu le drame.
Une bagarre de gamin, une des rares fois où je me suis battu. Mais je gérais mal la montée d’adrénaline, et j’ai pleuré, encore et encore. J'étais en rage, n'arrivant plus à contrôler mes émotions. Les enfants de l’école venaient me voir, me pointant du doigt en riant de mes réactions. Je hurlais de colère face à eux, face à leur méchanceté. Et eux partaient en courant, riant à chaudes larmes. J’ai encore des flashs de cette après-midi, et parfois dans mon sommeil, je les revois. Cette après-midi-là fut la dernière dans cette école. J’ai dû commencer à prendre des calmants (à l’époque du Sédinal, ne trouvant plus le sommeil). Ce fut ma première dépression. J’ai appris, bien des années plus tard, que le médecin, si cet incident avait eu lieu plus tôt dans l’année, aurait demandé une enquête. S’il y aurait eu des retombées, je n’en sais rien, car de toute façon, un enseignant, dans le système belge ne peut de toute façon pas être viré. Alors, est-ce que ça aurait servi à quelque chose ? Je ne pense pas. J’ai terminé l’année chez mes grands-parents, je ne pouvais plus rester à la maison, car, dès que la sonnerie de l’école se mettait à sonner, mon corps était parcouru de tremblements.
On aurait pu penser que me mettre dans une autre école pourrait changer les choses. Ce fut le cas, au début. C'était également une première : venant d'une école au fin fond du Brabant-Wallon, dans les années 80, il n'y avait pas de mixité sociale. Et là, j'arrive à Bruxelles, et l'on découvre d'autres cultures, d'autres personnes vivant différemment, avec des moyens différents. C'était déjà un premier choc. En début d'année, tout s'est bien passé. Je me suis fait quelques copains, mais il y avait deux bandes dans la classe, toutes deux ayant une sorte de leader. Lorsque la bande dans laquelle j'étais s'est rendu compte qu'être copain avec le fils d'un prof ne leur apportait aucun avantage, leur comportement changea. Et un beau matin, ils étaient là, debout sur le muret à me huer. A me dire des vilaines choses. J'ai encore cette image en tête. Naturellement, je me suis tourné vers l'autre « bande », et là, les ennuis ont commencé. On se faisait coincer par la première qui faisait tout pour nous emmerder. Au bout de quelques jours, mes nouveaux amis demandèrent simplement que je trouve d'autres copains, histoire d'avoir la paix. Je ne les blâme pas, je les comprends, et j'aurais peut-être fait pareil. Mais je me suis fait un ami, le cousin d'un gars de ma classe qui était dans celle juste en dessous. Et pendant trois ans, j'ai passé toutes mes récrés avec lui, ainsi que deux-trois autres élèves de sa classe.
Pour ma dernière année à l'école primaire, je changeais d'école, pour celle où je resterai un bon bout de temps, la Providence, à Wavre. J'étais assez stressé. Passer d'une école avec une classe par année à un établissement ressemblant déjà beaucoup plus à une usine avec une centaine d'élèves rien que pour la sixième primaire, ça a de quoi impressionner. J'ai eu dur les premiers jours, mais c'était un nouveau départ. Ici, pas de tête de turc, pas de méchanceté, même si l'on reste des enfants, seules des disputes peuvent éclater. Mais cette année-là, j'ai commencé à me rapprocher un peu plus des adultes, préférant leur compagnie à celle des enfants de mon âge. Un jour par semaine, il y a avait une activité parascolaire : des cours d'informatique ! J'étais déjà passionné par les ordinateurs depuis quelques années, et me suis lancé dans ces cours. On y apprenait le Basic, et j'ai sympathisé avec le prof. On s'échangeait des disquettes avec des jeux, le temps de midi lorsqu'il surveillait la cour de récré. Ce fut une année tranquille, avant le passage dans la cour des grands.
Les premières années de secondaire
Et nous voilà donc en secondaire. Comme beaucoup d’ados, je faisais pas mal de bêtises, et je suis devenu un habitué de la salle de retenue. Mais des fois, de manière totalement injustifiée. La personne qui m’a d’ailleurs dégoûté des maths, un prof sans aucune pédagogie ni autorité sur ses élèves, m’a par exemple juste collé pour avoir rigolé d’une blague. Le blagueur, lui bien sûr, n’étant pas inquiété. A partir de cette année-là, mes notes ont commencé à dégringoler d’années en années. Impossible d’étudier correctement, n’arrivant à mémoriser que les cours qui me passionnaient (et que je n’avais nul besoin d’étudier, cela rentrait tout seul).
Avec l'adolescence, on commence aussi à découvrir les interdits : j'ai commencé à fumer à l'âge de 13 ans, et quelques mois plus tard, je commençais à goûter au cannabis avec mon cousin. Je fumais peu de joints au début, surtout pour m'amuser, mais bien plus tard, ma consommation devint problématique ('j'y reviendrai au moment voulu). J'ai commencé à beaucoup écrire. J'aimais vraiment cela. Lorsque cela n'allait pas, lorsque j'étais amoureux, j'écrivais des poèmes. J'ai aussi écrit quelques petites histoires, mais malgré des recherches incessantes, je n'ai pas pu les retrouver. J'étais fasciné par Stephen King. Je dévorais ses romans, et je voulais faire comme lui. La seule nouvelle que j'ai retrouvée, écrite vers douze ou treize ans, était d'ailleurs inspirée d'un de ses livres. Cette nouvelle est d'ailleurs disponible sur mon blog, si vous voulez rire un bon coup, n'hésitez pas à y aller jeter un coup d'oeil !
J'ai doublé ma troisième secondaire. A cause des maths, justement. La prof de première m'avait tellement dégoûté de cette matière que j'avais une réfraction totale. Je n'arrivais pas à me plonger dessus. Selon le Greg de l'époque, c'est à ce moment-là que tout a commencé.
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