Apprendre à remonter
30 Chercher sa voie
Enfin sorti. Enfin libre. Allait commencer le vrai travail maintenant. Savoir quoi faire de ma vie. Trouver des solutions pour m’en sortir, pour ne plus vivre ces crises d’angoisse et apprendre à les accepter et les gérer. Je ne savais pas cependant, que ce travail me prendrait encore un bon bout de temps.
Je filais le parfait amour avec Mélanie. Elle vivait loin de chez moi, il me fallait deux bonnes heures en train pour aller jusque chez elle. Elle dépendait du CPAS (l’aide sociale belge), avait un petit appartement mais lorsque je n’étais pas chez elle, elle restait chez ses parents, qui vivaient à cinq minutes à pied de là. On se voyait le plus souvent possible, je restai parfois une semaine entière chez elle ou elle chez moi.
On cherchait des solutions. On nourrit même l’idée de créer un temple du rock : un magasin qui vendrait disques et toutes sortes de goodies liés au Rock et Metal, avec en plus des fringues. Bien sûr, ce projet ne resta qu’au stade de l’imaginaire, et je ne pense de toute façon pas que ça m’aurait plu à long terme. Seulement, elle ne faisait rien pour s’en sortir.
Il me fallut du temps pour m’en rendre compte, je me voilais la face. Pourtant, tous les signes étaient là. Quelques semaines après mon hospitalisation, j’arrêtai une grosse partie de ma médication. Il ne me restait plus que le Temesta, dont je n’arrivais pas à me défaire, ce qui n’aidait pas : j’étais presque tout le temps défoncé. Je prenais encore des médocs au soir, les fameux Trazolan et Stilnoct, pour être bien calmé pour la nuit. Je cherchais des solutions pour m’en sortir, même si cela me prenait du temps, de la réflexion. Quant à elle, elle se complaisait dans sa situation. Rien n’évoluait. Je pensais que ça viendrait avec le temps, mais rien ne changeait.
Une relation entre deux personnes en plein mal-être, ce n’est pas bon, et au bout de quelques mois, je n’en pouvais plus. J’avais l’impression de tenir le couple sur mes épaules1. Elle se gavait toujours autant et allait se faire directement vomir dans les toilettes, se gavait toujours autant de médocs et n’était pas suivie régulièrement par un psy. Je n’en pus plus. Je ne pouvais pas rester dans cette situation. Début avril, je coupai ma relation avec elle.
Pendant ce temps, je correspondais avec Max, qui était toujours dans son centre, bien loin à Thuin. Max adorait dessiner, il avait un talent incroyable. Il m’envoyait ses lettres sur des photocopies de ses dessins. On parlait de nos galères, comment ça se passait. Sa correspondance me faisait du bien. On se promettait de se voir dès qu’il pourrait sortir.
Juste avant ou après, je n’en suis plus sûr, que je rompe avec Mélanie, j’eus droit à un sevrage forcé. Je n’arrivais pas à me passer de mes Temesta. J’en prenais matin, midi et soir. Dès que j’étais un poil contrarié, que je sentais un pic d’anxiété, j’avalais une pilule. Cela ne pouvait plus durer. Un beau matin, je me dirigeais vers la grande commode du salon, où je laissais mes médocs. Ils n’étaient plus là. Panique totale. Je sentais déjà l’angoisse qui commençait à m’envahir. Ma mère m’annonça que ça ne pouvait plus durer comme cela, et qu’elle avait planqué ma drogue.
Je hurlai ce jour-là, de colère. Pourtant, je savais qu’elle avait raison. Ce truc était en train de me bousiller. J’étais tout le temps défoncé. La première semaine fut tout simplement horrible. Impossible de dormir. J’étais tout le temps sur les nerfs. Je dormais à peine malgré les autres sédatifs et somnifères. Mais petit à petit, les effets de manque se calmèrent. Psychologiquement, par contre, c’était difficile. L’envie ne partait pas. Dès que ça n’allait pas, dès que je sentais le stress monter, j’y pensais et j’avais du mal à me sortir cette envie de ma tête.
Quelques jours (ou semaines, les dates ne sont plus précises) après avoir rompu avec Mélanie, Daphnée passa quelques jours à la maison. Elle n’avait pas changé, elle était toujours aussi belle. Je pensais retomber amoureux. Le premier soir, je tentai déjà de l’embrasser, mais elle recula. Cependant, la deuxième nuit, c’était comme si on ne s’était pas quittés. On ne dormit d’ailleurs presque pas cette nuit-là. Je ne sais plus ce que je lui ai promis le lendemain, lorsqu’on l’a ramené chez elle. Je ne sais plus ce qu’on s’est dit. Le fait est que nous sommes pas ressortis ensemble. Je pense que de toute façon, je n’étais pas apte à recommencer une nouvelle relation. Et puis, j’avais un sujet de préoccupation qui allait m’occuper pendant de longs mois : préparer ce fameux examen d’entrée.
Je retournai souvent à Wavre, voir mes quelques amis de la Providence pendant le temps de midi. C’est là que j’entendis parler de l’institut Cardijn. Certains de mes anciens camarades d’école iraient y poursuivre leurs études pour devenir Assistant Social. Ma mère et moi sommes donc allés nous renseigner. Oui, on pouvait bien poursuivre ces études sans diplôme, moyennant un examen d’entrée. On ne se fit pas prier , et on fit directement toutes les modalités : inscription à l’examen d’entrée, préinscription à l’école. C’est là que ma mère et moi se rendirent compte qu’il était difficile de venir en transport en commun de notre patelin. Elle me prit une chambre d’étudiant. Seule avec trois enfants, on avait une réduction, ce qui fait que ça ne revenait pas trop cher. J’eus même droit à une visite de ma future chambre, et fis déjà connaissance avec l’un de mes futurs colocs qui gardait sa chambre pour l’année suivante. Maintenant, il ne me restait plus qu’à me préparer.
31 Quelques mois studieux
On y était. J’avais plusieurs mois pour étudier. Les sujets de cet examen couvraient cependant pas mal de matière : l’ensemble des cours de Français, Géographie, Histoire et Mathématiques avec des lectures en plus. J’eus cependant énormément d’aide, venant parfois de personnes que je n’aurais même rien espéré.
Il y avait déjà mon ancien professeur d’Espagnol, dont je vous ai déjà parlé. Il me proposa tout de suite son aide, pour m’aiguiller dans mes études et lectures. Il me proposa aussi de venir l’aider, avec ses élèves, de préparer le décor de la pièce des Réthos. J’acceptai sans hésiter, ça me permettait de revoir Marie, de ne pas rester tout le temps enfermé chez moi. Je reçus d’un de mes oncles avec qui je n’avais plus aucun contact, étant du côté paternel, des cours pour se préparer au jury central qui couvraient les matières d’Histoire et Géographie. Le père d’un des anciens copains scouts, qui était professeur, me donna des cours de Maths, qui était vraiment ma bête noire. Je reçus également pas mal de cours à prêter d’autres élèves de la Providence, dont M.
Je parcourais ses notes lorsque quelque chose me marqua profondément. Dans un de ses cours, il y avait une question : que recherchez-vous chez l’être qui partagera votre vie ? C’était une liste à répondre, avec des priorités. Tout ce qu’elle avait énuméré, lorsqu’on passait nos journées ensemble, était ce que je ressentais et ce que je pensais qu’elle avait apprécié chez moi. Lire cela, me fit énormément de mal. J’étais en colère contre elle : pourquoi n’avait-elle jamais dit oui, dans ce cas ? Je me suis remis à espérer quelque peu, car en plus, je savais qu’elle allait également à Cardijn pour être AS.
Mais elle était en couple, si je me rappelle bien, déjà à cette époque. Les rares fois où on se parlait, c’était principalement pour ses problèmes de cœur. J’étais là à écouter, conseiller. Même si ça me faisait mal. Je ne pouvais juste pas lui dire. Et puis, avec tout le mal que je lui avais fait, jamais je ne me serais permis de m’immiscer ou de lui dire de me prendre à la place de son mec.
Pendant cette période studieuse, Max sortit de son centre de désintoxication. On commença à se revoir. J’aimais bien sa compagnie, même si par moment, j’étais vraiment mal à l’aise. Il continuait à picoler. Il buvait pas mal de bière, fumait pas mal de pétards. Je le suivais un peu, mais sans plus. Je ne savais pas tenir la cadence. Il s’était trouvé un petit studio à Bruxelles, et je passais de temps en temps. Finalement, il m’annonça que Metallica venait en Belgique, à Werchter, un festival avec plein d’autres groupes qu’on appréciait tous les deux.
Seulement, je n’avais pas un balle. Je rêvais pourtant d’y aller. Voir ce groupe, que j’écoutais depuis mes douze ou treize ans, je ne voulais rater ça pour rien au monde. Contre toute attente, mes grands-parents me proposèrent un marché : on t’offre la place pour les trois jours, mais si tu foires ton examen d’entrée, tu nous rembourses. J’étais fou de joie. Max s’occupait de presque tout, je n’avais qu’à m’occuper de la tente.
Juste avant l’escapade à Werchter, c’était la proclamation des diplômes à mon ancienne école. La fin d’une période non seulement pour moi, mais pour les quelques amis qui me restaient. Il était donc normal que j’aille les soutenir. Ce fut avec un pincement au cœur que j’assistai à la proclamation des résultats. Ils avaient fini, ils avaient eu leur papier. Pas moi. Même si je savais que je pourrais continuer ma route, finalement, je n’étais pas comme eux. Je n’avais pas réussi. Je me suis pris une biture monumentale, lors du bal qui suivit. On termina par picoler dans les bois, dans les hauteurs de Wavre, là où j’aimais aller lorsque je brossais. Il était tard, et comme bien d’autres élèves, je n’avais aucun moyen de rentrer chez moi. On alla tous dormir à l’étage d’un magasin tenu par la mère d’une des élèves. Lorsque je revins le lendemain à la maison, je me suis pris une belle engueulade. Ma mère était morte d’inquiétude. Je n’avais pas donné de nouvelles, elle n’en avait presque pas fermé l’œil de la nuit. Elle vit cependant mon regard triste, parce qu’ils avaient eu ce papier et pas moi.
Je me changeai les idées à Werchter, avec Max. Ce furent trois jours de défonce totale. Max avait pris avec lui trente grammes d’herbe. On fumait du matin au soir. Et on picolait comme des porcs. Il suffisait de ramasser quelques gobelets pour avoir une boisson gratos, ce qui fait qu’on ne déboursa pas un balle pour boire durant tout le festival. Bien qu’on fut totalement défoncés pendant les trois jours, j’ai gardé un excellent souvenir de ce moment. J’étais ébloui par Metallica, qui maîtrisait comme nul autre la scène. Max étant plus âgé, il était resté à l’arrière. Mais je voulais les voir de prêt.
J’ai avancé, avancé. Mais je commençais à flipper. Je me retrouvais entouré de gros malabars, les gros stéréotypes du métalleux en veste de cuir et Santiags. Moi qui étais si petit ! J’allais me faire écrabouiller ! Pourtant, dès que le concert commença, avec ses pogos furieux, je me retrouvais dans mon élément. Je me défoulais. Dès que je n’avais plus de souffle, je tapotais sur l’épaule d’un des grands gaillards à côté de moi et il me propulsait sur les gens qui me portaient jusqu’aux barrières de sécurité. Grâce à cette technique, je pus voir le groupe plusieurs fois, à seulement quelques mètres de moi.
Quelques jours après le festival, je partis deux semaines à Clervaux, à l’abbaye. Ce serait plus facile pour me concentrer et étudier, bien au calme. C’était la première fois que j’y allais tout seul, cela me faisait un peu flipper. Le soir, à 21heures précise, c’est le silence absolu. Plus aucun bruit, chacun est enfermé dans sa chambre. On ne respectait pas vraiment cette règle, mon grand-père et moi lorsqu’on y allait à deux. J’allais dans sa chambre et on papotait quelques heures. Seulement là, j’étais vraiment tout seul. Je commençais en plus à stresser : et si je n’y arrivais pas, qu’est-ce qui se passerait ? Comment est-ce que je ressentirais l’échec ? Par moment, ces questions m’empêchaient d’étudier. J’avais du mal à encore gérer mon anxiété sans Temesta. Au bout de deux semaines, je n’avais pas l’impression d’avoir avancé dans mon étude. Surtout que, lorsque je serais de retour, j’aurais une autre occupation qui allait me prendre pas mal de temps…
32 Déménagement
Ma mère allait reprendre son boulot à temps plein. Elle devait partir très tôt pour aller à travailler à Bruxelles en évitant tous les embouteillages. Moi, je ne serais plus là pour l’aider si je réussissais mon examen d’entrée. Avec deux petites sœurs encore à l’école maternelle, c’était plus facile si elle déménageait et se rapprochait de son lieu de travail.
Elle avait trouvé un appartement à Bruxelles, plus précisément à Auderghem. Moi j’étais content. Non seulement j’allais avoir un kot2, dans la ville étudiante de Louvain-La-Neuve mais en plus j’allais habiter dans cette ville que j’adorais.
Début août 1999, je fis mes adieu à cette chambre. Cette pièce isolée, à laquelle on ne pouvait accéder que par le garage dans cette maison de plain-pied. Cette chambre qui avait connu tant de souffrance. Ce fut dur de se séparer de tant d’affaires : j’allais vivre dans une chambre minuscule, alors que je vivais dans l’équivalent d’un studio. Mais je m’en fichais. Changer d’air allait me faire le plus grand bien. Je n’avais pas besoin de beaucoup : il ne me fallait que mon pc, ma guitare et mes livres, c’était tout ce qui m’importait.
Généralement, je suis nostalgique quand je quitte un lieu dans lequel j’ai ressenti des émotions fortes et eu des tas d’expériences. J’ai besoin de repenser à ce que j’y avais vécu, de dire au revoir à ce lieu. Bizarrement, ici, je n’en eus pas besoin. Je ne me retournai pas une seule fois lorsque nous eûmes fini de tout débarrasser. La page la plus sombre de ma vie était en train de se tourner. Un nouveau chapitre allait bientôt commencer.
Entre quelques déballages de caisses et période studieuse, je me promenais en ville. Un matin, je croisais un punk qui faisait la manche. Tout en lui filant un peu de tabac, on tapa un peu la causette. Il me proposa de passer dans l’après-midi, non loin de là. Il rejoignait plusieurs de ses camarades pour passer le temps. J’acceptai sans hésiter. Je ne connaissais pas grand monde en ville, ce serait l’occasion de rencontrer de nouvelles têtes.
Je ne me sentais pas super à l’aise. J’avais quelques amis punks, mais ce n’était pas pareil. C’étaient des vrais de vrais, qui ne vivaient plus chez papa-maman. Bien que tout le monde fut très accueillant, certains me faisaient un peu peur. À juste titre. On parla de nos vécus, de nos galères et déboires. Je ne sais plus comment c’est arrivé sur le tapis, je parlais de moi et je montrai mes bras, un peu pour éviter de me lancer dans trop d’explications. Je reçus une gifle. Bien violente, tellement rapide que je n’avais rien venu venir. Le mec en face de moi était rouge de colère.
« Qu’est-ce que tu en sais toi, sur la souffrance ? »
Il était prêt à me bondir dessus pour me filer une bonne correction. Ses potes le retinrent et l’emmenèrent se calmer plus loin. J’étais sonné. Je ne m’étais absolument pas attendu à ça. D’autres me demandèrent de l’excuser. Il n’avait pas une vie facile. Voir des personnes qui avaient osé baisser les bras et l’exhibaient comme cela le mettait hors de lui.
Cette intervention me fit pas mal réfléchir : ma souffrance n’était pas plus importante, n’avait pas plus de valeur que celle d’un autre. Aucune souffrance n’est comparable : ce qui me paraît difficile, insurmontable sera peut-être une broutille pour un autre, et inversement. Dans un sens, j’étais quand-même un privilégié. C’est vrai que j’avais pas mal souffert, mais heureusement que des personnes telles que ma mère, mes grands-parents étaient là. J’avais toujours quelqu’un ou quelque chose à laquelle je pouvais me raccrocher. D’autres n’avaient pas cette chance, devaient se battre ne fut-ce que pour pouvoir vivre, avoir un toit. Depuis ce jour-là, je n’ai plus jamais jugé la souffrance d’autrui.
33 La dernière crise, et le moment de vérité
Je me rappelle que c’était un week-end, vers la mi-août. Mes sœurs devaient être chez mon père et ma mère s’était absentée. J’étais seul à l’appartement, à essayer d’étudier. Je commençai à sérieusement paniquer. Je n’arrivais plus à me concentrer. Ces questions me revenaient sans cesse, comme à Clervaux : « Et si je foirais ? ». Impossible de contenir cette sensation dans mon estomac. Le bide entièrement compressé. Je n’arrivais plus à respirer. Je perdis totalement le contrôle de moi-même.
Lorsque ma mère rentra, accompagnée de mon parrain, j’étais couvert de sang de la tête au pied. Je m’étais à nouveau mutilé. Je ne m’étais pas limité au bras. Mon corps comporte encore nombre de ses cicatrices : sur les jambes, sur mon bide. Heureusement que les entailles, sur le visage, n’étaient pas profondes. Ils essayèrent de me raisonner, rien n’y faisait. J’étais en pleine panique. Ma mère commença à me faire des reproches, et je me dirigeai vers la balustrade de la terrasse. Je m’apprêtai à faire un plongeon de six étages. Ce fut mon parrain qui me retint de justesse.
Ils m’emmenèrent à l’hôpital faire soigner tout cela. Mon parrain travaillait aux urgences, et je fus traité assez rapidement, avec une bonne grosse dose de calmants. Mais bien sûr, on ne me laissa pas sortir, bien que toutes les blessures soient désinfectées et pansées. Il fallait que je voie un psy.
Lorsque celui-ci arriva, il parla illico d’hospitalisation. Je me mis à pleurer. Je ne pouvais pas me laisser enfermer. Pas si prêt du but ! On lui expliqua la situation : j’étais suivi par un psy qui dépendait du même réseau universitaire que l’hôpital, que j’avais cet examen très bientôt et que certainement la pression m’avait fait craquer. Il me laissa sortir à la seule condition que je voie mon psy le plus vite possible. J’imagine que c’est avec lui qu’on trouva cette solution, car je ne m’en souviens plus : après cet accident, j’allais chez ma tante une bonne semaine, pour terminer de préparer mes examens.
Étude le matin, après-midi à picoler un peu avec le cousin et ses potes. L’horaire me convenait. Je bossais bien la matinée, et le reste de la journée, même si l’activité n’était pas spécialement saine, me permettait de me changer les idées. Le temps passa, vite beaucoup trop vite.
La veille de l’examen, je n’arrivais pas à dormir. J’étais excité comme une puce, mais à la fois inquiet. J’avais hâte de passer tout cela, d’avoir enfin la réponse, de savoir si j’étais capable d’arriver à quelque chose.
Finalement, on y arriva : début septembre 1999, le moment de vérité. Le moment où se jouait tout mon avenir. Malgré la dernière crise passée quelques semaines plus tôt, j’étais assez confiant. J’avais vraiment bien étudié. J’émettais cependant des doutes pour les mathématiques, mais si je réussissais haut la main le reste, c’était bon. Par contre, il y avait un oral. Je ne sais plus s’il y avait de la matière pour celui-ci, certainement des questions sur mes lectures. Je me souviens bien par contre qu’il y avait toute une partie sur mes motivations à poursuivre ces études. L’oral me foutait sérieusement les jetons. Parler. J’avais vraiment difficile de m’exprimer en public, ça me faisait peur. Peur de ce que l’on allait penser de moi, peur des réactions de mes interlocuteurs et de ne pas savoir le gérer, de ne pas avoir assez de répondant3.
Comme prévu, l’écrit se déroula comme sur des roulettes. Mais vint l’oral. En attendant mon tour, nous étions une petite dizaine à passer cette épreuve, je tentais de garder mon calme. Ce fut à moi de passer à l’échafaud. Mini panique. Je me retrouvais face à un jury de plusieurs personnes. Malgré quelques bégaiements, je me lançai. J’expliquai un peu mon parcours, pourquoi j’avais abandonné mes études, et surtout pourquoi je voulais devenir assistant social. Bien que leurs voix, aux membres du jury étaient douces et n’émettaient aucun jugement, ils ne laissaient rien paraître. En sortant, je ne savais pas si je les avais convaincus.
L’attente était interminable. Plusieurs jours sans nouvelles. L’incertitude me rongeait. Puis un beau matin, j’eus la réponse tant attendue : j’étais admis ! J’allais pouvoir commencer à préparer mes affaires, je recevais les clés de ma chambre le dimanche soir de la même semaine !
D’un coup, la chape de plomb, toute cette incertitude s’était envolée. Je n’étais pas au bout de mes peines, je savais bien que j’aurai encore beaucoup de travail à faire sur moi-même. Mais, au fond de moi, résonnaient ces quelques mots : c’est une nouvelle vie qui commence !
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