La graine de la vie
- Tu es sûr de toi ? demanda pour la troisième fois Morgan.
- Mais oui ! lui répondit son ami en soupirant.
Les deux jeunes hommes se faisaient face, en désaccord depuis bien des lunes déjà. Maeldan était sûr de lui. Il affirmait qu’ils étaient tous les quatre prêts à faire le rite ancien qui leur permettrait de devenir pleinement adulte. Enfin, entre le moment où il avait commencé à le dire et maintenant, ils avaient tous les quatre gagnés en compétences. Et en attendant encore, ils apprendraient d’autant plus de choses. Alors comment savoir s’ils étaient véritablement prêts ?
- Quoi ? Vous voulez qu’on continue comme ça ? En étant qu’un morceau de nous-même ? demanda-t-il en se tournant vers Foehn.
Foehn était le plus étrange d’eux tous, auraient décidé les trois autres sans qu’ils ne sachent pourquoi. Certes, son apparence pouvait surprendre. Être lié au vent était plutôt rare et ce dernier l’accompagnait en permanence, agitant ses cheveux comme de grands voiles transparents. Ses yeux, tout aussi pâle que ses cheveux se posèrent sur son ami alors qu’il répondait tranquillement, presque détaché de la situation.
- Tu sais bien que non. Et tu sais aussi que ce n’est pas moi qui te coincerais.
- Dosei ? demanda alors Maeldan, soudain plus hésitant.
Le garçon soupira. Il était connu pour être le moins évident de tous à faire bouger. Voir les trois êtres extraordinaires autour de lui attendre sa réponse le laissait toujours un peu mal à l’aise. Dosei souffrait d’un sérieux manque de confiance en lui. Il passa sa main dans ses cheveux brun clair, pour les repousser en arrière. Ils étaient aussi lourds que longs. Les autres observèrent attentivement ses jolis yeux verts.
- D’accord. Dit-il soudain, les surprenant.
Un cri de joie échappa à Maeldan qui sautilla sur place dans une attitude toute juvénile. Il se sentait enfin libre d’accomplir ce qui devait l’être depuis toujours et en prime, c’était lui qui allait pouvoir ouvrir le bal dès que les choses sérieuses commenceraient.
- Par contre, un seul essai. Si on n’y arrive pas, tant pis, on réessaiera dans trois ans.
Maeldan se figea un instant avant d’affirmer haut et fort, comme si c’était facile.
- Aucun risque ! On va y arriver.
Cependant entre le dire et le faire, il y avait une nuance des plus importantes et ils le savaient très bien tous les quatre. Lorsque Dosei se leva, ils le suivirent simplement. C’était au lié à la terre de les conduire jusqu’à l’arbre-mère. La route fut étrangement longue. Ils avaient l’habitude de se rejoindre dans une prairie de la grande mer verte, une forêt immense qui s’étendait d’un bout à l’autre du continent. Leur village n’était qu’un petit point, impossible à voir du ciel tant il faisait parti de la forêt. Dosei les conduisit le long d’une butte et tout en haut, ils purent admirer un arbre géant. Il semblait fait de quatre troncs enlacés tendrement qui s’étaient liés les uns aux autres. A sa cime, des feuilles épaisses prenaient le soleil, dépassant la canopée. Dosei posa son front contre l’écorce et soupira doucement. Toute la terre l’attirait à lui.
Ce fut Morgan qui en bon chef d’orchestre donna les ordres.
- Ok, première partie. Foehn tu dois rester concentré. Il faut que ça se limite autant que possible à cet arbre d’accord ?
- Quatre maximum, rappela Dosei d’une voix basse.
- Je vais rester en soutien, mais je ne suis pas censé intervenir. Pareil Dosei, n’hésites pas si vraiment ça dérape. Maeldan…
- Oui, oui, juste cet arbre. C’est bon ? J’y vais ?
- Oui. Murmura Dosei.
- Oui, répéta Morgan.
Ils se tournèrent vers Foehn mais pour seule réponse ils sentirent le grand courant d’air se concentrer le long du tronc, soulevant leurs vêtements légers et les surprenant par sa puissance. Ils prirent tout ça pour un oui et l’instant d’après, Maeldan faisait naître le feu dans ses mains.
Ses cheveux noirs dansèrent alors qu’il s’approchait du tronc et les flammes s’intensifièrent, rouges vives comme ses yeux, lorsqu’il les déposa sur l’écorce. Il ne fallut qu’un instant pour que le vent l’aide et que tout s’enflamme. Le grand et majestueux arbre devient un grand et majestueux brasier. Morgan se retient de conjurer la pluie et recula un peu sous l’effet brulant de la chaleur. Le bruit, l’odeur, l’impression que sa peau allait bruler simplement en restant trop près, tout était très impressionnant. Il savait que son ami s’était beaucoup entraîné en prévision de ce jour et il l’avait déjà vu, de loin, participer aux départs d’incendies que les adultes entraînaient régulièrement pour permettre à la nature de se régénérer. Mais cette fois-ci, il n’était pas loin. Pas loin du tout même.
Foehn géra remarquablement bien les départs d’incendies annexes, les étouffant aussi vite que possible, sans laisser le temps aux deux autres d’utiliser leurs pouvoirs pour maîtriser le feu. Il avait toujours été le plus doué et le plus intuitif. Il se perdait dans son propre élément et l’employait comme si ce n’était qu’une extension de lui-même.
Il fallut un certain temps pour que du bois ne reste que de la cendre, mais c’était le moment qu’ils attendaient tous depuis si longtemps qu’ils surent se montrer étrangement patients. Dans les cendres se trouvait une graine, une seule et unique petite graine, dure comme de la pierre et étrangement peu sensible au feu. Elle était encore chaude quand Maeldan la récolta en hésitant, conscient que ce moment était affreusement solennel.
Ils s’arrêtèrent tous pour l’observer et il ramena la graine vers chacun d’entre eux. Foehn fut le premier à réagir, récoltant quelques feuilles épaisses pour lui faire un nid, le temps qu’ils se préparent. La petite graine brune possédait quatre lignes vertes, deux lignes bleues, deux lignes blanches par-dessus une torsade rouge. Elle était très différente des autres graines.
- C’était parfait ! s’exclama Morgan.
- On n’a pas fini… rappela doucement Dosei, hésitant.
Ils se tournèrent vers leur ami et furent surpris de le voir inquiet, mais après tout, sur cette première partie, il n’avait eu qu’à trouver l’arbre ce qui était déjà une prouesse en soi, mais ce qui restait un rôle relativement sans danger.
Foehn fut le premier à se dénuder entièrement, sans aucune forme de pudeur. Ils avaient grandi ensemble, souvent nus, et ils se connaissaient parfaitement. Etrangement Morgan fut le second. Il dû tresser de nouveau ses cheveux bleus qui comme souvent s’étaient libérés mais pendant qu’il le faisait, Maeldan se déshabilla à son tour dévoilant un corps musclé et finalement tous se tournèrent vers Dosei. Il hésita un peu avant de se dénuder, mal à l’aise avec son propre corps. La majorité des liés à la terre étaient grands et imposants, tout ce qu’il n’était pas. S’il n’y avait pas eu la teinte de ses cheveux, on aurait pu le croire associé à l’air. Une véritable honte qui l’avait amené à repousser le rituel de nombreuses fois, espérant que son corps grandirait et se solidifierait. En vain.
Ils étaient tous les quatre aussi nus que le jour de leur naissance et il était temps de reprendre.
- Tu peux le faire ! l’encouragea Maeldan en souriant.
- On va devoir le faire ensemble. Lui rappela-t-il sombrement.
Ils s’agenouillèrent autour de la graine, fermèrent les yeux une minute le temps de réciter les mots du rituel mentalement. Puis sans prévenir, Dosei commença. La terre s’écroula un peu sur elle-même jusqu’à aspirer les feuilles et bientôt la graine qui fut ensevelie. Le trou se trouvait à quelques mètres du brasier seulement.
Dosei chuchota comme si c’était un secret.
- Une terre nourricière qui te porte et t’embellit.
Presque aussitôt Morgan intervient, se concentrant comme jamais auparavant. Les autres purent voir les gouttelettes d’humidité apparaître de partout sur la terre, comme une rosée.
- Une eau qui t’hydrate et te rafraîchit.
Ce fut au tour de Maeldan de faire de son mieux. S’il avait provoqué l’immense brasier sans trop d’efforts, cette partie-là était bien plus délicate. Il devait seulement réchauffer le sol.
- Un feu qui te berce et t’accueille.
Ils attendirent un instant puis le sol bougea légèrement sous la pression du bourgeon. Une seule et unique tige, vert clair, enroulée sur elle-même. Ils attendirent encore, retenant presque leur souffle et bientôt, quatre petites tiges délicates se montrèrent. C’était au tour de Foehn.
- Un air qui te caresse et t’offre un espace nouveau.
Le courant d’air léger fit tressaillir les petites tiges et aussitôt, Maeldan reprit en levant une main dans laquelle il fit naitre une boule de feu toute particulière.
- Un soleil qui éclaire ton chemin.
La tige se mit à grossir à vue d’œil, prenant une forme bien plus imposante sous le regard émerveillé des garçons. Morgan n’hésita pas, dès qu’elles furent assez grande à convoquer à son tour.
- Un nuage qui te lave et t’abreuve.
La pluie fine tomba, les trempant intégralement. A chaque gouttelette qui approchait sur petit soleil, ils entendaient un « pschiiii » sonore très clair alors qu’elles s’évaporaient.
- Un sol qui te soutient. Chuchota alors Dosei terminant le rituel.
Presque aussitôt, les quatre tiges se mirent en mouvement, dansant gentiment sur place. Aucun d’entre eux ne fit le moindre commentaire même s’ils observaient tous la plante, le cœur battant d’anticipation. Ils avaient réussi, à présent, plus rien ne pouvait vraiment mal se passer. Il suffisait de ne pas s’enfuir en courant pour que tout aille bien et ils s’étaient trop préparés pour avoir des telles envies.
- A quatre pattes, rappela soudain Dosei.
Ils en avaient parlé de nombreuses fois avant de choisir une position commune. Comme un seul homme, ils s’installèrent, formant deux paires qui leur permettaient de tenir la main d’un autre et d’y trouver une forme de réconfort. Dosei prit la main de Morgan doucement. Ils étaient encore trempés de la pluie épaisse qu’il avait fait tomber. De l’autre côté, Maeldan saisit celle de son ami Foehn, croisant leurs doigts de manière à ne pas se perdre. Foehn ne semblait pas éprouver la moindre appréhension, il souriait juste, heureux. Cette expression un peu béate fit rire son ami qui lui offrit un baiser tendre, puis ce fut comme s’il avait lancé le coup d’envoi. Les tiges s’abattirent sur eux, maladroites, elles parcouraient leurs corps avec rudesse.
Foehn fut le premier à couiner sous les chocs, alors que la tige qui s’était approché de lui l’encerclait et le serrait sans aucune précaution. Maeldan le caressa, cherchant à le rassurer. Attraper de l’air n’était jamais le plus évident et son pouvoir appelait à une forme de sauvagerie qu’ils ne connaitraient pas tous. De l’autre côté des tiges, un couinement similaire finit par retentir. C’était Morgan qui lui aussi été enserré avec force. La tige qui s’était approché de Maeldan était plus délicate, presque timide, mais son bout lisse et doux, cherchait activement l’entrée de son corps glissant le long de ses fesses, s’insinuant entre ses jambes pour finalement parcourir son pénis. Son premier cri ne fut qu’un gémissement tendre. La caresse lui faisait simplement du bien. La main de Foehn était fermement accrochée à la sienne et il aurait aimé que son ami puisse bénéficier de la même douceur mais ce n’était pas le cas.
Chaque arbre était un peu différent mais des grandes règles pouvaient être notées. Généralement, l’eau et l’air étaient traité avec rudesse. Le feu avec timidité et la terre avec tranquillité. Le premier à être pénétré était souvent la terre, ancrant la plante dans leurs corps et le dernier, lorsque la tige oserait enfin, serait sans doute le feu.
Le cri de Dosei leur indiqua que les choses sérieuses avaient commencé et effectivement, la tige butinait son sexe, insérant le bout le plus fin d’elle-même dans le méat offert. Le garçon fit de son mieux pour ne pas se révulser devant le contact étrange et pour se détendre. La terre sous ses bras, ses genoux et ses pieds l’aida à s’ancrer. Lorsque la plante plongea plus profondément en lui coulissant le long de son sexe bandé, il posa également son front sur la mousse délicate qui avait poussé là et offrit ses soupirs à son élément. Rien n’était jamais entré dans cette partie de son corps, rien n’avait caressé l’intérieur de sa chaire, rien ne l’avait envahie ainsi. Il fit de son mieux pour rester immobile, le dos courbé et les doigts enfoncés dans la mousse d’un côté et dans la main de son ami de l’autre. Morgan lui soufflait des encouragements entre deux petits cris, crispés. Dosei haleta, choqué, sous les sensations de brulures, alors que la tige s’épaississait légèrement, implantant la vie au fin fond de son sexe. Il sentit ses bourses prendre un peu plus de volume et presque aussitôt la fièvre le prit. Il avait chaud. Son sexe était brulant au point que ça en était désagréable mais surtout il gonfla comme jamais. La caresse à l’intérieur de sa verge était renversante et alors qu’elle sortait de son sexe, il avait l’impression qu’une partie de lui allait s’échapper également. Lorsqu’elle fut dehors à tâtonner le long de son gland, seuls quelques contacts légers suffirent à le faire jouir avec abondance.
La main contre la sienne le serra un peu plus fort encore et en relevant le visage, il observa Morgan prisonnier de sa tige. Elle avait entouré son corps avec rudesse, le forçant dans une lordose exagérée, afin d’avoir accès à ses fesses. La partie la plus fine devait déjà être profondément enfouie car c’étaient maintenant les plus gros volumes qui tentaient de le pénétrer. Un liquide vert, très clair, s’écoulait de son corps mais Dosei ne le voyait pas. Par contre, il le sentait. Ça sentait l’herbe fraichement coupée et l’odeur était légèrement sucrée.
De l’autre côté des tiges, Foehn poussa un grand cri alors que bloqué dans une position similaire, sa tige remuait sauvagement dans ses entrailles, le blessant légèrement. Maeldan lui murmurait des mots encourageants, un peu choqué par les mouvements si violents qu’il pouvait voir. Sa propre tige était toujours timidement aux portes de son corps et il allait devoir l’inviter à l’envahir pour qu’elle ose agir. Tel était le pouvoir du feu.
Foehn pleura franchement quand quelques parts dans son ventre, la tige se fit mutilante, l’ouvrant légèrement pour implanter une poche de naissance. La douleur vive et crue envahissait tout son esprit et il ne parvenait même plus à entendre ses amis. Il connaissait précisément toute la procédure et étant lié à l’air, il savait qu’il ne serait pas épargné. Les plantes avaient toujours peur qu’ils ne s’échappent dès le premier présent offert, avant que le principal ne soit fait. Dans la poche, plusieurs graines furent implantées. A chaque naissance, les petits naitraient avec l’une d’entre elles et au pire, à sa mort, les graines germeraient à leurs tours. Ainsi la plante était certaine d’avoir procréer avant même de leur offrir le don de faire naître la vie hors de leurs corps.
Foehn avait décidé depuis longtemps de ne pas s’échapper, mais le traitement rude lui donnait envie de fuir. Pourtant à entendre les gémissements de bonheurs de Dosei, du bon était à venir. Et effectivement, les caresses se firent plus tendres, pansant son corps meurtris. Là, entre ses fesses dans son conduit, une petite zone fut sollicitée jusqu’à tendre son sexe et en tirer quelques jets de sperme infécond. Lorsqu’elle sortit de lui, le vert pâle qui permettait la lubrification était mélangé au sang. Ça n’empêcha pas la tige de venir glisser le long de son sexe, encore sensible après la jouissance, pour se glisser dans les zones les plus sensibles. Il hoqueta prit entre deux sensations contraires. C’était tellement bon. Il avait encore tellement mal.
Devant lui, Maeldan saisit la tige timide, la porta à sa bouche et l’embrassa doucement comme pour l’apprivoiser. Vu ce que la plante se sentait capable de faire en tenant fermement son ami, elle devait bien pouvoir le prendre lui aussi. Il lécha le bout, goutant au lubrifiant, légèrement sucré, qui lui fit tourner la tête. De l’autre côté Morgan pleurait à son tour. Il força la tige à caresser son corps, à descendre jusqu’à son sexe et il présenta le bout de sa verge à cette pointe curieuse.
- Vas-y… Allez…
La plante lui concéda cette faveur, se faufilant à travers lui. Pour l’aider à passer, il garda sa main sur son sexe, se caressant tranquillement. Il voulait obtenir autant que ses amis. Il voulait être fertile, pouvoir offrir une bonne semence à un partenaire de cœur, mais il voulait également pouvoir recevoir la vie en son ventre. C’était rare pour les gens comme lui, les plantes avaient souvent trop peur… A moins que ce soit les manipulateurs de feu, en entendant leurs amis souffrirent, qui refusaient d’endurer les mêmes choses ? Maeldan savait parfaitement ce qu’il désirait. Alors il combattit la fièvre, s’empêcha de jouir sous les caresses et garda une main ferme sur la tige, la forçant à faire tout le travail. La plante sembla de plus en plus en confiance car elle s’exécuta.
Les quatre tiges portaient à présent des traces de semences et de sangs. Elles les libérèrent mais aucun d’entre eux ne bougea réellement, trop épuisé, le corps trop malmené, pour pouvoir déployer la moindre énergie supplémentaire. Les tiges s’enroulèrent à nouveau sur elles-mêmes, se torsadant joliment et pointant vers le ciel. Un nouvel arbre était formé et dans les quatre ventres douloureux, ses graines attendaient. Le premier a parlé fut Morgan.
- Maeldan, tu as tout fait aussi ?
Son ami lui répondit d’un grognement, une main plaquée sur son ventre meurtri près de sa poche de vie.
- Tu es complètement dingue…
- Et si tu nous soignais au lieu de m’emmerder ?
Morgan grogna à son tour et fit naître l’eau la plus apaisante qu’il pouvait fournir. Dosei se concentra à son tour pour que les plantes médicinales apparaissent à l’intérieur et d’un geste las, Foehn fit virevolter le tout, l’apposant dans les endroits les plus fragiles.
- Les gars ?
- Ouais ?
- On a réussi !
Ils se tournèrent vers Dosei en lui souriant tranquillement. Oui, ils avaient réussi. Ils étaient officiellement adultes. Adultes et féconds.
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