Chapitre 20 - Pitie
Je fixe l'eau comme si cela pouvait accélérer le temps et faire revenir Chloé plus vite. Quand je vois de l'écume arrivée vers moi, mon coeur s'accélère. J'ai peur. Mais il s'agit seulement d'une vague un peu plus grosse qui me mouille jusqu'aux genoux.
Puis ils remontent enfin. Chloé frissonne. Cette fois, mon cerveau n'hésite pas, je la serre dans mes bras pour l'aider à se réchauffer. Résultat, on se retrouve vite à grelotter tous les deux. L'idée d'avoir encore plusieurs heures de marche dans cet état me mine le moral. Je sens une sorte de souffle chaud aspirer autour de nous. Nous voyons de minuscules gouttelettes formées un chemin dans les airs jusqu'au dragon d'eau. En à peine quelques minutes, nous sommes complètement secs. Il a aspiré toute l'humidité de nos vêtements.
D'une seule voix, nous nous exclamons :
— Merci Azzoureau !
Chloé continue de le regarder. L'animal approche sa tête, gueule ouverte vers son visage. Subitement, j'ai tout de suite moins confiance ! Et mon amie fait un pas vers lui. L'a-t-il hypnotisé ? En regardant avec plus d'attention, je vois un fil épais coincé entre ses dents. Chloé l'attrape et j'aperçois un pendentif doré en forme d'oeil dont l'iris brille et ondule telle une nébuleuse. Mon amie le passe autour du cou. Aussitôt, le pendentif s'élève dans les airs, enveloppé d'une aura violette et bleue. Chloé gémit. Je fais un pas vers elle.
Je n'ai pas le temps de la rejoindre que tout revient à la normal. Chloé se tourne vers moi :
— Il faut aider Skaross à monter sur le trône. La Pitie me l'a montré, la seule manière d'en finir avec le monstre marin.
Elle pose ses mains de chaque côté de la tête d'Azzoureau, colle son front au sien et lui souffle :
— Merci Azzoureau. Je vois clair maintenant. Je n'ai plus peur.
Le dragon s'éloigne :
— JE DOIS REPARTIR ; AMIS M'ATTENDENT. AUREVOIR CHLOE.
— On se reverra avant mon départ, je l'ai vu.
Le dragon saute alors hors de l'eau, son corps nacré serpente sous les rayons du soleil. Il est magnifique ! Il ressemble beaucoup aux dragons asiatiques, surtout à celui dans le film de Chihiro. Lorsqu'il retombe, il plonge aussi sec dans l'océan et part rejoindre les siens.
Chloé attrape ma main et nous remontons sur le chemin. Lisa est toujours là. Avant de stressé, elle me dit en pensée :
— Je sens l'odeur laissée par le groupe, je vais vous guider pour rejoindre vos amis.
— Super, tu es géniale !
J'entends Chloé demander comment nous allons faire pour retrouver le groupe. C'est vrai qu'elle ne peut pas entendre Lisa. Je m'empresse de l'informer :
— Lisa peut suivre leur piste, nous n'avons qu'à la suivre.
— Allons-y, je dois transmettre des informations à Skaross avant d'arriver à Yhoushi.
Je la regarder surpris.
— La Pitie est ce collier que tu vois autour de mon cou. Il me donne des visions de l'avenir. Il semble que je ne puisse choisir quand les flashs vont survenir ni de quoi ils vont parler mais voir ce qui va se passer me rassure. Je n'ai plus peur. Enfin, beaucoup moins.
Son sourire me fait chaud au coeur, je suis ravi pour elle.
Je m'aperçois alors que nos mains sont toujours entrelacées. Je rougis et repense aux paroles de Peflor. Je vais suivre ses conseils, je ne lâche pas la main de celle que j'aime. De son côté, je ne sais pas si Chloé l'a remarqué mais elle n'ôte pas ses doigts des miens. Nous commençons à suivre la licorne main dans la main.
Lisa doit souvent ralentir le pas pour nous attendre. Elle finit par nous proposer de monter sur son dos. Nous hésitons, ayant peur de lui faire mal mais son insistance a raison de nos craintes. Elle se met à galoper. Je dois m'accrocher à sa crinière et Chloé m'entoure de ses bras. Je suis au anges.
Nous rejoignons la troupe alors qu'elle traverse une rivière grâce à un pont de pierre. On nous informe que la capitale sera en vue d'ici peu. Effectivement, après une montée, nous arrivons en haut d'une colline qui nous offre une vue sur une vaste plaine avec à l'horizon une grande ville dominée par un château de briques rouges.
Au lieu de nous diriger dans cette direction, nous longeons la crête pour arriver vers le milieu d'une petite montagne percée de nombreuses grottes. Nous sommes divisés en petit groupe pour monter le camp pour la nuit dans ces cavités naturelles.
Nous partageons la caverne de nos amis et d'une trentaine d'autres personnes dont Bleu-Haie et son frère, Sylve-un. Ils posent de nombreuses questions à Chloé et Sylve-un monopolise la conversation pour capter l'attention de Chloé. Je m'efface et part rejoindre T'ziss. Ce type me tape trop sur les nerfs.
J'ai du mal à trouver le sommeil, je repense à la douceur de la main de Chloé, à Sylve-un qui lui tourne autour, à ses bras autour de ma taille, à Sylve-un et ses exploits au lancer de dagues. Je tourne et me retourne sur mon lit de feuilles. Orangeade, qui était partie faire un tour, vient se poser près de moi et se met à vibrer une déliceuse mélodie.
Je trouve enfin le sommeil.
Au petit matin, l'agitation ambiante me réveille. Il y a du monde à l'entrée de la grotte. Je me retourne en direction de T'ziss qui a du mal à émerger. Quand j'aperçois sa tête, j'explose de rire. Je le vois ouvrir un oeil, puis l'autre puis commencer à s'agacer. Il passe sa main sur sa tête et jette les brindilles fichées sur son crâne dans les cendres. Il marmonne énervé. Orangeade vient se poser sur ma tête.
— Dis à ta boule volante que je ne suis pas un endroit où faire son nid !
Je rigole à nouveau. Je vois son visage s'assombrir.
— Tu vois ce que ça fait comme ça, dis-je en pouffant.
— Je... Oui, tu as raison. C'est beaucoup moins drôle sur soi. Orangeade, si tu dois faire un nid, fais-le dans un arbre ou sur un rocher. D'accord ?
Elle vrombit puis s'envole vers l'extérieur.
— J'ai bien peur qu'elle ne recommence, dit le Ïaryss dépité.
— Espérons que ce soit sur la tête de Sylve-un.
Je mets mes mains devant ma bouche. Je ne pensais pas avoir dit tout haut ce que je pensais tout bas. T'ziss s'approche et ébouriffe mes cheveux.
— Ce serait drôle en effet, ajoute l'homme oiseau en me faisant un clin d'oeil. Bon, c'est pas tout, je vais voir ce qui se passe dehors, on dirait que des gens nous ont rejoint. Je te laisse ranger les affaires.
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