Chapitre 2: Un vive émoi.
Paul croisa plusieurs villageois qui le saluèrent, joyeux. Le chasseur fit un sourire et répondit à leur salutation. Il se devait d'agir normalement. Il ne souhaitait pas devoir gérer leur panique. Il vit la petite fille du village qui le fixa avec intensité. Celle-ci lui dit d'une voix étonnamment sérieuse.
— Ce que vous faîtes va vous être reprochés.
Le chasseur sembla pris de malaise. De quoi parlait-elle exactement? Du fait qu'il cachait la mort de leur maire, John Bernard? Ou bien d'autre chose? Il hocha vaguement la tête en guise de réponse puis s'éloigna le plus rapidement possible de cet enfant, ne souhaitant pas s'attarder sur la phrase qu'elle venait de lui énoncer, telle une prophétie.
Paul le chasseur se rendit donc chez Élise la voyante. Celle-ci ouvrit sa porte avec lenteur, observant l'homme qui venait à peine de franchir l'entrée de son jardin. Il s'arrêta, mi-étonné, mi-effrayé, puis se rendit jusqu'à la femme. Il lui fit la bise et murmura tout bas, d'un ton conspirateur.
— Je dois absolument te parler.
— Je présume que cela concerne monsieur le maire?, lui répondit-elle d'une voix mystique. Viens, entre. Je ne veux pas que les voisins entendent ce que j'ai à te dire.Tu connais le fou, il adore répéter les choses.
Paul hocha la tête et suivit donc la voyante. Il s'assit sur un coussin et attrapa la tasse de thé qu'elle lui tendit. Élise s'assit en face de lui, but une gorgée puis commença son récit.
— Je savais qu'il allait se passer quelque chose de terrible... Mais jamais je n'aurai pu penser que cela concernerait John. Oh, Mervhope va en être profondément bouleversé. Je ne sais même pas si le village pourra s'en remettre, Paul. Il va falloir un homme qui puisse gérer cette dramatique situation.
— Je peux le faire, tu le sais bien, Élise.
— Bien entendu. Néanmoins, je pense que Charles, le docteur du village, est tout à fait digne de ce poste. Il est d'une force tranquille, contrairement à toi, Paul, lui répondit la voyante avec douceur.
Paul grinça des dents et hocha distraitement la tête. Il rêvait d'être maire depuis tout petit. Bien entendu, il était content pour John lors de son élection mais cela l'avait en même temps frustré. La voyante ignorait ce à quoi pouvait bien penser l'homme. Elle poursuivit donc ce qu'elle disait, se moquant bien si le chasseur l'écoutait ou non.
— Nous devons avertir dès à présent le village. Nous avons assez caché la triste nouvelle. En tant que voyante, je vais nommer Charles comme maire temporaire, il va néanmoins assurer ses fonctions de docteur. Steve, le détective, va s'occuper de l'enquête.
La femme marqua une pause et observa son visiteur. Celui-ci semblait ailleurs. Elle haussa les épaules et se leva. Paul sursauta et la suivit rapidement. Les deux membres du village sortirent de la demeure. Élise se rendit jusqu'au puits et fit sonner la cloche. Les habitants de Mervhope arrivèrent, étonnés de voir la voyante les quérir. Une fois que tout le monde fut rassemblé, Paul prit la parole.
— J'ai une bien triste nouvelle à vous annoncer, mes frères et sœurs. Notre maire, John Bernard, a été retrouvé assassiné. La sorcière affirme qu'aucune trace n'a été relevé sur le cadavre.
Un brouhaha s'éleva immédiatement du groupe. On pouvait y entendre des cris d'horreurs, des murmures conspirateurs et surtout, une profonde tristesse commune. Élise, voyant que le silence ne revint pas, cria.
— Silence!
Les villageois et villageoises se turent d'un seul coup, surpris. La voyante prit une profonde inspiration et poursuivit les explications.
— Je sais que cette nouvelle vous affecte. C'est pour quoi je demande à Steve de bien vouloir enquêter sur cette mort suspecte.
— Bien entendu, Élise, répondit le détective qui était à l'écart du groupe, observant chaque personne le composant.
— Merci. Charles, pourras-tu assurer temporairement les fonctions de John? Nous avons besoin d'un homme fort pour cela.
— Soit, acquiesça le docteur. Pourrai-je me rendre sur le lieu du décès en compagnie de Steve? Je pourrai peut-être savoir les causes du décès.
— J'espérais que tu le demandes. Avez-vous besoin d'une personne supplémentaire?
— Uniquement de Léopold, si jamais on trouve un suspect. Il pourra l'interroger durant la nuit.
— Je vous accompagne, répondit le dénommé Léopold, celui-ci étant entrain de jouer avec ses menottes.
Les trois hommes partirent donc en direction de la forêt. Ils avancèrent silencieusement. Au bord du lieu du meurtre, Mathilda apparut. Elle les observa.
— Vous êtes au courant alors?, murmura-t-elle.
— Est-ce toi qui a trouvé le corps?, dit Léopold d'un ton bourru.
— En effet. Voulez-vous que je vous montre où est-il?
— Oui, s'il te plaît, lui demanda Charles d'un ton doucereux.
La sorcière observa le docteur. Mervhope avait perdu un grand maire mais son remplaçant en paraissait digne. Mathilda les conduisait jusqu'à la grotte. Une fois arrivée sur les lieux du crime, tout le monde murmura. On pouvait voir des marques de sang sur les rochers, des feuilles éparpillées de partout mais aucune trace du corps.
— Je vous jure qu'il était là!, s'écria Mathilda.
— Cela se pourrait que le véritable tueur est récupéré le corps, murmura Steve en écrivant quelques phrases sur son carnet. A quelle heure avez-vous trouvé le corps?
— Je ne sais pas.. Mais je sais que c'était peu avant le lever du soleil. Il était étendu, inanimé. Il avait une marque au cou. Mais aucune autre trace de blessure.
— Je suis persuadé qu'elle nous ment, grogne Léopold. Ce soir, tu vas passer la nuit dans ma prison, sorcière. Je viendrai te chercher.
— Je suis innocente!, s'entêta-t-elle à répéter. J'avais même prévu de donner des potions au village. Justement, elles sont en cours de préparation.
Les trois hommes repartirent après avoir poursuivi l'interrogatoire. Le geôlier promit à Mathilda de revenir la chercher plus tard.
La sorcière était repartie dans la forêt, profondément bouleversée. Elle appréciait sincèrement le maire. John avait toujours été bienveillant envers elle. Jamais elle n'aurait voulu le tuer. Soudain, elle aperçut un objet brillant. Elle s'approcha et le prit entre ses mains. Elle fronça des sourcils et marmonna. Comment cela se pouvait-il? Elle écarquilla des yeux et voulut parler. A ce moment là, un animal bondit sur elle. Mathilda hurla.
— Un loup-garou!
Elle mit ses bras sur elle et sentit ses griffes déchiraient chaque parcelle de sa peau. La douleur était insoutenable. Elle ouvrit les yeux et sembla se figer. Avant de sombrer dans l'inconscience, elle murmura.
— Toi...
Le village ne se remettait guère de l'assassinat du maire. Il faisait nuit et tout le monde se préparait à aller dormir. Alors lorsque Léopold arriva en courant et cria la nouvelle, un mouvement de peur intense parcourut Mervhope.
— La sorcière a été tué!
Steve fronça des sourcils et écrivit intensément. Charles s'avança vers le geôlier et lui demanda.
— Comment le sais-tu?
— Je devais me rendre chez elle pour l'emmener en prison. Lorsque je suis arrivé, j'ai retrouvé son chaudron renversait au sol. Alors je suis parti à sa recherche et je l'ai retrouvé, profondément mutilée. Elle avait été entièrement vidé de son sang. C'était un spectacle horrible.
— Sans doute un animal sauvage qui nous a débarrassé de cette furie!, grommela Joe, le fou.
Mervhope se calma aussitôt. Deux morts avaient eu lieu: John, tué par quelqu'un du village, et Mathilda, dévoré par un animal. Ce dernier avait eu lieu accidentellement, il n'y avait donc rien à craindre. Néanmoins, cela faisait beaucoup de cadavres en si peu de temps...
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