APOCALYPSE
La sirène a grondé mais il était trop tard :
La terre était cendrée quand du ciel est tombée
La horde des furies, soudain là, nulle part,
Plantant leur croc unique en nos cœurs esseulés.
Trébuchants et glacés, dépouillés et tremblants,
Nous hésitions encore entre battre et ramper :
Le sol était fuyant et l’horizon, tremblé,
Rappelait aux défunts que l’espace est le temps.
De magmas en nuées, nos souvenirs mourraient :
Fouettés par des rubis et marqués du saphir
Ils s’en allaient au ciel et l’avenir pleurait.
Fouettés par des rubis et marqués du saphir,
Ils tournoyaient, béants, et leur sang noir coulait.
Fouettés par des rubis et marqués du saphir,
Ils rejoignaient la source où toujours n’est jamais,
Des nuées de magma où meurent les soupirs.
Quant à Toi, Œil Unique, et vision émettrice,
Tu es née de l’orage quand l’éclair vient gronder !
Et tu aimes le sang comme on aime le vice :
T’en gorger et vomir pour mieux te sanctifier !
La sirène n’est plus et le silence est mort :
En suspends, l’air vrombit pour assourdir la terre !
Nos cris n’ont plus d’échos pour rappeler nos corps :
Il n’y aura plus rien qu’une ombre et sa poussière.
Le soleil s’incendie une dernière fois
Dans l’horizon ambré des destins d’autrefois :
La Dame en Noir le borde au séjour des éclipses
Pour le tenir garant de la très sainte ellipse.
Et soudain, c’est le froid du bleu mêlé au noir !
C’est l’air sans son courant, le vent sans la matière :
Tout est nu et glaçant, tout est sombre et sévère,
Le monde est un vestige où s’éteint l’encensoir.
J’ai dû ramper longtemps sur des rochers coupants
J’y ai laissé mon sang et mes pauvres espoirs ;
J’ai dû ramper longtemps avant de m’émouvoir :
J’y ai laissé mes vies aspirées par le vent.
Le ciel était troublant comme un vieillard en pleurs
Ne pouvant qu’exister sans savoir où aller :
C’est un monde nouveau de nouveau qui est né,
Une illusion de plus émanant de nos peurs.
J’ai quitté les hauteurs pour me fondre en forêt:
C’est de là que je viens, protégé par mes sœurs,
Bercé par leurs soupirs et leurs parfums de fleurs,
J’ai reçu les onctions et j’ai guéri mes plaies.
Unie à mon azur, la Dame en Blanc salue
Celui qui vient ici contempler au présent
Ce qui n’est jamais né, ce qui ne mourra plus :
La Source, Elle, est en bleu où résonne un A blanc !
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