Oasis
Tous ceux qui un jour se sont fait surprendre en train de se masturber savent ce que je ressens en entrant à nouveau dans la boîte. J'ai l'impression que tout le monde sait. Je fais le tour, le rouge aux joues. Je chercher le canapé où mes copines s'affalent entre deux incursions sur la piste de danse. Quand je les retrouve enfin, je fais mine de rien. Je sens mon con qui dégouline. Merde. Je me fais sûrement des idées. On boit un verre, on rigole, mon embarras s'envole doucement. Je vais sur la piste avec Mélanie. Je me demande si Émilie a trouvé un balcon où s'envoyer en l'air.
La musique est bonne, et les succès de ma jeunesse — à trente ans, on peut dire ça, non ? — alternent avec des chansons plus récentes que je connais seulement du bout des lèvres. Mais peu importe, je m'amuse comme jamais. Les gens sont beaux. Je suis émerveillée par les bons danseurs. Cette jeune femme à quelques pas qui focalise l'attention. Ses mouvements sont fluides, musclés, parfaits. Elle danse le zouk avec une facilité déconcertante. Je rêve de pouvoir l'imiter. J'essaie. Merde. Je ris.
À chaque début de chanson, on crie tous ensemble pour saluer le choix du DJ. J'ai l'impression d'être acceptée ici. Mes copines s'approchent et s'éloignent, au gré du ressac formé par la foule. Vers une heure du matin, je suis entourée d'inconnus. Le type à la chemise rouge à disparu, le grand avec sa casquette aussi. J'ai dû dériver.
Mon corps remue sans retenue. Mes cheveux volent devant mes yeux. Une goutte de sueur roule entre mes seins. En relevant les yeux, j'aperçois par hasard le couple de la plage. Immédiatement tout me revient en mémoire, je suis appuyée contre un banc, le con en avant et la tête en arrière. Ils me regardent en souriant. Pendant une seconde j'ai l'impression qu'ils se moquent de moi — je suis un peu parano. En fait ils me saluent cordialement. Ils dansent et me donnent le loisir de les admirer. La femme doit avoir trente-cinq ans, l'homme à peine moins. Difficile à dire, il a une barbe épaisse. Il est blond, grand, bien bâti. J'aime sa façon de bouger, simple, détendue. Sa partenaire est très féline, agile. Son corps se contorsionne. Elle fait ma taille, un mètre soixante environ. Des petits seins. De rondes fesses. De puissantes cuisses. On a du mal à discerner où ses longs cheveux bruns s'arrêtent et où sa robe commence. Je détourne le regard, cela fait déjà trop longtemps que je les épie.
L'air de rien, ils s'approchent. D'ordinaire je pense que j'aurais cherché à m'éloigner. Mais j'ai envie de les voir de plus près. Je veux rentrer au gîte avec des images nettes, et me caresser en pensant à leurs corps imbriqués. Ils sont tout proches maintenant. Une vague m'aura livrée à eux. Ils sourient, moi aussi. Je me détends. Ils ne vont pas me manger.
La femme se penche vers moi.
— Merci !
— Pardon ?
— Tu m'as fait jouir ma belle !
— Ah ! De... de rien.
Et puis elle rit et retourne allumer son bel apollon. Inconsciemment je cherche à leur plaire. Je ne dis rien, je me contente de danser de manière sexy. Je me sens belle. Les regards me déshabillent. Je les invente peut-être. Qu'importe ! Il y a ce couple qui affirme avoir joui grâce à moi !
This hit, that ice cold. Michelle Pfeiffer, that white gold.
La foule hurle, Uptown Funk résonne. Le beat bien marqué de la chanson met un terme à mes mouvements langoureux, il est temps de s'amuser. L'homme à ma gauche prend mes mains et me fait tourner avant de me libérer soudain. Mes doigts ne restent pas seuls longtemps. Une peau inconnue s'y frotte, je serre. Je sais sans regarder que c'est elle. Maintenant que le contact est établi, je n'ai pas l'intention de la laisser partir. Je sens les messages qui passent entre nos paumes. Je me demande si j'ai envie d'elle. Je n'ai jamais fait l'amour avec une femme.
Mes doigts sont pris dans les siens. Je regarde l'homme. Il a l'air doux. Il veut me mettre à l'aise. Il sourit en me tendant sa main. Large. Ouverte. Je la saisis. Elle est un peu chaude. Nous formons un trio. J'ignore ce que cela signifie.
— Tu es vraiment très belle.
Je souris, inutile de hurler « merci ! » La musique est trop forte.
Il n'attend rien, il voulait juste me le dire. Mes yeux se plissent. Puis en les ouvrant de nouveau, je les plante dans les siens. Ils sont gris. Comme une mer du nord. Sa barbe est bien entretenue, son cou est large, son sourire très beau. S'il était célibataire, je le courtiserais sans relâche.
— Il te plaît ?
J'attendais cette question. Je l'ai imaginée des tas de fois. L'entendre dépasse tout. Ça y est, c'est en train d'arriver, je me dis. La télé m'avait prévenue, Le Cap, c'est la ville du vice.
Je fais oui de la tête. Elle aussi. J'ignore ce que ça signifie. Nous dansons.
***
— Je peux t'embrasser ? il demande.
Nous dansons, collés l'un à l'autre.
— D'accord.
Ma culotte est probablement trempée.
Ses mains épousent parfaitement le creux de ma taille. Les miennes se promènent sur son ventre sculpté. Ses yeux brillent un peu, reflet de soleil sur une mer grise. Ils se ferment.
Je sens sur mes lèvres le moelleux des siennes. Il sait y faire. Nos bouches s'éloignent à peine, puis se pressent à nouveau. Plus fort cette fois-ci. Les corps, comme aspirés par ce baiser, se heurtent l'un contre l'autre. Mes seins s'écrasent sur son torse musclé. Mes fesses brûlent de sentir ses doigts qui s'égarent. Je lui montre le chemin.
***
Maria et John — c'est leurs noms — me parlent d'eux. Après la danse, les baisers, nous nous sommes éloignés pour discuter. Lui vient de New York, il a un accent. Elle est italienne, sans accent. Elle a été élevée en France. Il est graphiste. Elle s'occupe des relations publiques d'une société de production. Je leur parle de moi, ils écoutent. La conversation est naturelle et agréable. Ils ont tous deux une main sur ma cuisse. Je leur raconte mes dernières aventures sexuelles, rien de transcendant, mais ça a l'air de les passionner. Je me lâche et donne des détails croustillants : ce gars qui voulait absolument éjaculer sur mon visage, que j'avais laissé faire, en me demandant l'intérêt qu'il pouvait avoir pour cette pratique. John et Maria rient.
— Et les femmes ?
— Non, je réponds. Je ne sors qu'avec des hommes.
— Tu n'aimes pas ?
— Je ne crois pas être lesbienne.
— As-tu déjà essayé ? Il faut goûter avant de dire non, lâche-t-elle en riant. Sa bouche est large. Ses dents blanches derrière ses lèvres rouges.
— Non, je dis en sentant mon cœur battre fort.
— Tout va bien ?
— Oui, oui, c'est mon cœur qui bat vite.
— Le mien aussi, fait-elle.
Elle saisit ma main et la pose entre ses seins. Je ne résiste pas. Je sens son cœur taper à l'unisson du mien. J'attrape son autre main et la presse contre ma poitrine. Nous restons immobiles un moment, puis elle se penche vers moi et écarte mes cheveux du bout du nez. Sa bouche passe et repasse devant la mienne. J'attends, les lèvres entrouvertes. Je la sens s'éloigner.
— Tu veux que je t'embrasse ?
J'acquiesce. Elle enlève sa main de sur la mienne. Ses doigts s'enroulent autour de ma nuque, à la base de mon crâne. Mes cheveux envoient des décharges électriques. Et puis je la sens. Un baiser. Sur mes lèvres. Sans effort je mesure la surface de nos bouches en contact. Le goût de cerise, la peau douce autour, la langue qui vient jouer contre mes dents, cherche la mienne, timide. Qui la trouve enfin, la tire de sa cachette, la pousse à sortir au grand jour. Ma main, interdite, est restée sur sa poitrine. Les siennes explorent mon corps. L'une d'elles saisit mon sein gauche, le presse une seconde puis lui rend sa liberté. Se pose sur ma cuisse, monte et descend le long de ma peau.
***
Pendant la demi-heure suivante, nous nous découvrons. Rien n'est plus nouveau que chaque nouveau baiser. Nous rions et parlons de tout. John et Maria veulent aller dans un club échangiste, l'Oasis. Ils me demandent si je connais.
— Bien sûr que non, je ne suis jamais allée dans un club pour adulte. Je suis une fille sage.
Je plaisante, et John me répond que lui aussi est sage. Il nous a regardées nous embrasser Maria et moi, sans intervenir. Sans réfléchir, poussée par l'audace de nos jeux, je pose ma main sur son entrejambe. Je sens son pénis gonfler immédiatement.
— Allons-y, fait Maria.
***
Le taxi nous dépose devant le club. De l'extérieur c'est une grande maison. Plusieurs étages, de grandes palissades sur l'arrière, rien pour indiquer la nature de l'établissement si ce n'est une banderole au-dessus la porte : L'Oasis.
Je suis nerveuse, je me demande comment ça marche. John saisit ma main, je le regarde. Il a compris et me rassure du regard. OK. Maria pousse la porte et entre. Je la suis, John ferme la marche. À l'intérieur, la lumière est blanche, un peu bleutée. En face il y a la caisse, une jeune femme dans un tee-shirt moulant prend les billets que Maria lui tend. Elles ont l'air de se connaître et discutent un peu. John la salue chaleureusement. Quant à moi, je souris en retrait. Je suis vraiment nerveuse. L'hôtesse nous emmène vers une pièce adjacente, elle nous donne une pile de linge blanc puis disparaît. Il y a des cabines fermées par des portes en bois, ça ressemble à un vestiaire de luxe. La robe de Maria tombe à ses pieds. Sa culotte suit. Comme si de rien n'était, elle secoue sa chevelure puis se fait une queue de cheval, haut sur le crâne. Elle regarde John qui vient d'enlever sa chemise. Ses abdominaux, ses pectoraux, les muscles de son dos, ses épaules. Il est très sexy. Sa ceinture glisse sans bruit, son pantalon s'ouvre sur sa nudité. Il ne porte pas de sous-vêtements. Son sexe n'est pas en érection, il est beau, un peu penché sur le côté comme un animal qu'on surprend au réveil. Les regards se tournent vers moi.
— Tu peux utiliser la cabine si tu veux Noémie. Il y a aussi des serviettes et des peignoirs. Tu n'as pas à être nue si tu ne le sens pas.
— Vous restez nus, vous ? je demande.
— Oui, on préfère.
Je peux le faire. Mon corps n'a pas à se cacher. Pas ici.
John et Marie me regardent. Je rougis un peu, il comprennent et décide de me laisser une seconde. Ils se tournent l'un vers l'autre et s'embrassent.
Je défais le haut de ma tunique, libère mes seins, ma taille, mes fesses, l'étoffe atterrit sur le sol. Ma culotte suit. Je ramasse mes vêtements. L'hôtesse les prend en souriant. C'est parti. On passe dans une grande pièce ouverte qui donne sur la cour arrière. La pièce principale est traversée d'un grand bar en verre. Les clients perchés sur leurs tabourets sont pour la plupart nus. Je fais mine de rien, mais je suis curieuse au plus haut point. Je jette des regards rapides aux corps dévoilés. Nous traversons la pièce, je découvre la piscine. Je suis John et Maria qui me guident. Autour du bassin, des couples sont installés sur des transats. L'un d'entre eux fait l'amour. La femme, au-dessus de l'homme, monte et descend sur un sexe qu'on devine. Nous faisons demi-tour, quelques regards se posent sur moi, je réalise que moi aussi je suis nue. De retour dans la pièce principale, Maria s'engage dans un escalier. Ses fesses dansent devant mes yeux. John est derrière moi, je me demande s'il apprécie le spectacle. Nous croisons une femme qui descend. Elle est couverte de tatouages, ses cheveux sont rouges, rasés d'un côté. Ses seins sont lourds, ses hanches larges. Ses yeux sont sombres, grands, je la trouve très belle. Nous atteignons le deuxième étage. Le palier donne sur quatre pièces aux volumes identiques. La première accueille un gigantesque lit couvert de latex ou d'une matière facile à nettoyer. Malin, je me dis. Allongée sur le dos un homme a le menton perdu entre les cuisses d'une femme, tandis qu'un autre homme, à genoux, le prend en bouche. C'est la première fois que je vois deux hommes ensemble. La seconde pièce est celle qu'on appelle le donjon. On y trouve une panoplie d'instruments brillants, une table similaire à celle d'un masseur, et un grand X contre le mur, d'où pendent des liens rouges et noirs. La salle est vide, je m'imagine attachée. Un frisson me parcourt. Parfois je demande à mes amants d'êtres rough avec moi, de me tirer les cheveux, de m'attacher les mains, de me baiser bien fort. Le donjon fait saliver mon con. Nous nous dirigeons vers l'étage supérieur, et croisons un homme au sexe énorme. Il emmène avec lui une femme d'une quarantaine d'années. Je resterai bien pour la voir gober ce membre disproportionné. Nous atteignons le palier suivant. Sur la moitié droite, deux portes closes. Maria m'explique que ce sont des chambres privées qu'on peut réserver à l'avance. Sur la gauche, une grande pièce où de nombreux couples font l'amour sur des fauteuils rouges. Deux par deux. Au centre il y a un canapé vide. Je me demande si c'est pour nous.
John pose sa main sur mon épaule, je me retourne.
— Tu as envie ?
— Oui, je réponds la gorge sèche.
Maria saisit le sexe de son partenaire. Elle le caresse sans y penser. Elle observe les autres couples. Je me colle contre John, prends sa main et la place entre mes cuisses. Je suis si humide que sans le vouloir, son index glisse tout seul entre mes lèvres. Je sens ma chatte s'ouvrir devant ce doigt curieux. Je soupire.
— Allons boire un verre au bar, fait Maria.
Je la regarde, implorante. J'ai trop envie.
— Oh ! fait-elle, qu'elle est gourmande ! C'est ça que tu veux ? fait-elle en agitant le sexe de John.
Je fais oui de la tête. Maria sourit et nous pousse à l'intérieur de la pièce. Du bout des doigts elle installe John sur le canapé, puis me dit de regarder. Elle se penche en avant. Ses seins se pressent sur le torse musclé. Maria tombe à genoux et d'un coup d'un seul engloutit le sexe qu'elle n'a pas lâché une seconde. Elle me fait signe de la rejoindre. Nos corps se collent entre les jambes écartées de John. Maria me tend ce sexe encore brillant de sa salive. J'ouvre la bouche et la referme sur le bâton de chair. J'aspire un peu, applique mes lèvres avec précaution. Ma langue se plaque contre la peau soyeuse. Je regarde John, je veux bien faire. Il penche la tête en arrière. Je commence à pomper, doucement, je descends de plus en plus. Je sais que je ne pourrais jamais avaler le membre tout entier comme l'a fait Maria, mais j'essaie tout de même. Mes lèvres viennent buter contre sa main, elle attire le pénis vers sa bouche grande ouverte. Nous alternons ainsi pendant quelques minutes. John grogne de plaisir. Quand je ne suis pas en train de le sucer, mes mains se perdent sur son corps et celui de Maria, tandis que mes regards boivent avec délice les couples voisins. Il y a cette femme, blonde, à ma gauche, qui rebondit avec vigueur sur le sexe de son partenaire. Les cris qu'elle pousse m'arrachent des râles à moi aussi.
Je viens appliquer mes lèvres sur le membre de John pendant que Maria le suce. Nos salives se mélangent, nous nous embrassons. Je cherche sa chatte avec mes doigts. Je la trouve et l'entrouvre, y glisse une phalange. Maria se penche en arrière, plaque mes lèvres sur son sein que je gobe avec vigueur.
— Lèche-moi, demande-t-elle. Et pour la première fois de ma vie, je vais gouter à un sexe de femme. Un sexe similaire au mien.
Mes lèvres se jettent littéralement sur elle, je la dévore. Le goût de la sueur et de sa cyprine se répand en moi. Elle m'appartient. Je plaque ma langue sur son con, je le lèche de bas en haut, j'embrasse son clitoris lorsque je le sens prêt, je le suce. Mon cul n'attend qu'une chose. John comprend. Il enfile un préservatif, se place entre mes jambes, je sens son membre dur pousser en moi. Il est épais, son gland large m'écarte et me transperce. Maria n'a pas l'intention de me laisser respirer. Elle m'attire à elle, je la lape furieusement tandis que derrière moi un corps dur me pénètre. Je sens la jouissance arriver très vite. Je la retiens un peu, à peine une seconde, elle est trop forte. Je ne parviens plus à penser clairement. Des images de Maria, de John, de la blonde à côté, des autres corps, le plaisir arrive.
— Jouis ! me dit-on.
Et l'orgasme me prend soudain, me secoue, me chavire. J'oublie tout le reste.
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