L'officier
Tout d'abord, il est attaché à son bureau.
On ne peut pas le voir, sans voir son bureau.
Petite salle, vétuste, sombre, une seule lampe éclaire la pièce.
Il en connaît le principe.
Cela le fait sourire.
Un seul faisceau lumineux.
Mais ce qui est amusant c'est qu'on ne remarque souvent son bureau que bien longtemps après lui.
Car c'est lui qu'on voit.
Lui.
L'officier.
Il est grand, jeune, fin, racé.
De jolies mains blanches, douces et tendres.
Elles caressent les rapports avec soin, elles jouent joliment avec le stylo alors que le prévenu est interrogé.
Oui, oui.
"Qui a donné les ordres ?"
On se souvient.
L'officier.
Il n'a pas un grade si élevé mais il y est attaché. L'orgueil de celui qui se sait important.
"Je ne suis pas n'importe qui, je suis l'officier XXXX."
Un homme jeune et beau.
Demandez aux femmes ! Demandez aussi à quelques hommes !
Un bel homme, affable, souriant et charmeur.
Un homme avec des yeux clairs, d'une transparence de glace.
Il sourit, mais ses yeux ne sourient pas.
" Qui a donné les ordres ?"
On écoute et on se tait, on cherche la réponse et on la dit enfin, dans les gémissements de douleur, s'il le faut.
Il est beau, mais froid. Il n'est pas cruel.
Ou si peu.
Ou alors toujours dans un but.
Il est dévoué. A son chef, à ses supérieurs, à l'armée.
" Qui a donné les ordres ?"
Son uniforme est impeccable. Les boutons sont brillants, les bottes sont bien cirées.
Un magnifique soldat.
Mais cela, c'est au début de la journée.
Lorsque le travail est terminé et que les cellules sont fermées, l'uniforme de l'officier est bien moins impeccable.
On remarque des taches suspectes sur ses manchettes, voire sur ses doigts.
Le temps d'une cigarette.
Vous pouvez l'entendre soupirer d'aise.
Une bonne journée de faite.
On reprendra le lendemain.
Avec de nouvelles questions ou les mêmes répétées à l'infini.
Croyez-moi.
Vous répondrez à toutes ses demandes sans l'ombre d'une hésitation.
Et, si vous êtes trop aveugle pour le comprendre tout de suite, vous serez si proche de lui que vous sentirez son odeur.
Il sent la cigarette.
L'alcool quand la pression est trop forte.
Et là, vous avouerez tout ce qu'il veut entendre.
Même ce qu'il n'a pas demandé.
" Qui a donné les ordres ?"
Mhmmm.
Une dernière chose à ajouter sur l'officier.
Il n'a aucune empathie.
Mais cela.
Vous le saurez bien vite.
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